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02/05/2017 | FRANCE | N°15BX00106

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 02 mai 2017, 15BX00106


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Fort de France, d'une part, d'annuler la décision du 1er août 2013 par laquelle le ministre de l'éducation nationale l'a exclu temporairement de ses fonctions pour une durée de deux ans, d'autre part, de suspendre l'exécution de cette décision.

Par un jugement n° 1400597,1400598 du 13 novembre 2014, le tribunal administratif de Fort de France a prononcé un non-lieu sur les conclusions à fin de suspension et a rejeté les conclusions à fin d'annula

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Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 janvier 201...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Fort de France, d'une part, d'annuler la décision du 1er août 2013 par laquelle le ministre de l'éducation nationale l'a exclu temporairement de ses fonctions pour une durée de deux ans, d'autre part, de suspendre l'exécution de cette décision.

Par un jugement n° 1400597,1400598 du 13 novembre 2014, le tribunal administratif de Fort de France a prononcé un non-lieu sur les conclusions à fin de suspension et a rejeté les conclusions à fin d'annulation.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 janvier 2015, M.C..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 13 novembre 2014 du tribunal administratif de Fort de France en tant qu'il statue sur ses conclusions à fin d'annulation ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la sanction infligée le 1er août 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la procédure est irrégulière ; le conseil de discipline a été convoqué deux fois en quinze mois avec deux avis dont l'un consistant à ne pas émettre d'avis ;

- le ministre, qui n'a pas tenu compte du temps écoulé entre les faits et sa décision, de sa situation depuis l'année 2010, de sa manière de servir et de sa volonté de réinsertion, a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ; la sanction est disproportionnée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 mai 2015, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis du 5 janvier 2012 est inopérant dès lors qu'un nouvel avis a été émis ; il était tenu de reprendre la procédure ;

- il a tenu compte tant du temps écoulé que du comportement de l'intéressé ; il a également retenu la situation de récidive, qui fait douter de sa volonté d'amendement ; la demande de dispense d'inscription au bulletin n° 2 de son casier judiciaire a été rejetée par la cour d'appel de Colmar ; la sanction n'est pas disproportionnée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marie-Thérèse Lacau,

- et les conclusions de M. David Katz, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Professeur de sciences de la vie et de la terre au lycée Frantz Fanon de La Trinité, M. C... a, par un jugement du 28 septembre 2010 du tribunal correctionnel de Colmar confirmé le 7 avril 2011 par la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Colmar, été reconnu coupable de récidive d'exhibition sexuelle et condamné à une peine de six mois d'emprisonnement. Le recteur de l'académie de la Martinique l'a suspendu de ses fonctions à compter du 1er septembre 2011, sur le fondement de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, puis a engagé une procédure disciplinaire. Le 5 janvier 2012, la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline s'est réunie sans toutefois émettre d'avis. Estimant que la procédure était entachée d'irrégularité, le recteur de l'académie de la Martinique a fixé une nouvelle réunion le 30 avril 2013 à l'issue de laquelle la commission s'est prononcée à l'unanimité pour la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de trois mois. Par une décision du 1er août 2013, le ministre de l'éducation nationale a prononcé à l'encontre de l'agent la sanction d'exclusion temporaire de ses fonctions pendant deux ans. Après avoir saisi la commission de recours du conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat, qui, par un avis du 21 mai 2014, a proposé de confirmer la sanction, M. C...a saisi le tribunal administratif de Fort-de-France de deux demandes tendant respectivement à l'annulation de la sanction et à la suspension de l'exécution de cette sanction. Par un jugement du 13 novembre 2014, après avoir joint ces requêtes, le tribunal administratif de Fort-de-France a prononcé un non-lieu sur la demande de suspension et a rejeté le surplus des conclusions de M.C.... Celui-ci relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre la sanction.

2. En premier lieu, en vertu de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983, toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. En vertu de l'article 67 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, l'autorité disciplinaire se prononce au vu d'un avis de la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline. L'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 prévoit, en cas de faute grave, y compris pour une infraction de droit commun, que son auteur peut être suspendu par l'autorité disciplinaire qui saisit sans délai, le conseil de discipline et précise que la situation du fonctionnaire suspendu doit être " définitivement réglée dans le délai de quatre mois. Si à l'expiration de ce délai aucune décision n'a été prise par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire, l'intéressé, sauf s'il est l'objet de poursuites pénales, est rétabli dans ses fonctions ".

3. Pour contester la régularité de la procédure disciplinaire, M. C...se borne à faire valoir que " le conseil de discipline a été convoqué deux fois en quinze mois avec deux avis dont l'un consistant à ne pas émettre d'avis ". Comme l'ont relevé les premiers juges, l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 a pour seul objet de limiter les effets de la suspension, aucun principe général du droit n'enferme dans un délai déterminé l'exercice de l'action disciplinaire et aucun texte applicable en l'espèce ne prévoyait un délai de prescription pour l'engagement d'une procédure disciplinaire à l'encontre d'un agent public. Aucun texte ou principe général ne fait obstacle à ce que l'autorité administrative compétente saisisse à nouveau une commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline, en lui demandant d'émettre un nouvel avis qui se substitue au premier, sous réserve que cette nouvelle saisine ne révèle pas un détournement de procédure. Par ailleurs, la seule circonstance que le conseil de discipline réuni le 12 janvier 2012 n'ait pas émis d'avis est sans incidence sur la régularité de la sanction en cause, dès lors que, comme en l'espèce, l'autorité disciplinaire a saisi à nouveau cette instance qui a émis un avis le 30 avril 2013, au demeurant en faveur de la réduction du quantum de la sanction envisagée.

4. En second lieu, l'article 66 de la loi du 11 janvier 1984 prévoit, au sein du troisième groupe de sanctions disciplinaires, qui sont réparties en quatre groupes, la rétrogradation puis l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans. Saisi d'une demande tendant à l'annulation d'une sanction prononcée pour des faits anciens, le juge administratif se doit d'apprécier, eu égard notamment au temps écoulé depuis que la faute a été commise, à la nature et à la gravité de celle-ci et au comportement ultérieur de l'agent, si la sanction prononcée présente un caractère proportionné.

5. La matérialité, d'ailleurs non contestée en appel, des faits d'exhibitionnisme sexuel commis par M. C...hors de son service le 9 avril 2010 est établie par le jugement correctionnel du 28 septembre suivant, confirmé en appel le 7 avril 2011. De tels faits sont de nature à justifier une sanction disciplinaire, ce qui n'est pas davantage contesté par le requérant qui invoque son évolution personnelle depuis l'année 2010, sa manière de servir et sa volonté de réinsertion. Dans les circonstances de l'espèce, eu égard à ses fonctions d'enseignant auprès de mineurs, à la gravité des faits en cause et aux deux condamnations pénales prononcées à son encontre les 26 octobre 2005 et 1er décembre 2009 pour des faits similaires, la sanction d'exclusion temporaire de ses fonctions pendant deux ans infligée le 1er août 2013 à M. C...à raison des faits commis le 9 avril 2010 n'est pas disproportionnée. Le moyen tiré de l'erreur " manifeste " d'appréciation doit donc, en tout état de cause, être écarté.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er de son jugement, le tribunal administratif de Fort de France a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la sanction prononcée le 1er août 2013.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Délibéré après l'audience du 21 mars 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Gil Cornevaux, président assesseur,

Mme Marie-Thérèse Lacau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 mai 2017.

Le rapporteur,

Marie-Thérèse Lacau Le président,

Elisabeth Jayat Le greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 15BX00106


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX00106
Date de la décision : 02/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-01 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Suspension.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Marie-Thérèse LACAU
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : SELAS JURISCARIB

Origine de la décision
Date de l'import : 16/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-05-02;15bx00106 ?
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