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01/10/2019 | FRANCE | N°18BX02949

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 01 octobre 2019, 18BX02949


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2017 par lequel le préfet du Lot a refusé de lui délivrer un titre de séjour et 1'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1705376 du 3 mai 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 juillet 2018, M. B..., représenté par

Me F..., demande à la cour :

1°) de 1'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre pro...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2017 par lequel le préfet du Lot a refusé de lui délivrer un titre de séjour et 1'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1705376 du 3 mai 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 juillet 2018, M. B..., représenté par Me F..., demande à la cour :

1°) de 1'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 3 mai 2018 ;

3°) d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2017 du préfet du Lot susmentionné ;

4°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, à défaut, de procéder à un réexamen de sa situation ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à verser à son conseil en application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour attaquée est entachée d'un défaut de motivation en fait au regard des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, dès lors que le préfet n'a pas tenu compte de sa demande de régularisation au titre du travail ;

- la motivation de cette décision révèle que le préfet n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation ;

- la décision portant refus de titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît tant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que celles du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, dès lors qu'il justifie d'attaches familiales fortes en France où résident ses parents, et ses frères et soeurs, qu'il n'a plus d'attaches dans son pays d'origine, et qu'il justifie de sa capacité d'intégration professionnelle car il bénéficie d'une promesse d'embauche dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée ;

- le refus de séjour méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que, converti au catholicisme, il a été menacé de mort dans son pays d'origine et a dû fuir l'Algérie ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français contestée est illégale par voie de conséquence de 1'illégalité du refus de titre de séjour ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français contestée est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale et méconnaît les stipulations de 1'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale ;

- la décision fixant le pays de renvoi contestée est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- la décision fixant le pays de renvoi contestée méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 août 2018, le préfet du Lot conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens invoqués par M. B... ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 août 2018.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu:

- la convention européenne de sauvegarde des droits de 1'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 pris pour son application ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant algérien né le 12 septembre 1986, est entré en France le 28 août 2015 muni d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour et s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire à l'expiration de ce visa. Il a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile qui lui a été refusée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 3 octobre 2016, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 5 décembre 2016. Le préfet de la Haute-Garonne a pris à son encontre le 18 avril 2017 une décision portant obligation de quitter le territoire français à laquelle l'intéressé s'est soustrait. M. B... a, en outre, sollicité auprès de la préfecture du Lot la délivrance d'une carte de séjour au titre de la vie privée et familiale le 5 avril 2017. Par l'arrêté en date du 25 septembre 2017, le préfet du Lot a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 3 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la demande tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire :

2. Par une décision du 17 août 2018, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, ses conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire sont devenues sans objet. Il n'y a dès lors plus lieu d'y statuer.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, M. B... reprend en appel les moyens déjà soulevés en première instance et tirés du caractère insuffisamment motivé du refus de titre de séjour contesté au regard des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration et du défaut d'examen réel et sérieux de sa situation. Il ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par le premier juge.

4. En deuxième lieu, aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco­algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale est délivré de plein droit: (...) 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 1 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. A l'appui de son moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées, M. B... fait valoir qu'il est entré en France en 2015 pour y demander l'asile, qu'il dispose d'attaches familiales fortes en France où résident régulièrement ses parents et ses frères et soeurs, il ressort des pièces du dossier que M. B..., qui est entré en France de manière irrégulière, n'a été autorisé à séjourner en France qu'à titre temporaire le temps de 1'instruction de sa demande d'asile, qui a été définitivement rejetée par la Cour nationale du droit d'asile le 5 décembre 2016. Toutefois, aucune pièce du dossier ne corrobore les allégations de M. B... et le fait qu'il aurait en France établi le centre de ses intérêts, en particulier la promesse d'embauche, datée du 25 mai 2017, émanant de la société PNS, localisée à Paris, dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée en qualité d'agent d'entretien ne peut suffire à établir les efforts d'insertion de M. B.... Par ailleurs, le moyen tiré des risques encourus en cas de retour en Algérie est inopérant à l'encontre du refus de séjour qui n'implique pas, par lui-même, un retour dans ce pays. Dans ces conditions, la décision portant refus de titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs qui la fondent et n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles du 5° de l'article de l'article 6 de l'accord franco-algérien.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. En troisième lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision de refus de titre de séjour n'étant pas illégale, le moyen tiré de l'illégalité de cette décision, invoqué par voie d'exception à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire, doit être écarté.

7. En quatrième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, en prenant à l'encontre du requérant la décision l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet n'a ni commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de M. B..., ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

8. En cinquième lieu, la décision désignant le pays de renvoi attaquée vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de 1'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et indique que M. B... n'a pas démontré la réalité et l'authenticité des évènements allégués relatifs aux persécutions et menaces dont il aurait fait 1'objet ainsi que le bien-fondé des craintes énoncées en cas de retour dans son pays d'origine, et qu'il ne produit pas de justificatif de nature à le faire regarder comme craignant pour sa vie en cas de retour en Algérie. La décision fixant le pays de renvoi est ainsi suffisamment motivée.

9. Aux termes des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Aux termes des stipulations de 1'article 3 de ladite convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".

10. En sixième et dernier lieu, M. B..., dont la demande d'asile a été rejetée par une décision du 3 octobre 2016 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 5 décembre 2016, n'apporte aucun élément probant de nature à établir la réalité de risques de traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en se bornant à soutenir que du fait de sa conversion au catholicisme, il a été victime de menaces de mort et qu'il craint pour sa vie en cas de retour en Algérie. Par suite, la décision fixant le pays de renvoi n'a pas méconnu, d'une part, les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni, d'autre part, les dispositions précitées de l'article L.513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur les autres conclusions :

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal -administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions combinées des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'aide juridictionnelle à titre provisoire présentée par M. B....

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée au préfet du Lot.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Dominique Naves, président,

Mme E... G..., présidente-assesseure,

Mme A... D..., conseiller,

Lu en audience publique, le 1er octobre 2019.

Le rapporteur,

Agnès D...Le président,

Dominique NAVESLe greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 18BX02949


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX02949
Date de la décision : 01/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme POUGET M.
Rapporteur ?: Mme Agnès BOURJOL
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : BENHAMIDA

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-01;18bx02949 ?
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