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16/04/2015 | FRANCE | N°14BX03207

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 16 avril 2015, 14BX03207


Vu la requête, enregistrée le 14 novembre 2014, présentée pour Mme B...M'A..., demeurant..., par Me D...;

Mme M'A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401949 du 16 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de la décision du préfet de la Haute-Garonne du 18 mars 2014 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixation le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour "

vie privée et familiale " à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de ...

Vu la requête, enregistrée le 14 novembre 2014, présentée pour Mme B...M'A..., demeurant..., par Me D...;

Mme M'A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401949 du 16 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de la décision du préfet de la Haute-Garonne du 18 mars 2014 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixation le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 600 euros à verser à son avocat sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

5°) de condamner l'Etat à lui verser les droits de plaidoirie prévus à l'article L. 723-3 du code de la sécurité sociale ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord du 17 mars 1988 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;

Vu l'accord-cadre relatif à la gestion concertée des migrations et au développement solidaire entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie et le protocole relatif à la gestion concertée des migrations, signés à Tunis le 28 avril 2008 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

L'affaire ayant été dispensée de conclusions sur proposition du rapporteur public en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mars 2015 :

- le rapport de M. Olivier Gosselin, président-assesseur ;

1. Considérant que Mme M'A..., de nationalité tunisienne, est entrée irrégulièrement en France le 21 mars 2009, accompagnée de ses deux filles, en possession d'un visa touristique d'une durée de validité de huit jours délivré par les autorités consulaires italiennes à Tunis ; qu'elle a déposé le 5 février 2013 une demande d'admission exceptionnelle au séjour en se prévalant notamment de sa vie familiale établie en France et d'une promesse d'embauche ; qu'elle relève appel du jugement n° 1401949 du 16 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de la décision du préfet de la Haute-Garonne du 18 mars 2014 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixation du pays de renvoi ;

2. Considérant en premier lieu que cet arrêté vise les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et en particulier les articles L. 313-11 7° et L. 313-14 sur lesquelles il se fonde, ainsi que les stipulations des articles 3 et 7 quater de l'accord franco-tunisien et 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il précise la date d'entrée en France de Mme M'A..., souligne que son installation a détourné la procédure du visa, et comporte des éléments concernant sa situation personnelle et familiale, notamment la circonstance que ses deux filles qui vivent avec elle sont scolarisées mais pourraient poursuivre leur scolarité en Tunisie, et que le jugement de divorce ne mentionne pas de violences de son mari ; que, par suite, cette décision est suffisamment motivée ;

3. Considérant en deuxième lieu qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien : " Sans préjudice des dispositions du b et du d de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;

4. Considérant que Mme M'A... soutient qu'elle est présente en France, où elle réside chez l'un de ses frères, depuis 2009, et se prévaut de sa volonté d'intégration en produisant une promesse d'embauche et des documents attestant de la scolarisation de ses deux filles depuis cette date et des bons résultats scolaires de l'aînée, âgée de seize ans ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier qu'elle est entrée en France en 2009 au plus tôt à l'âge de trente-sept ans et n'a demandé la régularisation de sa situation en matière de séjour que le 5 février 2013 ; que si elle fait état de la présence en France de ses frères et de ses soeurs, elle n'établit pas ne plus avoir d'attaches dans son pays d'origine depuis son divorce , alors qu'il ressort des pièces du dossier qu'elle y a résidé plusieurs années après avoir quitté son mari et pourra y retrouver sa mère, qui est également en situation irrégulière ; que, compte tenu des conditions et de la durée de son séjour en France et alors qu'elle a attendu cinq ans pour demander un titre de séjour, la décision contestée n'a pas porté au droit de Mme M'A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus qui lui a été opposé et n'a donc méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien ni enfin les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, pour les mêmes raisons, elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

5. Considérant en troisième lieu qu'aux termes de l'article 11 de l'accord franco-tunisien du 17 juin 1988 en matière de séjour et de travail : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord. / Chaque Etat délivre notamment aux ressortissants de l'autre Etat tous titres de séjour autres que ceux visés au présent accord, dans les conditions prévues par sa législation " ; que l'article 3 de la même convention stipule que : " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;

6. Considérant que, portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée ; que dès lors que l'article 3 de l'accord franco-tunisien prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant tunisien souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-tunisien, au sens de l'article 11 de cet accord ; que toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet de délivrer un titre de séjour à un ressortissant tunisien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit et qu'il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation ;

7. Considérant que ni les violences conjugales alléguées par Mme M'A..., dont son mari se serait rendu coupable en 2003 et qui auraient conduit à sa fuite en France en 2009, ni la promesse d'embauche pour un emploi de préparatrice de pizzas dont elle se prévaut, ne constituent des circonstances humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui auraient permis au préfet d'exercer son pouvoir de régularisation pour admettre l'intéressée au séjour ;

8. Considérant enfin que Mme M'A... ne peut se prévaloir utilement des orientations générales contenues dans la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière, laquelle ne comporte pas de dispositions réglementaires ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme M'A...C...'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ; que par suite, ses conclusions en injonction et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret n°95-161 du 15 février 1995 relatif aux droits de plaidoirie et à la contribution équivalente : " Le droit de plaidoirie est dû à l'avocat pour chaque plaidoirie faite aux audiences dont la liste est fixée par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice. /A défaut de plaidoirie, est considéré comme ayant plaidé l'avocat représentant la partie à l'audience... " ; que Mme M'A... n'ayant pas été représentée à l'audience, le droit de plaidoirie n'est pas dû ; que ses conclusions tendant au remboursement d'un tel droit ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme M'A... est rejetée.

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No 14BX03207


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14BX03207
Date de la décision : 16/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Olivier GOSSELIN
Rapporteur public ?: Mme MEGE
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS PRIOLLAUD COHEN-TAPIA

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-04-16;14bx03207 ?
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