La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/12/2018 | FRANCE | N°16BX03129

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 31 décembre 2018, 16BX03129


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Grondin travaux paysagers a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner la région Réunion à lui verser la somme

de 1 960 000 euros en réparation du préjudice résultant de la résiliation des contrats concernant les lots n° 4, n° 7 et n° 9 du marché à bons de commandes relatif à la réalisation de travaux d'entretien des espaces verts le long des routes nationales de La Réunion.

Par un jugement n° 1400979 du 26 mai 2016, le trib

unal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requêt...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Grondin travaux paysagers a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner la région Réunion à lui verser la somme

de 1 960 000 euros en réparation du préjudice résultant de la résiliation des contrats concernant les lots n° 4, n° 7 et n° 9 du marché à bons de commandes relatif à la réalisation de travaux d'entretien des espaces verts le long des routes nationales de La Réunion.

Par un jugement n° 1400979 du 26 mai 2016, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 8 septembre 2016 et 13 novembre 2017, la société Grondin travaux paysagers, représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 26 mai 2016 ;

2°) de condamner la région Réunion à lui verser la somme de 1 960 000 euros en réparation du préjudice causé par la résiliation des contrats concernant les lots n° 4, n° 7 et

n° 9 du marché à bons de commandes relatif à la réalisation de travaux d'entretien des espaces verts le long des routes nationales de La Réunion ;

3°) de mettre à la charge de la région Réunion le paiement de la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la résiliation du marché en cause est due, non à un motif d'intérêt général, mais à la faute commise par la région Réunion et qui a consisté à n'avoir pas examiné, en l'absence de vigilance suffisante, les offres d'un candidat, de sorte que la procédure de passation a été entachée d'irrégularité ;

- les articles 33 et 38 du cahier des clauses administratives générales applicable aux fournitures courantes et services ne peuvent s'appliquer ;

- la faute commise par la région lui a directement causé un préjudice tenant à un manque à gagner qui doit être évalué à la somme de 1 960 000 euros, par application de sa marge bénéficiaire de 25 % sur le chiffre d'affaires attendu de 7 840 000 euros pour l'exécution du marché sur une durée de quatre ans.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 27 avril et 24 novembre 2017, la région Réunion, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce qu'il soit mis à la charge de la société Grondin travaux paysagers le paiement de la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la société Grondin travaux paysagers ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- l'arrêté du 19 janvier 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de fournitures courantes et de services ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M.B...,

- les conclusions de M. Normand, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant la région Réunion.

Considérant ce qui suit :

1. À l'issue d'une procédure d'appel d'offre pour la passation d'un marché à bons de commandes relatif à la réalisation de travaux d'entretien des espaces verts le long des routes nationales de La Réunion, comportant neuf lots, la région Réunion a attribué à la société Grondin travaux paysagers les lots n° 4 " zone d'action de la subdivision routières

ouest (2A) ", n° 7 " zone d'action de la subdivision routière sud (3A) " et n° 9 " zone d'action de la subdivision routière est (4) ", chaque lot comportant un minimum et un maximum de commandes. Les actes d'engagement relatifs à ces lots, signés le 7 avril 2014, ont été notifiés à l'attributaire le 17 avril suivant.

2. Cependant, par une lettre du 22 mai 2014, la région Réunion a informé la société Grondin travaux paysagers que les marchés relatifs à l'ensemble des neuf lots seraient résiliés en raison d'un " vice de procédure ", à l'issue de l'attribution d'un nouveau marché en août 2014. Par un nouvel avis d'appel public à la concurrence publié le 28 mai 2014, la région Réunion a relancé une procédure d'appel d'offres en vue de l'attribution du marché à bons de commandes relatif à la réalisation de travaux d'entretien des espaces verts le long des routes nationales de la Réunion, comportant neuf lots identiques au marché précédent. Par lettre du 18 août 2014, la région Réunion a informé la société Grondin travaux paysagers du rejet de ses offres présentées dans le cadre de cette seconde procédure, puis, par lettre du 12 janvier 2015, elle lui a notifié la résiliation des marchés initialement conclus. Elle lui a versé une indemnité en réparation de cette résiliation à hauteur d'une somme globale de 56 370,32 euros. La société Grondin travaux paysagers relève appel du jugement du 26 mai 2016 par lequel le tribunal administratif

de La Réunion a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la région Réunion à lui verser la somme de 1 960 000 euros en réparation du manque à gagner qu'elle estime avoir subi du fait de ladite résiliation.

Sur la responsabilité du fait de la résiliation des contrats :

3. Aux termes de l'article 29 du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de fournitures courantes et de services, applicable aux marchés

résiliés : " Le pouvoir adjudicateur peut (...) mettre fin, à tout moment, à l'exécution des prestations pour un motif d'intérêt général. Dans ce cas, le titulaire a droit à être indemnisé du préjudice qu'il subit du fait de cette décision, selon les modalités prévues à l'article 33. (...) ".

4. Il résulte de l'instruction que les marchés litigieux ont été résiliés au motif que la passation de l'ensemble des lots du marché relatif à la réalisation de travaux d'entretien des espaces verts le long des routes nationales de La Réunion était entachée d'une irrégularité tenant à la circonstance que les offres d'un candidat, présentées pour chacun des neuf lots, n'avaient pas été examinées. Ce manquement aux règles de publicité et de mises en concurrence justifiait, pour un motif d'intérêt général tenant au respect de ces règles, la résiliation des contrats en

cause. Si la société Grondin travaux paysagers soutient que la région Réunion a commis une faute en raison de ce qu'elle n'a pas conduit une procédure régulière, le manquement ainsi commis a eu, compte tenu de sa gravité, une incidence déterminante sur l'attribution des marchés en sa faveur, de sorte que le lien entre la faute de l'administration et le manque à gagner dont elle entend sur ce terrain obtenir la réparation ne peut être regardé comme direct.

Sur l'évaluation du préjudice subi du fait de la résiliation des contrats :

5. D'une part, aux termes de l'article 33 du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de fournitures courantes et de services, applicable aux marchés

résiliés : " Lorsque le pouvoir adjudicateur résilie le marché pour motif d'intérêt général, le titulaire a droit à une indemnité de résiliation, obtenue en appliquant au montant initial hors taxes du marché, diminué du montant hors taxes non révisé des prestations admises, un pourcentage fixé par les documents particuliers du marché ou, à défaut, de 5 %./ Le titulaire a droit, en outre, à être indemnisé de la part des frais et investissements, éventuellement engagés pour le marché et strictement nécessaires à son exécution, qui n'aurait pas été prise en compte dans le montant des prestations payées. Il lui incombe d'apporter toutes les justifications nécessaires à la fixation de cette partie de l'indemnité dans un délai de quinze jours après la notification de la résiliation du marché. (...) ".

6. D'autre part, aux termes de l'article 3.1 des actes d'engagements relatifs aux marchés résiliés : " Le marché est conclu pour une période de 4 ans ferme à compter de la notification du marché, avec possibilité de résiliation annuelle, sans que cette résiliation ouvre droit à indemnité. ". Il résulte de ces stipulations, lesquelles ne sont pas illicites, que la société requérante n'est fondée à demander une indemnisation en réparation de la résiliation des contrats en cause qu'au titre de la seule première année d'exécution de ces contrats.

7. La société Grondin travaux paysagers n'apporte pas d'éléments susceptibles d'établir que l'indemnité d'un montant global de 56 370,32 euros que lui a versée la région Réunion en réparation de la résiliation des marchés dont elle était titulaire, résultant des décomptes de résiliation produits à l'instance, serait inférieure à celle qui lui est due en application des dispositions et stipulations précitées.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la société Grondin travaux paysagers n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la région Réunion, qui n'est pas partie perdante à l'instance, la somme que demande la société Grondin travaux paysagers au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société appelante la somme que demande au même titre la région Réunion.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la région Réunion en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Grondin travaux paysagers et à la région Réunion.

Délibéré après l'audience du 18 décembre 2018 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme Aurélie Chauvin, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 décembre 2018.

Le rapporteur,

Didier B...

Le président,

Éric Rey-BèthbéderLe greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au préfet de La Réunion en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 16BX03129


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX03129
Date de la décision : 31/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Fin des contrats - Résiliation - Motifs.

Marchés et contrats administratifs - Fin des contrats - Résiliation - Droit à indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL

Origine de la décision
Date de l'import : 15/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-12-31;16bx03129 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award