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18/12/2018 | FRANCE | N°16BX01638

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 18 décembre 2018, 16BX01638


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association France nature environnement Midi-Pyrénées, l'association France nature environnement Tarn-et-Garonne et l'association Agir Garonne ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du préfet de Tarn-et-Garonne du 28 mars 2013 autorisant la société Les graviers garonnais à exploiter une carrière sur le territoire de la commune de Verdun-sur-Garonne.

Par un jugement n°1302505 du 11 mars 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande et a mis à l

eur charge le versement de la somme globale de 1 200 euros à la société Les gravi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association France nature environnement Midi-Pyrénées, l'association France nature environnement Tarn-et-Garonne et l'association Agir Garonne ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du préfet de Tarn-et-Garonne du 28 mars 2013 autorisant la société Les graviers garonnais à exploiter une carrière sur le territoire de la commune de Verdun-sur-Garonne.

Par un jugement n°1302505 du 11 mars 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande et a mis à leur charge le versement de la somme globale de 1 200 euros à la société Les graviers garonnais au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 16 mai 2016, 10 septembre 2017, 28 septembre 2017, 13 novembre 2017 et 29 mars 2018, l'association France nature environnement Midi-Pyrénées, l'association France nature environnement Tarn-et-Garonne et l'association Agir Garonne, représentées par MeC..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 11 mars 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté mentionné ci-dessus du préfet de Tarn-et-Garonne du 28 mars 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- l'étude d'impact est insuffisante s'agissant du risque d'aggravation des inondations tant sur l'état initial que sur les effets qu'auront l'installation de merlons anti-bruits et la création de plans d'eau résiduels pour la remise en état du site ;

- cette étude est également insuffisante s'agissant de la sécurité publique alors que le site de l'exploitation est situé en zone rouge du plan de prévention du risque inondation ; aucune information n'est donnée sur les impacts de l'installation de convoyage des granulats pour l'évacuation des personnes ;

- l'étude est lacunaire s'agissant des risques sanitaires liés aux poussières et aux bruits ;

- l'étude d'impact ne comporte pas non plus une étude suffisante des risques routiers générés par l'évacuation des granulats ; l'exploitant ne démontre pas qu'il a obtenu les autorisations nécessaires aux aménagements routiers qu'il prévoit ; le tribunal n'a pas répondu à leur moyen sur ces points ;

- l'étude d'impact n'analyse pas les effets cumulés du projet avec les aménagements déjà présents sur le site ; le tribunal n'a que partiellement répondu à leur contestation sur ce point ;

- l'étude d'impact n'analyse pas les effets cumulés du projet avec l'installation de broyage-concassage située à Ondes ;

- le commissaire enquêteur n'a pas rendu un avis personnel et motivé ; son avis n'est pas explicite, il est ambigu quant au caractère de réserves ou de recommandations des remarques qu'il a émises et ne peut justifier un avis favorable par la seule demande croissante en granulats sans considérations relatives aux préoccupations d'environnement ;

- l'autorisation méconnaît le plan de prévention du risque inondation qui n'autorise la création de carrières en zone rouge que si une étude hydraulique le permet ; en l'espèce l'étude hydraulique et hydrogéologique produite par la société est ambigüe sur l'absence d'impact négatif mesurable et sur la définition de mesures compensatoires et ne prend pas en compte le tapis transporteur, le stockage d'inertes et les aménagements routiers ;

- l'autorisation méconnaît également l'article 11.2 II de l'arrêté ministériel du 22 septembre 1994 dès lors que le projet présente plusieurs facteurs d'aggravation du risque d'inondation et que l'espace de mobilité de la Garonne en amont et en aval du site n'a pas été évalué ;

- l'autorisation n'est pas compatible avec le schéma départemental des carrières dans son objectif d'économie des matériaux alluvionnaires et de maîtrise du mitage du territoire par les plans d'eau déjà nombreux ; le pétitionnaire n'a pas analysé les effets du projet sur l'agriculture locale ni proposé des mesures compensatoires alors que son projet détruit plus de 75 ha de terres agricoles ; le projet, comportant des murs anti-bruit non parallèles aux lignes de courant, une bande transporteuse faisant obstacle à l'écoulement des eaux et un stockage de déchets inertes de 75 000 m3 dans une zone où la hauteur de submersion est supérieure à un mètre et la vitesse d'écoulement supérieure à 0,50 m/s, n'est pas compatible avec l'objectif du schéma de limitation et de gestion des extractions en lit majeur et de prise en compte des zones inondables ;

- le projet est incompatible avec la vocation agricole de la zone NCg du plan d'occupation des sols de la commune et avec le règlement de la zone NDbg ;

- l'autorisation est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 511-1 du code de l'environnement, compte tenu des dangers et inconvénients de l'exploitation de la carrière autorisée située à moins de 100 mètres de nombreuses habitations, de plusieurs entreprises et d'une école, du fait des poussières et nuisances sonores générées, du fait de l'aggravation du risque d'inondation et du fait de la consommation d'espaces agricoles sans compensation.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 13 septembre 2016, 21 août 2017, 10 octobre 2017 et 9 janvier 2018, la société Les graviers garonnais, société par actions simplifiée, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge des associations requérantes le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administratif.

Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 5 décembre 2017, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il déclare s'en rapporter aux écritures du préfet de Tarn-et-Garonne devant le tribunal administratif.

La société Les graviers garonnais a présenté un mémoire enregistré le 27 avril 2018 qui n'a pas été communiqué.

Par ordonnance du 30 mars 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 30 avril 2018 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- l'arrêté ministériel du 22 septembre 1994 relatif aux exploitations de carrières et aux installations de premier traitement des matériaux de carrières ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Elisabeth Jayat,

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., représentant l'association France nature environnement Midi-Pyrénées, l'association France nature environnement Tarn-et-Garonne et l'association Agir Garonne et de MeA..., représentant la société Les graviers garonnais.

Une note en délibéré présentée pour la société Les graviers garonnais a été enregistrée le 7 décembre 2018.

Une note en délibéré présentée pour l'association France nature environnement Midi-Pyrénées, l'association France nature environnement Tarn-et-Garonne et l'association Agir Garonne a été enregistrée le 11 décembre 2018.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 28 mars 2013, le préfet de Tarn-et-Garonne a autorisé la société Les graviers garonnais à exploiter une carrière de sables et graviers sur le territoire de la commune de Verdun-sur-Garonne dans le lit majeur de la Garonne, en rive droite, pour une durée de 14 ans, sur une superficie d'environ 92,7 ha dont 74,6 exploitables et pour une production maximale annuelle de 600 000 tonnes. L'association France nature environnement Midi-Pyrénées, l'association France nature environnement Tarn-et-Garonne et l'association Agir Garonne ont demandé l'annulation de cet arrêté. Elles font appel du jugement du 11 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Dans ses points 6 à 16, le jugement décrit précisément le contenu de l'étude d'impact produite à l'appui de la demande, globalement, puis sur chaque catégorie d'incidences que les associations requérantes estimaient insuffisamment étudiées et conclut que l'étude d'impact, complétée par de nombreuses annexes, permettait au public d'apprécier l'impact du projet sur l'environnement et la pertinence des mesures envisagées pour en atténuer les inconvénients. Les points 14 et 15 sont, en particulier, consacrés aux risques routiers, d'une part, et aux risques liés aux réseaux et autres aménagements présents sur le site de l'exploitation, d'autre part. Le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à chacun des arguments présentés par les associations requérantes, a suffisamment motivé son jugement et n'a omis de répondre à aucun moyen.

Sur le fond du litige :

En ce qui concerne l'étude d'impact :

3. Le contenu de l'étude d'impact est déterminé par les articles R. 512-8 et R. 122-5 du code de l'environnement dans leur rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué. En application de ces dispositions, ce contenu " doit être en relation avec l'importance de l'installation projetée et avec ses incidences prévisibles sur l'environnement, au regard des intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1 ". Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

4. Ainsi que l'a relevé le tribunal, l'étude d'impact jointe au dossier de demande comprenait 280 pages et comportait un résumé non technique, une présentation du projet, un exposé sur la nature et l'importance des inconvénients potentiels assorti d'un exposé de la méthode d'exploitation, une présentation de l'état initial dans toutes ses composantes environnementales, les effets sur l'environnement directs et indirects, temporaires et permanents et les mesures correctrices proposées, les raisons du choix du projet, le récapitulatif des mesures proposées, les conditions de remise en état du site et les effets potentiels sur la santé publique. Comme l'ont également relevé les premiers juges, le dossier comportait par ailleurs une étude de dangers d'une centaine de pages ainsi que huit annexes dont un descriptif du tapis de plaine et le plan des installations, l'étude hydraulique et hydrogéologique réalisée en avril 2010 par un bureau d'études spécialisé SOGREAH et le rapport du tiers-expert de cette étude, établi par le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) en avril 2011.

5. S'agissant du risque d'aggravation des inondations par l'exploitation qui sera située en zone rouge du plan de prévention des risques d'inondation approuvé le 18 septembre 2002, l'étude hydraulique et hydrogéologique annexée à l'étude d'impact et validée, comme il a été dit, par le BRGM, repose sur une méthodologie et des données scientifiques ainsi que sur des observations et relevés réalisés sur place. La circonstance que les auteurs de l'étude ont entendu, comme il est précisé en début du rapport, trois riverains du secteur d'étude dont le témoignage, selon les associations requérantes, ne serait pas fiable, n'est pas de nature à priver l'étude de pertinence dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que les conclusions du rapport reposeraient principalement sur ces témoignages. Les associations requérantes, qui critiquent la modélisation employée, n'apportent pas d'éléments permettant d'infirmer la validité du modèle retenu. Elles n'apportent pas davantage d'éléments permettant d'estimer que l'inexactitude de certains documents graphiques joints à l'étude hydraulique et l'absence de prise en compte des bandes de transport des matériaux extraits et du stockage des déchets inertes, qui n'atteindra pas 75 000 m3 mais, aux termes de l'étude d'impact (p 180), 1 000 m3 par an, auraient pu conduire à des conclusions erronées de l'étude. Au demeurant, s'agissant de la bande transporteuse, la société Les graviers garonnais a produit en première instance un document d'avril 2014 émanant du cabinet ayant réalisé l'étude hydraulique et indiquant que cet équipement avait été pris en compte dans les résultats de l'étude et que sa présence n'aurait qu'une incidence très limitée sur les conditions d'écoulement des eaux en cas de crue. L'étude hydraulique conclut également à l'absence d'aggravation des risques en cas de crue du fait de la présence de merlons anti-bruit, et il ne résulte d'aucun élément de l'instruction que la réduction de la superficie d'exploitation postérieurement à la réalisation de l'étude d'impact aurait eu pour effet une modification de l'implantation des merlons telle qu'elle avait été initialement prévue. S'agissant de l'implantation prévue des merlons, il ne résulte pas de l'instruction, et notamment pas du document cartographique dont se prévalent les associations requérantes, que la société aurait prévu d'implanter des merlons dans un sens qui ne suivrait pas la direction principale d'écoulement, du sud vers le nord, des eaux en cas de crue. Si, comme l'indiquait le préfet dans ses écritures de première instance, des débits de plus faible intensité sont susceptibles de s'écouler d'est en ouest, il ne résulte d'aucun élément de l'instruction que cette donnée n'aurait pas été prise en compte dans l'étude d'impact et notamment dans l'étude hydraulique annexée. Ainsi, les données de l'étude d'impact n'apparaissent pas lacunaires sur ce point qui n'a d'ailleurs pas appelé d'observations particulières de l'autorité environnementale. Au surplus, la société a fait élaborer, à la demande de la commune de Verdon-sur-Garonne, deux études hydrauliques complémentaires en 2014 et 2015, indiquant qu'en cas d'alerte, les merlons seraient arasés rapidement, par des moyens qui sont précisément décrits et qu'aucun élément de l'instruction ne permet de mettre en doute. Ainsi, à supposer même que l'étude d'impact ait été lacunaire sur le positionnement des merlons, cette insuffisance ne peut être regardée comme ayant nui à l'information complète du public ni comme ayant été de nature à influer sur le sens de la décision prise. L'étude d'impact, et notamment l'étude hydraulique qui y est annexée, consacre par ailleurs des développements suffisants aux effets de la création des trois plans d'eau prévus pour la remise en état du site à la fin de l'exploitation. La diminution ou augmentation, selon les endroits, des vitesses d'écoulement des eaux qui en résultera est quantifiée. L'étude d'impact ne peut être regardée comme lacunaire sur ce point.

6. S'agissant de la sécurité publique, l'étude d'impact comportait en annexe 3 un document descriptif du tapis de plaine destiné à transporter les matériaux extraits. Si ce document financier et technique ne permettait pas d'avoir une idée précise de la configuration de l'ouvrage et notamment de ses dimensions, il résulte de l'instruction que l'étude hydraulique annexée à l'étude d'impact intégrait, comme il a été dit ci-dessus, la présence de cet ouvrage et le cabinet auteur de l'étude a précisé dans le document mentionné ci-dessus d'avril 2014 produit en première instance, les raisons pour lesquelles l'ouvrage, dont il indique qu'il s'agira d'une table de 80 cm de haut supportée par des pieds de 15 cm de largeur tous les 5 mètres parallèle au sens de l'écoulement des eaux sur la plupart de son tracé, n'était pas susceptible d'avoir une incidence significative sur l'écoulement des eaux. Aucun élément de l'instruction ne permet de mettre en doute cette affirmation. Par ailleurs, il résulte de l'instruction et notamment des affirmations de la société qui fait état du décret n° 73-404 du 26 mars 1973 prévoyant l'obligation de réaliser des franchissements réguliers sur ce type d'équipements, que la bande transporteuse prévue, d'une longueur de 2,8 kilomètres, doit être équipée de passages supérieurs réglementaires tous les 100 mètres. En tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que les dispositifs liés à l'exploitation seraient de nature à entraver l'évacuation des personnes en cas de crue, qui s'effectuerait en priorité par les voies de communication et non par les propriétés privées qui comportent plusieurs obstacles tels que clôtures, haies, fossés ou ruisseaux. Dans ces conditions, et alors que le site d'exploitation ne se situe pas dans l'espace de mobilité de la Garonne et que le secteur est, comme l'a relevé le tribunal, couvert par le service d'annonce des crues prévu par le plan de prévision du risque inondation, l'absence de précision suffisante des données de l'étude d'impact quant à la configuration de la table de transport des matériaux n'a pas été, dans les circonstances de l'espèce, de nature à nuire à l'information complète du public ni à influer sur le sens de la décision.

7. S'agissant des risques liés aux poussières et aux nuisances sonores, des risques routiers et des risques liés à la présence sur le site ou à proximité, de réseaux et d'équipements, comme l'ont constaté les premiers juges dont il y a lieu d'adopter les motifs pertinents sur ces points, l'étude d'impact comporte des précisions suffisantes. S'agissant des aménagements routiers prévus, aucune disposition n'imposait au pétitionnaire de joindre à l'étude d'impact les autorisations nécessaires à la réalisation de ces aménagements.

8. En application de l'article R. 512-6 du code de l'environnement, le pétitionnaire doit fournir à l'appui de sa demande des études et documents sur ses installations susceptibles, par leur proximité ou leur connexité avec le projet, d'en modifier les dangers ou inconvénients. L'installation de broyage-concassage exploitée par la société pétitionnaire sur le territoire de la commune d'Ondes, à une dizaine de kilomètres du projet, constitue la destination des matériaux extraits, lesquels doivent y être acheminés ainsi qu'il a été indiqué dans l'étude d'impact, et présente donc avec le projet un lien de connexité. En revanche, il ne résulte d'aucun élément de l'instruction que cette installation soit de nature, par cette connexité ou sa proximité avec le projet, d'en aggraver ou d'en modifier les risques ou les inconvénients. L'absence dans le dossier de précisions sur cette installation n'a donc pas entaché l'autorisation d'irrégularité.

En ce qui concerne l'avis du commissaire enquêteur :

9. Si le commissaire enquêteur n'a pas formellement indiqué qu'il émettait un avis favorable sur le projet, comme l'ont relevé les premiers juges dont il y a lieu d'adopter les motifs

pertinents sur ce point, il a analysé les observations qui lui ont été soumises ainsi que les réponses apportées par le pétitionnaire et a rendu un avis qui doit être regardé comme personnel, motivé et dépourvu d'ambigüité.

En ce qui concerne la méconnaissance du plan de prévention du risque inondation applicable au secteur Garonne amont :

10. L'article 2.1.1.1 du plan de prévention du risque inondation applicable au secteur concerné interdit en zone rouge toute construction, travaux, digues et remblais, clôtures, haies, plantations, installations et activités à l'exception de ceux visés notamment à l'article 2.1.1.2, lequel autorise en zone rouge en particulier certains types de clôture ainsi que, sous réserve qu'une étude hydraulique justifie l'absence d'impact négatif mesurable ou définisse des mesures compensatoires, les remblais, le stockage de matériaux et la création de carrières.

11. Le projet de la société Les graviers garonnais a fait l'objet d'une étude hydraulique et hydrogéologique qui conclut à l'absence d'impact significatif de la carrière projetée, des installations nécessaires à son exploitation, des stockages de déchets inertes et des trois plans d'eau qui doivent être aménagés pour la remise en état du site, en préconisant l'installation des merlons anti-bruit dans un sens qui ne soit pas perpendiculaire à celui de l'écoulement des eaux, l'aménagement d'ouvertures dans les merlons et l'aménagement des berges des plans d'eau pour éviter un risque de déstabilisation. Comme dit précédemment, il ne ressort d'aucun élément de l'instruction que cette étude reposerait sur des données et sur une méthodologie erronées ou lacunaires ni que ses résultats seraient faussés. Dans ces conditions, l'autorisation ne peut être regardée comme ayant été délivrée en méconnaissance des dispositions rappelées ci-dessus du plan de prévention du risque d'inondation.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'arrêté ministériel du 22 septembre 1994 :

12. Le 2 de l'article 11 de l'arrêté ministériel du 22 septembre 1994 relatif aux exploitations de carrières dispose que : " (...) II. - Les exploitations de carrière en nappe alluviale dans le lit majeur ne doivent pas créer de risque de déplacement du lit mineur, faire obstacle à l'écoulement des eaux superficielles ou aggraver les inondations. Les exploitations de carrières de granulats sont interdites dans l'espace de mobilité du cours d'eau. L'espace de mobilité est défini comme l'espace du lit majeur à l'intérieur duquel le lit mineur peut se déplacer. L'espace de mobilité est évalué par l'étude d'impact en tenant compte de la connaissance de l'évolution historique du cours d'eau et de la présence des ouvrages et aménagements à caractère provisoire faisant obstacle à la mobilité du lit mineur. Cette évaluation de l'espace de mobilité est conduite sur un secteur représentatif du fonctionnement géomorphologique du cours d'eau en amont et en aval du site de la carrière sur une longueur minimale de 5 kilomètres (...) ".

13. Ces dispositions portant prescriptions générales applicables aux exploitations de carrières ont été adoptées en application de l'article 7 de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 aujourd'hui repris à l'article L. 512-5 du code de l'environnement et s'appliquent de plein droit aux installations autorisées après son entrée en vigueur sous réserve des adaptations ou dérogations qu'elles autorisent. Aucune des dispositions de l'autorisation préfectorale contestée ne déroge expressément à celles de l'arrêté ministériel qui est visé. Ainsi qu'il a été dit précédemment, il ne résulte d'aucun élément de l'instruction que le projet autorisé risque d'aggraver le risque d'inondation du fait de la présence de merlons, du système d'évacuation des granulats par bande transporteuse, du stockage des déchets inertes et de la création des plans d'eau. Par ailleurs, il résulte de l'instruction et notamment de l'étude hydraulique conduite sur le projet, que les secteurs d'extraction sont situés dans le lit majeur mais à l'extérieur de l'espace de mobilité de la Garonne, l'étude de cet espace ayant été réalisée sur un linéaire de plus de 10 kilomètres ainsi que le précise l'étude hydraulique en page 8. Dans ces conditions, l'arrêté préfectoral ne peut être regardé comme dérogeant illégalement à l'arrêté ministériel du 22 septembre 1994.

En ce qui concerne la méconnaissance du schéma départemental des carrières de Tarn-et-Garonne du 13 avril 2004 :

14. En application de l'article L. 515-3 du code de l'environnement, le schéma régional des carrières définit notamment les conditions générales d'implantation des carrières et fixe les objectifs à atteindre en matière de limitation et de suivi des impacts et les orientations de remise en état et de réaménagement des sites. Ce même article prévoit que les autorisations de carrières doivent être compatibles avec ce schéma. Ainsi que l'a estimé le tribunal, il appartient au juge de rechercher si l'autorisation ne contrarie pas les objectifs du schéma départemental en se plaçant à l'échelle du département, qui est le territoire couvert par le schéma.

15. Les associations requérantes invoquent les dispositions du schéma départemental des carrières interdisant l'ouverture de carrières susceptibles d'aggraver les risques de crue, celles préconisant d'éviter le mitage du territoire par des plans d'eau et celles prévoyant, d'une part, l'analyse dans l'étude d'impact des effets sur l'agriculture locale et, d'autre part, la proposition de mesures compensatoires adaptées sur ce point. Le site du projet est implanté en zone " violette " du schéma qui est un " secteur à enjeux potentiels ".

16. S'agissant du risque d'aggravation des crues, ainsi qu'il a été dit précédemment, ce risque a été analysé et considéré comme non significatif, selon une méthodologie et d'après des données dont aucun élément de l'instruction ne permet d'estimer qu'elles seraient erronées. Il résulte de cette étude que les hauteurs d'eau attendues en cas de crue dans ce secteur peuvent atteindre par endroit jusqu'à 2,50 mètres et que l'exploitation aura pour effet, à certains endroits, d'abaisser cette hauteur d'eau et à d'autres de l'augmenter de moins de 10 cm. Il ressort également de cette étude que les vitesses d'écoulement des eaux, de l'ordre de 0,5 à 0,9 m3 par seconde, ne seraient pas modifiées par l'exploitation si ce n'est dans une proportion négligeable. Ainsi, sur ce point, l'autorisation contestée n'est pas incompatible avec le schéma départemental des carrières qui n'envisage l'exploitation de carrières que si l'étude d'impact montre que le projet n'a pas d'influence notable sur l'écoulement des crues.

17. S'agissant de l'impact du projet sur l'activité agricole, l'étude d'impact indique, en l'état du projet qui, avant réduction, portait alors sur plus de quatre-vingt dix hectares, que l'exploitation de la carrière aura pour effet une diminution des terres agricoles de la commune d'environ 4% et expose les aménagements prévus en fin d'exploitation et les mesures compensatoires prévues en vue, notamment, de ne pas gêner les exploitations environnantes. Il résulte par ailleurs de l'instruction et notamment de l'arrêté préfectoral contesté qui, en son article 21, prévoit trois plans d'eau de 10 ha, 4,6 ha et 30 ha et des berges aménagées et hauts fonds de 29 ha, trois zones boisées d'environ 10 ha au total et près de 9 ha rendus à leur vocation agricole, et il n'est d'ailleurs pas sérieusement contesté qu'après réduction de la surface d'exploitation envisagée, le projet aura pour effet la suppression de 65,78 ha de terres agricoles, soit environ 2,6 % des terres agricoles de la commune d'implantation, la société exploitante ayant fait le choix d'une remise en état majoritairement par la réalisation de trois plans d'eau. Toutefois, en l'absence d'éléments permettant d'estimer que cette consommation d'espaces agricoles aurait un impact notable à l'échelle du département, il ne résulte pas de l'instruction que, compte tenu par ailleurs de la baisse non contestée de l'extraction des matériaux alluvionnaires dans le département et des besoins en matériaux dans ce département, l'autorisation contestée serait incompatible sur ce point avec le schéma départemental des carrières.

18. S'agissant du mitage du territoire par les plans d'eau aménagés après exploitation, il résulte de l'instruction que la société a fait le choix de ce mode de remise en état par préférence à un comblement par l'apport de matériaux extérieurs pour éviter la circulation de camions sur le site d'exploitation et, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, les gravières les plus proches étant situées à 5 kilomètres, la préconisation du schéma départemental de réunir ou étendre les plans d'eau existants n'est pas applicable en l'espèce. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que l'autorisation accordée serait incompatible avec le schéma départemental des carrières sur cette question.

En ce qui concerne le non-respect du plan d'occupation des sols :

19. Il résulte de l'instruction qu'à la date de l'acte contesté, le secteur d'exploitation de la carrière autorisée était classé en zone NCcg du plan d'occupation des sols alors en vigueur, dans laquelle étaient autorisées les exploitations de carrières et gravières. Le préfet de Tarn-et-Garonne a au surplus indiqué en première instance que le secteur a été classé en zone Ng du plan local d'urbanisme approuvé ultérieurement, dans laquelle les carrières sont également autorisées. Si les associations requérantes soutiennent que le site serait également en partie classé en zone NDbg du plan d'occupation des sols, le règlement de zone qu'elles invoquent autorise l'exploitation de carrières si une étude hydraulique démontre l'absence d'impacts négatifs mesurables ou préconise des mesures compensatoires. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'étude hydraulique produite, dont il ne résulte pas de l'instruction qu'elle reposerait sur une méthodologie et des données erronées, fait apparaître un impact négligeable de l'exploitation projetée sur le risque d'inondation. Si les terrains d'implantation du dispositif de bandes transporteuses étaient classés en zone NCg à vocation agricole au plan d'occupation des sols, il ne résulte d'aucun élément de l'instruction que ce dispositif remettrait en cause la vocation agricole de la zone. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance du plan d'occupation des sols doit être écarté.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article L. 511-1 du code de l'environnement :

20. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique (...) ". L'article L. 512-1 de ce code soumet à autorisation les installations " qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 ". En application de l'article L. 181-3 du même code, l'autorisation ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés notamment à l'article L. 511-1.

21. Les associations requérantes soutiennent que le projet entraînera pour le voisinage, composé d'habitations, d'une école et d'entreprises, des nuisances sonores et des poussières, et générera ainsi, des dangers pour la santé publique. Elles soutiennent également que, du fait de son implantation en zone rouge du plan de prévention du risque d'inondation, l'exploitation présente un danger pour la sécurité publique. Elles soutiennent, enfin, que l'exploitation impactera 75 ha de terrains agricoles. Il ne résulte cependant d'aucun élément de l'instruction que les prescriptions générales et les prescriptions particulières contenues dans l'arrêté préfectoral, imposées à l'exploitant, ne seraient pas de nature à assurer la prévention des dangers et inconvénients liés aux bruits et aux poussières. Comme il a été dit ci-dessus, il ne résulte par ailleurs pas de l'instruction que le projet ait pour effet d'aggraver l'exposition, déjà importante, du secteur, aux risques d'inondations. Enfin, la suppression, à terme, de 65,78 ha de terres agricoles, soit environ 2,6 % des terres agricoles de la commune d'implantation, ne traduit pas, par elle-même, un grave danger ou inconvénient pour l'agriculture. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 511-1 du code de l'environnement doit être écarté.

22. Il résulte de tout ce qui précède que les associations requérantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 28 mars 2013.

Sur les frais liés à l'instance :

23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement aux associations requérantes d'une somme au titre des frais d'instance qu'elles ont exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à leur charge le versement à la société Les graviers garonnais d'une somme au titre des frais d'instance exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête des associations France nature environnement Midi-Pyrénées, France nature environnement Tarn-et-Garonne et Agir Garonne est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société Les graviers garonnais tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association France nature environnement Midi-Pyrénées, à l'association France nature environnement Tarn-et-Garonne, à l'association Agir Garonne, à la société Les graviers garonnais et au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire. Une copie en sera adressée au préfet de Tarn-et-Garonne et aux communes de Grisolles, de Dieupentale et de Verdun sur Garonne.

Délibéré après l'audience du 4 décembre 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Frédéric Faïck, premier conseiller,

Mme Florence Madelaigue, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 18 décembre 2018.

Le premier assesseur,

Frédéric Faïck

Le président-rapporteur,

Elisabeth Jayat

Le greffier,

Florence Deligey

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 16BX01638


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX01638
Date de la décision : 18/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

40-02 Mines et carrières. Carrières.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Elisabeth JAYAT
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : TERRASSE ALICE

Origine de la décision
Date de l'import : 25/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-12-18;16bx01638 ?
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