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30/11/2017 | FRANCE | N°17BX02507

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 30 novembre 2017, 17BX02507


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 20 avril 2017 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui octroyer un délai de départ volontaire et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1701861 du 25 avril 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26

juillet 2017, M.B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 20 avril 2017 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui octroyer un délai de départ volontaire et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1701861 du 25 avril 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 juillet 2017, M.B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 25 avril 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire français n'est pas suffisamment motivée ;

- cette décision est entachée d'un vice de procédure, faute d'avoir été précédée de la procédure contradictoire prévue par les dispositions des articles L. 211-2 et L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- la décision d'éloignement a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et repose sur une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ; il vit en France depuis le 1er juin 2014 ; il a trouvé un emploi et s'apprêtait à déposer une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié ; il est isolé dans son pays d'origine, n'ayant plus de nouvelle de sa mère et son père étant décédé ;

- la décision lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire est privée de base légale ;

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- cette décision est entachée d'un vice de procédure, faute d'avoir été précédée de la procédure contradictoire prévue par les dispositions des articles L. 211-2 et L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation avant d'édicter ce refus ;

- il ne peut être regardé comme s'étant soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement et ne présente ainsi pas un risque de fuite justifiant le refus de délai de départ volontaire qui lui a été opposé ; le juge des libertés et de la détention l'a d'ailleurs assigné à résidence ;

- la décision fixant le pays de renvoi est privée de base légale ;

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- cette décision est entachée d'un vice de procédure, faute d'avoir été précédée de la procédure contradictoire prévue par les dispositions des articles L. 211-2 et L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et repose sur une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 septembre 2017, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que le requérant ne s'est pas présenté à l'embarquement en vue de l'exécution de la mesure d'éloignement et qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Par ordonnance du 14 septembre 2017, la clôture d'instruction a été reportée au 3 octobre 2017 à 12h00.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 juillet 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., ressortissant de la République démocratique du Congo né le 3 mars 1994, est entré en France le 1er juin 2014 selon ses déclarations. Il a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 9 octobre 2014, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 3 avril 2015. Par un arrêté du 15 octobre 2015, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français ; le recours présenté par M. B...contre ces décisions a été rejeté par des jugements du tribunal administratif de Toulouse des 8 février 2016 et 8 juin 2016. Par un arrêté du 20 mai 2017, le préfet de la Haute-Garonne a pris à son encontre des décisions portant obligation de quitter le territoire français, refus d'octroi d'un délai de départ volontaire et fixant le pays de renvoi. M. B...relève appel du jugement du 25 avril 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 20 avril 2017.

2. En premier lieu, au soutien des moyens tirés de ce que les décisions en litige seraient insuffisamment motivées et auraient été prises à l'issue d'une procédure irrégulière faute de respect de la procédure contradictoire prévues par les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, le requérant n'invoque devant la cour aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas utilement les réponses apportées par le premier juge. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinemment retenus par le tribunal.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

4. M. B...fait valoir qu'il vit en France depuis le 1er juin 2014, qu'il justifie d'une insertion professionnelle et s'apprêtait à déposer une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié, et ajoute qu'il serait isolé dans son pays d'origine, n'ayant plus de nouvelle de sa mère et son père étant décédé. Toutefois, le requérant, entré en France à l'âge de vingt ans, est célibataire et sans enfant et ne justifie d'aucune attache personnelle ou familiale en France. Eu égard à la durée de son séjour en France et à l'existence de liens dans son pays d'origine, et alors même que l'intéressé, titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, justifie d'une insertion professionnelle, la décision l'obligeant à quitter le territoire français n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Pour les mêmes motifs, cette décision d'éloignement ne repose pas sur une erreur manifeste d'appréciation de sa situation.

5. En troisième lieu, compte tenu de ce qui vient d'être dit, le moyen tiré de ce que les décisions refusant à M. B...l'octroi d'un délai de départ volontaire et fixant le pays de renvoi seraient dépourvues de base légale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français litigieuse, ne peut qu'être écarté.

6. En quatrième lieu, aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité ou tout autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où il est légalement admissible. (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...).

7. Il ressort des pièces du dossier que M. B...n'a pas déféré à la décision l'obligeant à quitter le territoire français édictée à son encontre le 15 octobre 2015. Ainsi, et contrairement à ce qu'il soutient, il doit être regardé comme s'étant soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement au sens des dispositions précitées du d) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, c'est par une exacte application des dispositions précitées que le préfet a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire.

8. Enfin, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

9. En se bornant à faire valoir que son père, décédé, a été " vraisemblablement assassiné au cours d'affrontements politiques " et qu'il est dès lors en danger, sans apporter aucune précision ni le moindre commencement de preuve à l'appui de ses affirmations, M. B...n'établit pas être personnellement exposé à des risques de traitements prohibés par les stipulations précitées en cas de retour en République démocratique du Congo. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées ne peut ainsi qu'être écarté. Pour les mêmes raisons, la décision fixant le pays de renvoi n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de M.B....

10. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, par suite, être accueillies.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 26 octobre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 30 novembre 2017.

Le rapporteur,

Marie-Pierre BEUVE DUPUY

Le président,

Aymard de MALAFOSSE

Le greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX02507


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX02507
Date de la décision : 30/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre BEUVE-DUPUY
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : SCP CORMARY et BROCA

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-11-30;17bx02507 ?
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