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24/11/2015 | FRANCE | N°14BX01401

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 24 novembre 2015, 14BX01401


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...D..., Mme C...B..., la SCID..., la SCI JoffreyD..., la SARLD..., représentés par Me F...ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté n°2012-655 en date du 13 novembre 2012 portant modification de l'arrêté du 1er février 1989 réglementant la circulation et le stationnement, par lequel le maire de la commune d'Agen a réglementé la circulation et le stationnement de l'impasse des Aygadous et de l'avenue du Docteur Jean Bru.

Par un jugement n°1300029 du 11 mars 2014, l

e tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande et les a condamnés à v...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...D..., Mme C...B..., la SCID..., la SCI JoffreyD..., la SARLD..., représentés par Me F...ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté n°2012-655 en date du 13 novembre 2012 portant modification de l'arrêté du 1er février 1989 réglementant la circulation et le stationnement, par lequel le maire de la commune d'Agen a réglementé la circulation et le stationnement de l'impasse des Aygadous et de l'avenue du Docteur Jean Bru.

Par un jugement n°1300029 du 11 mars 2014, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande et les a condamnés à verser globalement à la commune d'Agen la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 7 mai 2014 et le 29 juin 2015, M. E...D..., Mme C...B..., la SCID..., la SCI Joffrey D...et la SARL D...représentés par Me F...demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 11 mars 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté n°2012-655 du maire d'Agen du 13 novembre 2012 ;

3°) d'ordonner la suppression immédiate de l'aire de retournement fermant l'accès à la voie publique " Impasse des Aygadous " aux occupants de la SCI Joffrey etD..., à leurs personnels, patients et usagers, sous astreinte de 150 euros par jour ;

4°) de mettre à la charge de la commune d'Agen une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la voirie routière ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sabrina Ladoire,

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,

- et les observations de MeF..., représentant M. D...et autres, et de MeA..., représentant la commune d'Agen.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté n° 2012-655 du 13 novembre 2012 portant modification de l'arrêté du 1er février 1989 réglementant la circulation et le stationnement, le maire d'Agen a réglementé la circulation et le stationnement de l'impasse des Aygadous et de l'avenue du Docteur Jean Bru, a décidé la création d'une raquette de retournement en bout de l'impasse des Aygadous et la réalisation de places de stationnement sur cette voie. M. D...et autres relèvent appel du jugement n°1300029 du 11 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement et la légalité externe de l'arrêté :

2. Les requérants font valoir, dans leur mémoire enregistré le 29 juin 2015, que le tribunal administratif aurait omis de statuer sur le moyen tiré de l'atteinte portée par l'arrêté attaqué à leur droit de propriété et invoquent également les moyens tirés de l'insuffisante motivation de cet arrêté, de ce qu'il serait dépourvu de caractère exécutoire à défaut d'avoir été transmis au préfet et enfin, de l'absence de consultation de la Commission préfectorale d'incendie.

3. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été notifié à M. D...et autres le 11 mars 2014. Ce n'est cependant que par un mémoire complémentaire enregistré le 29 juin 2015, soit plus d'un an après l'introduction de leur requête, que les requérants ont invoqué les moyens précités. Ces moyens relatifs à la régularité du jugement et à la légalité externe de l'arrêté en litige étant fondés sur des causes juridiques distinctes de celle qui servait de fondement à leur requête, constituent des demandes nouvelles qui, présentées tardivement, ne sont pas recevables.

Sur la légalité de l'arrêté :

4. En premier lieu, les requérants soutiennent qu'en créant de nouvelles places de stationnement dans l'impasse des Aygadous, la commune d'Agen a agrandi le parking à proximité et a ainsi nécessairement déclassé, sans organiser l'enquête publique prévue par l'article L.141-3 du code de la voirie routière, une partie de cette impasse qui appartenait au domaine public communal.

5. Aux termes de l'article L.141-3 du code de la voirie routière : " Le classement et le déclassement des voies communales sont prononcés par le conseil municipal. Ce dernier est également compétent pour l'établissement des plans d'alignement et de nivellement, l'ouverture, le redressement et l'élargissement des voies. / Les délibérations concernant le classement ou le déclassement sont dispensées d'enquête publique préalable sauf lorsque l'opération envisagée a pour conséquence de porter atteinte aux fonctions de desserte ou de circulation assurées par la voie. "

6. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué a modifié les conditions de circulation de l'impasse des Aygadous, en instaurant, d'une part, un double sens de circulation sur la voie comprise entre la rue Lavoisier et la zone de retournement, et d'autre part, un " cédez le passage " à la sortie du parking situé au 1020 avenue du Docteur Jean Bru pour l'accès à la voie publique. Il a également eu pour objet de créer des places de stationnement. Ainsi, cet arrêté, contrairement à ce que soutiennent les requérants, n'a eu ni pour objet ni pour effet de déclasser l'impasse des Aygadous et ne constitue donc pas une mesure d'application des dispositions précitées. Par suite, le moyen tiré de ce qu'il aurait dû être précédé d'un déclassement de l'impasse du domaine public communal, après la réalisation d'une enquête publique prévue par les dispositions précitées, est inopérant.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 2213-1 du code général des collectivités territoriales : " Le maire exerce la police de la circulation sur les routes nationales, les routes départementales et les voies de communication à l'intérieur des agglomérations, sous réserve des pouvoirs dévolus au représentant de l'Etat dans le département sur les routes à grande circulation (...). ". L'article L.2212-1 du même code dispose : " le maire est chargé, (...), de la police municipale, de la police rurale et de l'exécution des actes de l'Etat qui y sont relatifs ". Aux termes de l'article L.2212-2 du même code " la police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment 1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques (...) ". Enfin, selon l'article L.2213-2 : " Le maire peut, par arrêté motivé, eu égard aux nécessités de la circulation et de la protection de l'environnement : 1° Interdire à certaines heures l'accès de certaines voies de l'agglomération ou de certaines portions de voie ou réserver cet accès, à certaines heures, à diverses catégories d'usagers ou de véhicules ; 2° Réglementer l'arrêt et le stationnement des véhicules ou de certaines catégories d'entre eux, ainsi que la desserte des immeubles riverains ".

8. En appliquant ces dispositions, l'autorité municipale, titulaire du pouvoir de police de la circulation et du stationnement, doit veiller à ce que les restrictions apportées à la liberté de circulation ne présentent pas un caractère excessif par rapport aux buts en vue desquelles elles ont été prises.

9. Ainsi qu'il a été dit plus haut, l'arrêté attaqué modifie d'une part, les conditions de circulation dans l'impasse des Aygadous sur laquelle il prévoit une circulation à double sens et d'autre part, crée un " cédez le passage " à la sortie du parking situé au niveau du n°1020 de l'avenue du Docteur Jean Bru ainsi que des places de stationnement.

10. Tout d'abord, les requérants soutiennent que cet arrêté porte atteinte à la sécurité publique dès lors qu'il accentuerait le danger auxquels sont exposés les résidents de l'impasse des Aygadous et les usagers de l'avenue du Docteur Jean Bru. L'arrêté attaqué a été édicté dans le but de préserver la sécurité et la tranquillité des riverains de cette impasse, située en zone résidentielle, laquelle était régulièrement empruntée par le personnel et les usagers des nombreux services hébergés dans l'ensemble immobilier appartenant aux requérants et regroupant l'inspection du travail, le conseil des prud'hommes, les services de l'administration pénitentiaire, des syndicats territoriaux, la trésorerie municipale d'Agen, le service des domaines ainsi qu'une société d'ambulances et un cabinet de kinésithérapie. Il ressort en outre des pièces du dossier que la zone de retournement permet un accès sécurisé au service de collecte des ordures ménagères. Si les requérants soutiennent que l'accès à leur propriété par l'avenue du Docteur Jean Bru présenterait une dangerosité certaine compte tenu de la circulation importante existant sur cette voie, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué aménage, pour améliorer la sécurité de ce nouvel accès sur l'avenue en cause, un " cédez le passage ". Cet arrêté a en outre été précédé, dans le cadre du réaménagement du réseau routier de la commune et de la mutation de la rocade en avenue, d'un arrêté du 16 février 2011 limitant à 50 km/h la vitesse de circulation sur cette voie. Cette modification de la circulation s'est également accompagnée de la mise en place de feux tricolores régulant le flux de voitures sur l'avenue du Docteur Jean Bru, ainsi que de l'instauration d'un terre-plein central, lequel empêche les automobilistes de tourner à gauche en direction du fleuve afin de prévenir le risque de collision. En outre, la commune soutient sans être contredite que l'accès donnant sur cette voie a été aménagé afin de sécuriser les entrées et sorties des poids lourds lesquels, auparavant, utilisaient régulièrement le passage existant alors entre les parkings et l'avenue du Docteur Bru qui n'était pourtant pas adaptée à cette circulation. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, le nouvel accès créé sur l'avenue en cause, qui s'est accompagné d'interdictions de stationner, ne contraint pas les automobilistes à sortir en marche arrière sur cette voie à grande circulation. Par ailleurs, les requérants ne sauraient reprocher à la commune de n'avoir pas installé des feux tricolores au niveau de l'accès à leur ensemble immobilier dès lors qu'aucun texte n'impose l'installation systématique de ce type de dispositif à la sortie des propriétés. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que cet arrêté mettrait en danger les personnes handicapées, les cyclistes et les personnes vulnérables. Dans ces conditions, cet arrêté n'est pas de nature à porter une atteinte disproportionnée à la sécurité des usagers de la voie ni à mettre en péril celle des riverains de l'impasse.

11. Ensuite, les requérants invoquent une atteinte à la liberté du commerce et de l'industrie ainsi qu'à la libre circulation en faisant valoir que cet arrêté a pour conséquence d'interdire aux usagers de l'ensemble immobilier leur appartenant d'accéder à celui-ci depuis le centre-ville via l'impasse des Aygadous et de les contraindre ainsi à faire un détour de 1,2 km pour ceux souhaitant se rendre côté fleuve et venant de l'avenue du Docteur Jean Bru et de 1,5 km pour ceux arrivant du côté de Toulouse. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que cet arrêté aurait eu pour conséquence d'allonger de manière excessive le temps de trajet des automobilistes depuis le centre-ville d'Agen alors au demeurant que la commune établit que les détours que sont ainsi contraints d'effectuer les usagers peuvent être réduits à 500 mètres et 750 mètres.

12. Enfin, l'arrêté attaqué, en créant un nouvel accès direct sur l'avenue du Docteur Jean Bru, n'a pas eu pour objet ni pour effet d'enclaver l'ensemble immobilier appartenant aux requérants ni de porter ainsi atteinte à leur droit de propriété.

13. En troisième lieu, les requérants soutiennent que la règlementation instaurée par l'arrêté attaqué méconnaîtrait les " orientations d'aménagements et de programmation sectorielles " du plan local d'urbanisme intercommunal 47 préconisant la réduction des trafics sur l'axe des avenues du Docteur Jean Bru et Colmar. Toutefois, ils ne sauraient utilement se prévaloir des orientations de ce document d'urbanisme, lequel n'était pas en vigueur au moment de l'édiction de l'arrêté attaqué.

14. En quatrième lieu, les requérants ne sauraient utilement se prévaloir, pour contester cet arrêté, des prescriptions techniques établies par le SDIS.

15. En dernier lieu, il ressort de la configuration des lieux que les requérants, domiciliés au 1050 avenue Jean Bru, sont à la fois riverains de l'impasse des Aygadous et de l'avenue du Docteur Jean Bru alors que les habitants de l'impasse des Aygadous ne peuvent accéder à leur propriété que par cette voie. Ainsi, les personnes résidant dans cette impasse et les requérants ne sont pas placés dans une situation identique laquelle aurait justifié que leur soit appliquée la même règlementation. L'arrêté en litige, qui a eu pour effet de contraindre les requérants à accéder à leurs immeubles en empruntant le nouvel accès donnant directement sur l'avenue du Docteur Jean Bru n'a donc pu méconnaître le principe d'égalité. En outre, si les requérants font valoir que cette impasse faisait fonction de voie de liaison entre les parkings situés à proximité de leur ensemble immobilier et l'avenue du Docteur Jean Bru, ils ne sauraient se prévaloir d'un droit acquis au maintien de cette règlementation alors au demeurant que cette impasse n'avait pas initialement été conçue comme voie de liaison.

16. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande. Par suite, leurs conclusions accessoires aux fins d'injonction et d'astreinte doivent également être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

17. La commune d'Agen, qui n'est pas la partie perdante, ne saurait être condamnée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la commune d'Agen sur le fondement de ce même article.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D...et autres est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune d'Agen au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 14BX01401 - 2 -


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX01401
Date de la décision : 24/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Sabrina LADOIRE
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : CABINET ADAMAS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-11-24;14bx01401 ?
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