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04/10/2016 | FRANCE | N°16BX01262

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 04 octobre 2016, 16BX01262


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté en date du 23 septembre 2015 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1504841 du 16 mars 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 avr

il 2016 MmeD..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté en date du 23 septembre 2015 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1504841 du 16 mars 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 avril 2016 MmeD..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 16 mars 2016 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 23 septembre 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours suivant notification de l'arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

..........................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, ensemble le protocole du 22 décembre 1985 annexé ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Christine Mège a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. MmeD..., de nationalité algérienne, est entrée régulièrement en France le 22 février 2015 dans le cadre du regroupement familial après avoir épousé M. Kadridans leur pays d'origine. Le 23 février 2015, elle a demandé au préfet de la Haute-Garonne la délivrance d'un certificat de résidence de dix ans sur le fondement des dispositions du d) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien. Par arrêté du 23 septembre 2015, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Elle relève appel du jugement n° 1504841 du 16 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Contrairement à ce que soutient MmeD..., le jugement contesté a visé et analysé le mémoire produit par la requérante le 28 janvier 2016 en réplique au mémoire en défense du préfet de la Haute- Garonne. Par suite il n'a pas été porté atteinte au caractère contradictoire de la procédure et le jugement n'est pas entaché de l'irrégularité alléguée.

Sur la légalité de l'arrêté du 23 septembre 2015 :

3. Pour demander l'annulation de l'arrêté du 23 septembre 2015, Mme D...reprend en appel les moyens déjà soulevés en première instance et tirés de ce que le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé et de ce que ni l'obligation de quitter le territoire français ni la fixation du délai de départ volontaire ni la désignation du pays d'éloignement ne sont motivées. Elle ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

En ce qui concerne le refus de séjour :

4. Aux termes des stipulations de l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les membres de la famille qui s'établissent en France sont mis en possession d'un certificat de résidence de même durée de validité que celui de la personne qu'ils rejoignent sans préjudice des dispositions de l'article 9, l'admission sur le territoire français en vue de l'établissement des membres de famille d'un ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence d'une durée de validité d'au moins un an, présent en France depuis au moins un an sauf cas de force majeure, et l'octroi du certificat de résidence sont subordonnés à la délivrance de l'autorisation de regroupement familial par l'autorité française compétente (....) ". Aux termes du titre II du protocole annexé au même accord : " Les membres de la famille s'entendent du conjoint d'un ressortissant algérien (...) ". Aux termes de l'article 7 du même accord : " Les dispositions du présent article et celles de l'article 7 bis fixent les conditions de délivrance du certificat de résidence aux ressortissants algériens autres que ceux visés à l'article 6 nouveau. (...) d) Les ressortissants algériens autorisés à séjourner en France au titre du regroupement familial, s'ils rejoignent un ressortissant algérien lui-même titulaire d'un certificat de résidence d'un an, reçoivent de plein droit un certificat de résidence de même durée de validité, renouvelable et portant la mention " vie privée et familiale de l'article 7 bis ". Enfin, aux termes de l'article 7 bis du même accord : " Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au g) : (...) d) Aux membres de la famille d'un ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence valable dix ans qui sont autorisés à résider en France au titre du regroupement familial. ". Le regroupement familial, lorsqu'il est autorisé au profit du conjoint d'un ressortissant algérien résidant en France, a pour objet de rendre possible la vie commune des époux, ainsi qu'il résulte notamment des stipulations précitées de l'article 4 de l'accord franco-algérien. Par suite, en cas de rupture de cette vie commune intervenant entre l'admission du conjoint sur le territoire et la date à laquelle il statue sur la demande de titre de séjour, le préfet peut légalement refuser pour ce motif la délivrance du titre de séjour sollicité.

5. Il est constant qu'à la date de l'arrêté contesté, Mme D...et son mari M. Kadrivivaient sous le même toit. Toutefois, au cours de l'enquête de police diligentée dans le cadre de l'instruction de la demande de titre de séjour, l'intéressée a déclaré qu'elle et son mari font chambre à part depuis une altercation du 21 juin 2015 au cours de laquelle son mari s'est montré violent à son égard, et qu'elle demeure avec son époux jusqu'à ce qu'elle obtienne un titre de séjour. Auditionné également, son mari a confirmé ces déclarations, indiqué que le 21 juin sa femme s'était également montré violente à son égard, qu'il l'avait répudiée depuis le mois de juillet 2015 et souhaitait son départ. Les conclusions de cette enquête font également état de ce que M. Kadria déposé une requête en divorce en Algérie où avait été célébrée leur union. Dans ces conditions, et alors même que les deux époux n'ont eu de domicile séparé qu'à compter de l'ordonnance du juge aux affaires familiales du 29 octobre 2015, postérieure à la décision contestée, il ressort des pièces du dossier que la vie commune entre les époux, au sens des dispositions précitées de l'accord franco-algérien, avait cessé à la date de la décision contestée. Par suite, en refusant pour ce motif la délivrance d'un certificat de résidence de dix ans le préfet de la Haute-Garonne n'a ni méconnu les stipulations du d) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien ni fait une inexacte application de ces stipulations.

6. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la requérante n'est pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement du d) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien. Il n'est ni allégué ni établi qu'elle entrerait dans l'un des autres cas obligeant le préfet à saisir la commission du titre de séjour. Dès lors, le préfet de la Haute-Garonne n'était pas tenu de soumettre son cas à cette commission avant de rejeter sa demande. Le moyen tiré de l'irrégularité de la saisine de cette commission est par suite inopérant.

7 Les stipulations de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien citées au point 4 régissent d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles relatives à la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France. Par suite le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) est inopérant et doit être écarté.

8. Toutefois, ces stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.

9. Mme D...n'établit pas avoir communiqué à l'appui de sa demande d'autres éléments relatifs à l'existence de violences conjugales que l'information du dépôt d'une main-courante relatives à des faits de violences qui, alors que M. Kadriavait également informé le préfet de faits de violences de la part de son épouse, était insuffisante à établir la réalité des violences alléguées. Par suite le moyen tiré ce que l'arrêté contesté qui mentionne que Mme D... n'apporte pas d'élément concernant la suite donnée au dépôt de main-courante qu'elle a effectué concernant les agissements de son mari à son égard, serait entaché d'erreur de fait sur ce point ne peut qu'être écarté.

10. Il est établi par les pièces produites devant la juridiction administrative que Mme D... a été victime des violences conjugales de la part de son mari qui, pour ces faits, a été condamné le 5 avril 2016 par le tribunal correctionnel de Toulouse à un emprisonnement délictuel d'un mois avec sursis. Toutefois, à la date de l'arrêté du 23 septembre 2015, Mme D..., née le 18 octobre 1984, entrée en France pour y rejoindre M. Khadriqu'elle avait épousé en Algérie le 20 janvier 2014, n'y demeurait dans le cadre du regroupement familial que depuis sept mois. Elle n'a pas d'enfants, ne se prévaut pas de l'existence d'autres liens familiaux en France, et ne fait état que de quelques liens amicaux noués sur le territoire national. Il est constant que ses parents ainsi que ses deux frères résident en Algérie. Dans ces conditions, en dépit de ses efforts d'intégration, le refus de titre de séjour n'a pas porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni, en tout état de cause, les dispositions de la circulaire du 9 septembre 2011 relative au droit de séjour des victimes de violences conjugales, qui est dépourvue de caractère réglementaire. Il n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste quant à l'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle.

11. Mme D...ne peut utilement se prévaloir d'une méconnaissance des dispositions de l'article L. 316-3 du CESEDA selon lesquelles une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " est délivrée à l'étranger qui bénéficie d'une ordonnance de protection en vertu de l'article 515-9 du code civil dès lors qu'elle n'a obtenu le bénéfice de cette protection que postérieurement à l'arrêté contesté du 23 septembre 2015 par une ordonnance du 29 octobre 2015 et que le seul dépôt d'une requête en vue de l'obtention d'une telle mesure n'ouvre pas droit à la délivrance d'un tel titre. Elle ne peut non plus se prévaloir utilement d'une méconnaissance de l'article L. 316-4 du CESEDA selon lesquelles une carte de résident peut être délivrée à l'étranger ayant déposé plainte pour une infraction mentionnée au premier alinéa de l'article 132-80 du code pénal, en cas de condamnation définitive de la personne mise en cause, dès lors que M. Khadrin'a été condamné que postérieurement à l'arrêté contesté.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français, la fixation du délai de départ volontaire et la désignation du pays d'éloignement :

12. Pour demander l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français, de la fixation du délai de départ volontaire et de la désignation du pays d'éloignement, Mme D...reprend en appel le moyen déjà soulevé en première instance et tiré du défaut de motivation de ces décisions. Elle ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

13. Aucun des moyens dirigés contre la décision de refus de titre de séjour n'est fondé. Dès lors, Mme D...ne peut exciper ni de l'illégalité de cette décision pour contester celle l'obligeant à quitter le territoire français ni de l'illégalité de ces décisions pour contester celle désignant son pays d'éloignement.

14. Pour les motifs exposés au point 10 ni l'obligation de quitter le territoire français ni la désignation du pays d'éloignement ne portent une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale et par suite ne méconnaissent pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

15. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement n° 1504841 du 16 mars 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

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N° 16BX01262


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX01262
Date de la décision : 04/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. PEANO
Rapporteur ?: Mme Christine MEGE
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : CHMANI

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-10-04;16bx01262 ?
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