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28/12/2017 | FRANCE | N°17BX02597

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 28 décembre 2017, 17BX02597


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...C...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2016 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à défaut de se conformer à ladite obligation.

Par un jugement n°1604976 du 4 juillet 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la c

our :

Par une requête, enregistrée le 2 août 2017, M.C..., représenté par MeD..., demande à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...C...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2016 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à défaut de se conformer à ladite obligation.

Par un jugement n°1604976 du 4 juillet 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 août 2017, M.C..., représenté par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 4 juillet 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 29 juillet 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, subsidiairement, de désigner un médecin agréé afin de trancher la question de la disponibilité des soins que nécessite son état de santé dans son pays d'origine, ou à défaut, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 800 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'auteur de l'acte contesté n'était pas compétent ;

- l'arrêté est entaché d'un défaut de motivation ;

- le refus d'admission au séjour méconnaît les stipulations du 7° de

l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

- les décisions portant refus d'admission au séjour et l'obligeant à quitter le territoire français méconnaissent l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la mesure d'éloignement est privée de base légale du fait de l'illégalité de la décision de refus d'admission au séjour ;

- la décision fixant le pays de renvoi est privée de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant refus d'admission au séjour.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2017, le préfet de la

Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête sont infondés.

Par ordonnance du 18 août 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 octobre 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A...a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., ressortissant algérien né le 22 avril l971, est entré en France en décembre 2015 sous couvert d'un passeport algérien revêtu d'un visa Schengen de 30 jours délivré

le 11 novembre 2015 par le consulat d'Espagne à Oran, valable du 25 novembre 2015 au

24 février 2016. Le 25 janvier 2016, il a demandé son admission au séjour en qualité d'étranger malade. Cette demande a été rejetée par un arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 29 juillet 2016 qui a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et de la fixation du pays de renvoi. M. C...relève appel du jugement du 4 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 juillet 2016.

Sur la légalité de l'arrêté du 29 juillet 2016 :

En ce qui concerne l'arrêté pris dans son ensemble :

2. En premier lieu, par arrêté du 5 février 2016, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Haute-Garonne du même jour, le préfet de la

Haute-Garonne a donné délégation à M. Stéphane Daguin, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer toutes décisions " relevant des attributions de l'Etat dans le département de

la Haute-Garonne, à l'exception des arrêtés de conflit ". Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée manque en fait et doit être écarté.

3. En second lieu, l'arrêté contesté mentionne, avec une précision suffisante pour permettre à M. C...d'en comprendre les motifs et, dépourvue de caractère stéréotypé, les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement des différentes décisions qu'il comporte. Par suite, ce moyen doit être écarté.

En ce qui concerne le refus d'admission au séjour :

4. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien

du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (...) ". Aux termes de

l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants algériens : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...)". Et aux termes de l'article 4 de

l'arrêté du 9 novembre 2011 : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; / - la durée prévisible du traitement. (...) "

5. Il résulte de ces stipulations et dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui en fait la demande au titre des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment au coût du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.

6. Si M. C...soutient qu'il souffre d'otites chroniques bilatérales dont une otite chronique cholestéatomateuse de l'oreille droite, d'une forte myopie et d'une cataracte des deux yeux, l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 8 mars 2016 indique que l'état de santé de M. C...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il existe un traitement approprié dans son pays d'origine et que le traitement doit être poursuivi pendant une durée indéterminée. Le certificat médical établi le 4 novembre 2015 par un médecin spécialiste que M. C...verse au dossier se borne à indiquer que l'intéressé nécessite une prise en charge chirurgicale et préconise le déroulement de celle-ci en Espagne eu égard à la " compétence remarquable des cliniques espagnoles dans le domaine de l'ORL ". Ce document n'est ainsi pas susceptible d'établir que M. C...ne pourrait avoir effectivement accès au traitement approprié à son état de santé en Algérie, pas plus que les autres certificats médicaux produits à l'instance, notamment ceux du Dr B...qui, s'ils affirment que " les pathologies ophtalmologiques et ORL ne sont pas opérables dans le pays d'origine ", sont peu circonstanciés sur ce point. Au surplus, M. C...qui a demandé la délivrance d'un certificat de résidence algérien en raison de son état de santé peu de temps après son entrée sur le territoire français, ne justifie pas d'une résidence habituelle en France à la date de l'arrêté litigieux. Dans ces conditions, M. C...n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait méconnu les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien.

7. Le moyen tiré de ce que le refus d'admission au séjour méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre d'une décision qui, par elle-même, n'implique pas le retour de l'intéressé dans son pays d'origine.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

8. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus d'admission au séjour à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

9. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

10. M. C...est entré récemment en France à l'âge de quarante-quatre ans et a ainsi passé l'essentiel de son existence dans son pays d'origine. De plus, il ressort des pièces du dossier que M. C...possède des attaches familiales fortes en Algérie où résident son épouse, son père et sa deuxième soeur. Si M. C...fait valoir le soutien matériel et moral de sa soeur aînée qui l'accompagne lors de ses rendez-vous médicaux, cette circonstance ne peut suffire à établir qu'il aurait été porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquelles la décision litigieuse a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

11. La décision portant obligation de quitter le territoire ne fixe pas, par elle-même, le pays de renvoi de cette mesure d'éloignement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme est inopérant.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

12. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant refus d'admission au séjour à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 4 juillet 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter d'une part les conclusions présentées par l'appelant aux fins d'injonction et d'astreinte, d'autre part, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Didier Salvi, président,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller,

Mme Aurélie Chauvin, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 décembre 2017

L'assesseur le plus ancien,

Manuel Bourgeois

Le président-rapporteur,

Didier A...Le greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX02597


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX02597
Date de la décision : 28/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : ESCUDIER

Origine de la décision
Date de l'import : 09/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-12-28;17bx02597 ?
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