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18/06/2020 | FRANCE | N°18BX02371

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 18 juin 2020, 18BX02371


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Solution BTP a demandé au tribunal administratif de la Martinique de condamner la commune de Fort-de-France à lui payer les sommes de 10 076,62 euros au titre du solde du marché, assortie des intérêts moratoires, de 9 861,21 euros au titre de la retenue de garantie et de 50 000 euros au titre des dommages et intérêts.

Par un jugement n° 1600367 du 6 mars 2018, le tribunal administratif de la Martinique a condamné la commune de Fort-de-France à verser à la

SARL Solution BTP les sommes de 10 076,62 euros TTC, augmentée des intérêts moratoir...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Solution BTP a demandé au tribunal administratif de la Martinique de condamner la commune de Fort-de-France à lui payer les sommes de 10 076,62 euros au titre du solde du marché, assortie des intérêts moratoires, de 9 861,21 euros au titre de la retenue de garantie et de 50 000 euros au titre des dommages et intérêts.

Par un jugement n° 1600367 du 6 mars 2018, le tribunal administratif de la Martinique a condamné la commune de Fort-de-France à verser à la SARL Solution BTP les sommes de 10 076,62 euros TTC, augmentée des intérêts moratoires à compter du 23 février 2016, au titre du solde du marché, et de 9 861,26 euros au titre de la retenue de garantie.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 juin 2018, la commune de Fort-de France, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 6 mars 2018 du tribunal administratif de la Martinique ;

2°) de condamner la SARL Solution BTP à lui verser les pénalités d'un montant de 5 900 euros ;

3°) de mettre à la charge de la SARL Solution BTP la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune de Fort-de-France soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a écarté la fin de non-recevoir tirée de l'absence de mise en demeure de la commune de notifier son décompte général préalablement à la saisine du tribunal administratif, dès lors que le courrier du 17 mars 2016 ne saurait valoir mise en demeure au sens de l'article 13.4.2 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

- subsidiairement, il y a lieu d'appliquer les pénalités de l'article 4.3.3 du cahier des clauses administratives particulières.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 février 2019, la SARL Solution BTP conclut au rejet de la requête et demande en outre à la cour :

- de condamner la commune de Fort-de-France au paiement de la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- de mettre à la charge de la commune de Fort-de-France la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions de la commune tendant à ce qu'elle soit condamnée à lui verser les pénalités d'un montant de 5 900 euros sont nouvelles en appel et par suite irrecevables ;

- elle justifie de la réalité de son préjudice.

Par ordonnance du 30 août 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 30 septembre 2019 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le des marchés publics ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A..., rapporteure,

- les conclusions de M. Normand, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. En 2013, la commune de Fort-de-France a confié à la SARL Solution BTP l'exécution du lot n° 1 " maçonnerie, cloison sèche, menuiserie, plomberie sanitaire, revêtement sol et mur " du marché de travaux d'aménagement de bureaux au sein de l'école Morne Vanier. La SARL Solution BTP ayant cessé les travaux alors que les prestations n'étaient pas terminées, la commune de Fort-de-France a prononcé la résiliation du marché par décision du 5 février 2015 et, par procès-verbal des opérations préalables à la réception du 15 avril 2015, a dressé la liste des prestations non exécutées. Les travaux ne lui ayant pas été réglés, la SARL Solution BTP a saisi le tribunal administratif de la Martinique d'une demande tendant à ce que la commune de Fort-de-France soit condamnée à lui payer les sommes de 10 076,62 euros au titre du solde du marché, assortie des intérêts moratoires, de 9 861,21 euros au titre de la retenue de garantie et de 50 000 euros au titre des dommages et intérêts.

2. Par jugement du 6 mars 2018, le tribunal administratif la Martinique a condamné la commune à verser à la société les sommes de 10 076,62 euros TTC, augmentée des intérêts moratoires, au titre du solde du marché, et de 9 861,26 euros au titre de la retenue de garantie, et rejeté le surplus des conclusions de la demande. La commune de Fort-de-France relève appel de ce jugement et, par la voie de l'appel incident, la SARL Solution BTP en demande la réformation en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant au paiement de la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur la recevabilité de la demande portée devant les premiers juges :

3. Aux termes de l'article 13.3 du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de travaux applicable au marché en cause : " 13.3. Demande de paiement finale : 13.3.1. Après l'achèvement des travaux, un projet de décompte final est établi concurremment avec le projet de décompte mensuel afférent au dernier mois d'exécution des prestations ou à la place de ce dernier. (...) 13.3.2. Le titulaire transmet son projet de décompte final au maître d'oeuvre (...) Le maître d'oeuvre accepte ou rectifie le projet de décompte final établi par le titulaire. Le projet accepté ou rectifié devient alors le décompte final. (...) 13.4. Décompte général. 13.4.1. Le maître d'oeuvre établit le projet de décompte général qui comprend : / - le décompte final ; / - l'état du solde, établi à partir du décompte final et du dernier décompte mensuel (...) - la récapitulation des acomptes mensuels et du solde. (...) 13.4.2. Le projet de décompte général est signé par le représentant du pouvoir adjudicateur et devient alors le décompte général. / Le représentant du pouvoir adjudicateur notifie au titulaire le décompte général avant la plus tardive des deux dates ci-après : / quarante jours après la date de remise au maître d'oeuvre du projet de décompte final par le titulaire ; / - douze jours après la publication de l'index de référence permettant la révision du solde. / Si le représentant du pouvoir adjudicateur ne notifie pas au titulaire, dans les délais stipulés ci-dessus, le décompte général signé, celui-ci lui adresse une mise en demeure d'y procéder. L'absence de notification au titulaire du décompte général signé par le représentant du pouvoir adjudicateur, dans un délai de trente jours à compter de la réception de la mise en demeure, autorise le titulaire à saisir le tribunal administratif compétent en cas de désaccord ".

4. Il résulte de l'instruction que la SARL Solution BTP a transmis son projet de décompte final à la commune le 11 décembre 2015, mais qu'aucun décompte général ne lui a été notifié dans le délai prévu par les stipulations de l'article 13.4.2 du cahier des clauses administratives générales rappelées ci-dessus. Dès lors, le conseil de la société a adressé à la commune un courrier du 17 mars 2016, ayant pour objet " décompte solution BTP ", lui rappelant qu'elle lui avait adressé son projet de décompte final le 11 décembre 2015 et l'avertissant de ce que, à défaut de paiement du solde du marché, elle saisirait le tribunal administratif. Ce courrier, comme l'a jugé le tribunal administratif, doit être regardé comme la mise en demeure de lui notifier le décompte général exigée par les stipulations du cahier des clauses administratives générales. Par suite, la commune de Fort-de-France n'est pas fondée à soutenir que, faute d'une telle mise en demeure, la demande de la SARL Solution BTP portée devant les premiers juges était irrecevable.

Sur les pénalités :

5. Aux termes de l'article 4.3.3 du cahier des clauses particulières du marché en cause : " Infractions aux prescriptions de chantier : Dans le cas où les prescriptions ci-dessous ne seraient pas observées, il sera fait application de pénalités indépendantes de celles visées aux articles 4-3-1 et 4-3-2 et avec lesquelles elles se cumulent. / Ces pénalités interviendront de plein droit, sur la simple constatation par le maître d'oeuvre des infractions, et après notification écrite sur le chantier d'avoir à exécuter la prescription au plus tard le lendemain. / Elles seront déduites des situations mensuelles./ a) Non-respect des prescriptions relatives à la signalisation générale du chantier : 500 € / b) Dépôt de matériaux, terres, gravois en dehors des zones prescrites : 300 € /T / c) Retard dans la remise ou la diffusion de documents nécessaires à l'exécution des travaux (plans d'exécution, notes de calculs, notes techniques, études de détail, plans de synthèse, etc...) : 200 € par jour de retard / d) Retard dans la production de justificatifs et/ou prévisions de prix pour ouvrages non prévus : 100 € par jour de retard / e) Retard dans la présentation sur le chantier des prototypes , d'éléments de construction, d'échantillons y compris ceux entrant dans la réalisation des locaux témoins : 200 € par jour de retard / f) Retard dans le nettoyage du chantier : 100 € par jour de retard / g) Retard dans l'évacuation des gravois hors du chantier : 200 € par jour de retard ".

6. La commune de Fort-de-France s'est bornée en première instance à conclure au rejet de la demande de la SARL Solution BTP. Par suite, les conclusions tendant à ce que la SARL Solution BTP soit condamnée à lui verser des pénalités pour infractions aux prescriptions de chantier, en application de l'article 4.3.3 du cahier des clauses particulières, sont nouvelles en appel et par suite irrecevables.

Sur les conclusions d'appel incident de la SARL Solution BTP :

7. Si la SARL Solution BTP produit notamment un accusé de réception d'une demande de subvention au titre de l'aide à la restructuration d'entreprises en difficulté du 25 août 2017, une décision du 19 juillet 2017 de la commission des chefs des services financiers arrêtant un plan d'apurement pour le règlement de l'ensemble de ses dettes fiscales, pour un montant de 17 440 euros, ainsi que des relevés de comptes 2017 et 2018 qui révèlent ses difficultés financières, elle n'établit toutefois pas que les difficultés en cause seraient liées au retard de paiement par la commune de Fort-de-France de ses prestations, retard au demeurant compensé par l'allocation d'intérêts moratoires par le jugement attaqué. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté ses conclusions tendant à ce que la commune de Fort-de-France soit condamnée à lui verser la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts.

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les conclusions de la commune de Fort-de-France et de la SARL Solution BTP tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Fort-de-France est rejetée.

Article 2 : Les conclusions d'appel incident de la SARL Solution BTP, ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Fort-de-France et à la SARL Solution BTP.

Délibéré après l'audience du 20 mai 2020 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme C..., présidente-assesseure,

Mme Florence Madelaigue, premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 18 juin 2020.

Le président,

Éric Rey-Bèthbéder

La République mande et ordonne au préfet de la Martinique en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX02371
Date de la décision : 18/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : RELOUZAT BRUNO

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-06-18;18bx02371 ?
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