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10/04/2017 | FRANCE | N°15BX00673

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre - formation à 3, 10 avril 2017, 15BX00673


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...a demandé au tribunal administratif de la Réunion, l'annulation de l'arrêté du 8 janvier 2012 par lequel la présidente du conseil général de la Réunion a prononcé son intégration dans le cadre d'emplois des adjoints administratifs territoriaux à compter du 5 janvier 2011 et d'enjoindre au département de la Réunion de la reclasser dans un cadre d'emplois de catégorie B.

Par un jugement n° 1200222 du 29 décembre 2014, le tribunal administratif de la Réunion a annulé la décision d

e la présidente du conseil général de la Réunion du 8 janvier 2012, a enjoint au départ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...a demandé au tribunal administratif de la Réunion, l'annulation de l'arrêté du 8 janvier 2012 par lequel la présidente du conseil général de la Réunion a prononcé son intégration dans le cadre d'emplois des adjoints administratifs territoriaux à compter du 5 janvier 2011 et d'enjoindre au département de la Réunion de la reclasser dans un cadre d'emplois de catégorie B.

Par un jugement n° 1200222 du 29 décembre 2014, le tribunal administratif de la Réunion a annulé la décision de la présidente du conseil général de la Réunion du 8 janvier 2012, a enjoint au département de la Réunion de procéder, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, " à un nouvel examen du reclassement susceptible d'être proposé à Mme B...en envisageant prioritairement son reclassement dans un cadre d'emplois de catégorie B " et a rejeté les conclusions indemnitaires de MmeB....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 février 2015, et un mémoire le 12 juin 2015, Mme B... représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de la Réunion en tant qu'il rejette ses conclusions indemnitaires ;

2°) de condamner le département de la Réunion à lui verser la somme de 7 099 euros au titre des pertes de rémunération qu'elle a subies du fait de l'absence de reclassement sur un grade de la catégorie B, et la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice subi du fait du harcèlement dont elle a été victime, ces sommes devant être majorées des intérêts au taux légal et de la capitalisation à compter du jour de la requête ;

3°) d'enjoindre au département de la Réunion de reconstituer sa carrière à compter de la notification de l'arrêt et ce, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge du département de la Réunion, le paiement d'une somme de 3 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- elle a sollicité du tribunal administratif qu'il considère qu'elle a fait l'objet d'un détachement non au grade d'adjointe administrative territoriale mais au grade d'adjointe administrative principale de 1ere classe échelon 6 indice brut 449 à compter du 5 janvier 2011 et que lui soit reconnu le bénéfice d'une intégration à un poste de catégorie B et la reconstitution de sa carrière ;

- elle doit être regardée comme se trouvant placée dans la situation qui serait la sienne si la décision illégale n'était pas intervenue, c'est-à-dire affectée à un poste de catégorie B, ou à tout le moins au grade d'adjoint administratif principal de 1ère classe ;

- la décision illégale lui a causé un préjudice de carrière et un préjudice financier incontestable devant ouvrir droit à son profit à réparation sur le fondement de la jurisprudence Deberles du Conseil d'Etat du 7 avril 1933 ;

- compte tenu du motif d'illégalité interne sur lequel s'est fondé le tribunal administratif, cette illégalité imposait la réparation du préjudice financier subi, sans que ne puisse lui être opposée l'absence de demande préalable indemnitaire ;

- en tout état de cause, la liaison du contentieux est intervenue en cours d'instance, dès lors qu'elle a demandé devant le tribunal, de prendre en compte les incidences de l'illégalité du refus de reclassement en termes d'indices et de rémunérations ;

- le défaut de demande préalable a en tout état de cause été régularisé en cours d'instance par la défense au fond présentée par le département, qui n'a pas opposé l'irrecevabilité des conclusions indemnitaires ;

- la demande de préjudice moral est parfaitement justifiée, compte tenu des documents, notamment médicaux, qu'elle produit.

Par un mémoire en défense enregistré le 6 mai 2015 le département de la Réunion, représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête de Mme B...et à ce que soit mise à sa charge la somme de 2 500 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- l'annulation de l'arrêté du 8 janvier 2012 par lequel la présidente du conseil général de la Réunion a prononcé l'intégration de Mme B...n'impliquait ni la reconstitution de sa carrière ni la condamnation du département à l'indemniser des préjudices financiers qu'elle aurait subis ;

- en effet en premier lieu, l'annulation de l'arrêté du 8 janvier 2012, avait pour seule conséquence que l'administration restait saisie de la demande de Mme B...et cette annulation n'impliquait aucune reconstitution de carrière ;

- l'annulation n'a été prononcée qu'au motif qu'il n'avait pas été procédé par l'administration, à une recherche effective d'un poste, relevant de la catégorie B, et dès lors cette annulation n'impliquait pas la reconstitution de carrière dans la catégorie B ;

- c'est à bon droit que le tribunal a rejeté pour irrecevabilité les conclusions indemnitaires pour défaut de demande préalable, dès lors que contrairement à ce que soutient la requérante, le département n'a pas répondu au fond sur le mérite des conclusions indemnitaires n'ayant pas répliqué au mémoire présenté le 15 mai 2013 par MmeB....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n° 89-376 du 8 juin 1989 ;

- le décret n° 93-657 du 26 mars 1993 ;

- le décret n° 2006-1690 du 22 décembre 2006 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pierre Bentolila,

- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant MmeB....

Considérant ce qui suit :

1. MmeB... fonctionnaire titulaire du département de la Réunion, relevant du corps des moniteurs-éducateurs de la fonction publique hospitalière, a été déclarée inapte à reprendre ses fonctions à la suite d'un accident de service survenu en 2005. Par arrêté du 1er février 2010, la présidente du conseil général de la Réunion l'a détachée dans le cadre d'emplois des adjoints administratifs territoriaux, pour une période d'un an à compter de 5 janvier 2010 puis, par arrêté du 8 janvier 2012, a procédé à son intégration dans ce même cadre d'emplois des adjoints administratifs territoriaux, en qualité d'adjointe administrative territoriale de 1ère classe, avec effet au 5 janvier 2011. Mme B...relève appel du jugement du 29 décembre 2014 du tribunal administratif de la Réunion en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à sa demande, dès lors que s'il a annulé la décision d'intégration du 8 janvier 2012 au motif de l'absence de recherche par le département, contrairement à la demande de MmeB..., d'un reclassement dans un cadre d'emploi de catégorie B de la fonction publique territoriale, il n'a pas enjoint au département de la reclasser dans un cadre d'emplois de la fonction publique territoriale relevant de la catégorie B et en tant également qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires.

Sur les conclusions indemnitaires :

2. Aux termes de l'article R. 412-1 du code de justice administrative : " La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de la décision attaquée ou, dans le cas mentionné à l'article R 421-2, de la pièce justifiant de la date de dépôt de la réclamation. (...) ".

3. Contrairement à ce qu'imposent ces dispositions, MmeB..., n'a fait précéder ses conclusions indemnitaires présentées dans son mémoire du 15 mai 2013 devant le tribunal administratif, d'aucune demande préalable adressée au département. Si le département par un mémoire en défense du 12 décembre 2012 a répondu aux conclusions en annulation et en injonction présentées par MmeB..., dans sa requête adressée le 3 mars 2012 au tribunal administratif, il s'est abstenu, en revanche, de défendre aux conclusions indemnitaires présentées par Mme B...dans son mémoire du 15 mai 2013. Dans ces conditions, le silence de l'administration n'a pu avoir pour effet de lier le contentieux et le département est fondé à opposer à MmeB..., l'irrecevabilité de ses conclusions indemnitaires, qui ne peuvent être que rejetées.

Sur l'injonction :

4. Aux termes de l'article L 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ".

5. Par son jugement du 29 décembre 2014, le tribunal administratif de la Réunion a annulé la décision de la présidente du conseil général de la Réunion du 8 janvier 2012, prononçant l'intégration de Mme B...dans le cadre d'emplois des adjoints administratifs territoriaux et le jugement, dans son article 2, a enjoint au département de la Réunion de procéder, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, " à un nouvel examen du reclassement susceptible d'être proposé à Mme B...en envisageant prioritairement son reclassement dans un cadre d'emplois de catégorie B ". La requérante demande la réformation de l'article 2 du jugement en ce qu'il ne fait pas droit à ses conclusions tendant " d'enjoindre au département de la Réunion de la reclasser dans un cadre d'emplois de catégorie B ".

6. Selon article 71 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps, s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. / Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé. ". Selon l'article 72 : " En vue de permettre ce reclassement, l'accès à des corps ou emplois d'un niveau supérieur, équivalent ou inférieur est ouvert aux intéressés, quelle que soit la position dans laquelle ils se trouvent, selon les modalités retenues par les statuts particuliers de ces corps ou emplois (...) / Lorsque le concours ou le mode de recrutement donne accès à un corps de niveau hiérarchique inférieur, le classement dans le nouveau corps des agents mentionnés à l'article 71 sera effectué au premier grade du nouveau corps, compte tenu des services qu'ils ont accomplis dans leur corps d'origine, sur la base de l'avancement dont ils auraient bénéficié s'ils avaient accompli ces services dans leur nouveau corps (...) ". Selon l'article 73 : " Il peut être procédé dans un corps ou emploi de niveau équivalent ou inférieur au reclassement des fonctionnaires mentionnés à l'article 71 par la voie du détachement. / Dès qu'il s'est écoulé une période d'un an, les fonctionnaires détachés dans ces conditions peuvent demander leur intégration dans le corps ou emploi de détachement. Leur ancienneté est déterminée selon les modalités prévues par l'article 72. ". En vertu de l'article 74 : " Le reclassement peut être réalisé par intégration dans un autre grade du même corps dans les conditions mentionnées aux articles 71 et 72. ". Selon l'article 2 du décret du 8 juin 1989 pris pour l'application des articles précités de la loi du 9 janvier 1986 : " Dans le cas où l'état physique d'un fonctionnaire, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas de remplir les fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'intéressé peut présenter une demande de reclassement dans un emploi relevant d'un autre grade de son corps ou dans un emploi relevant d'un autre corps. / L'autorité investie du pouvoir de nomination recueille l'avis du comité médical départemental. ". Selon l'article 3 du décret : " Le fonctionnaire qui a présenté une demande de reclassement dans un emploi d'un corps différent de celui auquel il appartient peut être détaché dans ce nouveau corps si ce dernier est de niveau équivalent ou inférieur à son corps d'origine. / (...) Le fonctionnaire détaché dans un corps hiérarchiquement inférieur, qui ne peut être classé à un échelon d'un grade de ce corps doté d'un indice égal ou immédiatement supérieur à celui qu'il détient dans son corps d'origine, est classé à l'échelon terminal du grade le plus élevé du corps d'accueil et conserve à titre personnel l'indice détenu dans son corps d'origine.(...) ". Il s'évince de ces dispositions que comme l'ont relevé les premiers, juges, dans l'hypothèse notamment comme en l'espèce, d'un reclassement, après détachement, dans la fonction publique territoriale, d'un fonctionnaire relevant à l'origine de la fonction publique hospitalière, ce reclassement ne s'opère pas nécessairement à un grade d'un cadre d'emplois équivalent au grade d'origine.

7. Dans ces conditions MmeB..., qui appartenait avant son détachement et son intégration dans la fonction publique territoriale, en qualité d'adjointe administrative territoriale de 1ère classe, dans le cadre d'emploi des adjoints administratifs territoriaux constituant un cadre d'emplois administratif de catégorie C, au corps des moniteurs-éducateurs de la fonction publique hospitalière constituant un cadre B en vertu du décret susvisée du 26 mars 1993, n'est pas fondée à soutenir que le tribunal après avoir annulé l'arrêté du 8 janvier 2012 par lequel la présidente du conseil général de la Réunion a prononcé son intégration dans le cadre d'emplois des adjoints administratifs territoriaux, aurait commis une erreur de droit en n'enjoignant pas au département de la reclasser dans un cadre d'emplois de catégorie B.

8. Il résulte de ce qui précède, que Mme B...n'est pas fondée à demander la réformation du jugement du 29 décembre 2014 du tribunal administratif de la Réunion en tant qu'il rejette ses conclusions indemnitaires et en tant qu'il rejette ses conclusions tendant " d'enjoindre au département de la Réunion de la reclasser dans un cadre d'emplois de catégorie B ".

Sur les conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de la Réunion, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont Mme B...demande le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande du département de la Réunion présentée sur ce même fondement.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le département de la Réunion au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...B...et au département de la Réunion.

Délibéré après l'audience du 13 mars 2017, à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Pierre Bentolila, premier conseiller,

M. Axel Basset, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 avril 2017.

Le rapporteur,

Pierre Bentolila Le président,

Pierre LarroumecLe greffier,

Cindy Virin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

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N° 15BX00673


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX00673
Date de la décision : 10/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-05-02 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Disponibilité.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Pierre BENTOLILA
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : CLIQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 25/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-04-10;15bx00673 ?
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