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14/12/2017 | FRANCE | N°17BX02146

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 14 décembre 2017, 17BX02146


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...F...épouse D...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2016 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1700803 du 26 avril 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 juillet 2017, MmeD..

., représenté par Me M'A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 26 avril 2017 du tr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...F...épouse D...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2016 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1700803 du 26 avril 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 juillet 2017, MmeD..., représenté par Me M'A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 26 avril 2017 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ou à défaut, de réexaminer sa situation et ce, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 80 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 300 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision portant refus de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour sur lequel elle est fondée ; elle est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et méconnait son droit au respect de sa vie privée et familiale ; elle méconnait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 25 septembre 2017, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Par une ordonnance du 11 août 2017, la clôture d'instruction a été définitivement fixée au 29 septembre 2017 à 12h00.

Mme D...été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 juin 2017.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Sylvie Cherrier, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme F... épouseD..., ressortissante marocaine née le 25 juillet 1961 à Casablanca (Maroc), est entrée régulièrement en France en novembre 2014 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour, accompagné de son époux, M. C...D..., et de leur fils. Une autorisation provisoire de séjour lui a été délivrée, valable du 23 février 2016 au 22 août 2016, en raison de l'état de santé de son fils mineur. Le 8 juin 2016, elle a sollicité le renouvellement de cette autorisation auprès des services de la préfecture de la Gironde. Par arrêté du 7 décembre 2016, le préfet de la Gironde a refusé de l'admettre au séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de renvoi. Mme D...relève appel du jugement n° 1700803 du 26 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

2. Aux termes des stipulations de l'article 9 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord ". Selon les dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version en vigueur à la date de la décision en litige : " Sauf si leur présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour est délivrée aux parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, ou à l'étranger titulaire d'un jugement lui ayant conféré l'exercice de l'autorité parentale sur ce mineur, sous réserve qu'ils justifient résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'autorisation provisoire de séjour mentionnée au premier alinéa, qui ne peut être d'une durée supérieure à six mois, est délivrée par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police, dans les conditions prévues au 11° de l'article L. 313-11. Elle est renouvelable et n'autorise pas son titulaire à travailler. Toutefois, cette autorisation peut être assortie d'une autorisation provisoire de travail, sur présentation d'un contrat de travail ". Et, aux termes de l'article L. 313-11 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande en application de celles-ci, de vérifier, au vu l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'enfant mineur intéressé et, en particulier, d'apprécier la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'enfant mineur intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine.

4. Pour refuser de délivrer à Mme D...un titre de séjour portant la mention " accompagnant d'enfant malade ", le préfet de la Gironde s'est fondé sur un avis du médecin de l'agence régionale de santé du 6 octobre 2016 selon lequel l'état de santé de son fils, E...D..., nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, il existe un traitement approprié au Maroc et ce dernier peut voyager sans risque vers son pays d'origine. Pour remettre en cause cet avis, la requérante produit divers certificats médicaux indiquant que son enfant souffre d'une insuffisance motrice d'origine cérébrale entraînant une choréo-athétose avec dystonie, que ce handicap lourd nécessite " des soins multidisciplinaires neuropédiatriques spécifiques pour une durée prévisionnelle minimale de plusieurs années et au mieux en institution spécialisée " et qu'il justifie la prise orale de Xenazine et d'un médicament à base de Scopolamine, qui, selon les attestations postérieures à la décision en litige et émanant du directeur du médicament et de la pharmacie du ministère de la santé marocain, ne seraient pas disponibles au Maroc. Le certificat médical du docteur Deleplanque, rédigé postérieurement à la décision en litige le 1er mars 2017, s'il indique que l'arrêt du traitement médicamenteux n'est pas " recommandé " dès lors que " les effets bénéfiques commencent à se faire sentir " au terme du premier mois, ne permet toutefois pas de conclure que, contrairement à ce qu'a estimé le médecin de l'agence régionale de santé, un défaut de traitement serait de nature à entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par ailleurs, les attestations du ministère de la santé marocain ainsi que le certificat du 23 mars 2017 affirmant que le traitement par Xénazine " n'a pas d'équivalent en termes d'efficacité ", ne permettent pas tenir pour établi qu'il n'existerait pas, au Maroc, contrairement à ce qu'a relevé le médecin de l'agence régionale de santé, un traitement approprié à la pathologie dont souffre l'enfant de MmeD.... Par suite, la décision refusant à Mme D... le titre de séjour qu'elle avait sollicité n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation de l'intéressée.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

5. Il résulte de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision de refus de séjour à l'encontre de la mesure d'éloignement dont elle fait l'objet.

6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1.- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2.- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

7. Mme D...soutient qu'elle n'a plus aucune attache familiale effective au Maroc dès lors que son fils aîné suit des études en Allemagne, que son époux est titulaire d'une pension de retraite en tant qu'ancien ingénieur marocain, que le reste de sa famille vit en France et qu'elle ne représente aucune menace pour l'ordre public.

8. Il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme D...est entré récemment en France, à l'âge de 54 ans. Contrairement à ce qu'elle soutient, elle dispose d'attaches familiales au Maroc où résident a minima ses quatre frères et soeurs. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que la cellule familiale de Mme D...ne pourrait se reconstituer au Maroc. Dans ces conditions, et nonobstant le fait que l'époux de Mme D... dispose d'une pension de retraite lui permettant de subvenir aux besoins de sa famille, la décision litigieuse n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but poursuivi, au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de MmeD....

9. Dans la mesure où, comme il vient d'être dit, il ne ressort pas des pièces du dossier que le jeune E...ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé au Maroc, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut être accueilli.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme F...épouse D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 décembre 2016 par lequel le préfet de la Gironde a rejeté sa demande de délivrance de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par voie de conséquence il y a lieu de rejeter ses conclusions en injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme F...épouse D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...F...épouse D...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 15 novembre 2017 à laquelle siégaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

Mme Sylvie Cherrier, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 14 décembre 2017.

Le rapporteur,

Sylvie CHERRIERLe président,

Aymard de MALAFOSSELe greffier,

Christophe PELLETIER La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX02146


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX02146
Date de la décision : 14/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Sylvie CHERRIER
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : M'BELO LAETITIA

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-12-14;17bx02146 ?
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