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20/05/2020 | FRANCE | N°18BX01132

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 20 mai 2020, 18BX01132


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Kemi, représentée par Me C... F..., mandataire à sa liquidation judiciaire, puis par Me B..., désigné comme mandataire ad hoc par ordonnance du président du tribunal de commerce de Toulouse en date du 2 novembre 2017, a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er septembre 2011 au 28 février 2013, pour un montant de

40 194 euros.

Par un jugement n° 1405517 du 23 janvier 2018, le tribunal admini...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Kemi, représentée par Me C... F..., mandataire à sa liquidation judiciaire, puis par Me B..., désigné comme mandataire ad hoc par ordonnance du président du tribunal de commerce de Toulouse en date du 2 novembre 2017, a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er septembre 2011 au 28 février 2013, pour un montant de 40 194 euros.

Par un jugement n° 1405517 du 23 janvier 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 mars 2018 et le 4 novembre 2019, la SELAS Egide, prise en la personne de Me B... agissant en qualité de mandataire ad hoc de l'Eurl Kemi, représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 23 janvier 2018 ;

2°) de prononcer la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er septembre 2011 au 28 février 2013, pour un montant de 40 194 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 4 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'administration a méconnu le premier alinéa de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales et les dispositions de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié relatives au lieu du contrôle en contrevenant au principe selon lequel l'examen des documents comptables doit être effectué dans les locaux de l'entreprise vérifiée ;

- la vérification de comptabilité s'étant irrégulièrement poursuivie avec le gérant et hors la présence du liquidateur judiciaire, au-delà du 11 juin 2013, date d'ouverture de la liquidation judiciaire, elle est irrégulière ;

- du fait de ces irrégularités affectant la procédure, elle n'était pas en capacité d'apprécier le bien-fondé des rectifications et, par suite, d'en discuter l'exactitude ;

- le manquement délibéré n'est pas caractérisé, dès lors que les anomalies relevées sont imputables à la société Amazon qui présente les choses de la façon la plus favorable possible pour augmenter le nombre de vendeurs, en prétendant notamment, au téléphone, que ces derniers sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée.

Par un mémoire en défense et un mémoire, enregistrés le 4 octobre 2018 et le 15 novembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête présentée par la SELAS Egide, au nom de la société Kemi, est irrecevable en l'absence de désignation d'un mandataire ad hoc pour représenter la société devant la cour ;

- les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 2 décembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 17 décembre 2019 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de commerce ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E... G...,

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. L'EURL Kemi, qui exerçait une activité de vente en ligne de produits biologiques, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité du 5 avril au 6 juin 2013, portant sur la période du 31 août 2011 au 30 septembre 2012 étendue au 28 février 2013 en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à l'issue de laquelle, par proposition de rectification du 20 juin 2013, les rectifications de taxe sur la valeur ajoutée envisagées ont été portées à la connaissance de Me F..., nommée es qualité de liquidateur judiciaire de la société après sa liquidation judiciaire prononcée par le tribunal de commerce de Toulouse par jugement du 11 juin 2013. L'Eurl Kemi, représentée par Me F..., puis par Me B..., désigné comme mandataire ad hoc par ordonnance du président du tribunal de commerce de Toulouse en date du 2 novembre 2017, a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er septembre 2011 au 28 février 2013. La SELAS Egide, prise en la personne de Me B... relève appel du jugement du 23 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions en cause pour un montant de 40 194 euros.

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre en appel

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Les dispositions de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales ont pour conséquence que toute vérification de comptabilité doit en principe se dérouler dans les locaux de l'entreprise vérifiée. La vérification n'est toutefois pas nécessairement entachée d'irrégularité du seul fait qu'elle ne s'est pas déroulée dans ces locaux. Il en va ainsi lorsque, notamment, la comptabilité ne se trouve pas dans l'entreprise et que, d'un commun accord entre le vérificateur et les représentants de l'entreprise, les opérations de vérification se déroulent au lieu où se trouve la comptabilité, dès lors que cette circonstance ne fait, par elle-même, pas obstacle à ce que la possibilité d'engager avec le vérificateur un débat oral et contradictoire demeure offerte aux représentants de l'entreprise vérifiée.

3. Il résulte de l'instruction que la vérification de comptabilité de l'EURL Kemi s'est déroulée du 5 avril au 6 juin 2013, à la demande de son gérant, M. A..., dans l'entrepôt de stockage de la société situé à Roquettes (Haute-Garonne) et que quatre interventions ont eu lieu dans ces locaux en présence du gérant. Au cours des opérations de contrôle, le service vérificateur a adressé un courriel, le 24 avril 2013, à M. A... pour l'informer qu'il souhaitait avoir un entretien avec l'expert-comptable de la société afin d'effectuer avec lui des rapprochements de TVA, invitant le gérant à choisir l'horaire compatible avec ses disponibilités et à confirmer le rendez-vous par téléphone. Ce courriel transféré par le gérant au cabinet d'expertise comptable Coudouel a donné lieu, le 2 mai suivant, à un courriel de confirmation d'un des rendez-vous proposés par la vérificatrice, soit le 17 mai, dans les locaux du cabinet de l'expert-comptable.

4. L'appelante, qui admet en appel l'existence d'un débat oral et contradictoire, fait valoir qu'en l'absence de mandat donné par le gérant à l'expert-comptable pour représenter la société lors de la journée du 17 mai 2013 la procédure serait viciée du seul fait de la tenue de cette intervention dans les locaux de l'expert-comptable. Toutefois, il résulte de l'instruction que l'entretien du 17 mai s'est tenu après que la société, informée du souhait du vérificateur de rencontrer le comptable, ne s'y est pas opposé, puisqu'elle a transmis ladite demande à son cabinet d'expertise laissant à ce dernier le soin d'en fixer les modalités pratiques. La société n'a par ailleurs émis aucune réserve sur le principe et les modalités de cette intervention, ni à réception du courriel du 24 mai 2013 sollicitant des explications sur l'anomalie relevée dans les rapprochements TVA fournis par le comptable, ni lors de la réunion de synthèse du 6 juin 2013 clôturant les opérations de contrôle. Par suite, la circonstance que le gérant n'a pas donné un mandat à l'expert-comptable pour représenter la société lors de la journée du 17 mai 2013, hors du lieu de la vérification de comptabilité désigné par l'EURL Kemi, n'a pas vicié la procédure de contrôle, la garantie tenant au lieu de réalisation des opérations de contrôle étant au demeurant indissociable des principes tenant au respect du débat oral et contradictoire.

5. En deuxième lieu, lorsqu'après la fin des opérations de contrôle sur place, le vérificateur obtient des pièces nouvelles, celles-ci sont présumées ne pas avoir fait l'objet d'un débat oral et contradictoire, sauf preuve contraire rapportée par l'administration. L'absence de débat, dans une telle hypothèse, n'est en principe pas de nature à affecter la régularité de la procédure d'imposition, sauf s'il apparaît que les pièces recueillies après la fin des opérations de vérification, en raison de leur teneur, de leur portée et de l'usage qui en a été fait par l'administration, impliquaient la réouverture du débat oral et contradictoire sur la comptabilité de l'entreprise.

6. L'appelante soutient que la vérification de comptabilité s'est irrégulièrement poursuivie avec le gérant lors des échanges de courriels avec l'administration les 12, 19 et 20 juin, hors la présence du liquidateur judiciaire, au-delà du 11 juin 2013, date d'ouverture de la liquidation judiciaire, viciant ainsi la procédure d'imposition. Il résulte toutefois de l'instruction qu'à la suite de la réunion de synthèse du 6 juin 2013, la société a informé le service, par courriel du 12 juin 2013, que tous les échanges entre la société et Amazon concernant la TVA avaient été effacés de la base de données Amazon. Par courriel du 19 juin 2013, le service a alors précisé à la société les références de factures Price Minister et Wizishop évoquées lors de la réunion de synthèse auquel la société a répondu, par courriel du 20 juin 2013, qu'elle n'avait " plus accès au back office " de ces prestataires. Dès lors que cet échange n'a donné lieu à la production d'aucune pièce nouvelle, l'administration fiscale n'était pas tenue d'engager un débat oral et contradictoire avec le liquidateur judiciaire, auquel la proposition de rectification du 20 juin 2013 a été adressée. L'appelante n'est par suite pas fondée à soutenir que les impositions contestées ont été établies à l'issue d'une procédure irrégulière.

7. En dernier lieu, l'appelante reprend en appel les moyens tirés de ce que les irrégularités entachant la vérification de comptabilité ne la mettraient pas en mesure de contester utilement le bien-fondé des rappels de TVA litigieux et de ce que la pénalité qui a été infligée à la société sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts pour manquement délibéré n'est pas justifiée au motif que les anomalies relevées seraient imputables à la société Amazon qui prétendrait notamment, au téléphone, que les vendeurs sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée. Elle n'apporte cependant sur ces points aucun élément de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée par les premiers juges sur son argumentation de première instance. Il y a lieu, dès lors, d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la SELAS Egide, prise en la personne de Me B..., n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SELAS Egide, prise en la personne de Me B..., mandataire ad hoc de l'Eurl Kemi, est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SELAS Egide, prise en la personne de Me B..., mandataire ad hoc de l'Eurl Kemi, et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 20 février 2020 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme H..., présidente-assesseure,

Mme E... G..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 mai 2020.

Le président,

Éric Rey-Bèthbéder

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX01132


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX01132
Date de la décision : 20/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-01-02-03 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Contrôle fiscal. Vérification de comptabilité. Garanties accordées au contribuable.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : NASSIET

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-05-20;18bx01132 ?
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