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01/10/2015 | FRANCE | N°14BX01019

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 01 octobre 2015, 14BX01019


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...et la société à responsabilité limitée (SARL) Negocimmo ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux :

1°) d'annuler l'arrêté du 14 mars 2012 par lequel le maire du Pian-Médoc s'est opposé à la déclaration préalable déposée le 16 février 2012 en vue de diviser un terrain cadastré section CO n° 28 situé chemin du Sable en quatre parcelles à bâtir, sans création de voie ou d'espace commun, ainsi que la décision implicite rejetant leur recours gracieux ;

2°) de co

ndamner la commune du Pian-Médoc à verser à la SARL Negocimmo et à M. B... les sommes respectives d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...et la société à responsabilité limitée (SARL) Negocimmo ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux :

1°) d'annuler l'arrêté du 14 mars 2012 par lequel le maire du Pian-Médoc s'est opposé à la déclaration préalable déposée le 16 février 2012 en vue de diviser un terrain cadastré section CO n° 28 situé chemin du Sable en quatre parcelles à bâtir, sans création de voie ou d'espace commun, ainsi que la décision implicite rejetant leur recours gracieux ;

2°) de condamner la commune du Pian-Médoc à verser à la SARL Negocimmo et à M. B... les sommes respectives de 236 093 euros et de 50 000 euros en réparation des préjudices causés par l'arrêté ;

3°) de mettre à la charge de la commune du Pian-Médoc la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1203115 du 13 février 2014, le tribunal administratif de Bordeaux a donné acte du désistement de M.B..., annulé l'arrêté du 14 mars 2012 et a condamné la commune du Pian-Médoc à verser à la SARL Negocimmo une indemnité de 3 000 euros ainsi qu'une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 31 mars 2014, le 7 octobre 2014 et le 20 janvier 2015, la SARL Negocimmo, représentée par Me Heymans, demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 13 février 2014 en tant qu'il a limité l'indemnisation de la SARL Negocimmo à la somme de 3 000 euros ;

2°) de condamner la commune du Pian-Médoc à verser à la SARL Negocimmo une indemnité de 236 093 euros en réparation des préjudices causés par l'arrêté du 14 mars 2012 ;

3°) de mettre à la charge de la commune du Pian-Médoc la somme de 4 668 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Paul-André Braud,

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public,

- et les observations de Me Heymans, avocat de la SARL Negocimmo.

Une note en délibéré présentée par Me Heymans pour la SARL Negocimmo a été enregistrée le 3 septembre 2015.

Considérant ce qui suit :

1. M. B...est propriétaire d'une parcelle d'une superficie de 5 527 m² cadastrée section CO n° 28, située au lieu-dit " Chemin du Sable " sur le territoire de la commune du Pian-Médoc. Le 13 décembre 2011, il a conclu une promesse unilatérale de vente de cette parcelle au profit de la société à responsabilité limitée (SARL) Negocimmo et a également donné mandat à son gérant pour procéder notamment à toute démarche d'urbanisme nécessaire à son projet. La SARL Negocimmo a, en vertu de ce mandat, déposé pour le compte de M. B...un dossier de déclaration préalable en vue de diviser cette parcelle en quatre terrains à bâtir sans création de voie ou d'espace commun. Le maire du Pian-Médoc a, par un arrêté en date du 14 mars 2012, fait opposition à cette déclaration préalable. M. B...et la SARL Negocimmo ont formé le 10 mai 2012 un recours gracieux contre cet arrêté et ont sollicité le versement d'une indemnité de 236 093 euros au profit de la SARL Negocimmo et d'une indemnité de 50 000 euros au profit de M.B.... Ces demandes ayant été implicitement rejetées par le maire du Pian-Médoc, M. B...et la SARL Negocimmo les ont réitérées devant le tribunal administratif de Bordeaux qui, par un jugement en date du 13 février 2014, a donné acte du désistement de M. B..., a annulé l'arrêté du 14 mars 2012 du maire du Pian-Médoc et a condamné la commune du Pian-Médoc à verser à la SARL Negocimmo une indemnité de 3 000 euros ainsi qu'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. La SARL Negocimmo relève appel de ce jugement en tant qu'il a limité la condamnation de la commune du Pian-Médoc à la somme de 3 000 euros. Par la voie de l'appel incident, la commune du Pian-Médoc sollicite la réformation de ce jugement en tant qu'il a annulé l'arrêté du 14 mars 2012 et l'a condamnée à verser à la SARL Negocimmo une indemnité de 3 000 euros et une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur la recevabilité de l'appel incident :

2. Les conclusions de l'appel incident de la commune du Pian-Médoc tendant à la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a annulé l'arrêté du 14 mars 2012 du maire du Pian-Médoc reposent sur une cause juridique différente de celles de la requête de la SARL Negocimmo. Elles soulèvent ainsi un litige différent de celui qui résulte de l'appel principal et ne sont donc pas recevables.

Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune du Pian Médoc :

3. La promesse unilatérale de vente dont la SARL Negocimmo était titulaire lui conférait un intérêt suffisant pour demander réparation du préjudice résultant de la décision illégale d'opposition à déclaration préalable de division du terrain, qui a fait obstacle à la poursuite de son projet d'acquisition. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par la commune sur ce point ne peut qu'être rejetée.

Sur le montant du préjudice :

4. Pour engager la responsabilité de la commune du Pian-Médoc, le tribunal a retenu la faute commise par cette dernière en s'opposant à la déclaration préalable afférente au lotissement de la parcelle cadastrée section CO n°28, l'illégalité de cette décision ayant été constatée par le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 13 février 2014, devenu définitif sur ce point compte tenu de ce qui est dit au point 2. Cette illégalité fautive, qui se rattache au bien-fondé des motifs de l'opposition à déclaration préalable, est susceptible d'engager la responsabilité de la commune du Pian-Médoc si elle est à l'origine des préjudices subis par la SARL Negocimmo.

5. En premier lieu, la SARL Negocimmo sollicite l'indemnisation des frais exposés et du temps consacré en vain à la réalisation de cette opération. Ces frais ne peuvent toutefois être indemnisés que pour autant qu'ils seraient la conséquence directe des agissements fautifs de la commune et seraient justifiés. Il résulte de l'instruction que si la SARL Negocimmo a préparé et déposé le dossier de déclaration préalable pour le compte de M. B...en vertu du mandat accordé le 13 décembre 2011, ce mandat prévoit que les démarches sont effectuées sous la responsabilité du mandataire et à ses frais exclusifs. Dans ces conditions, les dépenses afférentes à la réalisation du dossier de déclaration préalable doivent être regardées comme ayant effectivement été engagées par la SARL Negocimmo, alors même que ce dossier a été déposé pour le compte de M.B.... Il résulte également de l'instruction, et notamment de l'attestation de fin d'engagement du 16 octobre 2012, que M. B...a mis un terme à son engagement de vendre la parcelle cadastrée section CO n° 28 à la SARL Negocimmo en raison du délai " trop tardif de réalisation de ce projet de vente " et de l'absence d'engagement de la société " à concrétiser cette promesse de vente avant la date butoir du 31 octobre 2012 ". Il n'est pas contesté que la SARL Negocimmo n'a pas levé l'option d'achat de la parcelle en raison de l'opposition du maire du Pian-Médoc à la déclaration préalable. Dès lors le préjudice allégué par la SARL Negocimmo résultant de l'impossibilité de réaliser le lotissement qu'elle projetait doit être regardé comme directement lié à la faute de la commune, alors même qu'il résulte également de la décision de M. B...de ne pas donner suite à la promesse de vente après l'expiration de son délai de validité. Ainsi le caractère inutile des dépenses engagées pour la réalisation du dossier de déclaration préalable trouve son origine dans l'illégalité de l'opposition à déclaration préalable. C'est donc à bon droit que les premiers juges ont indemnisé ce préjudice, qu'ils ont évalué à la somme de 3 000 euros. Au regard des frais de bornage justifiés à hauteur de 2 700 euros, des frais d'enregistrement de la promesse de vente à hauteur de 125 euros, et en l'absence de toute évaluation sérieuse du temps consacré par la société à ce projet, il y a lieu de confirmer cette évaluation.

6. En second lieu, la SARL Negocimmo sollicite l'indemnisation du manque à gagner correspondant à la privation des bénéfices qu'elle pouvait attendre de l'opération de lotissement. Si, pour les motifs énoncés au point 4, ce préjudice est directement lié à la faute commise par la commune du Pian-Médoc, il résulte cependant de l'instruction que pour établir l'existence de ce manque à gagner, la SARL Negocimmo ne produit des promesses d'achat que pour deux des quatre lots envisagés au terme de l'opération de lotissement, lesquelles sont assorties de conditions suspensives concernant notamment l'obtention d'un permis de construire .

7. Si la société Negocimmo avait présenté le 2 mars 2012 des demandes de certificats d'urbanisme opérationnels, le silence gardé par la commune n'avait pu faire naitre, en application de l'article R. 410-2 du code de l'urbanisme, de décisions positives sur ces demandes, lesquelles ne sauraient résulter des simples certificats d'information pris le 4 juillet 2012 sur le seul fondement du a) de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme. En outre, et contrairement à ce que soutient la société Negocimmo, l'obtention des permis de construire ne pouvait être considérée comme certaine, alors notamment que cette société reconnaît que les caractéristiques de l'assainissement, les besoins de protection au regard des risques d'incendie, et l'implantation des bâtiments par rapport à l'espace boisé classé figurant sur les deux lots de fond de parcelle devaient être examinés non à l'occasion de la déclaration préalable de division, comme l'avait estimé la décision annulée, mais de l'instruction des permis de construire. Dans ces conditions, ce préjudice ne présente pas un caractère suffisamment certain pour ouvrir droit à indemnisation.

8. Il résulte de ce qui précède que la SARL Negocimmo n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a limité son indemnisation à la somme de 3 000 euros. Pour ces mêmes motifs, la commune du Pian-Médoc n'est pas davantage fondée à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le tribunal administratif de Bordeaux l'a condamnée à verser à la SARL Négocimmo une indemnité de 3 000 euros et la somme de 1200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative .

Sur les conclusions de la commune du Pian-Médoc tendant à l'application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative :

9. Aux termes de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 rendu applicable par l'article L. 741-2 du code de justice administrative : " Ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux./ Pourront néanmoins les juges, saisis de la cause et statuant sur le fond, prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires, et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts (...) ".

10. Contrairement à ce que soutient la commune du Pian-Médoc, le passage dont la suppression est demandée n'excède pas le droit à la libre discussion et ne peut être regardé comme présentant un caractère injurieux, outrageant ou diffamatoire au sens des dispositions précitées. Par suite, la demande de la commune du Pian-Médoc tendant à la suppression des écritures contestées du mémoire enregistré le 7 octobre 2014 de la SARL Negocimmo ne peut qu'être rejetée.

Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune du Pian-Médoc, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la SARL Negocimmo au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SARL Negocimmo la somme demandée par la commune du Pian-Médoc au même titre.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Negocimmo est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune du Pian-Médoc sont rejetées.

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No 14BX01019


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14BX01019
Date de la décision : 01/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : BORDERIE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-10-01;14bx01019 ?
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