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18/12/2017 | FRANCE | N°16BX01411

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 18 décembre 2017, 16BX01411


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler la décision du 15 juillet 2013 par laquelle le maire de la commune de Guéret a refusé de lui accorder le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire et de condamner la commune de Guéret à lui verser ladite bonification à compter du 1er janvier 2008.

Par un jugement n° 1400298 du 3 mars 2016, le tribunal administratif de Limoges a annulé la décision contestée du 15 juillet 2013 et condamné la commune de Guéret à verser à

M. D...la nouvelle bonification indiciaire, au taux de dix points, à compter du 1er j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler la décision du 15 juillet 2013 par laquelle le maire de la commune de Guéret a refusé de lui accorder le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire et de condamner la commune de Guéret à lui verser ladite bonification à compter du 1er janvier 2008.

Par un jugement n° 1400298 du 3 mars 2016, le tribunal administratif de Limoges a annulé la décision contestée du 15 juillet 2013 et condamné la commune de Guéret à verser à M. D...la nouvelle bonification indiciaire, au taux de dix points, à compter du 1er janvier 2008.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 avril 2016, la commune de Guéret, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 3 mars 2016 du tribunal administratif de Limoges ;

2°) de mettre à la charge de M. D...la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a jugé que " la fin de non-recevoir tirée du défaut de chiffrage des conclusions indemnitaires de M. D...devait être écartée au motif que le requérant avait entendu demander le versement de la nouvelle bonification indiciaire de dix points d'indice majoré pour la période du 1er janvier 2008 au 7 février 2014, date d'enregistrement de sa requête, alors que, dans son courrier du 4 juillet 2013 valant réclamation préalable, l'intéressé n'a pas chiffré ses conclusions indemnitaires ;

- sur le fond, le Conseil d'Etat a rappelé, dans un arrêt n° 284380 du 4 juin 2007, que les dispositions du décret du 24 juillet 1991 qui ouvrent droit au bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire à raison de l'exercice à titre principal de fonctions d'accueil du public doivent être interprétées comme réservant ce droit aux agents dont l'emploi implique qu'ils consacrent plus de la moitié de leur temps de travail total à des fonctions d'accueil du public et que, pour l'application de cette règle, il convient de prendre en compte les heures d'ouverture au public du service, si l'agent y est affecté dans des fonctions d'accueil du public, ainsi que, le cas échéant, le temps passé par l'agent au contact du public en dehors de ces périodes, notamment à 1'occasion de rendez-vous avec les administrés ;

- en outre, il ressort d'une réponse du ministre de la fonction publique et de la réforme de 1'Etat en date du 5 février 2001 venant préciser ce que recouvre concrètement la notion d' " accueil du public " (Q. n° 53255 de M. B...E..., Réponse JOAN 5 février 2001, p. 828) qu'elle recouvre " les fonctions conduisant les agents qui les exercent à avoir des contacts directs et permanents avec le public et qui constituent l'essentiel de leur activité, comme, notamment, les emplois de guichet " ;

- en l'espèce, il ressort très clairement de la fiche de présentation de son poste et de son planning que les activités liées au secrétariat / bureau consistant, notamment, dans le suivi et mise en place des projets CMEJ, la préparation d'activités, et la rédaction de compte rendus et de courriers, représentent 16 h 30 du temps de travail de M.D..., contre 6 h 30 en ce qui concerne l'accueil public et l'accès au local ;

- ainsi, le temps effectivement passé par l'intéressé au contact du public apparaît insuffisant pour le faire regarder comme exerçant des fonctions d'accueil du public durant la majeure partie de son temps de travail ;

- à cet égard, la mission confiée à l'intéressé ne consiste pas à accueillir du public, au sens de donner des renseignements ou encore, aider à entreprendre des démarches administratives, mais seulement d'animer ce lieu au vu d'un projet pédagogique et si la mission d'accueil est évoquée dans sa fiche de poste, il n'en demeure pas moins qu'elle se rapporte davantage à l'animation, coeur du métier des adjoints d'animation ;

- dans un arrêt N° 14NT02729 du 3 mars 2016, la cour administrative d'appel de Nantes a jugé que le nombre d'heures travaillées " face au public " ne sauraient être équivalentes à l'exercice de mission d'accueil du public ;

- or en l'espèce, le tribunal a extrapolé les missions d'accueil, stricto sensu, confiées à M. D...à celles où ce dernier a un simple " contact avec le public " ;

- par ailleurs, dès lors que, si l'on se réfère à l'article R. 227-12 du code de l'action sociale et des familles, il existe une distinction entre les fonctions d'animation et les fonctions d'accueil, les fonctions d'animation exercées par l'intéressé ne sauraient être comptabilisées dans le cadre de ses activités d'accueil, et ce, quand bien même il serait " en contact avec le public " lors de ses activités d'animateur ;

- à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour ferait droit à la demande de l'intéressé, il conviendra de constater que l'exception quadriennale joue en l'espèce et fait, en tout état de cause, obstacle à ce que ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 15 juillet 2013 concernant la nouvelle bonification indiciaire soient accueillies pour les années antérieures.

Par ordonnance du 1er juin 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 3 juillet 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;

- la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991 modifiée ;

- le décret n° 2006-779 du 3 juillet 2006 ;

- le décret n° 2006-1693 du 26 décembre 2006 modifié ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Axel Basset,

- et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par une lettre du 4 juillet 2013, M.D..., fonctionnaire titulaire du grade d'adjoint territorial d'animation de 2ème classe, exerçant les fonctions d'adjoint animateur au sein du service jeunesse - citoyenneté - cohésion sociale de la commune de Guéret depuis janvier 2007, a sollicité le versement de la nouvelle bonification indiciaire (NBI), à hauteur de dix points d'indice majoré, en se prévalant de ce qu'il exerçait des fonctions d'accueil à titre principal. M. D...a demandé au tribunal administratif de Limoges, d'une part, d'annuler la décision du 15 juillet 2013 par laquelle le maire de la commune de Guéret a refusé de faire droit à cette demande et, d'autre part, de condamner la commune de Guéret à lui verser cette bonification à laquelle il estime avoir droit à compter du 1er janvier 2008. La commune de Guéret relève appel du jugement du 3 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Limoges a fait droit à ces demandes.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 27 de la loi du 18 janvier 1991 susvisée : " I. La nouvelle bonification indiciaire des fonctionnaires instituée à compter du 1er août 1990 est attribuée pour certains emplois comportant une responsabilité ou une technicité particulière, dans des conditions fixées par décret. (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 3 juillet 2006 susvisé : " Une nouvelle bonification indiciaire, prise en compte pour le calcul de la retraite, est versée mensuellement aux fonctionnaires territoriaux exerçant une des fonctions figurant en annexe (...) au présent décret. ". Le point 33 de l'annexe à ce décret désigne, parmi les fonctions ouvrant droit au versement d'une nouvelle bonification indiciaire de dix points majorés, les " fonctions d'accueil exercées à titre principal (...) dans les communes de plus de 5 000 habitants (...) ". D'une part, il résulte de ces dispositions que le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire est lié non au corps d'appartenance ou au grade des fonctionnaires ou encore à leur lieu d'affectation, mais aux seules caractéristiques des emplois occupés, au regard des responsabilités qu'ils impliquent ou de la technicité qu'ils requièrent. D'autre part, les dispositions du décret n° 2006-779 du 3 juillet 2006 qui ouvrent droit au bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire à raison de " l'exercice à titre principal de fonctions d'accueil du public " doivent être interprétées comme réservant ce droit aux agents dont l'emploi implique qu'ils consacrent plus de la moitié de leur temps de travail total à des fonctions d'accueil du public. Pour l'application de cette règle, il convient de prendre en compte les heures d'ouverture au public du service, si l'agent y est affecté dans des fonctions d'accueil du public, ainsi que, le cas échéant, le temps passé par l'agent au contact du public en dehors de ces périodes, notamment à l'occasion de rendez-vous avec les administrés.

3. L'article 3 du décret du 22 décembre 2006 susvisé dispose : " Les membres du présent cadre d'emplois interviennent dans le secteur périscolaire et dans les domaines de l'animation des quartiers, de la médiation sociale, du développement rural, de la politique du développement social urbain et de l'organisation d'activités de loisirs. Ils peuvent intervenir au sein de structures d'accueil ou d'hébergement. / Les adjoints territoriaux d'animation de 2e classe ont vocation à être placés sous la responsabilité d'un adjoint territorial d'animation des grades supérieurs ou d'un animateur territorial et participent à la mise en oeuvre des activités d'animation. / Les adjoints territoriaux d'animation de 1re classe ainsi que les adjoints territoriaux d'animation principaux de 2e et de 1re classe mettent en oeuvre, éventuellement sous la responsabilité d'un animateur territorial, des activités nécessitant une compétence reconnue. Dans le domaine de la médiation sociale, les adjoints territoriaux d'animation peuvent participer, sous la responsabilité d'un animateur territorial ou d'un agent de catégorie A et en collaboration avec les agents des services intervenant dans ce domaine, aux actions de prévention des conflits ou de rétablissement du dialogue entre les personnes et les institutions dans les espaces publics ou ouverts au public ".

4. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir de former sa conviction sur les points en litige au vu des éléments versés au dossier par les parties.

5. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de la fiche de poste de M. D..., que " placé sous la responsabilité du chef de service, [l'intéressé] sera en charge du fonctionnement de la commission du conseil municipal d'enfants et viendra en appui sur les actions du conseil local de jeunes ; de plus, il aura pour mission l'organisation de l'accueil et des animations en lien avec le projet pédagogique du local jeunes. Il assurera l'encadrement des groupes lors des congés scolaires ". Cette même fiche de poste précise que " les actions liées à ses missions " consistent, " pour le CMEJ, [en l'] organisation, [le] suivi et [les] animations des commissions et des projets, [en l'accompagnement et la réalisation des] actions émanant du CMEJ et [le] suivi administratif. / Pour le secteur jeunesse : assurer l'accueil des jeunes adolescents sur leur temps péri et extra-scolaire. Préparer et encadrer des activités socio-éducatives en direction des 11-17 ans. Accompagner et suivre les projets et actions en direction des jeunes. / Autres activités : participer à des animations transversales de la direction SJC ". Si, ainsi que l'a relevé le tribunal, de telles missions et activités impliquent pour M. D...un contact avec le public adolescent dans le cadre de sa prise en charge quotidienne, il ressort toutefois du planning de travail de l'intéressé hors vacances scolaires (36 heures / semaine), dont les quotités horaires qu'il récapitule ne sont d'ailleurs pas contestées par M.D..., qui n'a produit aucun mémoire en défense en appel, que les quatre grands types de tâches qui lui sont imparties se répartissent de la manière suivante : 1. " secrétariat / bureau (suivi et mise en place des projets CMEJ, préparations d'activités, compte-rendus, courriers) " = 16 h 30 ; 2. " accueil public, accès au local jeune (dialogue, écoute, jeux libres, accompagnement de projets...) " = 6 h 30 ; 3. " ALSH ado. (animations, encadrement, règles de sécurité...) " = 9 h 00 ; 4. activité péri-éducative (activité d'enseignement, cycle d'apprentissage...) = 4 h 00. Ainsi que le fait valoir à juste titre la commune de Guéret, les tâches de " secrétariat / bureau (16 h 30) ne sont pas susceptibles de se rattacher aux fonctions d'accueil du public au sens du décret du 3 juillet 2006. Par ailleurs, la commune appelante fait valoir sans aucun contredit de M. D...que les deux catégories de tâches " ALSH ado. " (9 h 00) et " activité péri-éducative " (4 h 00) ne consistent pas pour l'intéressé à accueillir du public mais, uniquement, à animer ce lieu au vu d'un projet pédagogique. Les pièces produites au dossier, qui ne permettent pas de déterminer si ces deux dernières activités impliquent à titre exclusif un accueil du public, ne contredisent pas cette affirmation de la commune. Ainsi, et contrairement à ce qu'ont relevé les premiers juges, il n'est pas établi que M. D...se consacrerait à titre principal, c'est-à-dire au moins 50 % de son temps de travail, à des fonctions d'accueil du public au sens des dispositions, précitées au point 2, du décret du 3 juillet 2006. Il s'ensuit qu'en refusant de lui accorder le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire, par la décision contestée du 15 juillet 2013, le maire de la commune de Guéret n'a pas inexactement qualifié les faits de l'espèce ni, davantage, commis d'erreur d'appréciation.

6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance de M.D..., que la commune de Guéret est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a annulé la décision contestée du 15 juillet 2013 et prononcé sa condamnation à verser à l'intéressé la nouvelle bonification indiciaire, au taux de dix points, à compter du 1er janvier 2008.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances particulières de l'espèce, de mettre à la charge de M. D...la somme que la commune de Guéret demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1400298 du 3 mars 2016 du tribunal administratif de Limoges est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Limoges est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Guéret et M. C...D....

Délibéré après l'audience du 27 novembre 2017, à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Gil Cornevaux, président-assesseur,

M. Axel Basset, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 décembre 2017.

Le rapporteur,

Axel BassetLe président,

Pierre LarroumecLe greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

2

N° 16BX01411


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 16BX01411
Date de la décision : 18/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération. Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Axel BASSET
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : CLERC

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-12-18;16bx01411 ?
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