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25/06/2018 | FRANCE | N°16BX01041

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre - formation à 3, 25 juin 2018, 16BX01041


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la note qui lui a été attribuée par le maire d'Arneguy sur sa manière de servir au titre de l'année 2014, ainsi que la décision du 6 février 2015 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1500767 du 18 janvier 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a annulé les appréciations littérales portées sur la manière de servir de Mme C...ainsi que la note qui lui a été attribuée au titre

de l'année 2014.

Procédure devant la cour :

Par une requête, un mémoire en réplique, e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la note qui lui a été attribuée par le maire d'Arneguy sur sa manière de servir au titre de l'année 2014, ainsi que la décision du 6 février 2015 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1500767 du 18 janvier 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a annulé les appréciations littérales portées sur la manière de servir de Mme C...ainsi que la note qui lui a été attribuée au titre de l'année 2014.

Procédure devant la cour :

Par une requête, un mémoire en réplique, enregistrés les 25 mars et 2 août 2016, la commune d'Arneguy demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 18 janvier 2016 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme C...devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de Mme C...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier, le contradictoire ayant été méconnu, dès lors que des pièces complémentaires, communiquées par Mme C...au tribunal le 30 décembre 2015 ne lui ont pas été communiquées ; la commune n'a donc pu discuter de ces éléments ;

- Mme C...n'effectuait pas correctement son service et n'exécutait pas certains ordres qui lui étaient donnés par le maire, ou ne l'informait pas de certaines choses ; elle faisait preuve de difficultés d'organisation, d'un manque de réactivité et de difficultés de partage de l'information ; c'est pour l'ensemble de ces raisons que le maire lui a attribué la note de 5 et a porté sur son évaluation les appréciations critiquées ; à cet égard, il ne saurait être opposé au maire ses appréciations élogieuses antérieures, non plus que sa précédente note de 19,99, qui apparaît excessive.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 juin 2016, et des pièces complémentaires, enregistrées le 23 janvier 2018, MmeC..., représentée par la SCP Echeverry, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune d'Arneguy la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la commune ne produit pas la délibération par laquelle elle aurait donné délégation au maire pour agir en justice, conformément au 16° de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales ;

- les moyens soulevés par la commune ne sont pas fondés ; en particulier, le jugement n'est pas entaché d'irrégularité ; l'appréciation portée sur sa valeur professionnelle et la note qui lui a été attribuée sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-473 du 14 mars 1986 ;

- le décret n° 87-1107 du 30 décembre 1987 ;

- le décret n° 2006-1690 du 22 décembre 2006 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac,

- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,

- et les observations de MeD..., représentant la commune d'Arneguy.

Considérant ce qui suit :

1. MmeC..., adjoint administratif de deuxième classe, a été recrutée par le maire de la commune d'Arneguy (Pyrénées-Atlantiques) à compter du 1er janvier 2008 pour exercer les fonctions de secrétaire de mairie à raison de 28 heures hebdomadaires. Le nouveau maire de la commune, issu des élections municipales de 2014, a procédé à l'appréciation de sa manière de servir au titre de l'année 2014 et a décidé de lui attribuer la note de 5/20, assortie d'appréciations défavorables. La commune d'Arneguy fait appel du jugement du tribunal administratif de Pau du 18 janvier 2016 qui a annulé les appréciations littérales portées sur la manière de servir de Mme C...ainsi que la note qui lui a été attribuée au titre de l'année 2014.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " (...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...). / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ".

3. Il ressort des pièces du dossier que, le 29 décembre 2015, Mme C...a présenté devant le tribunal administratif de Pau des pièces complémentaires, qui ont été visées sans analyse. En s'abstenant de communiquer ces pièces qui ne comportaient aucun élément de droit ou de fait nouveau ni aucun moyen nouveau, le tribunal n'a pas méconnu les exigences qui découlent des dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative et qui sont destinées à garantir le caractère contradictoire de l'instruction. Il suit de là que la commune d'Arneguy n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait intervenu à la suite d'une procédure irrégulière et à en demander, pour ce motif, l'annulation. Le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire ne peut en conséquence qu'être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. D'une part, aux termes de l'article 17 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Les notes et appréciations générales attribuées aux fonctionnaires et exprimant leur valeur professionnelle leur sont communiquées. / Les statuts particuliers peuvent ne pas prévoir de système de notation. ". Aux termes de l'article 76 de la loi du 26 janvier 1984, dans la version applicable à l'année 2014 : " Le pouvoir de fixer les notes et appréciations générales exprimant la valeur professionnelle des fonctionnaires dans les conditions définies à l'article 17 du titre Ier du statut général est exercé par l'autorité territoriale au vu des propositions du secrétaire général ou du directeur des services de la collectivité ou de l'établissement./ Les commissions administratives paritaires ont connaissance des notes et appréciations ; à la demande de l'intéressé, elles peuvent en proposer la révision./Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article. ".

5. D'autre part, l'article 8 du décret du 30 décembre 1987 portant organisation des carrières des fonctionnaires territoriaux de catégorie C énonce qu'il " est tenu compte pour l'établissement de la note des éléments suivants : 1. Connaissances professionnelles ; 2. Initiative, exécution, rapidité, finition ; 3. Sens du travail en commun et relations avec le public ; 4. Ponctualité et assiduité. ". En vertu de l'article 3 du décret du 14 mars 1986 relatif aux conditions générales de notation des fonctionnaires territoriaux qui s'applique à tous les corps, cadres d'emplois, ou emplois de la fonction publique territoriale dotés d'un statut particulier, sauf dispositions spéciales de ce statut, la fiche individuelle de notation, établie chaque année, comporte : " 1° Une appréciation d'ordre général exprimant la valeur professionnelle de l'agent et indiquant, le cas échéant, les aptitudes de l'intéressé à exercer d'autres fonctions dans le même grade ou dans un grade supérieur ; 2° Une note chiffrée allant de 0 à 20 ; 3° Les observations de l'autorité territoriale sur les voeux exprimés par l'intéressé. ".

6. Il ressort des pièces du dossier que le maire d'Arneguy, nouvellement élu, a procédé à l'appréciation de la manière de servir de Mme C...au titre de l'année 2014 et lui attribué la note de 5/20 en considérant qu'elle avait fait preuve d'une " collaboration [réduite au] strict minimum et a déformé [ses] propos auprès des administrés dans l'intention de [lui] nuire ". L'intéressée conteste ces éléments d'appréciation et dénie avoir eu l'attitude de dénigrement qui lui est reprochée. Elle se prévaut également de la note de 19,99/20 attribuée au titre de l'année précédente ainsi que des appréciations littérales correspondantes, faisant état de son professionnalisme et de sa discrétion, et concluant à une proposition d'avancement de grade, ainsi que des appréciations très favorables portées sur sa manière de servir par le maire de la commune de Baigts-de-Béarn, qui l'a recrutée sur des fonctions de secrétaire de mairie adjointe à compter de juin 2015 et qui a d'ailleurs, pour cette raison, porté son temps de travail de 17h30 à 28 heures par semaine à compter du 1er avril 2016, comme il l'affirme lui-même par une attestation en date du 30 avril 2016.

7. Pour justifier de l'attitude qu'elle reproche à MmeC..., la commune d'Arneguy se borne à des allégations, qui ne sont pas étayées par les quelques documents qu'elle produit en appel, notamment une déclaration de sinistre, un extrait du cahier de correspondance ou encore un courrier du syndicat national des secrétaires de mairie. La seule attestation de deux anciens adjoints, au demeurant non datée, qui relaient les propos du maire eu égard au comportement de l'agent et qui évoquent, sans s'appuyer sur des faits précis, un " manque de collaboration manifeste envers MmeA... ", " dans l'intention de la gêner dans son action mais également dans l'intention de ralentir l'action de l'équipe municipale " ne suffit pas, dans ces conditions, à établir la matérialité des griefs formulés par le maire à l'encontre de l'intéressée, alors au demeurant qu'il ressort des pièces du dossier que le comportement professionnel de Mme C...était apprécié très favorablement par l'ancien maire d'Arneguy et l'est à nouveau par le maire de Baigts-de-Béarn. Par suite, à supposer même que le défaut d'investissement de Mme C... dans ses fonctions soit avéré pour l'année 2014 en raison de difficultés relationnelles qui auraient existé avec le nouveau maire, l'appréciation littérale portée sur sa notation doit être regardée comme entachée d'une erreur de fait et l'abaissement de sa note à 5/20, ce qui représente quinze points de moins que l'année précédente, doit être regardé comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par MmeC..., que la commune d'Arneguy n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a annulé les appréciations littérales portées sur la manière de servir de Mme C...ainsi que la note qui lui a été attribuée au titre de l'année 2014.

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de Mme C...la somme que demande la commune d'Arneguy sur ce fondement. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune une somme de 1 500 euros que demande Mme C...sur ce même fondement.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune d'Arneguy est rejetée.

Article 2 : La commune d'Arneguy versera à Mme C...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Arneguy et à Mme B...C....

Délibéré après l'audience du 28 mai 2018 à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller,

M. Axel Basset, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 juin 2018.

Le rapporteur,

Florence Rey-GabriacLe président,

Pierre LarroumecLe greffier,

Cindy Virin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

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N°16BX01041


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX01041
Date de la décision : 25/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-06-01 Fonctionnaires et agents publics. Notation et avancement. Notation.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : CABINET FORT LABAT AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-06-25;16bx01041 ?
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