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21/03/2017 | FRANCE | N°15BX01479

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 21 mars 2017, 15BX01479


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux à lui payer une indemnité de 150 624,98 euros en réparation des préjudices occasionnés par l'infection nosocomiale contractée dans cet établissement.

Par un jugement n° 1301667 du 17 mars 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné le CHU de Bordeaux à payer à M. C...une indemnité de 14 110 euros et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant

la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés les 30 avril et 7 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux à lui payer une indemnité de 150 624,98 euros en réparation des préjudices occasionnés par l'infection nosocomiale contractée dans cet établissement.

Par un jugement n° 1301667 du 17 mars 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné le CHU de Bordeaux à payer à M. C...une indemnité de 14 110 euros et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés les 30 avril et 7 mai 2015, 29 avril, 11 mai, 9 juin et 25 octobre 2016, M.C..., représenté par MeD..., demande à la cour de porter à 152 883,85 euros l'indemnité allouée et de réformer en ce sens le jugement du 17 mars 2015 du tribunal administratif de Bordeaux et de mettre à la charge du CHU de Bordeaux, d'une part, les frais de procédure en ce compris le coût de l'expertise médicale, d'autre part, la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lacau, rapporteur ;

- les conclusions de M. Katz, rapporteur public ;

- et les observations de MeB..., représentant M.C....

Considérant ce qui suit :

1. Le 7 octobre 2009, DenisC..., qui souffrait d'une gonarthrose interne sur genu varum à l'origine d'une gonalgie, a subi au centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux une ostéotomie de valgisation du tibia droit par plaque d'ostéosynthèse. Suspectant une pseudarthrose septique, l'équipe médicale a retiré la plaque le 9 juin 2010. M. C...a présenté des difficultés de cicatrisation puis a été admis au service des urgences le 9 juillet suivant dans un état d'hyperthermie associé à un érythème de la cuisse droite et à un lymphoedème du membre inférieur droit. Les prélèvements bactériologiques ont révélé la présence de plusieurs germes, de type staphylocoque et streptocoque. Après avoir bénéficié d'une antibiothérapie en août 2010, M. C... a saisi la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (CRCI) de la région Aquitaine. Celle-ci a commis un expert, qui a établi son rapport le 17 juin 2011, puis le 18 juillet 2012, a estimé que la responsabilité de l'établissement de santé était engagée et a transmis le dossier à son assureur. En l'absence d'offre d'indemnisation, M. C...a saisi, comme le prévoient les articles L. 1142-14 et L. 1142-15 du code de la santé publique, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des infections nosocomiales et des affections iatrogènes (ONIAM) qui a, le 4 octobre 2012, refusé de présenter une offre. L'assureur a finalement fait une offre, le 29 novembre 2012, jugée insuffisante par M.C..., qui a saisi le tribunal administratif de Bordeaux d'une demande tendant à la condamnation de l'établissement hospitalier à lui payer une indemnité de 150 624,98 euros. Par un jugement du 17 mars 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a retenu l'engagement de la responsabilité du CHU de Bordeaux au titre d'une infection nosocomiale sur le fondement du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, l'a condamné à payer à M. C...une indemnité de 14 110 euros et a rejeté le surplus de sa demande. M.C..., qui relève appel de ce jugement, demande à la cour de porter à 152 883,85 euros l'indemnité allouée. La caisse de Mutualité sociale agricole (MSA) de la Gironde sollicite l'allocation des montants respectifs de 20 224,73 euros et de 1 047 euros au titre des débours exposés pour le compte de son assuré et de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 376-1 du code de sécurité sociale. Le CHU de Bordeaux ne conteste pas le principe de sa responsabilité et ne forme pas d'appel incident.

2. Si M. C...invoque " la faute médicale ayant entraîné, d'une part, une claudication importante et douloureuse et, d'autre part, le préjudice précédemment décrit de l'infection nosocomiale ", une telle faute ne résulte d'aucun élément de l'instruction. En tout état de cause, le requérant ne se prévaut d'aucun préjudice spécifique imputable à une telle faute, dont la réparation ne serait pas comprise dans sa demande de 152 883,85 euros.

3. M.C..., qui exerçait à temps complet l'activité de " chef de ligne " dans une unité de conditionnement de légumes, produit en appel les pièces justifiant des pertes de salaires qu'il a effectivement subies compte tenu des indemnités journalières versées par la MSA de la Gironde. Il est donc fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté sa demande de ce chef. Ce poste de préjudice doit être estimé, compte non tenu de la période de convalescence de deux mois consécutive à l'opération du 7 octobre 2009, sur une période de deux cent vingt-cinq jours, du 7 avril au 18 novembre 2010, date de consolidation de l'état de santé de l'intéressé, à 900 euros.

4. M. C...soutient avoir exposé des frais d'un montant total de 1 550,92 euros pour se rendre à des consultations et aux réunions d'expertise et produit la liste exhaustive de ses rendez-vous médicaux au CHU de Bordeaux et les justificatifs de ses frais liés à l'expertise. Dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu de retenir ce montant de 1 550,92 euros, dont la réalité et l'imputabilité à l'infection en cause ne sont pas sérieusement contestées par le défendeur.

5. M.C..., déclaré le 17 juillet 2012 inapte par le médecin du travail à tout poste dans la société qui l'employait, puis licencié pour inaptitude physique le 13 septembre 2012, soutient se trouver " en grande difficulté sur le marché de l'emploi ". En admettant que son licenciement soit directement imputable, non à l'évolution de son état antérieur de gonarthrose interne sur genu varum, mais aux complications dermatologiques résultant de l'infection, contre-indiquant le port de bottes, il ne résulte pas de l'instruction et n'est d'ailleurs pas allégué par M. C...qu'il serait inapte à l'exercice de toute activité professionnelle ne nécessitant pas impérativement de porter des bottes. La réalité des préjudices allégués au titre de la perte de gains professionnels futurs et de l'incidence professionnelle du dommage n'est donc pas établie.

6. Le principe de la réparation intégrale du préjudice impose que les frais liés à l'assistance à domicile de la victime par une tierce personne, alors même qu'elle serait assurée par un membre de sa famille, soient évalués à une somme qui ne saurait être inférieure au montant du salaire minimum augmenté des charges sociales, appliqué à une durée journalière, dans le respect des règles du droit du travail. Il résulte de l'instruction, notamment de l'expertise, que M. C...nécessitait une assistance quotidienne de deux heures pendant deux mois et d'une heure pendant cinq mois et trois semaines. Si le requérant fait valoir que " ce calcul ne coïncide absolument pas avec le salaire minimum interprofessionnel de croissance horaire brut, augmenté des charges sociales applicables ", il ne résulte pas de l'instruction que les premiers juges auraient fait de ce poste de préjudice une appréciation insuffisante en estimant à 2 910 euros la réparation due à ce titre.

7. Il résulte de l'instruction, notamment de l'expertise, que M. C...a subi pendant vingt-trois jours un déficit fonctionnel temporaire total imputable à l'infection, puis pendant deux mois un déficit fonctionnel temporaire partiel fixé par l'expert à 25 %, et pendant quatre mois et demi, jusqu'à la date de consolidation de son état de santé, au taux de 10 %. Le tribunal administratif de Bordeaux n'a pas fait une appréciation insuffisante de ce chef de préjudice en estimant à 900 euros le montant de la réparation due à ce titre.

8. L'expert a estimé que M. C...reste atteint d'un déficit fonctionnel permanent dont le taux de 8 % n'est pas sérieusement contesté par le défendeur qui se borne à faire valoir que le dommage est imputable à l'ablation de la plaque. En allouant à M.C..., né en 1957, une indemnité de 7 500 euros, les premiers juges ont fait une évaluation insuffisante de ce chef de préjudice, qu'il y a lieu de porter à 9 000 euros.

9. En accordant les montants respectifs de 2 000 euros et de 800 euros, le tribunal n'a pas fait une appréciation insuffisante des souffrances de M. C...imputables à l'infection, évaluées par l'expert à 2 sur une échelle de 7, et du préjudice esthétique occasionné par une tâche dyschromique sur la face interne du tibia, évalué à 1 sur 7. L'expert a relevé l'absence de perte d'autonomie et de difficulté à la pratique des activités de loisir antérieures. Le certificat médical établi le 14 octobre 2016 par son médecin traitant mentionnant sans autres précisions des difficultés à la marche et une " perte d'autonomie progressive " depuis son opération du genou et les allégations tout aussi peu circonstanciées de M. C...qui fait état de difficultés dans ses activités de loisir, notamment la marche et la pêche, n'établissent pas la réalité du préjudice d'agrément allégué, ni, en tout état de cause, l'imputabilité de ce préjudice à l'infection nosocomiale.

10. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de sa demande en tant qu'elle excède le montant de 150 624,98 euros sollicité en première instance, que M. C...est seulement fondé à demander que l'indemnité allouée par l'article 1er du jugement attaqué soit portée à 18 033,92 euros et la réformation en ce sens du jugement.

11. La caisse de MSA de la Gironde, régulièrement mise en cause, n'a pas présenté devant les premiers juges de conclusions tendant au remboursement des débours exposés antérieurement au jugement. Ses conclusions à cette fin sont nouvelles en appel et ne peuvent par suite, sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur les autres fins de non-recevoir, qu'être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, celles tendant au paiement de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.

12. Aucun dépens n'ayant été exposé au cours de l'instance d'appel, les conclusions présentées à ce titre ne peuvent être accueillies. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'affaire, de faire droit aux conclusions présentées par M. C...au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : L'indemnité que le centre hospitalier universitaire de Bordeaux a été condamné à payer à M. C...par l'article 1er du jugement du 17 mars 2015 du tribunal administratif de Bordeaux est portée à 18 033,92 euros.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 17 mars 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. C...et les conclusions de la caisse de Mutualité sociale agricole de la Gironde sont rejetés.

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No 15BX01479


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