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21/03/2017 | FRANCE | N°16BX04128

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 21 mars 2017, 16BX04128


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 26 septembre 2016 par lequel le préfet de Tarn-et-Garonne a ordonné le transfert de sa demande d'asile aux autorités espagnoles.

Par un jugement n° 1604562 du 19 octobre 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 décembre 2016, M.A..., représenté par Me C... demande à la cour :<

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1°) d'annuler ce jugement du 19 octobre 2016 du magistrat désigné par le président du tribunal ad...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 26 septembre 2016 par lequel le préfet de Tarn-et-Garonne a ordonné le transfert de sa demande d'asile aux autorités espagnoles.

Par un jugement n° 1604562 du 19 octobre 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 décembre 2016, M.A..., représenté par Me C... demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 19 octobre 2016 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 26 septembre 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Tarn-et-Garonne, sous astreinte, de le munir d'un récépissé provisoire d'examen de sa demande d'asile en France à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Marie-Thérèse Lacau a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Ressortissant mauritanien, M.A..., entré en France selon ses dires le 21 mai 2016, a sollicité la qualité de réfugié le 23 mai suivant. La consultation du fichier Eurodac a révélé qu'il bénéficiait d'un visa délivré par les autorités espagnoles du 5 mai au 18 juin 2016 et le préfet de Tarn-et-Garonne a demandé à l'Espagne, le 14 juin, de prendre en charge la demande d'asile, en application de l'article 12.2 du règlement (UE) n° 604/2013 du Conseil du 26 juin 2013 dit Dublin III. Suite à l'accord des autorités espagnoles émis le 22 juillet 2016, par un arrêté du 26 septembre suivant, le préfet a décidé le transfert de M. A...vers l'Espagne sur le fondement de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. A...relève appel du jugement du 23 novembre 2016 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

2. Aux termes de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'autorité administrative estime que l'examen d'une demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat qu'elle entend requérir, l'étranger bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la fin de la procédure de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande et, le cas échéant, jusqu'à son transfert effectif à destination de cet Etat. (...) Le présent article ne fait pas obstacle au droit souverain de l'Etat d'accorder l'asile à toute personne dont l'examen de la demande relève de la compétence d'un autre Etat. ". L'article L. 742-3 du même code prévoit que, sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet, par une décision écrite motivée, d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen.

3. En premier lieu, l'arrêté contesté mentionne la délivrance par les autorités espagnoles d'un visa du 5 mai au 18 juin 2016 et leur accord, le 22 juillet 2016, pour prendre en charge la demande d'asile de M.A..., l'absence de tout élément de la situation de l'intéressé, célibataire et sans charge familiale, permettant de lui faire bénéficier des dérogations prévues aux articles 3-2 et 17 du règlement Dublin III, enfin, l'absence de risque personnel d'atteinte au droit d'asile. Dans ces conditions, le requérant ne peut sérieusement invoquer l'absence de toute considération propre à sa situation personnelle qui révèlerait, outre l'insuffisante motivation de la décision, un défaut d'examen de sa situation.

4. En deuxième lieu, M. A...invoque l'absence de toute attache familiale en Espagne, sa méconnaissance de l'espagnol, la présence en France de ses oncles et cousins et ses chances plus importantes d'intégration professionnelle dans un pays francophone eu égard à sa parfaite connaissance, au demeurant non contestée, de la langue et de la culture françaises. Toutefois, il est constant qu'il n'est entré en France qu'en mai 2016 à l'âge de vingt-sept ans après avoir fait ses études au Maroc et qu'il est célibataire sans charge de famille. Dans les circonstances de l'affaire, la décision de transfert n'a pu porter une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

5. En troisième lieu, le règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 pose en principe dans le paragraphe 1 de son article 3 qu'une demande d'asile est examinée par un seul Etat membre, déterminé par application des critères fixés par son chapitre III. Selon le même règlement, l'application des critères d'examen des demandes d'asile est écartée en cas de mise en oeuvre, soit de la clause dérogatoire énoncée au paragraphe 1 de l'article 17 du règlement prévoyant que " chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement " qui procède d'une décision prise unilatéralement par un Etat membre, soit de la clause humanitaire définie par le paragraphe 2 de ce même article 17 du règlement. Le paragraphe 2 de cet article prévoit en effet qu'un Etat membre peut, même s'il n'est pas responsable en application des critères fixés par le règlement, " rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées notamment sur des motifs familiaux ou culturels ". La mise en oeuvre par les autorités françaises de ces dispositions doit être assurée à la lumière des exigences définies par le second alinéa de l'article 53-1 de la Constitution, aux termes duquel : " les autorités de la République ont toujours le droit de donner asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ou qui sollicite la protection de la France pour un autre motif ". La faculté ainsi laissée à chaque Etat membre de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés, est discrétionnaire et ne constitue pas un droit. En se bornant à se prévaloir de sa connaissance de la langue et de la culture française alors qu'il ne maîtrise pas l'espagnol et de l'absence en Espagne de branche du mouvement " Initiative pour la Résurgence du mouvement Abolitionniste (IRA) Mauritanie-France ", M. A...qui n'allègue pas que les modalités d'application des règles relatives à l'asile en Espagne, Etat membre de l'Union européenne et partie tant à la convention de Genève sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, seraient constitutives d'une atteinte au droit d'asile, n'apporte aucun élément sérieux permettant d'estimer qu'en s'abstenant de mettre en oeuvre la faculté discrétionnaire prévue par l'article 17 du règlement, le préfet se serait livré à une appréciation manifestement erronée de sa situation.

6. En dernier lieu, M. A...n'établit ni même n'allègue être soumis en Espagne, pays responsable de l'examen de sa demande d'asile, à des traitements inhumains ou dégradants prohibés par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par ailleurs, à les supposer établis par le récit de M. A...assorti de considérations générales sur l'esclavage et les droits de l'homme et de témoignages en faisant état, les risques personnels allégués en Mauritanie sont sans incidence sur la légalité de la décision de transfert de la demande d'asile aux autorités espagnoles, qui n'a ni pour objet ni pour effet de renvoyer le demandeur dans son pays d'origine. A le supposer maintenu en appel, le moyen tiré de la violation des stipulations susmentionnées doit donc être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent être accueillies.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

2

N° 16BX04128


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX04128
Date de la décision : 21/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

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Communautés européennes et Union européenne - Règles applicables.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Marie-Thérèse LACAU
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : SCP LARROQUE - REY - ROSSI

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-03-21;16bx04128 ?
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