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09/07/2020 | FRANCE | N°18BX00871

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 09 juillet 2020, 18BX00871


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Espace Oméga a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de La Réunion a rejeté son recours gracieux tendant, à titre principal, au retrait de l'arrêté du 10 avril 2015 du préfet de La Réunion portant cessibilité, au profit de la communauté d'agglomération du territoire de la côte ouest (TCO), des terrains d'assiette nécessaires au projet de constitution de réserves foncières dans le cadre de la

réalisation d'une opération d'aménagement urbain " Cambaie-Oméga " ÉcoCité, sur le ter...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Espace Oméga a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de La Réunion a rejeté son recours gracieux tendant, à titre principal, au retrait de l'arrêté du 10 avril 2015 du préfet de La Réunion portant cessibilité, au profit de la communauté d'agglomération du territoire de la côte ouest (TCO), des terrains d'assiette nécessaires au projet de constitution de réserves foncières dans le cadre de la réalisation d'une opération d'aménagement urbain " Cambaie-Oméga " ÉcoCité, sur le territoire de la commune de Saint-Paul, en tant qu'il déclare cessibles les parcelles HN 4, HN 13, HN 245, HN 247 et HN 259 et, à titre subsidiaire, à la réduction de l'emprise foncière du périmètre de cessibilité en excluant la parcelle HN 13 du périmètre de cessibilité.

Par un jugement n° 1501152 du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 février 2018, la société Espace Oméga, représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 29 décembre 2017 ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de La Réunion a rejeté son recours gracieux tendant au retrait de l'arrêté du 10 avril 2015 et, à titre subsidiaire, en tant qu'elle s'est opposée à la demande de réduction de l'emprise foncière destinée à être expropriée ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont commis une erreur de droit en excluant la DUP " réserves foncières " du champ d'application de l'article L. 123-14 du code de l'urbanisme, lequel impose une mise en compatibilité du PLU concomitamment à la DUP lorsque 1'opération est de nature à compromettre le parti d'aménagement retenu par la commune et / ou méconnaît les dispositions du règlement de zone dans laquelle sa réalisation est prévue ;

- en l'espèce, la DUP n'est pas compatible avec le PLU : d'une part, elle est de nature à compromettre le parti d'aménagement retenu par la commune dans ce plan compte tenu de la contradiction entre les 500 logements prévus par le PLU dans le secteur de Cambaie et les 15 000 logements envisagés par la DUP, d'autre part, le périmètre du projet ÉcoCité défini par le PLU et le périmètre du projet ÉcoCité retenu par la DUP sont contradictoires puisque la DUP intègre des terrains qui font partie de la zone d'activités économiques de Cambaie c'est-à-dire des terrains qui ne font pas partie du projet ÉcoCité défini par les auteurs du PLU ;

- contrairement à ce que les premiers juges ont relevé, l'objet de la DUP est défini avec suffisamment de précision ;

- la DUP ne pouvait donc être prise le 13 mars 2014 sans être précédée d'une enquête publique portant sur la mise en compatibilité du PLU de la commune de Saint-Paul ;

- les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de l'erreur de droit ou erreur manifeste d'appréciation du préfet en s'opposant à sa demande d'exclure le terrain dont elle est locataire de l'emprise foncière destinée à être expropriée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mai 2018, la communauté d'agglomération du territoire de la côte ouest (TCO), représentée par la SCP d'avocats Charrel et associés, conclut au rejet de la requête, et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la société Espace Oméga au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient à titre principal que la requête est irrecevable à défaut pour la société d'intérêt et de qualité à agir pour solliciter l'annulation de l'arrêté de cessibilité dans son ensemble ou en tant qu'il vise l'ensemble foncier appartenant à la société Ocimmo, et à titre subsidiaire, que les moyens soulevés par la société Espace Oméga ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 octobre 2018, le ministre des outre-mer conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société Espace Oméga ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... E...,

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant la société civile Ouest concassage immobilier, et de Me B..., représentant la communauté d'agglomération du territoire de l'Ouest (TCO).

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 13 mars 2014, le préfet de La Réunion a déclaré d'utilité publique la constitution, au profit de la communauté d'agglomération du territoire de la Côte Ouest (TCO), de réserves foncières d'une superficie de 179 hectares en vue de la réalisation, sur les territoires des communes de Saint-Paul, du Port et de la Possession, de l'opération d'aménagement urbain dite " Cambaie-Oméga " ÉcoCité. La société Espace Oméga, qui est locataire de la parcelle HN 13 appartenant à la société Ocimmo, incluse dans le périmètre de la déclaration d'utilité publique, relève appel du jugement rendu le 29 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de La Réunion a rejeté son recours gracieux tendant à titre principal au retrait de l'arrêté du 10 avril 2015 du préfet de La Réunion portant cessibilité, au profit de la communauté d'agglomération du territoire de la côte ouest (TCO), des terrains d'assiette nécessaires au projet de constitution de réserves foncières dans le cadre de la réalisation d'une opération d'aménagement urbain " Cambaie-Oméga " ÉcoCité, sur le territoire de la commune de Saint-Paul, en tant qu'il déclare cessibles les parcelles HN 4, HN 13, HN 245, HN 247 et HN 259 et, à titre subsidiaire, à la réduction de l'emprise foncière du périmètre de cessibilité en excluant la parcelle HN 13 du périmètre de cessibilité.

Sur la régularité du jugement :

2. Dans le cadre du contrôle de l'utilité publique du projet litigieux soulevé par voie d'exception, les premiers juges ont, au point 21 de leur jugement, répondu au moyen de la société Espace Oméga et tiré de ce que la délimitation du périmètre de la déclaration d'utilité publique est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, notamment en ce qu'elle inclut la parcelle HN13 qui n'a pas vocation à faire partie du projet " EcoCité " selon le plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Paul. Par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché d'une omission à statuer sur un moyen.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne le moyen dirigé contre l'arrêté de cessibilité tiré du défaut de compatibilité de la déclaration d'utilité publique avec le plan local d'urbanisme :

3. Aux termes de l'article L. 123-14 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : " Lorsque la réalisation d'un projet public ou privé de travaux, de construction ou d'opération d'aménagement, présentant un caractère d'utilité publique ou d'intérêt général, nécessite une mise en compatibilité d'un plan local d'urbanisme, ce projet peut faire l'objet d'une déclaration d'utilité publique (...) Dans ce cas, l'enquête publique porte à la fois sur l'utilité publique ou l'intérêt général du projet et sur la mise en compatibilité du plan qui en est la conséquence. La déclaration d'utilité publique ou la déclaration de projet d'une opération qui n'est pas compatible avec les dispositions d'un plan local d'urbanisme ne peut intervenir qu'au terme de la procédure prévue par l'article L. 123-14-2 ".

4. L'opération qui fait l'objet d'une déclaration d'utilité publique ne peut être regardée comme compatible avec un plan local d'urbanisme, pour l'application de cet article, qu'à la double condition, d'une part, qu'elle ne soit pas de nature à compromettre le parti d'aménagement retenu par la commune au travers de ce plan, et d'autre part, qu'elle ne méconnaisse pas les dispositions du règlement de la zone du plan dans laquelle sa réalisation est prévue.

5. Ainsi qu'il a été dit au point 1, l'arrêté du 13 mars 2014 a pour objet de déclarer d'utilité publique la constitution de réserves foncières en vue de permettre la réalisation ultérieure d'une opération d'aménagement. Contrairement à ce que soutient la société appelante, à la date de l'enquête publique ainsi qu'à la date de la déclaration d'utilité publique, le TCO disposait seulement d'une esquisse urbaine du futur projet du lauréat du concours de maîtrise d'oeuvre qui ne lui permettait pas de connaître précisément, à l'échelle du projet d'aménagement, le plan général des travaux et les caractéristiques principales des ouvrages, notamment leur taille et leur localisation exacte. D'ailleurs, la notice explicative du dossier, justifiant le recours au dossier simplifié, indiquait notamment que : " le projet urbain n'est qu'au stade de l'esquisse, que les études préalables ne sont pas encore réalisées, que le plan guide (...) traduction du projet urbain, issu de la note de présentation de l'Écocité, n'est pas encore contractualisé (...) que la ville de Saint-Paul devra réviser son document de planification (PLU), une fois le projet urbain précisé ". En outre, les parcelles en cause, cadastrées HN 4, HN 13, HN 245, HN 247 et HN 259, sont situées en zone AU1 Est, soit dans une zone du PLU d'urbanisation future. Par conséquent, elles pouvaient être intégrées dans le périmètre de la DUP sans méconnaître les dispositions de l'article L. 123-14 du code de l'urbanisme imposant la mise en conformité du plan local d'urbanisme, dès lors également que le projet d'aménagement pour lequel les réserves foncières ont été déclarées d'utilité publique n'était pas suffisamment précis pour désigner les types de constructions précisément prévus par parcelles ou secteurs. Par suite, le moyen tiré de ce que l'enquête publique et la déclaration d'utilité publique auraient également dû porter sur la mise en compatibilité du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Paul doit être écarté.

En ce qui concerne les conclusions tendant au retrait de la parcelle HN 13 du périmètre de l'opération :

6. Si la société Espace Oméga soutient que le périmètre de l'opération inclut des terrains qui n'ont pas vocation à faire partie du projet, et notamment la parcelle HN 13, elle n'apporte devant la cour aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas la réponse apportée par le tribunal administratif. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.

7. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la communauté d'agglomération du territoire de la côte ouest, la société Espace Oméga n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante ou tenue aux dépens dans la présente instance, la somme que la société appelante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Espace Oméga une somme de 750 euros, à verser à la communauté d'agglomération du TCO au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Espace Oméga est rejetée.

Article 2 : La société à responsabilité limitée Espace Oméga versera à la communauté d'agglomération du territoire de la côte ouest (TCO) la somme de 750 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Espace Oméga, à la communauté d'agglomération du territoire de la côte ouest (TCO) et au ministre des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la région Réunion, préfet de La Réunion.

Délibéré après l'audience du 18 juin 2020 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme F..., présidente-assesseure,

Mme D... E..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 juillet 2020.

Le président,

Éric Rey-Bèthbéder

La République mande et ordonne au ministre des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX00871


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX00871
Date de la décision : 09/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

34-02-02 Expropriation pour cause d'utilité publique. Règles générales de la procédure normale. Acte déclaratif d'utilité publique.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : CERVEAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 29/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-07-09;18bx00871 ?
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