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08/10/2019 | FRANCE | N°19BX01898

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 08 octobre 2019, 19BX01898


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 29 mai 2018 par lequel le préfet de l'Indre lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1801003 du 31 octobre 2018, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 mai 2019, Mme A..., représentée pa

r Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Limoges du 3...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 29 mai 2018 par lequel le préfet de l'Indre lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1801003 du 31 octobre 2018, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 mai 2019, Mme A..., représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Limoges du 31 octobre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 mai 2018 du préfet de l'Indre ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour, dans le délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, à tout le moins, de procéder au réexamen de sa situation et, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation, dans le délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens.

Elle soutient que :

- elle remplit les conditions aux fins de bénéficier de la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- en tout état de cause, elle doit pouvoir se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle est la mère d'un enfant français et vit en concubinage avec le père, ressortissant français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 septembre 2019, le préfet de l'Indre conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- la requête d'appel est tardive ;

- les moyens soulevés par Mme A... ne sont, en toute hypothèse, pas fondés.

Par une décision n° 2019/010544 du 29 août 2019, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux a rejeté la demande du 7 mai 2019 de Mme A... d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne en matière de séjour et de travail, signé à Paris le 17 mars 1988, modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante tunisienne, née le 26 septembre 1987, est entrée en France, le 17 octobre 2016 sous couvert d'un passeport tunisien délivré le 31 mai 2016 muni d'un visa de court séjour de 90 jours délivré le 18 août 2016 par les autorités allemandes. Le 24 octobre 2016, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " étudiant " qui lui a été refusé. Le 31 juillet 2017, elle a ensuite sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ". Elle relève appel du jugement du 31 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 mai 2018 par lequel le préfet de l'Indre lui a refusé la délivrance du titre de séjour demandé, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

2. En premier lieu, il résulte des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien susvisé et du point 2.3.3 du protocole du 28 avril 2008 annexé à cet accord, combinées avec les dispositions des articles L. 5221-2 et R. 5221-3 à -14 du code du travail, que la délivrance aux ressortissants tunisiens d'un titre de séjour portant la mention " salarié " est subordonnée à la présentation d'un visa de long séjour et d'un contrat visé par les services en charge de l'emploi.

3. A supposer que Mme A... ait entendu soutenir en appel que l'arrêté qu'elle conteste méconnaîtrait les stipulations et dispositions visées au point précédent, il est constant qu'outre le fait qu'elle ne dispose pas d'un visa de long séjour, elle n'a pas présenté, à l'appui de sa demande de titre de séjour " salarié ", un contrat de travail visé par les services de la direction régionale de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien et des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, en toute hypothèse, être écarté.

4. En deuxième lieu, l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 susvisé prévoit que : " Sans préjudice des dispositions du b et du d de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ". L'article 10 de ce même accord stipule : " 1. Un titre de séjour d'une durée de dix ans, ouvrant droit à l'exercice d'une activité professionnelle, est délivré de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour sur le territoire français : (...) / c) Au ressortissant tunisien qui est père ou mère d'un enfant français résidant en France, à la condition qu'il exerce, même partiellement, l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins (...). / 2. Sont notamment considérés comme remplissant la condition de séjour régulier, les bénéficiaires d'un titre de séjour d'un an délivré en application des articles 7 ter et 7 quater. (...). Et aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée " .

5. Si Mme A... semble, pour la première fois en appel, se prévaloir de la méconnaissance par le préfet des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif qu'elle est la mère d'un enfant français né le 20 octobre 2018, il est constant, en tout état de cause, qu'à la date de la décision attaquée du 29 mai 2018 ledit enfant n'était pas né et que les parents n'ont procédé à une reconnaissance préalable que le 22 juin 2018. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées par la décision en litige, dont la légalité s'apprécie à la date de son édiction, ne peut, en toute hypothèse, qu'être écarté.

6. En troisième et dernier lieu, portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Ainsi, dès lors que l'article 3 de l'accord franco-tunisien susvisé prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant tunisien souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-tunisien, au sens de l'article 11 de cet accord. Toutefois, si cet accord ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un titre de séjour à un ressortissant tunisien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Mais il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation. Et dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi.

7. Il résulte de ce qui vient d'être dit que Mme A... ne peut utilement invoquer la méconnaissance par le préfet de l'Indre des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ne lui sont pas applicables. Toutefois, et en admettant même que Mme A... ait entendu soutenir, en réalité, que le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation, dans le cadre de l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, outre ce qui vient d'être dit aux points 3 et 5, la requérante n'apporte aucun élément de nature à justifier de l'existence de motifs exceptionnels au soutien de sa demande de titre de séjour portant la mention " salarié ", non plus qu'au titre de sa vie privée et familiale, le préfet indiquant, sans être utilement contredit, n'avoir été rendu destinataire d'aucun élément d'information en ce sens avant l'édiction de sa décision. Il suit de là que Mme A... n'est pas davantage fondée à soutenir que l'arrêté qu'elle conteste serait entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation.

8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense et alors même que la nouvelle situation de l'intéressée ferait obstacle à ce que le préfet exécute l'obligation de quitter le territoire français, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 mai 2018 du préfet de l'Indre. Par voie de conséquence, les conclusions qu'elle présente à fin d'injonction ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Indre.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

Mme Anne Meyer, président-assesseur,

M. Thierry C..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 octobre 2019.

Le rapporteur,

Thierry C...Le président,

Catherine Girault

Le greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

No 19BX01898


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX01898
Date de la décision : 08/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. thierry SORIN
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : GOMOT-PINARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-08;19bx01898 ?
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