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18/12/2017 | FRANCE | N°16BX01707

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 18 décembre 2017, 16BX01707


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Relais FNAC a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 21 mars 2013 par laquelle l'inspectrice du travail a refusé d'autoriser le licenciement de M. F...C..., ensemble la décision du 25 septembre 2013, du ministre chargé du travail confirmant cette décision du 21 mars 2013 et rejetant le recours hiérarchique de la SAS Relais FNAC.

Par un jugement n° 1305295 du 14 avril 2016 le tribunal administratif de Toulouse a annulé les décisions des 21 mars et 25 septembre

2013.

Procédures devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 23 mai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Relais FNAC a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 21 mars 2013 par laquelle l'inspectrice du travail a refusé d'autoriser le licenciement de M. F...C..., ensemble la décision du 25 septembre 2013, du ministre chargé du travail confirmant cette décision du 21 mars 2013 et rejetant le recours hiérarchique de la SAS Relais FNAC.

Par un jugement n° 1305295 du 14 avril 2016 le tribunal administratif de Toulouse a annulé les décisions des 21 mars et 25 septembre 2013.

Procédures devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 23 mai 2016 sous le n° 16BX01707, M. F...C..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 14 avril 2016 ;

2°) de rejeter la demande de la société Relais FNAC présentée devant le tribunal administratif de Toulouse ;

3°) de mettre à la charge de la SAS Relais Fnac la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- qu'il a été recruté par la FNAC en 1989 et travaille comme vendeur au service après-vente de l'établissement FNAC Micro de Toulouse, depuis 2000 ;

- son travail s'est déroulé sans problème jusqu'à la période d'août 2010 à partir de laquelle il a fait l'objet de quatre sanctions disciplinaires ;

- contrairement à ce que soutient la FNAC, il n'a jamais été animé par une intention frauduleuse, et sa version des faits n'a jamais varié ;

- après la pause déjeuner, il a repris le travail à 13 heures et est resté à son poste de travail jusqu'à 15 heures ;

- pour prendre sa pause cigarette, il passe devant le service du stock, et c'est pourquoi il a récupéré les produits litigieux, composés de deux enceintes et d'une mini-chaîne, au SAV, pour les déposer au service du stock, mais ce dernier étant fermé, il a déposé les produits au poste de sécurité, mais a finalement oublié de les récupérer ; les produits étaient déposés dans deux cabas portant la mention " D3E3 ", donc en vue de leur destruction ;

- ces deux enceintes qui appartenaient à un ensemble de home cinéma étaient défectueuses et avaient fait l'objet d'un remboursement du client, la FNAC ayant été remboursée par le fabricant, qui n'a pas réclamé l'envoi de ces deux enceintes ;

- quand il a été interrogé par son supérieur hiérarchique M.D..., il a indiqué qu'il destinait ce matériel à la destruction par le service Stocks, même s'il reconnait qu'il n'a pas sollicité l'accord de M. D...pour cette destruction ; il n'a jamais déclaré qu'il aurait eu l'intention de s'approprier ces produits ;

- les enceintes n'étaient pas enregistrées dans le stock, et la minichaine était hors service et d'une ancienneté supérieure à cinq ans ;

- le témoignage de M.A..., l'agent de sécurité, ne peut être retenu, dès lors qu'il ne respecte pas les conditions de l'article 202 du code de procédure civile et que ce témoignage est de toute façon mensonger dès lors que M. A...a été fautif, pour ne pas avoir demandé à M. C... des justificatifs de facture d'achat ni de bon de sortie ou de bon de circulation du matériel entreposé dans le local de sécurité ;

- le témoignage de M.D..., son supérieur hiérarchique, ne peut non plus être retenu, dès lors qu'il ne respecte pas les conditions de l'article 202 du code de procédure civile et que ce témoignage n'est pas apparu initialement, et dès lors qu'il était fautif, pour ne pas avoir demandé à M. C...des justificatifs de facture d'achat ni de bon de sortie ou de bon de circulation du matériel entreposé dans le local de sécurité ;

- en ce qui concerne les antécédents disciplinaires qui lui sont opposés, ils reposent essentiellement sur des dépassements non autorisés du plafond (de 1 000 euros), des remboursements des clients et sur la disparition dans les stocks d'une station météo, mais qui a finalement été retrouvée ;

- les sanctions doivent ainsi que le rappellent les décisions en litige, être proportionnées aux faits reprochés ;

- par ailleurs, son projet de licenciement s'inscrit dans le cadre d'une réduction des effectifs de la part de la FNAC et de l'intervention d'un plan de sauvegarde de l'emploi ;

- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, les matériels entreposés n'étaient pas en bon état de fonctionnement ;

- le matériel n'était pas dissimulé, mais comme le montrent les photographies, seulement posé sans être caché, dans des sacs ;

- il n'a pas, notamment lors de l'entretien préalable, reconnu les faits, alors qu'il a subi devant le comité d'établissement, un véritable interrogatoire de police ;

- dans le PV du comité d'établissement, il est indiqué que M. C...a expliqué que s'il a changé de version des faits, c'était pour infléchir la position de M.G..., le directeur.

Par un mémoire enregistré le 19 mai 2017, la ministre du travail conclut aux mêmes fins que son mémoire produit en première instance et par les mêmes moyens.

II. Par une requête enregistrée le 17 juin 2016, sous le n° 16BX01987, M. F... C..., représenté par MeB..., demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement n° 1305295 du 14 avril 2016 du tribunal administratif de Toulouse.

Il soutient que :

- il présente des moyens sérieux dans sa requête au fond et que par ailleurs au sens de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, l'exécution du jugement aurait des conséquences difficilement réparables dès lors que son salaire est de 1 500 euros par mois, celui de son épouse, de 1 000 euros par mois, que le couple a trois enfants, dont une fille qui est à leur charge et qui fait des études d'infirmière et que le couple doit rembourser mensuellement la somme de 750 euros au titre d'un prêt immobilier.

Par un mémoire en défense enregistré le 19 juillet 2016, la société Relais FNAC, représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M.C..., la somme de 1 500 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que M. C...ne développe pas au sens de l'article R. 811-17 du code de justice administrative de moyens sérieux d'annulation et ne justifie pas de conséquences difficilement réparables du fait de l'exécution du jugement du 14 avril 2016 du tribunal administratif de Toulouse.

Par une ordonnance du 4 mai 2017 la clôture de l'instruction a été fixée au 6 juin 2017.

Un mémoire présenté par la ministre du travail a été enregistré le 20 novembre 2017.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pierre Bentolila,

- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,

- et les observations de MeE..., représentant la société Relais FNAC.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Relais FNAC a sollicité le 27 février 2013, de l'inspection du travail l'autorisation de licencier pour faute M. F... C..., vendeur au service après-vente de l'établissement FNAC Micro de Toulouse et salarié protégé, et par une décision du 21 mars 2013, l'inspectrice du travail a refusé d'autoriser le licenciement de M.C.... Par une décision du 25 septembre 2013, le ministre chargé du travail a confirmé cette décision du 21 mars 2013 et a rejeté le recours hiérarchique de la SAS Relais FNAC. Par un jugement n° 1305295 du 14 avril 2016 le tribunal administratif de Toulouse a annulé les décisions des 21 mars et 25 septembre 2013. M. F...C...relève appel du jugement du 14 avril 2016 du tribunal administratif de Toulouse et en demande le sursis à exécution.

2. Les requêtes n°s 16BX01707 et 16BX01987 sont relatives à la situation d'un même requérant et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur le bien-fondé du jugement et de la décision en litige :

3. En vertu des dispositions de l'article L. 2411-3 du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives, bénéficient, dans l'intérêt des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, et ne peuvent être licenciés qu'avec l'autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution du mandat dont il est investi.

4. En premier lieu, contrairement à ce que soutient M.C..., les attestations des 8 février 2013 de M.A..., agent de sécurité, et de M.D..., supérieur hiérarchique de M. C..., du 5 mars 2013, alors même qu'elles ne respectent pas toutes les conditions de forme de l'article 202 du code de procédure civile, peuvent être prises en compte.

5. En deuxième lieu, en ce qui concerne la matérialité des faits, l'attestation de M. A..., du 8 février 2013 indique que le 8 février 2013, M. C...a déposé dans le local de sécurité " deux sacs contenant une chaine hifi Pionner, et deux enceintes Samsung ". Selon cette attestation : " François (C...) m'a dit que ces sacs étaient à lui et qu'il les récupérerait ce soir. Le PC sécurité se trouve après les barrières anti-vol de la sortie du personnel ". Dans son attestation du 5 mars 2013, M.D..., supérieur hiérarchique de M. C...indique avoir constaté la présence des sacs le 8 février 2013 vers 14 h 15. M. C...soutient que le témoignage de M. A...serait mensonger ce qui serait selon lui établi par le fait que M. A...ne lui aurait pas demandé de justificatifs quant à la destination des matériels quand il a déposé ses sacs. Mais la circonstance que M.A..., ce qui n'est pas contesté, n'ait pas demandé d'explications à M. C..., ne permet pas de considérer que son témoignage serait mensonger. M.C..., qui a ainsi que l'ont relevé les premiers juges, changé sa verion des faits lors de sa présentation devant le comité d'établissement, soutient que le 8 février 2013 à 15 heures, lorsqu'il a souhaité prendre une pause cigarette à l'extérieur de l'établissement, il a amené les sacs dont il ne conteste pas qu'ils contenaient du matériel hifi et audio, en vue de les laisser à son passage devant la pièce de stockage, mais que cette pièce étant close, il a laissé les sacs au poste de sécurité se trouvant après les barrières anti-vol de la sortie du personnel avec l'intention de les porter plus tard vers la pièce de stockage pour leur destruction. Mais ces affirmations, contredites par les attestations produites par M. A...et par M. D..., ne sont étayées par aucun commencement de preuve émanant du requérant lui-même ou d'un tiers, alors que par ailleurs le matériel se trouvant dans ces sacs ne portait pas les identifiants de matériels destinés à la destruction contrairement à ce qu'imposaient les procédures internes à la Fnac Relais. Il ressort des pièces du dossier, que contrairement à ce que soutient M.C..., il avait l'intention de soustraire ces matériels, lesquels lors de l'enquête contradictoire devant l'inspecteur du travail ont été branchés et testés, ce qui a permis de constater leur bon état de fonctionnement, et le fait qu'ils n'étaient pas dénués de valeur marchande, la FNAC indiquant dans sa requête devant le tribunal administratif, sans être sérieusement contredite, que leur valeur était de 200 euros. La circonstance invoquée par M. C...selon laquelle ce matériel avait été remboursé à la FNAC par le fabricant alors que la FNAC avait remboursé le client, et que le fabricant aurait négligé d'en demander la récupération, se trouve sans incidence sur le fait que M. C...avait l'intention de le soustraire frauduleusement à son avantage.

6. Il résulte de ce qui précède, que comme l'ont considéré à bon droit les premiers juges, M. C...qui avait fait l'objet de plusieurs sanctions antérieures, dont un avertissement le 27 août 2010, pour disparition de son stock, d'une " station Météo France ", a failli aux obligations imparties par ses fonctions de vendeur réceptionniste expérimenté devant assurer l'intégrité physique du stock et a donc commis une faute d'une gravité suffisante justifiant son licenciement. Dans ces conditions, en dépit de son ancienneté dans l'entreprise, M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse, par son jugement du 14 avril 2016 a annulé pour erreur d'appréciation les décisions des 21 mars et 25 septembre 2013, de l'inspecteur du travail et du ministre du travail, refusant d'autoriser le licenciement pour faute grave de M.C....

Sur la requête à fins de sursis à exécution :

7. Compte tenu de ce que la cour statue sur le fond sur la requête de M. C...la requête n° 16BX01987 à fins de sursis à exécution présentée par M. C...est devenue sans objet.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que SAS Relais FNAC qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à M.C..., la somme qu'il réclame sur le fondement de ces dispositions. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au bénéfice de la société Fnac Relais.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 16BX01987 à fins de sursis à exécution présentée par M.C....

Article 2 : La requête au fond n° 16BX01707 présentée par M. C...est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par la société Relais Fnac sur le fondement de l'article L761-1 du code de justice administratif sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. F...C..., à la FNAC et à la ministre du Travail.

Délibéré après l'audience du 27 novembre 2017, à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Pierre Bentolila, premier conseiller,

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 décembre 2017.

Le rapporteur,

Pierre BentolilaLe président,

Pierre LarroumecLe greffier,

Cindy Virin La République mande et ordonne à la ministre du travail, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

2

N°s 16BX01707, 16BX01987


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 16BX01707
Date de la décision : 18/12/2017
Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-07-01-04-02 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour faute.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Pierre BENTOLILA
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : ESPLAS

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-12-18;16bx01707 ?
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