La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/03/2018 | FRANCE | N°16BX00344

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre - formation à 3, 30 mars 2018, 16BX00344


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure : ,

M. D...A...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 21 mai 2013 par lequel le préfet de la Vienne a autorisé Mme E...C...à exploiter 5,30 hectares de terres supplémentaires à Nueil-Sous-Faye.

Par un jugement n° 1301533 du 26 novembre 2015, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 janvier 2016, M.A..., représenté par la SCP Lacoste-Plat-B..., société d'avocats, demand

e à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers daté du 26 novembr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure : ,

M. D...A...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 21 mai 2013 par lequel le préfet de la Vienne a autorisé Mme E...C...à exploiter 5,30 hectares de terres supplémentaires à Nueil-Sous-Faye.

Par un jugement n° 1301533 du 26 novembre 2015, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 janvier 2016, M.A..., représenté par la SCP Lacoste-Plat-B..., société d'avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers daté du 26 novembre 2015 ainsi que l'arrêté du 21 mai 2013 autorisant Mme C...à exploiter les terres en litige ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté du 21 mai 2013 est dépourvu de motivation dès lors que le préfet doit rechercher en quoi la situation du demandeur par rapport à celle de l'exploitant en place justifie l'octroi de l'autorisation d'exploiter ; le préfet n'a tenu compte ni du critère de viabilité des exploitations, ni des références de production ou droits à aide, ni de l'âge du repreneur (62 ans alors que le preneur avait, lui, 48 ans à la date de l'arrêté) ni des situations économiques et professionnelles des intéressés ;

- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions de l'article L. 331-3 du code rural : l'arrêté contesté est entaché d'une erreur de fait dès lors que Mme C...n'a jamais exploité 60,98 hectares de terres, mais seulement environ 5 hectares ; les autres terres sont en fermage et qu'elle a près de 65 ans ;

- le préfet a méconnu, enfin, les prescriptions de l'article R. 331-1 du même code dès lors que Mme C...n'a aucun diplôme agricole et ne justifie d'aucune expérience professionnelle.

Par une lettre enregistrée le 6 avril 2016, Mme C...a présenté des observations. Ce courrier non régularisé à l'invitation du greffe de la cour n'a pas été communiqué.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 mars 2017 et des pièces complémentaires, enregistrées le 19 février 2018, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- si M. A...s'est opposé à la reprise des terres par MmeC..., il n'a pas déposé de demande concurrente d'autorisation d'exploiter de sorte que les priorités du schéma directeur départemental des structures agricoles n'étaient pas applicables ; ainsi seules les orientations du schéma et les critères énoncées par l'article L. 331-3 du code rural devaient être pris en compte ; pour autant, le préfet n'est pas tenu de se prononcer sur chacun des critères ; aussi, l'arrêté attaqué est suffisamment motivé en droit et en fait ;

- il ne ressort pas de l'arrêté attaqué que le préfet n'aurait pas pris en compte l'ensemble des critères légaux pour justifier l'autorisation litigieuse ; aucune pièce produite par M. A...n'a permis d'établir que la reprise des terres aurait mis en péril son exploitation ;

- à supposer l'erreur de fait établie, elle n'a aucune incidence sur la légalité de la décision délivrée ;

- le préfet n'a commis aucune erreur d'appréciation ; en effet, il ne ressort pas des pièces du dossier que la reprise aurait des conséquences telle sur l'exploitation du requérant que le préfet aurait dû refuser l'autorisation sollicitée ; la satisfaction aux conditions de capacité ou d'expérience professionnelle constitue simplement un élément d'appréciation de sorte que si Mme C...ne dispose pas de la capacité professionnelles requise, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ; enfin, en se bornant à évoquer l'âge de Mme C...par rapport au sien, M. A...n'apporte aucun élément justifiant que le préfet aurait entaché son arrêté d'une erreur d'appréciation.

Par ordonnance du 13 mars 2017, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 13 avril 2017 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le schéma directeur des structures agricoles du département de la Vienne du 15 juillet 2010 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 2 mars 2018 :

- le rapport de Mme Sylvande Perdu ;

- les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public ;

- et les observations de MeB..., représentant M. D...A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme E...C...a entendu exercer son droit de reprise de 5,30 hectares de parcelles agricoles lui appartenant, situées sur le territoire de la commune de Nueil-sous-Faye, et qui étaient exploitées par M. D...A...auquel les terres avaient été données à bail. Après avis favorable du 7 mai 2013 rendu par la commission départementale d'orientation de l'agriculture, le préfet de la Vienne a autorisé Mme C...à exploiter ces terres par un arrêté en date du 21 mai 2013. M. A...relève appel du jugement du 26 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté précité.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime : " L'autorité administrative se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. Elle doit notamment : 1° Observer l'ordre des priorités établi par le schéma départemental entre l'installation des jeunes agriculteurs et l'agrandissement des exploitations agricoles, en tenant compte de l'intérêt économique et social du maintien de l'autonomie de l'exploitation faisant l'objet de la demande ; / 2° S'assurer, en cas d'agrandissement ou de réunion d'exploitations, que toutes les possibilités d'installation sur une exploitation viable ont été considérées ; / 3° Prendre en compte les biens corporels ou incorporels attachés au fonds dont disposent déjà le ou les demandeurs ainsi que ceux attachés aux biens objets de la demande en appréciant les conséquences économiques de la reprise envisagée ; / 4° Prendre en compte la situation personnelle du ou des demandeurs, notamment en ce qui concerne l'âge et la situation familiale ou professionnelle et, le cas échéant, celle du preneur en place ; / 5° Prendre en compte la participation du demandeur ou, lorsque le demandeur est une personne morale, de ses associés à l'exploitation directe des biens objets de la demande dans les conditions prévues à l'article L. 411-59 ; / 6° Tenir compte du nombre d'emplois non salariés et salariés permanents ou saisonniers sur les exploitations concernées (...) ".

3. Et aux termes du II de l'article R. 331-6 du code rural et de la pêche maritime : " La décision d'autorisation ou de refus d'exploiter prise par le préfet doit être motivée au regard des critères énumérés à l'article L. 331-3 (...) ". Si le préfet doit, en vertu de ces dispositions, motiver sa décision, il ne saurait être tenu de se prononcer expressément sur chacun des critères dont ces dispositions prescrivent de tenir compte.

4. En premier lieu, l'arrêté préfectoral contesté, après avoir visé les textes applicables et notamment le schéma directeur départemental des structures agricoles du département de la Vienne du 15 juillet 2010 applicable aux faits du litige, précise la localisation des terres visées par la demande, la situation personnelle du demandeur, et indique qu'au regard des critères fixés par l'article 1er du schéma directeur, et notamment de l'objectif d'agrandissement des exploitations dont les dimensions sont insuffisantes, compte tenu également du ratio superficie / unité de main d'oeuvre, favorable à la pétitionnaire, la demande de Mme C...est prioritaire par rapport à celle de M.A....

5. Dans ces conditions, l'arrêté du 21 mai 2013 précise en quoi la situation du demandeur justifie, par rapport à celle du preneur en place, l'octroi de l'autorisation litigieuse au regard des critères mentionnés à l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche, et des orientations définies dans le schéma directeur départemental des structures agricoles. Le fait que l'arrêté ne mentionne pas que Mme C...est plus âgée que M. A...est sans incidence sur la motivation de l'arrêté s'agissant d'une demande qui n'a pas pour objet l'installation d'un jeune agriculteur. Ainsi, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté en litige doit être écarté.

6. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet a pris en compte la situation du preneur en place et l'a comparée avec celle du propriétaire, quant à la superficie et au nombre d'actifs dont ils disposaient. Si M. A...soutient que le préfet n'a pas apprécié les conséquences économiques de cette demande sur son exploitation, il n'établit pas, et il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la reprise de 5,30 hectares de terres par Mme C...mettrait en péril sa propre exploitation qui conserve 165,92 hectares. Et la seule différence d'âge existant entre Mme C...et M. A...ne suffit pas à établir que le préfet a méconnu les dispositions précitées de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 331-2 du même code, applicable aux faits : " I. - Sont soumises à autorisation préalable les opérations suivantes : / (...) / 3° Quelle que soit la superficie en cause, les installations, les agrandissements ou les réunions d'exploitations agricoles au bénéfice d'une exploitation agricole : / a) Dont l'un des membres ayant la qualité d'exploitant ne remplit pas les conditions de capacité ou d'expérience professionnelle (...) ". Et aux termes de l'article R. 331-1 dudit code : " Satisfait aux conditions de capacité ou d'expérience professionnelle mentionnées au 3° de l'article L. 331-2 le candidat (...) à l'agrandissement (...) qui justifie, à la date de l'opération : / 1° Soit de la possession d'un diplôme ou certificat d'un niveau reconnu équivalent au brevet d'études professionnelles agricoles (BEPA) ou au brevet professionnel agricole (BPA) ; / 2° Soit de cinq ans minimum d'expérience professionnelle (...) ".

8. A supposer que, comme le soutient M.A..., Mme C...ne disposait pas, à la date de l'arrêté en litige, du diplôme requis au regard des dispositions des articles L. 331-2 et R. 331-1 du code rural et de la pêche maritime, cette circonstance l'obligeait seulement à solliciter une autorisation d'exploiter, ce qu'elle a fait le 8 janvier 2013, et ne faisait nullement obstacle à la délivrance d'une telle autorisation sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 331-3 du même code.

10. Enfin, en quatrième et dernier lieu, M. A...se borne à reprendre en appel le moyen de première instance tiré de ce que le préfet de la Vienne aurait entaché son arrêté d'une erreur de fait au motif que Mme C...n'aurait jamais exploité la surface de terres agricoles mentionnée dans l'arrêté, mais seulement environ 5 hectares. Toutefois, il ne se prévaut d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif de nature à remettre en cause l'appréciation des premiers juges qui ont estimé, par des motifs qu'il y a lieu d'adopter, que cette erreur n'était nullement établie.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'autorisation d'exploiter 5,30 hectares de terres agricoles, accordée à Mme C...par un arrêté du préfet de la Vienne du 21 mai 2013.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande M. A...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A..., à Mme E...C...et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Copie en sera délivrée au préfet de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 2 mars 2018 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

Mme Marianne Pouget, président-assesseur,

Mme Sylvande Perdu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 mars 2018.

Le rapporteur,

Sylvande Perdu Le président,

Philippe Pouzoulet

Le greffier,

Florence Deligey

La République mande et ordonne ministre de l'agriculture et de l'alimentation, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 16BX00344


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX00344
Date de la décision : 30/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-03-03-01-03 Agriculture et forêts. Exploitations agricoles. Cumuls et contrôle des structures. Cumuls d'exploitations. Motifs de la décision.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: Mme Sylvande PERDU
Rapporteur public ?: Mme MUNOZ-PAUZIES
Avocat(s) : SCP LACOSTE-PLAT-MAISSIN

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-03-30;16bx00344 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award