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29/10/2019 | FRANCE | N°19BX00791

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 29 octobre 2019, 19BX00791


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... G... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 23 février 2018 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1801629 du 18 septembre 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 février 2019, M. G..., r

eprésenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... G... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 23 février 2018 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1801629 du 18 septembre 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 février 2019, M. G..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 18 septembre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 février 2018 du préfet de la Gironde susmentionné ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier en tant que les premiers juges n'ont pas répondu à l'ensemble des arguments développés à l'appui du moyen tiré de l'erreur de droit, de l'erreur d'appréciation et de l'erreur de fait, liées à la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et notamment sur la question du maintien du lien thérapeutique établi en France depuis avril 2013, de l'indisponibilité du traitement que requière son état de santé dans son pays d'origine, et de sa situation de dépendance vis-à-vis de sa mère, chez qui il réside ;

- cet arrêté porte atteinte à sa vie privée et familiale et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que le centre de ses intérêts privés et familiaux se situe en France depuis sept ans, qu'il justifie de ses efforts d'insertion professionnelle, et qu'il établit suivre des cours de langue française, qu'il est dépendant de sa mère, titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, qui l'héberge, avec son épouse et ses deux enfants mineurs, qui sont scolarisés ;

- pour les mêmes motifs, le préfet a méconnu les prescriptions de la circulaire du 28 novembre 2012, prévoyant que la circonstance que les parents sont en situation irrégulière ne fait pas obstacle, en cas de scolarisation de leurs enfants, à leur admission au séjour ;

- l'arrêté contesté est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;

- l'arrêté contesté porte atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants mineurs et méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990.

Par un mémoire, enregistré le 3 mai 2019, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête en se référant expressément à ses écritures de première instance.

M. G... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 décembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 pris pour son application ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A... D...,

- et les observations de Me C..., représentant M. G....

Considérant ce qui suit :

1. M. G..., de nationalité arménienne, a déclaré être entré en France le 1er mai 2010 et a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 29 juillet 2010 et par la Cour nationale du droit d'asile le 30 mars 2011. Il a ensuite bénéficié de titres de séjour en qualité d'étranger malade, dont le dernier était valable jusqu'au 1er mai 2017. S'il en a sollicité le renouvellement, le préfet de la Gironde a toutefois pris un arrêté en date du 23 février 2018 portant à son encontre refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et décision fixant le pays de destination. M. G... relève appel du jugement du 18 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Si le requérant invoque une omission à statuer " sur les questions du maintien du lien thérapeutique établi en France depuis avril 2013, de l'indisponibilité du traitement que requière son état de santé dans son pays d'origine, et de sa situation de dépendance vis-à-vis de sa mère chez qui il réside ", en tout état de cause, les premiers juges, qui ont répondu à tous les moyens invoqués, n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments à l'appui de ces moyens.

3. Dans ces conditions, et à supposer que le requérant ait entendu mettre en cause la régularité du jugement, ce moyen ne peut qu'être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Aux termes des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. ". En application des dispositions de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. ".

5. Pour refuser d'accorder à M. G... le titre de séjour sollicité, le préfet de la Gironde s'est fondé sur l'avis rendu le 19 juillet 2017 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, lequel a relevé que si l'état de santé du demandeur nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut bénéficier effectivement d'un traitement adapté dans son pays d'origine eu égard à l'offre de soins, et lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine. Pour contester cet avis, M. G... soutient qu'il ne pourra bénéficier d'un traitement approprié en Arménie et produit à ce titre un certificat médical établi par le Dr Vigneau, psychiatre, le 14 avril 2017, attestant du suivi médico-psychologique de l'intéressé en raison de troubles psychiatriques, ainsi que de prescriptions médicamenteuses. Toutefois, il ressort des termes mêmes de ce certificat médical que son état de santé est désormais stabilisé, n'indique pas que les traitements dont M. G... a besoin ne seraient pas disponibles en Arménie et n'est donc pas de nature à contredire l'appréciation du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration selon laquelle il existe une offre de soins dans son pays d'origine. Dans ces conditions, le préfet de la Gironde n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle du requérant, ni d'erreur de fait.

6. La circonstance que l'autorité médicale a, par le passé, été d'avis que M. G... ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ne faisait pas obstacle à ce que son opinion évolue sur ce point, soit parce qu'il estimait que l'intéressé se trouvait dans une phase moins critique de sa pathologie, soit parce qu'il constatait que les traitements dont il a besoin sont désormais disponibles dans son pays. M. G... ne saurait, dès lors, utilement se prévaloir de la délivrance de cartes de séjour temporaire antérieures en raison de son état de santé.

7. Le tribunal administratif de Bordeaux a considéré que : " M. G..., soutient qu'il est parfaitement intégré en France où il est entré en 2010, où il vit avec son épouse et leurs deux enfants ainsi que sa mère et où il a travaillé et suivi des formations professionnelles. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que si sa mère est titulaire d'une carte de séjour temporaire, son épouse a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français le 5 avril 2017, contre laquelle le recours formé par l'intéressée a été rejeté par jugement n° 1703176 du tribunal du 31 octobre 2017 devenu définitif. Il n'établit pas que la cellule familiale ne pourrait pas se reconstituer dans leur pays d'origine, l'Arménie, où résident d'ailleurs les parents de son épouse. En outre, il ne justifie pas d'une insertion professionnelle significative. Dans ces conditions, l'arrêté attaqué n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ". M. G..., qui se borne en appel à reprendre dans les mêmes termes son argumentation développée en première instance et à produire les mêmes pièces justificatives qu'en première instance, ne se prévaut d'aucun élément de fait ou de droit nouveau utile de nature à remettre en cause l'appréciation du premier juge. Par suite, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par adoption des motifs pertinemment retenus par le tribunal administratif tels qu'ils viennent d'être rappelés.

8. Pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés au point précédent, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

9. Ainsi qu'en ont jugé à bon droit les premiers juges, le requérant ne peut utilement se prévaloir des dispositions de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui n'a pas un caractère réglementaire.

10. Aux termes des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Eu égard à la situation décrite plus haut et en l'absence de circonstance faisant obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue en Arménie, l'arrêté contesté ne peut être regardé comme méconnaissant, à l'égard des deux enfants mineurs du requérant, les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant. Par suite le moyen tiré de la violation de cet article doit être écarté.

Sur les autres conclusions :

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. G... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... G... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 1er octobre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Dominique Naves, président,

Mme E... F..., présidente-assesseure,

Mme A... D..., conseiller,

Lu en audience publique, le 29 octobre 2019.

Le rapporteur,

Agnès D...Le président,

Dominique NAVESLe greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX00791


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX00791
Date de la décision : 29/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: Mme Agnès BOURJOL
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : HACHET

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-29;19bx00791 ?
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