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30/06/2017 | FRANCE | N°16BX00715

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 30 juin 2017, 16BX00715


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 5 avril 2013 par laquelle la directrice adjointe de la maison centrale de Saint-de-Martin-de-Ré a prononcé son déclassement.

Par un jugement n° 1301245 du 18 décembre 2015, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 février et le 10 décembre 2016, M. C... D..., représenté par MeB..., demande à la cour :<

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1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 18 décembre 2015 ;

2°) d'ann...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 5 avril 2013 par laquelle la directrice adjointe de la maison centrale de Saint-de-Martin-de-Ré a prononcé son déclassement.

Par un jugement n° 1301245 du 18 décembre 2015, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 février et le 10 décembre 2016, M. C... D..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 18 décembre 2015 ;

2°) d'annuler la décision contestée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- la directrice du quartier de la Caserne était incompétente pour signer la décision en litige dès lors qu'il est écroué dans un autre quartier, celui de la Citadelle ;

- la décision contestée est entachée d'un défaut de motivation en fait ;

- la décision repose sur une erreur de fait et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; il ne lui a jamais été reproché, durant trois années, un manque de productivité ; la seule mesure dont il a auparavant fait l'objet constituait un déclassement de trente jours pour absence injustifiée ; l'administration s'est bornée à prendre en compte sa production sur une période très brève de seulement trois semaines ; le document intitulé " activité du détenu ", sur lequel s'est basée l'administration, ne permet pas d'avoir une vision d'ensemble de son travail dès lors que n'y figurent pas les phases d'adaptation et de formation aux différents postes de travail occupés ; il a en effet occupé 5 postes différents sur deux semaines ; ainsi, le jour où sa production a été évaluée à 3 %, il avait occupé 3 postes différents dans la même journée ; durant les semaines 4 et 5, il faisait un essai à l'atelier des polos ; son absence du 14 février 2013 s'explique par le fait qu'il n'a été prévenu que la veille de la reprise du travail ; durant la semaine 8, il a travaillé chaque jour sur un poste différent ; les absences qui lui sont reprochées sont anciennes, remontant à une période où il rencontrait des difficultés d'ordre familial ; durant les semaines 11 et 12, son taux de production a été de 60 et 70 % ; ses passages fréquents à l'infirmerie sont justifiés par son suivi médico-psychologique ; il devait passer chaque matin prendre son traitement à l'infirmerie, rencontrant parfois des temps d'attente longs ; la Commission d'accès aux documents administratifs, saisie par ses soins, n'a pu lui transmettre les fiches de production pour la période de travail antérieure au 13 mars 2013 ainsi que celles concernant les semaines 11 et 12, en raison de leur destruction par l'administration ; il est de ce fait mis dans l'impossibilité de prouver son taux de productivité élevé durant ces deux semaines ;

- le déclassement en litige constitue une sanction déguisée.

Par ordonnance du 12 décembre 2016, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 13 janvier 2017 à 12h00.

Un mémoire a été présenté le 2 juin 2017 par le ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice.

M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 mars 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de procédure pénale ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy,

- et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M.D..., incarcéré depuis le 31 janvier 2006, et écroué à la maison centrale de Saint-Martin-de-Ré depuis le 12 mars 2009, s'est vu infliger, par une décision du 5 avril 2013, une mesure de déclassement de l'emploi qui lui avait été attribué au sein de l'atelier de confection de cet établissement pénitentiaire. Il relève appel du jugement n° 1301245 du 18 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté son recours tendant à l'annulation de cette décision de la directrice adjointe de la maison centrale de Saint-Martin-de-Ré.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Ainsi que l'a relevé le tribunal administratif, MmeA..., directrice adjointe de la maison centrale de Saint-de-Martin-de-Ré, a reçu délégation, par arrêté du 16 juillet 2012 du directeur de cet établissement pénitentiaire, publié le 30 juillet 2012 au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Charente-Maritime et disponible en particulier sous sa forme électronique, à l'effet de signer notamment les décisions de déclassement d'emploi, délégation qui n'est nullement limitée aux décisions concernant les détenus incarcérés au sein du quartier de " La Caserne " dudit établissement. Par suite, le moyen tiré de ce que l'intéressée n'était pas compétente pour prendre la décision contestée du 5 avril 2013 ne peut qu'être écarté.

3. Contrairement à ce que soutient M.D..., la décision attaquée qui relève ses " absences non justifiées " et un " problème de productivité ", est suffisamment motivée en fait.

4. L'article D. 432-4 du code de procédure pénale dispose que : " Lorsque la personne détenue s'avère incompétente pour l'exécution d'une tâche, cette défaillance peut entraîner le déclassement de cet emploi. Lorsque la personne détenue ne s'adapte pas à un emploi, elle peut faire l'objet d'une suspension, dont la durée ne peut excéder cinq jours, afin qu'il soit procédé à une évaluation de sa situation. A l'issue de cette évaluation, elle fait l'objet soit d'une réintégration dans cet emploi, soit d'un déclassement de cet emploi en vertu de l'alinéa précédent. (...). ".

5. Le support d'engagement au travail signé par M. D...le 19 mai 2010 en vue d'exercer un emploi dans l'atelier de confection de la maison centrale de Saint-Martin-de-Ré indique notamment que l'intéressé s'engage à respecter les horaires de travail et à atteindre les " objectifs qualitatifs et quantitatifs exigés ". Or, malgré deux précédentes mesures de déclassement d'emploi provisoires prises le 10 mai 2011 et le 31 mai 2012 au motif tenant à des absences injustifiées, suivies de plusieurs avertissements et " recadrages ", le requérant ne s'est pas présenté pour travailler les 13 juillet 2012 et 14 février 2013. M.D..., qui ne conteste pas la matérialité des faits s'agissant de son absence du 13 juillet 2012, ne justifie pas davantage celle constatée le 14 février 2013 en se bornant à faire valoir qu'il n'avait été prévenu que la veille de ce qu'il devait reprendre le travail. Si le requérant soutient par ailleurs qu'il devait se rendre quotidiennement à l'unité de consultation et de soins ambulatoires afin que lui soit administré un traitement, la décision attaquée est, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, fondée sur les retours tardifs de l'intéressé, faits dont la matérialité n'est pas sérieusement contestée. Enfin, la fiche d'activité établie le 13 mars 2013, qui porte sur la période du 7 janvier au 8 mars 2013, révèle une productivité très insuffisante de l'intéressé. Si M. D...soutient que cette productivité s'explique par ses fréquents changements de poste au sein des ateliers de confection, il ressort cependant des pièces du dossier que l'intéressé justifie d'une expérience de trois années de travail dans ce type d'atelier et rencontre des difficultés importantes d'adaptation à toute nouvelle tâche, ce qu'il a d'ailleurs reconnu. Ainsi, et alors même que sa productivité se serait améliorée postérieurement au 8 mars 2013, ledit document permet d'établir son insuffisante productivité. Dans ces conditions, et contrairement à ce que soutient l'appelant, la décision litigieuse ne repose pas sur des faits inexacts.

6. Compte tenu des faits ci-dessus décrits, la décision attaquée de déclassement d'emploi pour incompétence ne repose pas sur une erreur manifeste d'appréciation.

7. Enfin, si le requérant fait valoir que la décision en litige constitue une sanction déguisée, le détournement de pouvoir allégué n'est toutefois pas établi par les pièces du dossier.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 avril 2013 de la directrice adjointe de la maison centrale de Saint-de-Martin-de-Ré.

Sur les conclusions présentées au titre du 2ème alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

9. L'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées au titre du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D...et au ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 6 juin 2017 à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 30 juin 2017.

Le rapporteur,

Marie-Pierre BEUVE DUPUY Le président,

Aymard de MALAFOSSE Le greffier,

Virginie MARTY La République mande et ordonne au ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

4

N° 16BX00715


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX00715
Date de la décision : 30/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

37-05-02-01 Juridictions administratives et judiciaires. Exécution des jugements. Exécution des peines. Service public pénitentiaire.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre DUPUY
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : LIAUZUN

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-06-30;16bx00715 ?
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