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08/06/2020 | FRANCE | N°19BX03818

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 08 juin 2020, 19BX03818


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A... H... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler les arrêtés en date du 25 mars 2019 par lesquels le préfet de la Haute-Garonne a décidé de son transfert vers l'Etat membre de l'Union européenne responsable de l'examen de sa demande d'asile et l'a assignée à résidence.

Par un jugement n° 1901765 du 11 avril 2019 le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une r

equête, enregistrée le 9 octobre 2019, M. F... B..., représenté par Me D..., demande à la cour :...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A... H... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler les arrêtés en date du 25 mars 2019 par lesquels le préfet de la Haute-Garonne a décidé de son transfert vers l'Etat membre de l'Union européenne responsable de l'examen de sa demande d'asile et l'a assignée à résidence.

Par un jugement n° 1901765 du 11 avril 2019 le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 octobre 2019, M. F... B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en date du 11 avril 2019 ;

2°) d'annuler la décision de transfert du préfet de la Haute-Garonne en date du 25 mars 2019 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision de transfert est entachée d'un défaut de motivation ;

- cette décision a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors qu'il n'est pas établi qu'il ait bénéficié d'un entretien individuel mené par un agent qualifié prévu par l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- cette décision est irrégulière dès lors que le préfet n'établit pas avoir informé les autorités maltaises de l'état de son état de santé afin de s'assurer qu'elles soient en mesure de lui apporter une assistance médicale adéquate en méconnaissance des articles 31 et 32 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- cette décision est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- cette décision est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par ordonnance du 8 janvier 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 6 février 2020 à midi.

M. F... A... H... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 septembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'ordonnance n ° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. G... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. F... A... H... B..., ressortissant bangladais, né le 16 janvier 1990 à Sylhet (Bangladesh), entré en France, selon ses déclarations, le 9 novembre 2018, relève appel du jugement en date du 11 avril 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés en date du 25 mars 2019 par lesquels le préfet de la Haute-Garonne a décidé de son transfert vers l'Etat membre de l'Union européenne responsable de l'examen de sa demande d'asile et l'a assignée à résidence. M. A... H... B... ayant été déclaré en fuite, le délai de son transfert a été prolongé jusqu'au 11 octobre 2020.

2. En premier lieu, M. F... A... H... B... reprend en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer la réponse qui lui a été apportée par le tribunal administratif, les moyens tirés du défaut de motivation et du défaut d'examen particulier de sa situation. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par le premier juge.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " (...) 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé ". Si M. F... A... H... B... soutient que l'entretien dont il a bénéficié n'aurait pas été mené par une " personne qualifiée ", il n'apporte toutefois aucun élément permettant de douter de ce que cet entretien n'aurait pas été mené par une personne qualifiée en vertu du droit national, les services de la préfecture, et notamment les agents recevant les étrangers au sein du guichet unique des demandeurs d'asile mis en place dans cette préfecture, devant être regardés comme ayant la qualité, au sens de l'article 5 précité du règlement n° 604/2013, de " personne qualifiée en vertu du droit national " pour mener l'entretien prévu à cet article. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 5 précité du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 31 du règlement susvisé du 26 juin 2013 : " 1. L'État membre procédant au transfert d'un demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), communique à l'État membre responsable les données à caractère personnel concernant la personne à transférer qui sont adéquates, pertinentes et raisonnables, aux seules fins de s'assurer que les autorités qui sont compétentes conformément au droit national de l'État membre responsable sont en mesure d'apporter une assistance suffisante à cette personne, y compris les soins de santé urgents indispensables à la sauvegarde de ses intérêts essentiels, et de garantir la continuité de la protection et des droits conférés par le présent règlement et par d'autres instruments juridiques pertinents en matière d'asile. Ces données sont communiquées à l'État membre responsable dans un délai raisonnable avant l'exécution d'un transfert, afin que ses autorités compétentes conformément au droit national disposent d'un délai suffisant pour prendre les mesures nécessaires. / 2. L'État membre procédant au transfert transmet à l'État membre responsable les informations qu'il juge indispensables à la protection des droits de la personne à transférer et à la prise en compte de ses besoins particuliers immédiats, dans la mesure où l'autorité compétente conformément au droit national dispose de ces informations, et notamment : / a) les mesures immédiates que l'État membre responsable est tenu de prendre aux fins de s'assurer que les besoins particuliers de la personne à transférer sont adéquatement pris en compte, y compris les soins de santé urgents qui peuvent s'avérer nécessaires ; (...) ". Aux termes de l'article 32 du même règlement : " 1. Aux seules fins de l'administration de soins ou de traitements médicaux, notamment aux personnes handicapées, aux personnes âgées, aux femmes enceintes, aux mineurs et aux personnes ayant été victimes d'actes de torture, de viol ou d'autres formes graves de violence psychologique, physique ou sexuelle, l'État membre procédant au transfert transmet à l'État membre responsable des informations relatives aux besoins particuliers de la personne à transférer, dans la mesure où l'autorité compétente conformément au droit national dispose de ces informations, lesquelles peuvent dans certains cas porter sur l'état de santé physique ou mentale de cette personne. Ces informations sont transmises dans un certificat de santé commun accompagné des documents nécessaires. L'État membre responsable s'assure de la prise en compte adéquate de ces besoins particuliers, notamment lorsque des soins médicaux essentiels sont requis. (...) ".

5. Les dispositions précitées, qui concernent le traitement de la personne transférée une fois le transfert décidé, n'imposent pas que les données sur l'état de santé de l'intéressé soient communiquées aux autorités responsables de la demande d'asile avant l'exécution du transfert. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions est, en lui-même, sans incidence sur la légalité du transfert.

6. En dernier lieu, aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. ". Il résulte de ces dispositions que si le préfet peut refuser l'admission au séjour d'un demandeur d'asile au motif que la responsabilité de l'examen de cette demande relève de la compétence d'un autre Etat membre, il n'est pas tenu de le faire et peut autoriser une telle admission au séjour en vue de permettre l'examen d'une demande d'asile présentée en France.

7. Si M. F... A... H... B... soutient qu'il a rencontré des problèmes médicaux lorsqu'il se trouvait à Malte et qu'il n'a pas pu bénéficier d'un traitement médical adéquat, il n'établit pas par les éléments qu'il produit que le préfet de la Haute-Garonne aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une erreur de droit, en ne faisant pas usage de la clause discrétionnaire prévue à l'article 17 règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Pour les mêmes motifs cette décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. F... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 25 mars 2019 par lesquels le préfet de la Haute-Garonne a décidé de son transfert auprès des autorités maltaises et de son assignation à résidence. Par voie de conséquence il y a lieu de rejeter ses conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. F... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... A... H... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 11 mai 2020, à laquelle siégeaient :

M. Pierre G..., président,

Mme E... C..., présidente assesseure

Mme Florence Rey-Gabriac, premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 8 juin 2020.

Le président,

Pierre G...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX03818


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX03818
Date de la décision : 08/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02-03


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Pierre LARROUMEC
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : DURAND CLEMENCE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-06-08;19bx03818 ?
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