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07/06/2018 | FRANCE | N°16BX03051

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 07 juin 2018, 16BX03051


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Rivehaute et M. et Mme A...D...ont saisi le tribunal administratif de Pau d'une demande tendant à la condamnation solidaire du département des Pyrénées-Atlantiques et de la SNC Appia Sud Aquitaine à leur verser la somme totale de 371 973,86 euros en réparation de différents chefs de préjudice liés à des désordres affectant leur immeuble situé lieu-dit Le Bourg à Rivehaute.

Par jugement n° 1100744 du 4 juin 2013, le tribunal administratif de Pau a d'une part, retenu la responsabilité so

lidaire du département et de la société Eiffage Travaux Publics Sud Ouest, venant a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Rivehaute et M. et Mme A...D...ont saisi le tribunal administratif de Pau d'une demande tendant à la condamnation solidaire du département des Pyrénées-Atlantiques et de la SNC Appia Sud Aquitaine à leur verser la somme totale de 371 973,86 euros en réparation de différents chefs de préjudice liés à des désordres affectant leur immeuble situé lieu-dit Le Bourg à Rivehaute.

Par jugement n° 1100744 du 4 juin 2013, le tribunal administratif de Pau a d'une part, retenu la responsabilité solidaire du département et de la société Eiffage Travaux Publics Sud Ouest, venant au droit de la société Appia Sud Aquitaine, dans les désordres apparus sur l'habitation de M. et Mme D...après l'achèvement des travaux d'assainissement sur la partie de la route départementale 23 située au droit de leur habitation, lieu-dit Le Bourg à Rivehaute et, d'autre part, avant dire droit, ordonné un complément d'expertise.

Par arrêt n° 13BX02227 du 12 novembre 2015, la cour de céans a annulé l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Pau déclarant responsable in solidum le département des Pyrénées-Atlantiques et la société Eiffage Travaux Publics Sud Ouest, et renvoyé l'affaire devant le tribunal.

Par jugement n° 1100744 du 21 juin 2016, le tribunal administratif de Pau a notamment rejeté les conclusions indemnitaires présentées par la SCI Rivehaute et par M. et MmeD....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 8 septembre 2016, la SCI Rivehaute et M. et Mme D..., représentés par MeE..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 21 juin 2016 ;

2°) de condamner solidairement le département des Pyrénées-Atlantiques et la société Eiffage Route Sud Ouest à leur verser la somme de 238 525 euros au titre des travaux de remise en état de l'immeuble dont ils sont propriétaires ou exploitants à Rivehaute le long de la RD n° 23, la somme de 34 448,86 euros au titre des frais de déménagement et de garde-meubles, la somme de 9 000 euros au titre des frais de relogement, la somme de 90 000 euros au titre des troubles de jouissance subis depuis plusieurs années, l'ensemble de ces sommes devant être assorties des intérêts au taux légal à compter du dépôt de la requête ;

3°) d'ordonner une nouvelle expertise ;

4°) de mettre à la charge solidaire du département des Pyrénées-Atlantiques et de la société Eiffage Route Sud Ouest la somme de 9 591,48 euros au titre des frais d'expertise et celle de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est irrégulier dès lors qu'il n'a pas statué sur le nouveau fondement de responsabilité invoqué, tiré des fautes commises par la société Eiffage et par le conseil général ; l'arrêt de la cour du 12 novembre 2015 annulant partiellement le jugement avant-dire droit du tribunal n'avait pas écarté tout lien de causalité entre les travaux et leur préjudice ;

- les deux rapports d'expertise judiciaire, s'ils divergent sur les causes des désordres, font ressortir la faute du maître d'ouvrage et de la société Eiffage et lui imputent de manière certaine les désordres résultant des travaux d'assainissement ;

- la société Eiffage n'a pas analysé l'état du sous-sol à proximité d'une maison ancienne ni les conséquences de la mise en place d'un collecteur sur le drainage des sols environnants ; aucune étude des sols préalable n'a été réalisée ; ni la société Eiffage, ni le conseil général n'ont fait procéder à un état des lieux de l'immeuble existant ; le phénomène de drainage et d'assèchement des sols aurait dû être anticipé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 octobre 2016, le département des Pyrénées-Atlantiques conclut au rejet de la requête, à ce que la cour mette les frais d'expertise à la charge de la SCI Rivehaute et de M. et Mme D...et à ce que la cour mette à la charge des appelants une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la requête est tardive ;

- les demandes indemnitaires sont dénuées de fondement dès lors que tout lien de causalité entre les travaux publics et les dommages allégués a été définitivement écarté par l'arrêt de la cour de céans du 12 novembre 2015 ;

Par un mémoire en défense enregistré le 20 décembre 2016, la société Eiffage Route Sud Ouest conclut :

1°) à titre principal au rejet de la requête ;

2°) à titre subsidiaire à ce que le préjudice soit évalué à la somme de 33 148, 60 euros TTC retenue par l'expert et à ce qu'elle soit relevée indemne de toute condamnation prononcée à son encontre par le département des Pyrénées-Atlantiques ;

3°) à ce que la cour mette à la charge des requérants ou de toute partie succombante la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- quel que soit le régime de responsabilité retenu, dès lors qu'il a été reconnu qu'aucun lien de causalité ne pouvait être établi entre les travaux publics en cause et les dommages allégués, les demandes indemnitaires des appelants ne pouvaient qu'être rejetées ;

- aucune faute ne peut lui être reprochée et il n'est pas davantage démontré que la réactivation des fissures serait due aux travaux publics en cause, dont la qualité n'est pas contestée ; d'autres entreprises sont intervenues après qu'elle ait réalisé les travaux ;

- seule la responsabilité du maître de l'ouvrage peut être engagée en l'absence de faute des intervenants dans l'exécution de leurs prestations.

Par ordonnance du 30 novembre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 8 janvier 2018 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Claude Pauziès ;

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un acte d'engagement du 26 avril 2005, la SNC Appia Sud Aquitaine s'est vue confier par le département des Pyrénées-Atlantiques la réalisation de travaux d'assainissement le long de la partie de la route départementale n° 23 située au lieu-dit Le Bourg sur la commune de Rivehaute. Les travaux ont été réalisés de juillet à septembre 2006. A la demande de la SCI Rivehaute, propriétaire d'un immeuble situé à proximité du lieu des travaux, le juge des référés du tribunal administratif de Pau a missionné, par une ordonnance du 30 juillet 2008, M. C..., expert, aux fins de décrire les désordres affectant l'immeuble occupé par M. et Mme D...et de déterminer les responsabilités, le coût de la remise en état et les préjudices subis du fait de ces travaux. Après le dépôt du rapport de l'expert le 8 décembre 2009, la SCI Rivehaute ainsi que son gérant M. D...et l'épouse de ce dernier ont saisi le 23 mars 2011 le tribunal administratif de Pau d'une demande en réparation des dommages qui ont affecté cet immeuble et qu'ils imputent aux travaux d'assainissement réalisés en septembre 2006. Par un jugement du 4 juin 2013, le tribunal administratif de Pau a retenu la responsabilité solidaire du département et de la société Eiffage Travaux Publics Sud Ouest, venant aux droits de la société SNC Appia Sud Aquitaine, et, avant dire droit, a ordonné un complément d'expertise. L'expert désigné à la suite du jugement avant dire droit a déposé son rapport le 15 avril 2015. Le département des Pyrénées-Atlantiques et la société Eiffage Travaux Publics Sud Ouest ont relevé appel de ce jugement. Par arrêt n° 13BX02227 du 12 novembre 2015, la cour de céans a annulé l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Pau déclarant responsable in solidum le département des Pyrénées-Atlantiques et la société Eiffage Travaux Publics Sud Ouest, et renvoyé l'affaire devant le tribunal. Par jugement en date du 21 juin 2016, le tribunal administratif de Pau a rejeté les demandes indemnitaires présentées par la SCI Rivehaute et par les époux D...et a mis à leur charge solidaire les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme totale de 15 373,73 euros. La SCI Rivehaute et M. et Mme D...relèvent appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. La SCI Rivehaute et M. et Mme D...font valoir que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de ce que la responsabilité pour faute du département des Pyrénées-Atlantiques et de la société Eiffage Travaux Publics Sud Ouest pouvait être engagée à la suite des désordres apparus sur leur maison. Toutefois, les premiers juges ont bien répondu à ce moyen au point 4 du jugement, en relevant que l'arrêt de la cour avait écarté toute relation de causalité entre les dommages subis par les requérants et les travaux. Par suite, le jugement n'est pas irrégulier sur ce point.

Sur la responsabilité pour faute du département des Pyrénées-Atlantiques et de la société Eiffage Travaux Publics Sud Ouest :

3. La SCI Rivehaute et M. et Mme D...soutiennent que le département des Pyrénées-Atlantiques et la société Eiffage Travaux Publics Sud Ouest ont commis des fautes de nature à engager leur responsabilité. Ils reprochent au maître d'ouvrage et au constructeur de ne pas avoir pris en compte l'état du sous-sol à proximité d'une maison ancienne et de ne pas avoir procédé à un état des lieux de l'immeuble existant avant de débuter les travaux.

4. Toutefois, l'existence d'un lien de causalité direct entre les désordres en litige et les travaux d'assainissement incriminés constitue une condition nécessaire à tout engagement de la responsabilité du maître d'ouvrage ou du constructeur, que ce soit sur le terrain de la responsabilité sans faute ou sur celui de la responsabilité pour faute. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont pu écarter le moyen des requérants en relevant que le lien de causalité entre les désordres en litige et les travaux publics incriminés ne pouvait être regardé comme établi, et rejeter ainsi les conclusions indemnitaires présentées sur le terrain de la responsabilité pour faute.

5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin, ni de statuer sur la recevabilité de la requête, ni d'ordonner une nouvelle expertise, que la SCI Rivehaute et M. et Mme D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande et a mis à leur charge les frais d'expertise.

Sur les frais exposés par les parties au litige :

6. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux demandes présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SCI Rivehaute et M. et Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le surplus des conclusions d'appel du département des Pyrénées-Atlantiques et de la société Eiffage Travaux Publics Sud Ouest est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Rivehaute, à M. A...et Mme B...D...,

au département des Pyrénées-Atlantiques et à la société Eiffage Travaux Publics Sud Ouest.

Délibéré après l'audience du 9 mai 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

Mme Cécile Cabanne, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 juin 2018.

Le rapporteur,

Jean-Claude PAUZIÈSLe président,

Catherine GIRAULT

Le greffier,

Virginie MARTY

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Atlantiques en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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No 16BX03051


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX03051
Date de la décision : 07/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-03-04 Travaux publics. Différentes catégories de dommages. Dommages créés par l'exécution des travaux publics.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PAUZIÈS
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SCP TUCOO - CHALA

Origine de la décision
Date de l'import : 12/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-06-07;16bx03051 ?
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