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12/11/2019 | FRANCE | N°18BX02806

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 12 novembre 2019, 18BX02806


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... et Mme I... H... épouse C... ont demandé au tribunal administratif de la Martinique d'annuler l'arrêté du 23 août 2017 par lequel le maire de la commune des Trois-Ilets a délivré un permis de construire à la société Iterato, société par actions simplifiée.

Par un jugement n° 1700626 du 17 mai 2018, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, un mémoire et des pièces, enregistrés le 17 juillet 201

8, le 31 juillet 2018 et le 16 janvier 2019, M. E... C... et Mme I... H... épouse C..., représentés ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... et Mme I... H... épouse C... ont demandé au tribunal administratif de la Martinique d'annuler l'arrêté du 23 août 2017 par lequel le maire de la commune des Trois-Ilets a délivré un permis de construire à la société Iterato, société par actions simplifiée.

Par un jugement n° 1700626 du 17 mai 2018, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, un mémoire et des pièces, enregistrés le 17 juillet 2018, le 31 juillet 2018 et le 16 janvier 2019, M. E... C... et Mme I... H... épouse C..., représentés par Me B..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Martinique du 17 mai 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté susmentionné ;

3°) de mettre à la charge de la commune des Trois-Ilets et de la société Iterato le paiement d'une somme globale de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

Sur la régularité du jugement :

- le jugement est irrégulier en l'absence de respect du contradictoire dès lors que les pièces produites par la commune à la demande du tribunal pour compléter l'instruction n'ont été ni visées ni communiquées et que le mémoire du 10 avril 2018 produit également par la commune, n'a pas été communiqué ;

- le tribunal a consulté le cadastre via un site internet en méconnaissance du principe du contradictoire ;

- le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de l'absence, dans le projet, de création d'aires de stationnement pour les deux roues en méconnaissance de l'article UC 12 du règlement du plan local d'urbanisme et de son annexe ;

Sur le bien-fondé du jugement :

- le dossier de demande de permis de construire est incomplet au regard des dispositions de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme en ce qu'il ne comporte pas les documents prévus au c) et au d) de cet article ce qui a faussé l'appréciation de la commune ; en effet le profil du terrain avant et après travaux n'apparait pas, de même que l'implantation des travaux, le volume extérieur des constructions et les cotes de niveau du terrain ; alors que le terrain présente une pente de 0,74 mètre, l'étude d'impact hydrologique jointe au dossier, qui ne porte pas sur le projet, ne permet pas de combler cette lacune ; le projet ne précise pas que la desserte est exclusivement réalisée par une voie privée ;

- le dossier de demande de permis est incomplet au regard des dispositions de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme en l'absence de mention dans le plan de masse de la limite de parcelle, de plan en trois dimensions, de mention de l'emplacement exact des constructions, du traitement des espaces verts, des réseaux extérieurs et raccordements et des cotes de référence PPRN alors que la zone est classée en aléa orange :

- la notice architecturale ne comprend pas les éléments prévus au f) de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme ;

- le projet qui concerne la construction d'un établissement recevant du public (ERP) ne respecte pas les dispositions de l'article R. 431-30 du code de l'urbanisme ; le dossier ERP n'a pas été instruit ;

- les concessionnaires de service public (eau, assainissement, électricité et ordures) n'ont pas été consultés sur le projet situé dans une zone déjà densément peuplée ;

- le projet qui consiste dans le développement d'une activité commerciale de tourisme, est incompatible avec le classement des lieux en zone UC destinée à l'habitat de densité moyenne ;

- le projet méconnaît les dispositions de l'article UC 3 du règlement du plan local d'urbanisme dès lors que la rue du Marignan n'est pas une desserte suffisante permettant l'intervention des secours compte tenu de la largeur de la voie, de son encombrement et de son caractère de voie privée ; l'intensification du trafic induit par le projet est de nature à mettre en péril la sécurité des riverains ;

- le projet méconnaît les dispositions de l'article UC 4 du règlement du plan local d'urbanisme dès lors qu'il ne permet pas d'apprécier l'adéquation des réseaux existants avec ce projet ;

- le projet méconnaît les dispositions de l'article UC 6 du règlement du plan local d'urbanisme en l'absence de preuve du respect de la règle de retrait de 10 mètres de la construction par rapport au cours d'eau le plus proche ;

- le projet méconnaît les dispositions de l'article UC 11 du règlement du plan local d'urbanisme dès lors qu'il prévoit des pilotis apparents ;

- le projet méconnaît les dispositions de l'article UC 12 du règlement du plan local d'urbanisme en l'absence d'aires de stationnement pour les deux roues et ne respecte pas la règle d'accessibilité des places de stationnement en prévoyant un stationnement en enfilade ; le nombre de places prévues est ainsi insuffisant ;

- le projet méconnaît les dispositions de l'article L. 111-7 du code de la construction et de l'habitation s'agissant d'un ERP dès lors que son accessibilité aux personnes handicapées n'est pas assurée compte tenu que les pièces de vie sont situées aux niveaux R+1 et R+2 ;

- le projet méconnait l'article 2 du titre 1 du règlement du plan local d'urbanisme dès lors que la construction est située en zone d'aléa d'inondation moyen et en zone de mouvement de terrain faible dans le PPRN.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 septembre 2018, la commune des Trois-Ilets, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête ou le cas échéant, au prononcé d'un sursis à statuer en cas de régularisation nécessaire, et à ce qu'il soit mis à la charge des requérants le paiement des dépens et de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en l'absence de justification de l'accomplissement des formalités prévues par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, la demande de première instance est irrecevable ;

- les requérants ne justifient pas de l'intérêt leur donnant qualité pour agir et notamment de ce que le projet est susceptible d'affecter directement leurs conditions d'occupation et de jouissance de leur bien ; leur demande est dès lors irrecevable ;

- les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 octobre 2018, la SAS Itérato, représentée par la SCP Dubois et Associés, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge des requérants de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'intérêt donnant qualité pour agir aux requérants du seul fait qu'ils sont voisins immédiats du projet n'est pas établi ; au demeurant leur parcelle ne jouxte pas celle du projet ;

- les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 17 janvier 2019, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 15 mars 2019 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code du tourisme ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F... G...,

- les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant M. C... et Mme H... épouse C....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 23 août 2017, le maire de la commune des Trois-Ilets (Martinique) a délivré à la SAS Iterato un permis de construire portant sur l'édification de dix logements à vocation touristique sur un terrain situé rue du Marignan, dans le quartier de Anse-à-l'âne. M. et Mme C..., propriétaires de la parcelle voisine du lieu d'implantation du projet, relèvent appel du jugement par lequel le tribunal administratif de la Martinique a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des pièces du dossier que M. et Mme C... ont produit, le 5 avril 2018, avant la clôture automatique de l'instruction intervenue trois jours francs avant l'audience du 24 avril 2018, un mémoire dans lequel ils invoquaient l'absence de respect des dispositions de l'article UC 12 du règlement du plan local d'urbanisme et de son annexe en tant que le projet de construction ne prévoit pas d'aires de stationnement pour les deux roues. Le tribunal n'a pas visé ce mémoire et n'a pas répondu, dans ses motifs, à cette branche du moyen, qui n'est pas inopérante, entachant ainsi son jugement d'irrégularité. Les requérants sont, par suite, fondés à demander l'annulation pour ce motif du jugement attaqué.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. et Mme C... devant le tribunal administratif de la Martinique.

Sur les fins de non-recevoir opposées à la demande de première instance :

4. En premier lieu, aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un certificat d'urbanisme, d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant un certificat d'urbanisme, une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou un permis de construire, d'aménager ou de démolir. L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif. La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux ".

5. Il ressort des pièces du dossier que le recours contentieux dirigé contre le permis de construire, enregistré au greffe du tribunal le 20 octobre 2017, a été notifié par lettres du même jour au maire de la commune des Trois-Ilets, auteur de l'arrêté attaqué, ainsi qu'au pétitionnaire, conformément aux dispositions précitées de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par la commune des Trois-Ilets tirée de l'absence de respect des formalités prévues par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, doit être écartée.

6. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que le projet consiste en la construction d'habitations destinées à la location pour touristes. M. et Mme C... sont propriétaires de la parcelle voisine, que seul un chemin de terre sépare du terrain d'assiette du projet en litige, lequel prévoit la construction de trois bâtiments de deux étages d'une hauteur de 8,5 mètres, sensiblement plus élevée que celle de leur maison. En outre, les intéressés font valoir que la fréquentation du projet d'une capacité d'accueil d'une trentaine de personnes induira des nuisances sur leur cadre de vie. Un tel projet est dès lors de nature à affecter les conditions d'occupation et d'utilisation de la propriété de M. et Mme C.... Dans ces conditions, ils justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour agir contre l'arrêté en litige.

Sur la légalité de l'arrêté du 23 août 2017 portant permis de construire :

7. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; (...) e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. ". Aux termes de l'article R. 431-9 du même code : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. Il indique également, le cas échéant, les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics ou, à défaut d'équipements publics, les équipements privés prévus, notamment pour l'alimentation en eau et l'assainissement. Lorsque le terrain n'est pas directement desservi par une voie ouverte à la circulation publique, le plan de masse indique l'emplacement et les caractéristiques de la servitude de passage permettant d'y accéder. Lorsque le projet est situé dans une zone inondable délimitée par un plan de prévention des risques, les cotes du plan de masse sont rattachées au système altimétrique de référence de ce plan. ". Aux termes de l'article R. 431-10 du même code : " Le projet architectural comprend également : a) Le plan des façades et des toitures ; lorsque le projet a pour effet de modifier les façades ou les toitures d'un bâtiment existant, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse. ".

8. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

9. Il ressort des pièces du dossier de permis de construire que ce dernier comporte une notice architecturale qui décrit l'état initial du terrain et de ses abords immédiats et qui procède à la description détaillée du profil de l'implantation et du volume de la construction, composée de trois bâtiments distincts, par rapport aux constructions et paysages avoisinants, du traitement des clôtures et végétations situées en limite de terrain et des matériaux et de la couleur de la construction envisagée. Le dossier de permis de construire comporte également une série de planches photographiques qui permettent de visualiser l'état actuel de la parcelle concernée et de déterminer précisément sa localisation. La notice architecturale précise que le terrain d'assiette du projet comporte une construction, soit une maison d'habitation de 110m2, qui sera détruite, et qu'il ne subira ainsi aucune modification majeure, l'accès existant situé rue du Marignan étant conservé. Le dossier de permis de construire comporte en outre des vues d'insertion du projet dans le site ainsi qu'une photographie de la zone concernée par le projet qui permettent d'apprécier l'impact visuel de la construction envisagée dans le paysage proche et lointain et son insertion dans l'environnement au regard des constructions existantes. Si par ailleurs, les requérants soutiennent que le terrain présente une légère pente dès lors qu'il existerait une différence de niveau au sol de 74 cm, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'administration ne disposait pas des éléments suffisants pour apprécier la topographie du terrain compte tenu que l'étude hydraulique mentionne que la cote du terrain est entre 1,2 m A... et 2 m A... soit une différence de niveau représentant une pente de seulement 1%. Si le terrain est desservi par la rue du Marignan, qui est une voie privée disposant d'une servitude de passage pour les riverains il ne ressort pas des pièces du dossier que l'absence de mention de cette précision ait pu empêcher l'autorité administrative d'appréhender la desserte du terrain. En outre, les limites de la parcelle sont représentées sur le plan de masse, par un trait en gras et le plan de masse et les plans de coupe et de façade permettent de vérifier les cotes en trois dimensions des bâtiments et constructions. Enfin, l'emplacement, les dimensions des bâtiments et le raccordement aux réseaux publics figurent sur le plan de masse et la notice indique le traitement réservé aux espaces verts, avec notamment le maintien ou le déplacement des arbres existants, ainsi que la plantation d'arbres pour les places de stationnement. Par ailleurs, la notice indique les modalités d'accès au terrain et aux places de stationnement. Dans ces conditions, contrairement à ce que les requérants soutiennent, les documents graphiques ne sont pas entachés d'approximation ou d'insuffisance. La circonstance que le plan de masse ne comporte pas de cotes rattachées au système altimétrique de référence du plan de prévention des risques d'inondation est sans incidence dès lors que le pétitionnaire a fait réaliser une étude d'impact hydrologique sur le terrain d'assiette du projet permettant de vérifier, quand bien même elle ne mentionne qu'un des trois bâtiments, le respect des prescriptions de ce plan avec une surélévation de la construction par la création d'un vide sanitaire et l'aménagement des parkings ouverts au rez-de-chaussée des bâtiments. Dans ces conditions, les éléments produits étaient suffisants pour que les services instructeurs puissent vérifier la conformité du projet aux règles d'urbanisme. Ainsi le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.

10. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 123-2 du code de la construction et de l'habitation : " (...) constituent des établissements recevant du public tous bâtiments, locaux et enceintes dans lesquels des personnes sont admises, soit librement, soit moyennant une rétribution ou une participation quelconque, ou dans lesquels sont tenues des réunions ouvertes à tout venant ou sur invitation, payantes ou non. / Sont considérées comme faisant partie du public toutes les personnes admises dans l'établissement à quelque titre que ce soit en plus du personnel. ". Aux termes de l'article D. 321-1 du code du tourisme : " La résidence de tourisme est un établissement commercial d'hébergement classé, faisant l'objet d'une exploitation permanente ou saisonnière. Elle est constituée d'un ou plusieurs bâtiments d'habitation individuels ou collectifs regroupant, en un ensemble homogène, des locaux d'habitation meublés et des locaux à usage collectif. Les locaux d'habitation meublés sont proposés à une clientèle touristique qui n'y élit pas domicile, pour une occupation à la journée, à la semaine ou au mois. Elle est dotée d'un minimum d'équipements et de services communs. Elle est gérée dans tous les cas par une seule personne physique ou morale ". Aux termes de l'article R. 431-30 du code de l'urbanisme : " Lorsque les travaux projetés portent sur un établissement recevant du public, la demande est accompagnée des dossiers suivants (...) : / a) Un dossier permettant de vérifier la conformité du projet avec les règles d'accessibilité aux personnes handicapées, comprenant les pièces mentionnées aux articles R. 111-19-18 et R. 111-19-19 du code de la construction et de l'habitation (...) ".

11. Il ressort des pièces du dossier que le projet en litige est constitué de trois bâtiments accueillant des appartements meublés destinés à la location touristique. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le projet, alors même que les surfaces créées apparaissent sous l'intitulé d'" hébergement hôtelier " dans le dossier de demande, comporterait un hall d'accueil du public ni des équipements ou services communs. Dans ces conditions, quand bien même le projet a été qualifié de " résidence de tourisme " dans le document Cerfa, les bâtiments comportant ces meublés de tourisme, qui sont à usage d'habitation, ne peuvent être regardés comme des établissements recevant du public (ERP) au sens et pour l'application des dispositions du code de la construction et de l'habitation. Par suite, les requérants ne peuvent utilement soutenir que le dossier de demande de permis de construire serait insuffisant au regard de l'article R. 431-30 du code de l'urbanisme ou que, s'agissant d'un établissement recevant du public, le maire aurait dû vérifier la conformité avec l'accessibilité des pièces de vie situées aux niveaux R+1 et R +2.

12. En troisième lieu, le projet ne portant pas sur un établissement recevant du public, les requérants ne peuvent utilement soutenir que le " volet ERP " n'aurait pas été instruit au titre des dispositions du code de la construction et de l'habitation.

13. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que le pétitionnaire a fait réaliser une étude d'impact hydrologique portant sur le terrain d'assiette du projet et permettant de vérifier le respect des prescriptions du plan de prévention des risques en matière d'inondation. Si l'étude mentionne un et non trois bâtiments, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette différence soit par elle-même de nature à influer sur les résultats de cette étude dès lors que le dimensionnement du bâti pris en compte dans l'étude, soit une emprise au sol de 750 m2, est supérieur à l'emprise au sol du projet du pétitionnaire, qui fait état de surfaces créées d'un total 555 m2. Par suite, le moyen tiré de ce que le projet ne respecte pas le plan de prévention des risques d'inondation doit être écarté. Par ailleurs, le moyen n'est assorti d'aucune précision s'agissant du risque de mouvement de terrain alors que le projet est classé seulement en zone jaune de ce plan. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 2 du titre 1 du règlement du plan local d'urbanisme relatif à la " prise en compte des risques naturels et à la protection générale " doit être écarté.

14. En cinquième lieu, en se bornant à soutenir qu'il n'apparaît pas que les concessionnaires de services publics auraient été consultés, les requérants n'apportent pas de précision à l'appui de leur allégation permettant d'apprécier sa portée. De même, alors que le projet consiste en la construction de trois bâtiments comportant un total de dix logements du T2 au T4, destinés à être loués meublés à une clientèle touristique, le permis litigieux n'est pas contraire au règlement de la zone UC du règlement du plan local d'urbanisme qui autorise la construction d'habitations à densité moyenne.

15. En sixième lieu, aux termes de l'article UC 3 du règlement du plan local d'urbanisme : " Accès et voirie. 1. Accès. Le permis de construire peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l'importance ou à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles envisagés, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficiles la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie. Il peut également être refusé sur les accès présentent un danger pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic (...) 2. Voirie La création de voie publiques ou privées communes ouvertes à la circulation automobile est soumises aux conditions suivantes : (...) les voies en impasse doivent être aménagées dans leur partie terminale afin de permettre aux véhicules des services publics de faire aisément demi-tour (...). ".

16. Il ressort des pièces du dossier que le projet est directement desservi par la rue du Marignan, qui est une voie privée déjà existante dotée d'une servitude de passage pour les riverains. Dès lors, la circonstance que le projet ne prévoit pas d'aire de retournement sur la voie se terminant en impasse est inopérante, cette obligation trouvant à s'appliquer uniquement aux créations de vois nouvelles. Il ressort également des pièces du dossier que la rue du Marignan, en ligne droite au droit du projet, a une largeur d'au moins 5,5 mètres et qu'elle dessert un nombre de propriétés limité. Dès lors, et alors même que des riverains stationneraient sur l'accotement de cette voie publique, les caractéristiques de la voie sont suffisantes pour desservir en toute sécurité le projet qui prévoit la création de 20 places de stationnement et pour permettre la circulation des engins de secours. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de la desserte ne peut qu'être écarté.

17. En septième lieu, aux termes de l'article UC 4 du règlement du plan local d'urbanisme : " Desserte par les réseaux. 4-1 Eau potable. Toute construction ou installation nouvelle doit être desservie par une conduite de distribution potable de caractéristiques suffisantes conformément à la règlementation en vigueur ; 4-2 Assainissement. Toute construction ou installation nouvelle doit évacuer ses eaux usées par canalisations souterraines raccordées au réseau d'assainissement existant. (...) 4-3 Eaux pluviales. Les aménagements réalisés sur tout terrain doivent être tels qu'ils garantissent l'écoulement des eaux pluviales dans les réseaux "

18. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du plan de masse, que le pétitionnaire a prévu de raccorder le projet aux réseaux publics existants d'eau potable, eau pluviales et assainissement. En se bornant à des affirmations, les requérants n'apportent aucun élément permettant de considérer que les réseaux existants, qui desservent une zone déjà urbanisée, seraient insuffisants pour accueillir le projet.

19. En huitième lieu, aux termes de l'article UC 6 du règlement du plan local d'urbanisme : " Implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques. Les constructions doivent être implantées au-delà des marges de recul indiquées au plan. A défaut d'indication figurant sur les plans, les constructions doivent respecter un reculement minimum de (...) 10 m par rapport aux bords des cours d'eau. ".

20. Il ressort des pièces du dossier que le bâtiment en fond de parcelle, le plus proche du cours d'eau, est situé en rive gauche et à plus de 10 mètres du bord de l'affluent de la Ravine de l'Anse-à-l'âne. Par suite, et alors même que le terrain est situé en zone orange du plan de prévention du risque d'inondation, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ne peut qu'être écarté.

21. En neuvième lieu, aux termes de l'article UC 7 du règlement du plan local d'urbanisme : " Implantation des constructions par rapport aux limites séparatives. 7-1 Lorsque les constructions ne jouxtent pas les limites séparatives, elles doivent être écartées de celles-ci d'une distance au moins égale à 4 m. 7-2 les constructions annexes peuvent être construites, soit le long des limites séparatives des terrains, soit à une distance minimale de 4 m des limites séparatives. ".

22. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du plan de masse, que, conformément aux dispositions précitées, deux bâtiments sont implantés sur les limites séparatives latérales, et que le troisième est implanté à plus de 4 mètres de la limite séparative de fond de parcelle, les limites séparatives étant représentées par un trait en gras sur le plan de masse. Par ailleurs, les structures en pergola recouvrant les places de stationnement sont également situées sur les limites séparatives. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.

23. En dixième lieu, aux termes de l'article UC 8 du règlement du plan local d'urbanisme : " Implantation des constructions les unes par rapport aux autres sur une même propriété ou plusieurs propriétés liées par un acte authentique. Les bâtiments ou corps de bâtiments en vis-à-vis sur un même terrain doivent être édifiés de telle manière que la distance de tout point d'un bâtiment à tout point d'un autre bâtiment soit au moins égale à la différence de niveau entre l'égout du toit du bâtiment le plus haut et le sol du bâtiment le plus bas sur les façades en vis-à-vis sans pouvoir être inférieur à 4 mètres. ".

24. Il ressort des pièces du dossier que les trois bâtiments collectifs sont chacun espacés d'une largeur de plus de 4 mètres et par ailleurs, les dispositions précitées ne sont pas applicables à la pergola centrale qui n'est pas un bâtiment. Dans ces conditions le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.

25. En onzième lieu, aux termes de l'article UC 11 du règlement du plan local d'urbanisme : " Aspect extérieur (...) 1. Les constructions sur pilotis apparents sont interdits ". Il ressort des pièces du dossier, notamment des photographies d'insertion et de la notice architecturale, que le projet en litige prévoit des bâtiments construits non sur pilotis mais sur des structures porteuses en béton texturé et peint, et disposant simplement, sur certaines façades, d'éléments décoratifs ressemblant à des pilotis. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.

26. En douzième lieu, aux termes de l'article UC 13.3 du règlement du plan local d'urbanisme : " Les aires de stationnement doivent être plantées à raison d'un arbre pour 4 places ". Il ressort de la notice architecturale du projet que les aires de stationnement seront plantées à raison d'un arbre pour quatre places. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut qu'être écarté

27. En treizième lieu, aux termes de l'article UC 12 du règlement du plan local d'urbanisme : " Stationnement des véhicules : Le stationnement des véhicules correspondant aux besoins des constructions et installations diverses doit être assuré en dehors des voies publiques dans les conditions minimales données en annexe (...). ". L'annexe prévoit que : " La surface affectée au stationnement est égale à 50% de la surface de plancher affectée au logement avec un minimum de 1 place par logement de type F1 F2, 1,5 places par logement de type F3, 2 places par logement de type F4. Le nombre de places obtenues en application de cette règle sera augmenté de 10 % (...) pour permettre le stationnement des visiteurs. (...) Les aires de stationnement nécessaires aux deux roues doivent être également prévues ".

28. Si les requérants soutiennent que le projet devait prévoir des places de stationnement répondant aux critères exigés pour les personnes à mobilité réduite dès lors que le projet relève de la catégorie des établissements recevant du public, il résulte de ce qui a été dit précédemment que le projet ne relève pas de cette catégorie.

29. Si quatre des emplacements de stationnement prévues, situés en enfilade, ne présentent pas une accessibilité suffisante, les seize autres emplacements sont conformes aux exigences d'accessibilité et leur nombre est suffisant, eu égard à la configuration du projet qui comporte quatre logements T2, quatre logements T3 et deux logements T4.

30. En revanche, ainsi que les requérants le soutiennent, alors que l'annexe à l'article UC 12 du règlement du plan local d'urbanisme précité l'exige, il ne ressort pas de la demande de permis de construire que des emplacements pour deux roues ont été prévus. Par suite, les requérants sont fondés à soutenir que le projet ne respecte pas sur ce point les prescriptions du plan local d'urbanisme.

31. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations (...) ".

32. Le vice auquel le moyen exposé au point 30 ci-dessus se rapporte est susceptible de régularisation. Il y a donc lieu pour la cour, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, d'inviter les parties à lui présenter, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, leurs observations sur l'éventualité d'une telle régularisation. Dans ces conditions, il appartient à la cour de surseoir à statuer sur la demande de M. et Mme C....

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de la Martinique du 17 mai 2018 est annulé.

Article 2 : Il est sursis à statuer sur les conclusions de la demande présentée par M. et Mme C... devant le tribunal administratif de la Martinique.

Article 3 : Les parties sont invitées à présenter dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt leurs observations sur la possibilité de régulariser le vice dont est entaché l'arrêté du 23 août 2017.

Article 4 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C... et Mme I... H... épouse C..., à la commune des Trois-Ilets et à la SAS Iterato.

Copie en sera adressée au ministre des outre-mer et au préfet de la Martinique.

Délibéré après l'audience du 15 octobre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

Mme F... G..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 12 novembre 2019.

Le rapporteur,

Caroline G...

Le président,

Elisabeth JayatLe greffier,

Virginie Marty

La République mande et ordonne au préfet de la Martinique, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

4

N° 18BX02806


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX02806
Date de la décision : 12/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Caroline GAILLARD
Rapporteur public ?: Mme PERDU
Avocat(s) : SCP DUBOIS et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-11-12;18bx02806 ?
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