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28/05/2019 | FRANCE | N°17BX01142

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 28 mai 2019, 17BX01142


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...D...a demandé au tribunal administratif de Limoges, à titre principal, d'annuler la décision du 14 février 2014 par laquelle le recteur de l'académie de Limoges a refusé de reconnaître comme maladie professionnelle l'affection dont elle souffre, ainsi que la décision du 6 juin 2014 par laquelle le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a rejeté son recours hiérarchique, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise afin de déterminer si les troubles d

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...D...a demandé au tribunal administratif de Limoges, à titre principal, d'annuler la décision du 14 février 2014 par laquelle le recteur de l'académie de Limoges a refusé de reconnaître comme maladie professionnelle l'affection dont elle souffre, ainsi que la décision du 6 juin 2014 par laquelle le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a rejeté son recours hiérarchique, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise afin de déterminer si les troubles dont elle souffre sont imputables au service, et de condamner l'État à lui verser une somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral.

Par un jugement n° 1401455 du 9 février 2017, le tribunal administratif de Limoges a annulé les décisions attaquées, a mis à la charge de l'État la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 avril 2017, Mme C...D..., représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 9 février 2017 en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires ;

2°) de condamner l'État à lui verser une indemnité d'un montant de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

3°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le recteur a rejeté sa demande indemnitaire par décision notifiée

le 30 novembre 2015, antérieurement au jugement attaqué, de sorte que ses conclusions indemnitaires étaient recevables devant les premiers juges ;

- la décision du recteur portant refus de reconnaissance de maladie professionnelle est insuffisamment motivée et entachée d'un vice de procédure ;

- les décisions litigieuses sont entachées d'une erreur de fait et d'une erreur de droit.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 mai 2018, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme D...ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 7 mai 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 19 juin 2018.

Un mémoire présenté pour Mme D...a été enregistré le 25 avril 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M.B...,

- les conclusions de M. Normand, rapporteur public,

- et les observations de MmeD....

Considérant ce qui suit :

1. Après qu'un " lymphome lymphoprolifératif " lui a été diagnostiqué au cours de l'année 2009, MmeD..., professeur de lycée professionnel de coiffure, a demandé,

le 11 juin 2009, que ses troubles soient reconnus comme maladie professionnelle.

La commission de réforme, saisie par le recteur de l'académie de Limoges, a estimé,

le 23 février 2010, qu'un complément d'information était nécessaire. Le professeur Coiffier, chef du service d'hématologie clinique du centre hospitalier Lyon sud a rendu, le 2 juillet 2011, son expertise aux termes de laquelle Mme D... ne présentait pas de lymphome mais une anomalie biologique bénigne qui ne nécessitait aucun traitement et ne saurait constituer une maladie professionnelle. Après avoir saisi à deux reprises la commission de réforme, laquelle a estimé, en dernier lieu le 28 janvier 2014, qu'une expertise auprès d'un référent en hématologie était nécessaire, le recteur a, par une décision du 14 février 2014, refusé de reconnaître l'affection de l'intéressée comme maladie professionnelle. Puis le ministre chargé de l'éducation nationale a, le 6 juin 2014, rejeté le recours hiérarchique exercé par Mme D... contre la décision du recteur. Par son jugement du 9 février 2017, le tribunal administratif de Limoges a annulé ces décisions au motif d'un vice de procédure. Mme D... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires.

2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable à la demande de première instance : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. (...) ".

3. Il résulte de l'instruction qu'antérieurement au jugement attaqué, le recteur de l'académie de Limoges a rejeté, par une décision du 30 septembre 2015, la demande indemnitaire préalable dont l'avait saisi Mme D...le 24 septembre 2015 sur le fondement de l'illégalité fautive de la décision portant refus de reconnaissance de maladie professionnelle. Ainsi, cette circonstance faisait obstacle à ce que les conclusions indemnitaires de l'intéressée soient rejetées par le tribunal comme irrecevables en dépit de la fin de non-recevoir opposée en défense par le recteur, ainsi que le fait valoir MmeD.... Par suite, le jugement attaqué doit être annulé pour irrégularité en tant qu'il rejette ses conclusions indemnitaires.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande indemnitaire présentée par Mme D...devant le tribunal administratif de Limoges.

5. D'une part, si l'intervention d'une décision illégale peut constituer une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'administration, elle ne saurait donner lieu à réparation si, dans le cas d'une procédure régulière, la même décision aurait pu légalement être prise.

6. D'autre part, une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

7. Il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expertise réalisée

le 2 juillet 2011 par le chef du service d'hématologie clinique du centre hospitalier Lyon sud, confirmant d'ailleurs les conclusions de son homologue du groupe hospitalier Necker de l'Assistance publique-hôpitaux de Paris rendues à la suite d'une consultation du 11 août 2009, que Mme D...ne présente aucun lymphome, ni aucune autre maladie lymphoproliférative et que l'arrêt de travail débuté le 11 juin 2009, peu de temps après l'annonce erronée d'un lymphome et les soins qui lui ont été dispensés, ne peuvent en aucun cas être pris en compte au titre d'une maladie imputable au service. L'irrégularité entachant les décisions litigieuses et tenant au défaut d'avis préalable de la commission départementale de réforme n'a pas été, en l'espèce, susceptible d'exercer une influence sur le refus, justifié au fond, qui a été opposé à MmeD.... Ses conclusions tendant à être indemnisée du préjudice moral subi du fait de ce refus ne peuvent donc qu'être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas partie perdante à l'instance, la somme que demande Mme D...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Limoges est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions indemnitaires de MmeD....

Article 2 : Les conclusions indemnitaires présentées par Mme D...devant le tribunal administratif de Limoges ainsi que ses conclusions présentées en application de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...D...et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Copie en sera transmise, pour information, au recteur de l'académie de Limoges.

Délibéré après l'audience du 30 avril 2019 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme Aurélie Chauvin, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 mai 2019.

Le rapporteur,

Didier B...

Le président,

Éric Rey-BèthbéderLe greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX01142


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX01142
Date de la décision : 28/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-07-04 Fonctionnaires et agents publics. Statuts, droits, obligations et garanties. Comités médicaux.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : CLERC

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-05-28;17bx01142 ?
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