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28/05/2015 | FRANCE | N°13BX01437

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 28 mai 2015, 13BX01437


Vu, enregistrée le 28 mai 2013, sous le numéro 13BX01437, la requête présentée pour la commune de Sainte-Marie, représentée par son maire en exercice, dûment autorisé par délibération du 26 juin 2008, par la SCP Belot-Crégut-Hamreoux ;

La commune de Sainte-Marie demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0900045 du tribunal administratif de Saint-Denis en date du 2 mai 2013 ayant annulé la délibération du 20 novembre 2008 par laquelle son conseil municipal a désigné la société CBo Territoria comme concessionnaire de la ZAC Beauséjour ; <

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2°) de rejeter la demande présentée par M. Annette devant le tribunal administrat...

Vu, enregistrée le 28 mai 2013, sous le numéro 13BX01437, la requête présentée pour la commune de Sainte-Marie, représentée par son maire en exercice, dûment autorisé par délibération du 26 juin 2008, par la SCP Belot-Crégut-Hamreoux ;

La commune de Sainte-Marie demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0900045 du tribunal administratif de Saint-Denis en date du 2 mai 2013 ayant annulé la délibération du 20 novembre 2008 par laquelle son conseil municipal a désigné la société CBo Territoria comme concessionnaire de la ZAC Beauséjour ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Annette devant le tribunal administratif de Saint-Denis ;

3°) de mettre à la charge de M. Annette la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu la loi n° 2005-809 du 20 juillet 2005 relative aux concessions d'aménagement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 avril 2015 ;

- le rapport de Mme Sylvie Cherrier, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Christine Mège, rapporteur public ;

- et les observations de Me C...pour M. Annette et celles de Me B... pour la Société CBo Territoria ;

1. Considérant que par une délibération du 27 décembre 2006, le conseil municipal de Sainte-Marie, à la Réunion, a approuvé le dossier de création de la zone d'aménagement concerté (ZAC) dite de Beauséjour et a décidé que son aménagement et son équipement seraient confiés à un aménageur dans le cadre d'une concession d'aménagement telle que prévue par l'article L. 300-4 du code de l'urbanisme ; qu'une procédure de consultation a été lancée au mois de mars 2008, dans le cadre de laquelle six entreprises ont retiré un dossier de consultation ; qu'une seule candidature a été déposée dans le délai prévu par le règlement de la consultation, émanant de la société CBo Territoria ; qu'elle a donné lieu à un avis favorable de la commission chargée de l'examen des candidatures, réunie le 18 juin 2008 ; que des discussions ont par la suite été menées entre la commune de Sainte-Marie et la société CBo Territoria, ayant abouti à la signature du traité de concession le 9 décembre 2008 ; que le 19 janvier 2009, M. Annette, conseiller municipal de Sainte-Marie, a saisi le tribunal administratif de Saint-Denis d'une demande tendant, d'une part, à l'annulation de la délibération du 20 novembre 2008 par laquelle le conseil municipal de Sainte-Marie a désigné la société CBo Territoria comme concessionnaire de la ZAC de Beauséjour, approuvé les termes du traité de concession et autorisé le maire à le signer et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à la commune de procéder à la résolution amiable du traité de concession ou de saisir le juge du contrat à cette fin ; que, par une requête n° 13BX01437, la commune de Sainte-Marie relève appel du jugement n° 0900045 du tribunal administratif de Saint-Denis du 2 mai 2013 en tant qu'il a annulé la délibération du 20 novembre 2008 ; que, par une requête n° 13BX02231, M. Annette demande à la cour d'annuler le même jugement en tant qu'il a rejeté sa demande d'injonction ;

2. Considérant que les requêtes n° 13BX01437 et 13BX02231 sont dirigées respectivement contre deux articles distincts d'un même jugement ; qu'elles ont trait toutes deux à la procédure d'attribution de la concession de la ZAC Beauséjour ainsi qu'aux actes juridiques subséquents, et soulèvent des questions de droit communes ; qu'il convient de les joindre pour statuer par un même arrêt ;

Sur la requête n° 13BX01437 :

3. Considérant que, pour annuler la délibération du 20 novembre 2008 par laquelle le conseil municipal de Sainte-Marie a désigné la société CBo Territoria comme concessionnaire de la ZAC de Beauséjour, approuvé les termes du traité de concession et autorisé le maire à le signer, le tribunal administratif de Saint-Denis s'est fondé sur un unique moyen tiré de ce que la procédure de consultation mise en oeuvre pour désigner l'aménageur avait été menée en méconnaissance du principe d'égalité de traitement des candidats ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 300-4 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " L'Etat et les collectivités territoriales, ainsi que leurs établissements publics, peuvent concéder la réalisation des opérations d'aménagement prévues par le présent code à toute personne y ayant vocation. / L'attribution des concessions d'aménagement est soumise par le concédant à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes, dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. / Le concessionnaire assure la maîtrise d'ouvrage des travaux et équipements concourant à l'opération prévus dans la concession, ainsi que la réalisation des études et de toutes missions nécessaires à leur exécution. Il peut être chargé par le concédant d'acquérir les biens nécessaires à la réalisation de l'opération, y compris, le cas échéant, par la voie d'expropriation ou de préemption. Il procède à la vente, à la location ou à la concession des biens immobiliers situés à l'intérieur du périmètre de la concession. " ; qu'aux termes de l'article R. 300-6 du même code : " Le concédant adresse (...) à chacun des candidats un document précisant les caractéristiques essentielles de la concession d'aménagement et indiquant le programme global prévisionnel des équipements et des constructions projetés, ainsi que les conditions de mise en oeuvre de l'opération (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 300-7 : " Le concédant choisit le concessionnaire en prenant notamment en compte les capacités techniques et financières des candidats et leur aptitude à conduire l'opération d'aménagement projetée, après avoir engagé librement toute discussion utile avec une ou plusieurs personnes ayant présenté une candidature " ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 300-8 : " Lorsque le concédant est une collectivité territoriale (...) une commission est constituée (...). Cette commission émet un avis sur les candidatures reçues, préalablement à l'engagement des discussions mentionnées à l'article R. 300-7. / L'organe délibérant désigne le concessionnaire, sur proposition de l'autorité compétente, au vu de cet avis " ;

5. Considérant que le dossier de consultation remis aux candidats souhaitant présenter une offre comportait, d'une part le règlement de la consultation, d'autre part le projet de traité de concession et ses annexes et, enfin, le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) et ses annexes ; que l'article 4 du traité de concession prévoyait que : " L'aménageur justifie avoir la maîtrise foncière des terrains désignés en (couleur) sur le plan annexé (Annexe III) de la présente concession, soit environ 68 hectares. " ; que le CCTP était composé des sept pièces constitutives du dossier de création de la ZAC Beauséjour, dont notamment le rapport de présentation, lequel indique, en page 18, que " La majorité des terrains qui constituent l'assiette foncière de la ZAC appartiennent à CBo Territoria (environ 87 %) (...). Au total, la ZAC couvre une superficie de 78,01ha (...) " et recense, en pages 19 et 20, l'ensemble des parcelles incluses dans le périmètre de la ZAC en précisant pour chacune d'elles l'identité de leur propriétaire ; que ces parcelles sont par ailleurs représentées sur un plan de situation du foncier figurant dans le dossier de création de la ZAC, les parcelles appartenant à la société CBo Territoria, d'une superficie globale d'environ 68 hectares, y étant représentées en jaune ; que ledit plan figurait également à l'annexe III du traité de concession, sous l'intitulé " plan de repérage foncier ", annexe à laquelle renvoyait, comme il a été dit, l'article 4 du traité de concession ;

6. Considérant que dans ces conditions, les différents candidats ayant retiré un dossier de consultation ne pouvaient que constater que la société CBo Territoria, dont il est constant qu'elle est un acteur important de l'aménagement et de l'économie locale dans le département de la Réunion, possédait l'ensemble des parcelles sur lesquelles l'article 4 du traité de concession imposait à l'aménageur de justifier qu'il disposait de la maîtrise foncière ; que dans la mesure par ailleurs où, dans ce contexte foncier très particulier, aucun document du dossier de consultation n'évoquait la possibilité, pour les candidats, de procéder à l'acquisition des terrains situés dans le périmètre de la ZAC, à l'amiable ou par voie d'expropriation, l'article 0-1 du traité concession dont se prévaut la commune de Sainte-Marie, qui prévoit que l'aménageur devra acquérir les biens immobiliers compris dans le périmètre de l'opération, ayant été ajouté à la suite des négociations menées avec la société CBo Territoria et ne figurant pas dans la version du traité de concession jointe au dossier de consultation, les cinq autres aménageurs ayant retiré un dossier de consultation ne pouvaient qu'être dissuadés de présenter une offre après avoir pris connaissance de l'ensemble des pièces de celui-ci ; que c'est par suite à bon droit que le tribunal administratif a jugé que le principe d'égalité de traitement des candidats avait été méconnu ; que la commune de Sainte-Marie, qui ne saurait utilement faire valoir que l'article 4 du traité de concession était entaché d'une erreur de plume et que la maîtrise foncière de 68 hectares sur les 78 hectares inclus dans le périmètre de la ZAC ne constituait pas un critère d'attribution du contrat et pouvait faire l'objet de modifications dans le cadre de la phase de discussion avec les candidats retenus, n'est, en conséquence, pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Saint-Denis a annulé la délibération du 20 novembre 2008 au motif que la procédure de consultation mise en oeuvre pour désigner l'aménageur avait été menée en méconnaissance du principe d'égalité de traitement des candidats ;

Sur la requête n° 13BX02231 :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

8. Considérant que l'annulation d'un acte détachable d'un contrat n'implique pas nécessairement que le contrat en cause doive être annulé ; qu'il appartient au juge de l'exécution, après avoir pris en considération la nature de l'illégalité commise, soit de décider que la poursuite de l'exécution du contrat est possible, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation prises par la personne publique ou convenues entre les parties, soit, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, d'enjoindre à la personne publique de résilier le contrat, le cas échéant avec un effet différé, soit, eu égard à une illégalité d'une particulière gravité, d'inviter les parties à résoudre leurs relations contractuelles ou, à défaut d'entente sur cette résolution, à saisir le juge du contrat afin qu'il en règle les modalités s'il estime que la résolution peut être une solution appropriée ; que, dans la détermination des mesures rendues nécessaires par l'annulation, le juge de l'exécution n'est pas tenu par celles demandées par le requérant ;

9. Considérant que le vice entachant la délibération annulée, tiré de l'atteinte à l'égalité entre les candidats, a affecté gravement la régularité de la mise en concurrence et la légalité du choix du concessionnaire ; qu'en effet, comme il a été dit, le dossier de consultation, compte tenu des termes dans lesquels il était rédigé, a eu pour effet de dissuader les cinq candidats autres que la société CBo Territoria auxquels il avait été remis de présenter une offre, et donc de favoriser la société CBo Territoria, seule susceptible de remplir la condition posée à l'article 4 du traité de concession tenant à la maîtrise foncière de 68 des 78 hectares inclus dans le périmètre de la ZAC ; qu'un tel vice, qui ne peut être régularisé, justifie, eu égard à sa particulière gravité, que soit recherchée une résolution du traité de concession ; que si la commune de Sainte-Marie et la société CBo Territoria font état de l'atteinte excessive à l'intérêt général qui en résulterait, elles n'établissent ni la réalité du coût financier allégué de la résolution du traité de concession, ni l'impossibilité de reprendre ultérieurement les opérations d'aménagement et de construction dans la ZAC, à la suite d'une nouvelle mise en concurrence, ni les conséquences que pourraient avoir sur l'emploi ou l'environnement une interruption momentanée desdites opérations, et ne démontrent dès lors pas l'existence d'une telle atteinte ; qu'en tout état de cause, il n'appartient pas au juge de l'injonction de tenir compte de l'intérêt général lorsque la mesure qu'il envisage de prononcer tend à la résolution du contrat ; que dans ces conditions, M. Annette est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Saint-Denis a rejeté ses conclusions à fin d'injonction ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'enjoindre à la commune de Sainte-Marie, si elle ne peut obtenir la résolution amiable du traité de concession relatif aux conditions d'aménagement et d'équipement de la zone d'aménagement concerté Beauséjour, de saisir, dans un délai de quatre mois suivant la notification du présent arrêt, le juge du contrat afin qu'il en fixe les modalités ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que ces dispositions s'opposent à ce que la commune de Sainte-Marie et la société CBo Territoria, qui succombent dans la présente instance, puissent en invoquer le bénéfice ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Sainte-Marie et de la société CBo Territoria une somme de 1 500 euros chacune au titre des frais exposés par M. Annette et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 13BX01437 présentée par la commune de Sainte-Marie est rejetée.

Article 2 : Il est enjoint à la commune de Sainte-Marie, si elle ne peut obtenir la résolution amiable du traité de concession relatif aux conditions d'aménagement et d'équipement de la zone d'aménagement concerté Beauséjour, de saisir, dans un délai de quatre mois suivant la notification du présent arrêt, le juge du contrat afin qu'il en fixe les modalités.

Article 3 : Le jugement n° 0900045 en date du 2 mai 2013 du tribunal administratif de Saint-Denis est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : La commune de Sainte-Marie et la société CBo Territoria verseront chacune à M. Annette la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions présentées par la commune de Sainte-Marie et la société CBo Territoria au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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Nos 13BX01437-13BX02231


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13BX01437
Date de la décision : 28/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

39-02-005 Marchés et contrats administratifs. Formation des contrats et marchés. Formalités de publicité et de mise en concurrence.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Sylvie CHERRIER
Rapporteur public ?: Mme MEGE
Avocat(s) : SCP BELOT CREGUT HAMEROUX

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-05-28;13bx01437 ?
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