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09/05/2017 | FRANCE | N°17BX00219

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre - formation à 3, 09 mai 2017, 17BX00219


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 4 juillet 2014 du préfet de la Vienne refusant la demande de délivrance d'une carte de résident valable dix ans.

Par un jugement n° 1402297 du 23 novembre 2016, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 janvier 2017, M.C... ' représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1402297 du tribuna

l administratif de Poitiers du 23 novembre 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté précité du 4 juillet 2014 du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 4 juillet 2014 du préfet de la Vienne refusant la demande de délivrance d'une carte de résident valable dix ans.

Par un jugement n° 1402297 du 23 novembre 2016, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 janvier 2017, M.C... ' représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1402297 du tribunal administratif de Poitiers du 23 novembre 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté précité du 4 juillet 2014 du préfet de la Vienne ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Vienne, à titre principal, de lui délivrer une carte de résident de dix ans dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de prendre, en tenant compte des motifs pour lesquels l'annulation de la décision aura été prononcée, une nouvelle décision dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 35 et 37 de la loi du 10 juillet 1991, dont distraction au profit de la SCP Artur-A....

Il soutient que :

- l'arrêté contesté est entaché d'un défaut de motivation au regard de la loi du 11 juillet 1979, dés lors qu'il n'énonce pas l'ensemble des considérations de droit et de faits qui le fondent ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, il remplissait les conditions requises pour obtenir un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet de la Vienne a commis une erreur de droit en considérant que son comportement n'était pas constitutif d'une bonne intégration républicaine, dés lors qu'il a omis d'examiner tous les critères permettant d'apprécier cette intégration ;

- le préfet de la Vienne a commis une erreur manifeste d'appréciation de la situation de M. C...en estimant qu'il ne remplissait pas la condition d'intégration républicaine compte tenu de l'absence de pénalisation des faits reprochés et de ses efforts d'intégration professionnelle et sociale ;

- l'arrêté contesté méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ce qu'elle le maintient dans une situation administrative précaire au regard de son autorisation de séjourner en France ;

- la décision du préfet de la Vienne est contraire à l'intérêt supérieur de ses enfants garanti par l'article 3 paragraphe 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990, en ce qu'elle maintient leur père dans une situation d'incertitude quant à son maintien sur le territoire français.

Un mémoire en défense présenté par le préfet de la Vienne a été enregistré le 22 mars 2017.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 février 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée, désormais reprise dans le code des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 pris pour son application ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B...C..., de nationalité congolaise, né le 23 mars 1987, est entré en France le 16 mai 2004. Il a déposé une demande d'asile politique puis a sollicité le statut de réfugié auprès de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides le 10 août 2004. Il a bénéficié de plusieurs autorisations de séjour provisoires jusqu'à la délivrance, le 3 mai 2007, d'un carte de séjour au titre de la " vie privée et familiale " valable un an, dont il a, depuis lors, obtenu à chaque échéance le renouvellement. Il a sollicité auprès du préfet de la Vienne, le 25 février 2014, la délivrance d'une carte de résident d'une durée de dix ans en qualité de parent d'un enfant de nationalité française sur le fondement du 2° de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 4 juillet 2014, le préfet de la Vienne a refusé de lui accorder ce titre. M. C...relève appel du jugement n° 1402297 du 23 novembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. M. C...reprend en appel le moyen déjà soulevé en première instance et tiré du caractère insuffisamment motivé de l'arrêté contesté au regard de la loi du 11 juillet 1979 susvisée, désormais reprise dans le code des relations entre l'administration et le public. Après avoir cité les textes applicables, notamment l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il a reproduit des extraits, le préfet a indiqué à M. C... qu'eu égard à ses antécédents de violence volontaire sur sa conjointe le 22 juillet 2007 et le 7 octobre 2009, d'agression sexuelle sur mineur de quinze ans le 15 octobre 2007, de soumission d'une personne vulnérable ou dépendante à des conditions de travail indigne le 18 juillet 2013 et de différents entre époux, tapage nocturne, différends suite à droit de garde d'enfant, il ne présentait pas les garanties d'intégration républicaine requises pour la délivrance du titre sollicité. Cette motivation, qui a mis l'intéressé à même de présenter utilement ses observations, est conforme aux dispositions précitées. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

3. L'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que la carte de résident de dix ans prévue à l'article L. 314-1 peut être accordée notamment au parent d'un enfant français résidant en France et titulaire depuis au moins trois années de la carte de séjour temporaire mentionnée au 6° de l'article L. 313-11. Toutefois, l'article L. 314-2 du même code subordonne la délivrance de ce premier titre à l'intégration républicaine de l'étranger dans la société française, appréciée en particulier au regard de son engagement personnel à respecter les principes qui régissent la République, du respect effectif de ces principes et de sa connaissance suffisante de la langue française, sans que ces critères doivent être regardés comme cumulatifs, comme l'ont précisé à bon droit les premiers juges. Le requérant évoque pour apprécier la condition d'intégration républicaine, la prise en compte des critères issus de la circulaire du 20 janvier 2004 NOR : INTD0400006C prise pour l'application de la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité. Toutefois, ces dispositions, au demeurant dénuées de valeur règlementaire, ne lient pas le préfet qui conserve, dans le cadre de son pouvoir d'appréciation, la faculté de déterminer dans quelle mesure cette condition d'intégration est effectivement remplie ou non par l'étranger. Par suite en se fondant sur le défaut d'intégration républicaine de M. C...au regard des faits délictueux rapportés par les services de police pour refuser la délivrance de la carte de résident, le préfet de la Vienne n'a pas commis d'erreur de droit.

4. Il ressort des pièces produites par le préfet que M. C...est connu des services de police pour des faits exposés au point 2, dont le caractère de gravité n'est pas contesté. En se bornant à se prévaloir du fait qu'ils n'auraient pas donné lieu à des condamnations pénales, le requérant ne conteste pas sérieusement la matérialité de ces faits. Par suite, de tels faits manifestement répétés depuis 2007 pouvaient être pris en compte par le préfet pour apprécier la condition d'intégration républicaine à laquelle est subordonnée la délivrance de la première carte de résident en application des dispositions précitées de l'article L. 314-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En considérant que ces faits témoignaient d'un défaut d'intégration républicaine en dépit de l'insertion professionnelle et familiale de M. C...et en refusant pour ce motif de lui délivrer la carte de résident précitée, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1.- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2.- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". M. C...soutient que la décision du préfet méconnait ces stipulations en ce qu'elle le maintient dans une situation administrative précaire au regard de son droit à se maintenir durablement sur le territoire français. Toutefois à la date de la décision litigieuse, le titre de séjour temporaire de M. C... portant la mention " vie privée et familiale ", initialement pris le 3 mai 2007 sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, était en cours de renouvellement. Renouvelé depuis le 3 mai de 2007, il est constant que ce titre permet à M. C...de se maintenir durablement sur le territoire français. Ne l'ayant pas privé de ce droit, la décision contestée n'a pas porté au droit de M. C... au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

6. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte ainsi de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Comme exposé au point 5, la décision refusant le titre de séjour valable dix ans n'a ni pour objet ni pour effet de séparer M. C...de ses enfants. Dès lors, la décision litigieuse ne porte pas atteinte à l'intérêt supérieur de William, Melyna et Mayliss au sens des stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Sur les autres conclusions :

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction en vertu des dispositions des articles L. 911-1, L. 911-2 et L.911-3 du code de justice administrative et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du même code et des articles 35 et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise au préfet de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 27 mars 2017 à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Pierre Bentolila, premier conseiller,

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 mai 2017.

Le rapporteur,

Florence Rey-Gabriac,

Le président,

Pierre Larroumec

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

2

N° 17BX00219


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX00219
Date de la décision : 09/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : SCP ARTUR - CALIOT

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-05-09;17bx00219 ?
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