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13/11/2017 | FRANCE | N°15BX00567

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre - formation à 3, 13 novembre 2017, 15BX00567


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I...J...a demandé le 14 juin 2013 au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge des rappels de droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour période du 1er janvier 2006 au 30 novembre 2008 ainsi que des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1300989 du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Pau a partiellement rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 février 2015, M.J..., représenté par Me

G..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 16 décembr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I...J...a demandé le 14 juin 2013 au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge des rappels de droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour période du 1er janvier 2006 au 30 novembre 2008 ainsi que des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1300989 du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Pau a partiellement rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 février 2015, M.J..., représenté par Me G..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 16 décembre 2014 en tant qu'il n'a pas fait intégralement droit à sa demande en décharge des impositions susmentionnées ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités restant en litige.

Il soutient que :

- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors qu'au cours de la vérification sur place, le vérificateur a consulté des documents à usage privé destiné à informer le client sur les frais exposés en faisant appel à un traiteur y compris ceux facturés par d'autres prestataires ; ces documents n'ont aucune valeur comptable ne correspondent pas à des recettes et ne pouvaient donc être utilisés dans le cadre du redressement ;

- le questionnaire adressé à ses clients et à ses fournisseurs par l'administration, dont les questions étaient ambiguës, n'a pas permis de rassembler des informations sur lesquels le service fiscal pouvait se fonder ;

- il n'est pas redevable de la taxe sur la valeur ajoutée pour les prestations effectuées au client " Les vignerons de France " dès lors que ces prestations ont été facturées et payées par son autre établissement " Le Pilota " situé à Pau ;

- l'administration ne pouvait taxer au taux normal son activité de traiteur dès lors qu'il se borne à fournir des repas à ses clients sans autre prestation annexe ; aucun salarié ne travaillait les jours des banquets ; les mini-facturiers sur lesquels s'est fondé le vérificateur n'ont aucune valeur juridique ; le requérant fait état des prestations fournies à sept clients de l'établissement au titre de la période vérifiée pour lesquels il indique avoir uniquement fourni les repas ;

- la pénalité de 40 % appliquée pour manquement délibérée n'est pas justifiée alors que les recettes rectifiées ne s'élèvent qu'à 1 375 euros en 2006 et que la taxe rappelée sur erreur de taux doit entraîner une charge et aucun résultat imposable.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juillet 2015, le ministre des finances et des comptes publics, conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par ordonnance du 15 avril 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 23 mai 2016 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Caroline Gaillard ;

- et les conclusions de Mme Munoz-Pauzies, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. J...exploite en entrepreneur individuel une activité de restauration à l'enseigne " Chez Château " à Esquiule (64) et une activité secondaire de traiteur et de ventes à emporter. Il a fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour la période du 1er janvier 2006 au 30 novembre 2008 à la suite de laquelle, l'administration, après avoir écarté la comptabilité de l'établissement comme dépourvue de valeur probante, a notamment refusé l'application du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée à des livraisons de repas qu'elle a regardées comme étant fournies avec d'autres prestations, imposées au taux normal de TVA et non comme des ventes à emporter, imposées au taux réduit. Par une proposition de rectification du 30 juillet 2009, des rappels de taxes assorties de pénalités ont été notifiés à l'intéressé au titre de la période du 1er janvier 2006 au 30 novembre 2008. M. J...relève appel du jugement du 16 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Pau a partiellement rejeté sa demande en décharge de ces rappels ainsi que des pénalités correspondantes.

Sur la régularité de la procédure :

2. Aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables ". Aux termes de l'article L. 81 du même livre : " Le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette et le contrôle des impôts, d'avoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées. /Le droit prévu au premier alinéa s'exerce quel que soit le support utilisé pour la conservation des documents. ". Aux termes de l'article L. 76 B du même livre : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ".

3. Pour établir la réalité des prestations fournies par le requérant, et en vue de pallier l'imprécision des factures du requérant, l'administration a pu régulièrement exploiter les informations contenues dans des " mini-facturiers " où celui-ci consignait notamment les prestations fournies à ses clients qu'il leur facturait par la suite, des renseignements sur ses fournisseurs, et des informations sur les services fournis par d'autres prestataires au même client, même si ces " mini-facturiers " n'avaient pas la nature de documents comptables. Le service, afin de déterminer le régime de taxe sur la valeur ajoutée à appliquer aux livraisons du requérant, a exercé le droit de communication auprès des clients et des fournisseurs de M. J...conformément à l'article L. 81 du livre des procédures fiscales en leur demandant de fournir des renseignements sur les prestations effectivement fournies par M. J...ou livrées à ce dernier. La circonstance que le questionnaire adressé à certains clients et les réponses obtenues dans l'exercice du droit de communication seraient entachés d'erreurs est sans incidence sur la régularité de la procédure dès lors que M. J...a été informé de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers, qu'il a pu critiquer le contenu du questionnaire et que les documents exploités par le service ont pu être communiqués au requérant à sa demande avant la mise en recouvrement des impositions, ainsi que le prévoit l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, et a ainsi pu critiquer les données sur lesquelles les rectifications ont été fondées.

4. Par suite, il y a lieu d'établir le contenu des prestations fournies par M. J..., qui détermine le bien-fondé du taux de TVA appliqué par l'administration, au vu des informations recueillies par le service telles qu'elles sont critiquées ou infirmées par le requérant.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

5. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) ". Aux termes de l'article 278 dudit code : " Le taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée est fixé à 19,60 % ". Aux termes de l'article 278 bis du code général des impôts : " La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit de 5,50 p. 100 en ce qui concerne les opérations d'achat, d'importation, d'acquisition intracommunautaire, de vente, de livraison, de commission, de courtage ou de façon portant sur les produits suivants : 1° Eau et boissons non alcooliques ; 2° Produits destinés à l'alimentation humaine ".

6. Si les ventes à emporter de produits alimentaires bénéficient du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée, les produits destinés à être consommés sur place comportent une prestation de services relevant du taux normal de taxe sur la valeur ajoutée. Il en est de même lorsque la livraison de ces produits chez le client s'accompagne de la fourniture des installations ou des services nécessaires à permettre leur consommation, lorsque cette fourniture revêt un caractère prépondérant ainsi que lorsque la livraison de ces produits s'accompagne de la vente de vins et que les factures indiquent un prix global sans distinction des denrées alimentaires et du vin.

7. En premier lieu, M. J...soutient que les prestations fournies aux clientsA..., E...C..., H..., E..., D..., B...etF... se sont limités à la fourniture de repas et relèvent donc du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée.

8. Si le requérant soutient que M. A...n'a bénéficié que de repas sans prestation annexe, il résulte de l'instruction que ce dernier a indiqué, en réponse au questionnaire du vérificateur, avoir bénéficié de la mise à disposition de personnel. Il en va de même de la réponse de M.E.... Le requérant ne fournit aucun justificatif permettant de contredire ces affirmations.

9. S'agissant de la prestation effectuée pour le compte de M. C...le 23 juin 2006, l'administration a constaté que la facture de 6 076 euros mentionnait une somme de 600 euros pour le service et que, selon le journal des salaires tenu par M.J..., sept salariés travaillaient ce jour là. Pour contester la réalisation d'une prestation de traiteur, le requérant se borne à produire une attestation de MmeC..., établie pour les besoins de la cause, non accompagnée de la copie d'un document attestant l'identité de son auteur, indiquant que le forfait n'incluait ni la vaisselle, ni le vin, ni le service. Faute pour M. J...de justifier qu'aucun des salariés n'était employé au service de M.C..., il ne peut être admis que le requérant n'aurait livré que des repas.

10. S'agissant de M.H..., si le requérant fait valoir que le service était fourni par un tiers, il résulte de l'instruction que M. J...a procédé à la location de vaisselle à la même date et pour le même nombre de convives, ce qui suffit à établir que ce dernier a également effectué une prestation annexe de vaisselle, en l'absence de tout justificatif permettant d'établir que la vaisselle servait uniquement à contenir les préparations.

11. En revanche, s'agissant de M.D..., il résulte de l'instruction que la prestation réalisée s'est accompagnée de la vente de vins ayant donné lieu à une facturation distincte. Dès lors que l'administration ne justifie de l'existence d'aucune prestation autre que la fourniture des préparations alimentaires, le requérant était en droit de bénéficier du taux réduit de TVA pour la livraison des produits alimentaires faisant l'objet de la facture du 29 septembre 2007.

12. Enfin, pour les prestations facturées à MM. B...etF..., la seule circonstance retenue par l'administration qu'un salarié du requérant a installé le buffet n'est pas de nature à faire regarder comme prépondérante la prestation de service.

13. Dans ces conditions, M. J...est seulement fondé à soutenir que l'administration ne pouvait pas taxer au taux normal de TVA les prestations facturées aux clientsB..., F...etD....

14. En second lieu, M. J...ne conteste pas devant la cour que la prestation fournies à " les Vignerons indépendants de France " lors du congrès qui s'est tenu du 24 au 27 avril 2008 au Palais Beaumont était une prestation de traiteur taxable au taux normal. Mais il affirme qu'elle a été encaissée non par ses soins pour l'établissement " Le Château " mais par son autre établissement " Le Pilota " situé à Pau et exploité en société. Il produit une facture libellée au nom de ce dernier. Toutefois, l'intéressé ne rapporte pas la preuve que le chèque en paiement émis au nom à la fois de M. J...et de l'établissement " Le Pilota " a été effectivement encaissé par la société exploitante, alors au surplus que l'établissement " Chez Château " a comptabilisé en charge les dépenses exposées pour la prestation en litige et qu'il a déduit la taxe sur la valeur ajoutée correspondant à une facture de location de vaisselle émise à la même date et portant sur la location de vaisselle correspondant au même nombre de convives. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a rattaché la prestation en litige à l'activité de l'établissement " Chez Château ".

Sur les pénalités :

15. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) ".

16. Pour justifier la majoration appliquée au rappel de taxe sur la valeur ajoutée en litige, l'administration a relevé que de nombreuses anomalies avaient été constatées dans la comptabilité, entraînant une minoration importante de la taxe sur la valeur ajoutée due par l'établissement, que M. J...connaissait les différents régimes de facturation de ses prestations. L'administration établit ainsi la minoration délibérée de l'imposition et le bien-fondé de la pénalité.

17. Il résulte de ce qui précède que M. J...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée afférentes aux facturations des prestations fournies aux clientsB..., F...etD....

DECIDE :

Article 1er : Les droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée assignés à M. J... au titre de la période du 1er janvier 2006 au 30 novembre 2008 ainsi que les pénalités y afférentes sont réduits à hauteur de l'application du taux réduit de TVA aux prestations facturées à MM.B..., F...etD....

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Pau est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. I...J...et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera délivrée au directeur du contrôle fiscal sud-ouest.

.

Délibéré après l'audience du 11 octobre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

Mme Marianne Pouget, président-assesseur,

Mme Caroline Gaillard, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 13 novembre 2017.

Le rapporteur,

Caroline Gaillard

Le président,

Philippe Pouzoulet

Le greffier,

Florence DeligeyLa République mande et ordonne ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 15BX00567


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX00567
Date de la décision : 13/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Analyses

19-06-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: Mme Caroline GAILLARD
Rapporteur public ?: Mme MUNOZ-PAUZIES
Avocat(s) : MINGINETTE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-11-13;15bx00567 ?
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