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12/03/2015 | FRANCE | N°13BX00239

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 12 mars 2015, 13BX00239


Vu la requête enregistrée le 24 janvier 2013, présentée pour la SARL Merinvil, dont le siège social est 42 rue Armand Simard à Cognac (16100), représentée par son président directeur général en exercice, par la société Ten France SCP d'avocats ;

La SARL Merinvil demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1100279 du 29 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui sont réclamés au titre de la période du 1er avril 2008 au 31 mars 2009 pour la somm

e de 234 676 euros de droits et pénalités ;

2°) de prononcer la décharge de l'imp...

Vu la requête enregistrée le 24 janvier 2013, présentée pour la SARL Merinvil, dont le siège social est 42 rue Armand Simard à Cognac (16100), représentée par son président directeur général en exercice, par la société Ten France SCP d'avocats ;

La SARL Merinvil demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1100279 du 29 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui sont réclamés au titre de la période du 1er avril 2008 au 31 mars 2009 pour la somme de 234 676 euros de droits et pénalités ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée ;

3°) de prononcer la restitution des sommes payées indûment au trésor public majorées des intérêts moratoires ;

4°) de condamner l'Etat à payer la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 février 2015,

- le rapport de M. Antoine Bec, président-assesseur ;

- les conclusions de Nicolas Normand, rapporteur public ;

- les observations de MeA..., pour la SARL Merinvil ;

1. Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er avril 2005 au 31 mars 2009, la SARL Merinvil, qui exerce une activité de commerce de cognac, a été assujettie à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er avril 2008 au 31 mars 2009 pour la somme de 234 676 euros de droits et pénalités ; que la société relève appel du jugement du 29 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces rappels ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, d'une part, qu'en indiquant que l'engagement des sociétés du groupe Lafragette à honorer une partie des dettes qu'elles reconnaissaient avoir envers les sociétés Merinvil et Henri de Beaulieu ne peut être regardé comme ayant le caractère d'une prestation de services à titre onéreux qui serait rémunérée par les abandons de créances consentis par la société Merinvil et qu'ainsi, l'avoir émis par cette dernière n'a pas pour contrepartie des prestations de services individualisées, les premiers juges ont suffisamment répondu au moyen invoqué par la requérante ;

3. Considérant, d'autre part, que pour écarter le moyen tiré de ce que l'administration n'apporte pas la preuve d'un manquement délibéré, les premiers juges ont indiqué que la société Merinvil, ayant déduit la taxe litigieuse au vu d'un avoir qui n'était manifestement susceptible d'entrer à aucun titre dans le champ des opérations imposables à la taxe sur la valeur ajoutée, ne pouvait ignorer qu'elle n'était pas en droit de procéder à cette déduction; qu'ils ont ainsi suffisamment motivé leur décision sur ce point ;

Sur le bien-fondé des impositions :

4. Considérant qu'aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : " Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) " ; qu'aux termes du 1 de l'article 266 du même code : " La base d'imposition est constituée : a - Pour les livraisons de biens, les prestations de services et les acquisitions intracommunautaires, par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire en contrepartie de ces prestations, de la part de l'acheteur, du preneur, ou d'un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une prestation de services à titre onéreux suppose l'existence d'un lien direct entre le service effectif et individualisé rendu à un bénéficiaire et la contre-valeur perçue par le prestataire ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que par un échange de lettres en date des 27 et 28 juin 2008, les sociétés du groupe Lafragette, d'une part, et les sociétés Merinvil et Henri de Beaulieu, d'autre part, ont conclu un accord en vertu duquel ces deux dernières sociétés acceptaient de renoncer, sur les créances qu'elles détenaient à l'encontre des sociétés du groupe Lafragette, à une somme d'un million d'euros ; qu'en vertu de cet accord, la société Merinvil a émis un avoir à hauteur de la somme prévue au bénéfice de la société Maison Lafragette ; que l'administration, considérant que l'avantage ainsi accordé ne rémunérait pas des prestations de services rendues à titre onéreux et de nature commerciale, a estimé qu'elle n'entrait pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée et ne pouvait, par suite, ouvrir droit à la déduction de la taxe ;

6. Considérant que si la société Mérinvil soutient que cet abandon de créance comportait comme contrepartie la perspective de récupérer le reste de ses créances, s'élevant à 1 647 208 euros, il résulte de l'instruction et notamment du courrier échangé entre les avocats des deux sociétés que cet abandon constituait la condition d'un accord plus vaste incluant l'associé de la société Lafragette au sein de la société LetL, aux termes duquel la société Mérinvil réglait à cet associé, à concurrence de 3 827 000 euros, les indemnités que ce dernier réclamait à Lafragette en contrepartie de l'arrêt des poursuites à son encontre ; que la perspective de recouvrer le reliquat de créances ne constituait donc pas la finalité de l'abandon de créance consenti par Mérinvil à Lafragette ; que la société requérante n'apporte aucun élément de nature à établir l'existence d'une contrepartie à la prise en charge de ces pénalités, même si ces pénalités étaient réduites du montant, non précisé, de la vente des actions détenues par Lafragette dans LetL, et devaient ultérieurement être remboursées à Mérinvil par Lafragette ; qu'en l'absence de contrepartie clairement identifiée à cet abandon de créances, cette opération ne saurait être regardée comme une prestation de service entrant dans le champ de la TVA ; que, par suite, le moyen tiré de ce que cette opération aurait généré une TVA déductible doit être écarté ;

Sur la majoration pour manquement délibéré :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) " ;

8. Considérant qu'après avoir constaté, dans le cadre de la vérification de comptabilité de la SARL Merinvil, que celle-ci avait appliqué la taxe sur la valeur ajoutée sur une opération exclue du champ d'application de cette taxe, générant ainsi à son profit un crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a demandé le remboursement alors qu'il n'avait pas lieu d'être, l'administration fiscale a estimé que la société requérante, en tant qu'acteur économique normalement avisé et secondé par son cabinet comptable, devait s'informer des règles en vigueur concernant le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée en cas d'abandon de créances ; que la société Merinvil ne pouvait ignorer que cet abandon de créances n'entrait pas dans le champ des opérations imposables à la taxe sur la valeur ajoutée ; que si cette dernière fait valoir qu'elle n'était pas une habituée de cette pratique, cette circonstance aurait dû l'inciter à la plus grande prudence avant de demander le remboursement par l'administration fiscale d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée qui ne lui était pas dû ; que l'administration établit ainsi le manquement délibéré de la société Merinvil au sens de l'article 1729 du code général des impôts et, par suite, justifie l'application de la majoration dont s'agit sans que cette dernière puisse utilement faire valoir la circonstance, au demeurant non établie, selon laquelle la société Maison Lafragette aurait reversé à l'administration fiscale la taxe sur la valeur ajoutée en litige ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Merinvil n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui sont réclamés ; que par voie de conséquence, ses conclusions tendant à la restitution des sommes payées indûment au trésor public et à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être accueillies ;

DECIDE

Article 1er : La requête de la SARL Merinvil est rejetée.

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N° 13BX00239


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX00239
Date de la décision : 12/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Analyses

19-06-02-01-01 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Personnes et opérations taxables. Opérations taxables.


Composition du Tribunal
Président : Mme RICHER
Rapporteur ?: M. Antoine BEC
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : LACHAUME

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-03-12;13bx00239 ?
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