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28/06/2016 | FRANCE | N°14BX00367

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 28 juin 2016, 14BX00367


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Sauvegarde de la Haute Vallée du Lot, M. et Mme F...C...agissant en leur nom personnel ainsi que pour la société Groupement forestier de La Combe, M. A...O..., M. H...D..., M. K...D..., Mme Q...D..., Mme P...E..., Mme L...D..., Mme M...D..., M. I...G...et M. K...N...ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 16 avril 2010 par lequel le préfet de l'Aveyron a déclaré d'utilité publique le projet de valorisation de l'espace naturel " Haute Vallée du Lot " sur le te

rritoire des communes de La Capelle Bonance, Pomayrols, Saint Geniez d'Ol...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Sauvegarde de la Haute Vallée du Lot, M. et Mme F...C...agissant en leur nom personnel ainsi que pour la société Groupement forestier de La Combe, M. A...O..., M. H...D..., M. K...D..., Mme Q...D..., Mme P...E..., Mme L...D..., Mme M...D..., M. I...G...et M. K...N...ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 16 avril 2010 par lequel le préfet de l'Aveyron a déclaré d'utilité publique le projet de valorisation de l'espace naturel " Haute Vallée du Lot " sur le territoire des communes de La Capelle Bonance, Pomayrols, Saint Geniez d'Olt et Saint Laurent d'Olt.

Par un jugement n°s 1002715, 1002778, 1002779, 1002780, 1002781 du 28 novembre 2013, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 février 2014, l'association Sauvegarde de la Haute Vallée du Lot et Mme R... C..., représentés par Me J...C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 28 novembre 2013 ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté du préfet de l'Aveyron du 16 avril 2010 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

..........................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Béatrice Molina-Andréo,

- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant le syndicat mixte de la Haute Vallée du Lot.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 16 avril 2010, le préfet de l'Aveyron a déclaré d'utilité publique le projet de valorisation de l'espace naturel " Haute Vallée du Lot " sur le territoire des communes de La Capelle Bonance, Pomayrols, Saint Geniez d'Olt et Saint Laurent d'Olt (Aveyron), par la réalisation de sentiers de randonnée avec parcours de pêche. Par ce même arrêté, le préfet a autorisé le syndicat mixte de la Haute Vallée du Lot à acquérir, soit à l'amiable, soit par voie d'expropriation, les immeubles dont l'acquisition serait nécessaire à la réalisation de l'opération. L'association Sauvegarde de la Haute Vallée du Lot et Mme C...interjettent appel du jugement du 28 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Après avoir cité les dispositions des articles L. 414-4 et R. 414-21 du code de l'environnement dans leur rédaction applicable à la date de l'arrêté contesté, les premiers juges ont, d'une part, relevé que la version de ces articles est " issue de la loi n° 2008-757 et du décret n° 2010-365, lesquels n'étaient pas en cause dans l'arrêt en constatation de manquement rendu le 4 mars 2010 par la Cour de justice de l'Union européenne dans l'affaire C-241/08 opposant la Commission européenne à la France ". Ils ont d'autre part estimé que " les requérants n'établissent pas que ces articles, dans leur rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué, seraient incompatibles avec la directive 92/43/CEE ". Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait entaché d'une omission à statuer sur la compatibilité de la règlementation applicable à la date de l'arrêté contesté au regard de la directive 92/43/CEE doit être écarté comme manquant en fait. Par ailleurs, le tribunal n'avait pas à se prononcer sur la compatibilité, au regard de la directive susmentionnée, de la règlementation en vigueur postérieurement à l'arrêté en cause, qui n'était pas applicable au litige.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Il ressort des pièces du dossier et notamment de la notice explicative du projet que celui-ci est présenté comme s'inscrivant dans un projet global de développement touristique, incluant, outre l'espace naturel Haute vallée du Lot dit " espace naturel de découverte " qui est situé en amont, une zone en aval dénommée " espace lac " et une zone centrale dite d'accueil et d'hébergement. Toutefois, il ressort également des pièces du dossier que l'aménagement de la zone en aval et celui de la zone centrale ont été réalisés indépendamment l'un de l'autre et que seul l'espace Haute Vallée du Lot restait encore non aménagé. A ce titre, le projet litigieux de création de sentiers de pêche et de randonnée dans cette zone se distingue des actions qui pourraient être encore menées dans l'espace lac et la zone d'accueil et d'hébergement, telles que l'aménagement d'un débarcadère de canoës-kayaks ou la rénovation du camping. Ainsi, l'aménagement de l'espace Haute Vallée du Lot constitue une opération distincte de celle de l'espace lac et de celles de l'espace d'accueil et d'hébergement qui ne la conditionnent pas. Dans ces conditions, l'utilité publique de ces opérations n'avait pas à faire l'objet d'une enquête commune. Par suite, et en tout état de cause, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le périmètre de l'enquête publique aurait irrégulièrement été limité au seul projet en litige.

4. Aux termes de l'article R. 122-8 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable à la date de prescription de l'enquête publique : " I. - Ne sont pas soumis à la procédure de l'étude d'impact, sous réserve des dispositions de l'article R. 122-9, les aménagements, ouvrages et travaux dont le coût total est inférieur à 1 900 000 euros. En cas de réalisation fractionnée, le montant à retenir est celui du programme général de travaux. / II. - Toutefois, la procédure de l'étude d'impact est applicable quel que soit le coût de leur réalisation, aux aménagements, ouvrages et travaux définis ci-après : / 1° Opérations d'aménagements fonciers agricoles et forestiers visées au 1° de l'article L. 121-1 du code rural, y compris leurs travaux connexes (...). ". Aux termes de l'article L. 121-1 du code rural et de la pêche maritime : " L'aménagement foncier rural a pour but d'améliorer les conditions d'exploitation des propriétés rurales agricoles ou forestières, d'assurer la mise en valeur des espaces naturels ruraux et de contribuer à l'aménagement du territoire communal ou intercommunal défini dans les plans locaux d'urbanisme, les cartes communales ou les documents en tenant lieu, dans le respect des objectifs mentionnés aux articles L. 111-1 et L. 111-2. / Les différents modes d'aménagement foncier rural sont les suivants : / 1° L'aménagement foncier agricole et forestier régi par les articles L. 123-1 à L. 123-35 ; / 2° Les échanges et cessions amiables d'immeubles ruraux régis par les articles L. 124-1 à L. 124-13 ; / 3° La mise en valeur des terres incultes régie par les articles L. 125-1 à L. 125-15 et L. 128-3 à L. 128-12, et la réglementation et la protection des boisements régies par les articles L. 126-1 à L. 126-5. / Les procédures sont conduites par des commissions communales, intercommunales ou départementales d'aménagement foncier, sous la responsabilité du département. (...) ".

5. D'une part, si le projet en litige comprend la création d'ouvrages, en particulier d'ouvrages routiers, il ressort des pièces du dossier que le montant des travaux, de l'ordre de 1 200 000 euros, est inférieur au seuil de 1 900 000 euros prévu par l'article R. 122-8 précité du code de l'environnement. Contrairement à ce que les requérants soutiennent, le coût des autres aménagements également prévus par un schéma directeur dont la réalisation a été décidée en 1996 par les élus locaux pour préfigurer la mise en place d'un projet de développement touristique, n'est pas à inclure dans le montant des travaux à retenir, dès lors que ces aménagements sont, ainsi qu'il a été dit au point 3, indépendants les uns des autres. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du I de l'article R. 122-8 du code de l'environnement doit être écarté.

6. D'autre part, le projet en cause, qui consiste seulement en la création de sentiers de randonnée avec parcours de pêche et ne comprend aucun des aménagements régi par les articles L. 123-1 à L. 123-35, échanges, cessions amiables d'immeubles ruraux ou mise en valeur de terres incultes, ne peut être qualifié d' " aménagement foncier agricole et forestier " au sens des dispositions précitées de l'article L. 121-1 du code rural et de la pêche maritime. Dans ces conditions, et alors qu'il n'est pas allégué que le projet pourrait entrer dans un autre des cas prévus par les articles R. 122-8 et R. 122-9 du code de l'environnement, le moyen tiré de ce que le dossier d'enquête aurait dû contenir une notice ou une étude d'impact doit être écarté.

7. Si le projet litigieux de création de sentiers de pêche et de randonnée est inclus dans le périmètre du site Natura 2000 FR 7300874 " Haute Vallée du Lot entre Espalion et Saint Laurent d'Olt et gorges de Truyère, basse vallée du Lot et le Goul ", il n'est pas établi qu'il serait susceptible, au sens des dispositions de l'article L. 414-4 du code de l'environnement, d'affecter, de manière significative, ledit site Natura 2000. Par suite, à le supposer soulevé, le moyen tiré de ce que la réalisation d'une étude d'incidence aurait été nécessaire au regard des dispositions susmentionnées de l'article L. 414-4 du code de l'environnement doit, en tout état de cause, être écarté.

8. Une opération ne peut être légalement déclarée d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social ou l'atteinte à d'autres intérêts publics qu'elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente.

9. Il ressort des pièces du dossier que l'espace naturel " Haute Vallée du Lot ", sur le territoire des communes de La Capelle Bonance, Pomayrols, Saint Geniez d'Olt et Saint Laurent d'Olt, constitue un pôle de développement touristique, dont la vocation a été affirmée par la réalisation du schéma directeur mentionné au point 5 et préfigurant la mise en place d'un projet de développement touristique durable axé sur les ressources en eau et sur la qualité du patrimoine naturel. A ce titre, l'opération en cause tend à la réalisation de sentiers de randonnée avec parcours de pêche de part et d'autre de la rivière du Lot, incluant une valorisation pédagogique, une signalétique des sentiers, une signalétique routière directionnelle et une résorption des points noirs paysagers. Ainsi, et en fonction de la topographie des lieux, le sentier aura un usage de randonnée, d'accès au sentier pêcheur, de contemplation ou de découverte. Par suite, ce projet, qui permet le développement d'une activité de tourisme " vert ", comporte une utilité publique. Si les requérants font état d'inconvénients environnementaux, il ressort des pièces du dossier, notamment de la notice explicative du projet, que les atteintes susceptibles d'être portées à l'environnement, qui ont au demeurant été prises en compte par la mise en place de dispositifs d'évitement ou de limitation, d'ailleurs renforcés postérieurement à l'arrêté contesté, sont de faible ampleur. Cette notice explicative expose, de plus, que le projet permettra de mettre en valeur le site grâce à la résorption de décharges et de carcasses de véhicules, à la gestion de la végétation ainsi qu'à l'entretien des berges. Par ailleurs, et contrairement à ce qui est soutenu, cet aménagement, qui aura pour vocation de faire découvrir la richesse de la vallée à l'aide de panonceaux d'interprétation et de sites d'observation situées sur le sentier pédestre, ne se limite pas à la pratique de la pêche et encore moins à l'intérêt d'une seule catégorie de pêcheurs qualifiés " grand public ", au détriment des pêcheurs dits " sportifs ". Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les inconvénients du projet seraient excessifs eu égard à l'intérêt qu'il présente.

10. Enfin, les requérants ne peuvent utilement faire valoir, à l'encontre de l'arrêté contesté, qui ne porte pas cessibilité, mais seulement déclaration d'utilité publique, que l'emprise de l'expropriation excèderait les nécessités de l'opération projetée.

11. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le syndicat mixte de la Haute vallée du Lot, que l'association Sauvegarde de la Haute Vallée du Lot et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 avril 2010 du préfet de l'Aveyron.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que l'association Sauvegarde de la Haute Vallée du Lot et Mme C...demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge des requérants une somme globale de 2 000 euros à verser au syndicat mixte de la Haute Vallée du Lot sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association Sauvegarde de la Haute Vallée du Lot et Mme C...est rejetée.

Article 2 : L'association Sauvegarde de la Haute Vallée du Lot et Mme C...verseront la somme globale de 2 000 euros au syndicat mixte de la Haute Vallée du Lot en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 14BX00367


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX00367
Date de la décision : 28/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

34-02-02 Expropriation pour cause d'utilité publique. Règles générales de la procédure normale. Acte déclaratif d'utilité publique.


Composition du Tribunal
Président : M. LALAUZE
Rapporteur ?: Mme Béatrice MOLINA-ANDREO
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : SELARL AB CONSEILS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-06-28;14bx00367 ?
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