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27/04/2018 | FRANCE | N°16BX00824

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre - formation à 3, 27 avril 2018, 16BX00824


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision du 13 décembre 2013 par laquelle la garde des sceaux, ministre de la justice, a rejeté sa demande indemnitaire du 9 octobre 2013 et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 238 000 euros, assortie des intérêts au taux légal, en réparation du préjudice lié à la perte de chance d'obtenir sa promotion au grade de lieutenant avant son admission à la retraite.

Par un jugement n° 1400133 du 15 décembre 2015, le t

ribunal administratif de La Réunion a rejeté la demande de M.B....

Procédure devant...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision du 13 décembre 2013 par laquelle la garde des sceaux, ministre de la justice, a rejeté sa demande indemnitaire du 9 octobre 2013 et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 238 000 euros, assortie des intérêts au taux légal, en réparation du préjudice lié à la perte de chance d'obtenir sa promotion au grade de lieutenant avant son admission à la retraite.

Par un jugement n° 1400133 du 15 décembre 2015, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté la demande de M.B....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 mars 2016, M. A...B..., représenté par la SCP Canale-Gauthier-Antelme-Bentolila, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 15 décembre 2015 ;

2°) d'annuler la décision du 13 décembre 2013 par laquelle la garde des sceaux, ministre de la justice, a rejeté sa demande indemnitaire ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 238 000 euros en principal, à titre de dommages et intérêts et d'assortir cette somme des intérêts à taux légal à compter du 14 octobre 2013, date de réception de sa réclamation préalable ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué a violé le principe du contradictoire, dès lors que les premiers juges se sont fondés sur des décisions de justice relatives à une autre instance et non produites aux débats ;

- c'est à tort que le tribunal a retenu l'exception de chose jugée, dès lors que l'instance qui a donné lieu à un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 8 décembre 2014 ne visait qu'à réparer le préjudice issu d'un retard dans sa nomination au grade de premier surveillant ;

- sur le fond, l'administration, ayant méconnu le principe d'égalité de traitement, a commis une illégalité fautive emportant obligation de l'indemniser ; cette illégalité a été constatée par le jugement du tribunal administratif du 22 novembre 2012 ;

- au regard de ses excellents états de service, il a perdu une chance sérieuse de promotion au grade de lieutenant ; il a ainsi été victime d'une rupture dans l'égalité de traitement entre fonctionnaires ;

- cette perturbation dans le déroulement normal de sa carrière a entraîné pour lui des troubles sérieux dans ses conditions d'existence et des préjudices au plan matériel et moral ; il produit des éléments de calcul justifiant ses prétentions indemnitaires, que l'administration n'a jamais discuté au fond ;

- en se prévalant de l'autorité de la chose jugée, le ministre, comme les premiers juges, ont commis une erreur de droit et une erreur de fait ; dans l'instance qui a abouti à l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux, le contentieux portait uniquement sur les retards mis dans sa promotion au grade de premier surveillant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 avril 2017, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- le jugement n'a nullement violé le principe du contradictoire, dès lors que les décisions de justice auxquelles il s'est référé concernent des instances engagées par M. B... lui-même et lui ont donc été régulièrement notifiées ; en outre, ces décisions de justice sont, comme tous les jugements, publiques, comme le précise l'article L. 10 du code de justice administrative ;

- l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux n° 13BX03311 emporte bien autorité de la chose jugée, s'agissant des préjudices nés de l'absence de promotion du requérant au grade de lieutenant ; le pourvoi en cassation formé par M. B...contre cet arrêt n'a pas été admis par le Conseil d'Etat ; par conséquent, la demande qu'il a présentée devant le tribunal administratif présentait une identité de parties, de cause et d'objet avec sa précédente demande, qui a fait l'objet d'un jugement du 10 octobre 2013 et de l'arrêt précité ; c'est donc à bon droit qu'en vertu de l'autorité de la chose jugée, le jugement attaqué l'a rejetée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac,

- et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A...B..., né en 1957, surveillant pénitentiaire affecté à La Réunion, qui était titulaire depuis 1989 du certificat d'aptitude aux fonctions de premier surveillant, n'a obtenu sa promotion au grade de premier surveillant qu'en 2002. Cependant, sa nomination à ce grade, concrétisée par un arrêté en date du 15 juillet 2002, a été prononcée avec effet rétroactif au 1er janvier 1996. M. B...a été admis à la retraite à la fin de l'année 2007 sans avoir obtenu sa promotion en qualité de lieutenant, une demande en ce sens ayant été vainement présentée en septembre 2006. Il fait appel du jugement du tribunal administratif de La Réunion du 15 décembre 2015, qui a rejeté da demande indemnitaire, tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 238 000 euros, assortie des intérêts au taux légal, en réparation du préjudice lié à la perte de chance d'obtenir sa promotion au grade de lieutenant avant son admission à la retraite.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 10 du code de justice administrative dans a version en vigueur à la date du jugement attaqué : " Les jugements sont publics. Ils mentionnent le nom des juges qui les ont rendus. ".

3. M. B...soutient que les premiers juges on violé le principe du contradictoire, dès lors qu'ils se sont fondés, pour rejeter sa demande, sur le jugement n° 1100009 du 10 octobre 2013 du même tribunal, sur l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux n° 13BX03311 du 8 décembre 2014 et sur la décision du Conseil d'Etat n° 388507 en date du 21 septembre 2015, décisions de justice qui n'ont pas été produites aux débats et qui concernaient un contentieux indemnitaire différent.

4. Cependant, et alors en tout état de cause, qu'aux termes de l'article L. 10 du code de justice administrative, les jugements sont publics, ces trois décisions de la juridiction administrative répondaient à des contentieux engagés par M. B...lui-même et, partant, lui ont donc été régulièrement notifiées, de sorte qu'il ne pouvait en ignorer ni le sens ni la portée. En outre, tant le jugement du 10 octobre 2013 que l'arrêt du 8 décembre 2014 ont rejeté les conclusions indemnitaires de l'intéressé tendant à la réparation des préjudices issus de son absence de promotion au grade de lieutenant.

5. Par suite les premiers juges n'ont pas méconnu le principe du contradictoire et n'ont pas entaché leur jugement d'irrégularité à cet égard.

Sur les conclusions indemnitaires :

6. Comme l'ont déjà relevé à bon droit les premiers juges, la décision ministérielle consécutive à la demande formée par l'intéressé le 9 octobre 2013 a eu pour seul effet de lier le contentieux à l'égard des prétentions indemnitaires de M. B..., dont la requête présente, dans son ensemble le caractère d'un recours de plein contentieux. Eu égard à l'objet d'une telle demande, qui conduit le juge à se prononcer sur le droit de l'intéressé à percevoir la somme qu'il réclame, les vices propres dont serait, le cas échéant, entachée la décision ayant lié le contentieux sont sans incidence sur la solution du litige.

7. Contrairement à ce que soutient M.B..., sa précédente demande indemnitaire, qui a abouti à un jugement du tribunal administratif de La Réunion du 10 octobre 2013 et à un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 8 décembre 2014 concernait non seulement le préjudice résultant de sa tardive promotion au grade de premier surveillant, mais encore le préjudice subi du fait qu'il n'a pu obtenir sa promotion en qualité de lieutenant avant sa mise à la retraite. Le tribunal administratif a rejeté ses conclusions à cet égard, en relevant, au point 2 de son jugement " qu'en ce qui concerne le refus de promotion en qualité de lieutenant, il a été constaté, par jugement du 22 novembre 2012, que la décision prise à cet égard en 2006 était entachée d'un vice de procédure, mais il ne résulte pas de l'instruction, en l'absence d'éléments concrets permettant de mettre en évidence une erreur manifeste d'appréciation commise au détriment de l'intéressé dans le cadre du processus de sélection, que le préjudice invoqué par M. B...au titre de l'absence de nomination dans le grade de lieutenant ou dans celui de capitaine avant son admission à la retraite, puisse être regardé comme la conséquence directe d'agissements fautifs de l'administration ". Ce jugement a été confirmé à cet égard par les points 4 et 5 de l'arrêt précité de la cour de céans, qui a conclu que M. B...n'établissait pas qu'il aurait eu une chance sérieuse d'obtenir la promotion revendiquée et que, dans ces conditions, il n'était pas fondé à demander la réparation d'un préjudice de carrière du fait de son absence de promotion au grade de lieutenant avant son admission à la retraite. Enfin, par une décision en date du 21 septembre 2015, le Conseil d'Etat a prononcé la non-admission du pourvoi en cassation formé par M. B...contre l'arrêt du 8 décembre 2014, ainsi devenu définitif, notamment quant au rejet des conclusions indemnitaires fondées sur l'absence de promotion au grade de lieutenant. Dans ces conditions, le ministre de la justice est fondé, sans commettre d'erreur de droit ou de fait, à faire valoir que la présente demande indemnitaire de M.B..., qui présente une identité de parties, de cause et d'objet avec sa précédente demande qui a conduit aux décisions précitées, ne peut qu'être rejetée en raison de l'autorité de la chose jugée. C'est donc à bon droit que les premiers juges ont considéré que l'intéressé ne pouvait qu'être débouté de sa demande indemnitaire.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. B...présentées sur ce fondement.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 19 mars 2018 à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Gil Cornevaux, président-assesseur,

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 avril 2018.

Le rapporteur,

Florence Rey-GabriacLe président,

Pierre Larroumec

Le greffier,

Cindy Virin La République mande et ordonne au ministre de la justice, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

2

N° 16BX00824


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX00824
Date de la décision : 27/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Notation et avancement - Avancement.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : SCP CANALE GAUTHIER ANTELME

Origine de la décision
Date de l'import : 08/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-04-27;16bx00824 ?
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