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06/02/2020 | FRANCE | N°18BX00473

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 06 février 2020, 18BX00473


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... D... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011.

Par un jugement n° 1404104 du 5 décembre 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 février 2018, M. et Mme D..., représentés par Me B..., demandent à la cour :

1°) d'a

nnuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 5 décembre 2017 ;

2°) de prononcer la déchar...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... D... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011.

Par un jugement n° 1404104 du 5 décembre 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 février 2018, M. et Mme D..., représentés par Me B..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 5 décembre 2017 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011.

Ils soutiennent que :

en ce qui concerne l'année 2010 :

- le locataire d'une parcelle de terre agricole n'ayant en vue que l'exploitation de la superficie, la parcelle perd ainsi sa nature d'immeuble et le contrat de location a donc un caractère commercial et le bénéfice de la réduction d'impôt prévu à l'article 199 undecies B du code général des impôts n'est pas subordonné, dans cette hypothèse, à la production d'un permis de construire ou d'une déclaration d'achèvement ;

en ce qui concerne l'année 2011 :

- ils sont fondés à demander le bénéfice de dispositif prévu à l'article 199 undecies A du code général des impôts ;

- les sociétés Sopra et Karukera Land ont respecté leurs obligations déclaratives en matière fiscale ;

- l'avantage fiscal s'opère au titre de l'année de souscription au capital de la société qui dispose ensuite d'un délai de douze mois pour réaliser l'investissement ; ainsi, la circonstance que les factures soient datées de 2012 ne fait pas obstacle au bénéfice de la réduction d'impôt en 2011 ;

en ce qui concerne les pénalités :

- les intérêts de retard ne peuvent pas leur être appliqués dès lors qu'ils ont joint à leurs déclarations l'ensemble des justificatifs en leur possession ;

- l'administration ne démontre pas qu'ils se sont intentionnellement soustrait à leurs obligations fiscales.

Par un mémoire, enregistré le 21 août 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les appelants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C... E...,

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. À l'issue d'un contrôle sur pièces portant sur les années 2010 et 2011, le service a adressé à M. et Mme D... une proposition de rectification les informant de son intention de mettre à leur charge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu pour des montants, en droits et pénalités, de 30 000 euros et 14 400 euros au titre de l'année 2010 et de 35 000 et 15 120 euros au titre de l'année 2011. M. et Mme D... demandent à la cour d'annuler le jugement du 5 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces cotisations supplémentaires.

Sur la réduction d'impôt litigieuse :

2. En premier lieu et aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts dans leurs versions applicables au litige : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy, dans les îles Wallis-et-Futuna et les Terres australes et antarctiques françaises, dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34. / (...) Les dispositions du premier alinéa s'appliquent aux investissements réalisés par une société soumise au régime d'imposition prévu à l'article 8 ou un groupement mentionné aux articles 239 quater ou 239 quater C, dont les parts sont détenues directement, ou par l'intermédiaire d'une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, par des contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B. En ce cas, la réduction d'impôt est pratiquée par les associés ou membres dans une proportion correspondant à leurs droits dans la société ou le groupement. / La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé. (...) La réduction d'impôt prévue au présent I s'applique aux investissements productifs mis à la disposition d'une entreprise dans le cadre d'un contrat de location si les conditions mentionnées aux quinzième à dix-huitième alinéas du I de l'article 217 undecies sont remplies et si 60 % de la réduction d'impôt sont rétrocédés à l'entreprise locataire sous forme de diminution du loyer et du prix de cession du bien à l'exploitant. Ce taux est ramené à 50 % pour les investissements dont le montant par programme et par exercice est inférieur à 300 000 euros par exploitant. (...) L'octroi de la réduction d'impôt prévue au premier alinéa est subordonné au respect par les entreprises réalisant l'investissement et, le cas échéant, les entreprises exploitantes de leurs obligations fiscales et sociales et de l'obligation de dépôt de leurs comptes annuels selon les modalités prévues aux articles L. 232-21 à L. 232-23 du code de commerce à la date de réalisation de l'investissement. ".

3. D'une part, il résulte des dispositions des articles L. 232-21 à L. 232 23 du code de commerce dans leur version applicable au litige, que les sociétés en nom collectif, les sociétés en participation, les sociétés à responsabilité limitée (SARL) et les sociétés anonymes simplifiées doivent déposer auprès du greffe du tribunal de commerce dont elles dépendent leurs comptes annuels dans le mois qui suit leur approbation. En l'occurrence, il résulte de l'instruction et il n'est au demeurant pas contesté que, s'agissant de l'année 2011, les deux sociétés à responsabilité limitée Sopra et Karukera Land, dont M. et Mme D... ont acquis des parts du capital, n'ont pas respecté leur obligation de dépôt de leurs comptes annuels. D'autre part, s'agissant de l'année 2010, il résulte également de l'instruction et n'est pas davantage contesté, que les entrepreneurs individuels et les sociétés à responsabilité limitée qui auraient exploité les investissements réalisés par les sociétés dont M. et Mme D... ont acquis des parts du capital n'ont pas respecté leurs obligations fiscales ou sociales ou leur obligation de dépôt de leurs comptes annuels au titre de l'année considéré. Enfin, les appelants ne justifient pas de la réalité des investissements productifs concernés au titre des mêmes années. Par suite, en application des dispositions précitées de de l'article 199 undecies B du code général des impôts, les investissements réalisés par ces entreprises n'ouvraient pas droit à la réduction d'impôt prévue par cet article.

4. En second lieu, le bénéfice des réductions d'impôts prévues par les dispositions de l'article 199 undecies A du code général des impôts dans leur version applicable au litige est subordonné, d'une part, à l'engagement par les souscripteurs de parts ou d'actions des sociétés éligibles de les conserver pendant cinq ans au moins à compter de la date d'achèvement des immeubles et, d'autre part, à l'engagement des sociétés effectuant des investissements productifs neufs à en achever les fondations dans les deux ans qui suivent la clôture de la souscription, de s'engager à maintenir l'affectation des biens à l'activité dans les secteurs visés pendant les cinq ans qui suivent leur acquisition ou pendant leur durée normale d'utilisation si elle est inférieure. Or il n'est ni établi, ni même soutenu que M. et Mme D... et les sociétés dont ils ont acquis des parts du capital au cours des années concernées auraient pris ces engagements. Par suite, les appelants ne sont pas fondés à soutenir qu'ils remplissaient les conditions auxquelles le bénéfice des réductions d'impôts prévues par les dispositions de l'article 199 undecies A du code général des impôts est subordonné.

5. Il résulte ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que les parts sociales acquises par les appelants au capital de sociétés effectuant des investissements productifs en Guadeloupe n'ouvraient pas droit au bénéfice des réductions d'impôts prévues aux articles 199 undecies A et 199 undecies B du code général des impôts sans pouvoir utilement soutenir que ces investissements remplissaient les autres conditions auxquelles le bénéfice de ces réductions d'impôt est subordonné.

Sur les pénalités :

6. En premier lieu, à l'appui des moyens tirés de ce que l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du code général des impôts ne leur serait pas applicable, les appelants ne se prévalent devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critiquent pas utilement la réponse apportée par le tribunal administratif. Par suite, il y a lieu de rejeter ces moyens par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.

7. En second lieu, aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". Pour établir la mauvaise foi du contribuable, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt.

8. En l'occurrence, si l'administration fait valoir, d'une part, que le montant des réductions d'impôts déclarées par M. et Mme D... entraînait une diminution de, respectivement, 76 % et 44 % du montant de l'impôt dû en 2010 et 2011 et, d'autre part, qu'ils ne se sont pas assurés que les sociétés au capital desquelles ils ont investi respectaient leurs obligations légales ainsi que leurs engagements au regard des dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts, ces circonstances permettent uniquement de considérer que les appelants ont souhaité faire diminuer le montant de leurs impôts sur le revenu de façon significative en utilisant les dispositifs légalement mis à leur disposition et qu'ils ont fait preuve de négligence dans le contrôle de leur participation au capital des sociétés concernées mais ne permettent pas de caractériser leur intention d'éluder l'impôt dès lors, en particulier, que la réalité de leur investissement financier dans ces sociétés n'est pas contestée.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté leur demande tendant à la décharge de pénalité de 40 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts, et, par voie de conséquence, à demander que le jugement attaqué soit, dans cette mesure, reformé.

DÉCIDE :

Article 1er : M. et Mme D... sont déchargés des pénalités de 40 % dont ont été assortis les suppléments d'impôt sur le revenu auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011.

Article 2 : Le jugement attaqué est réformé en tant qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... D... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Ouest.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2020 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme F... présidente-assesseure,

M. C... E..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 février 2020.

Le rapporteur,

Manuel E...

Le président,

Éric Rey-BèthbéderLa greffière,

Camille Péan

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX00473


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX00473
Date de la décision : 06/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-05-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Établissement de l'impôt. Réductions et crédits d`impôt.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : DAGNON

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-02-06;18bx00473 ?
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