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09/07/2020 | FRANCE | N°18BX01382

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 09 juillet 2020, 18BX01382


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler, d'une part, la décision n° 502892 du 24 février 2016 par laquelle le directeur du centre ministériel de gestion de Bordeaux a rejeté son recours du 24 juillet 2015 tendant à obtenir la révision de son compte-rendu d'entretien professionnel au titre de l'année 2014, d'autre part, d'annuler le compte-rendu d'entretien professionnel des années 2013 et 2014, ensuite, d'annuler ses notations des années 2010 à 2017, d'enjoindre au minist

re de la défense de modifier le compte-rendu d'entretien professionnel de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler, d'une part, la décision n° 502892 du 24 février 2016 par laquelle le directeur du centre ministériel de gestion de Bordeaux a rejeté son recours du 24 juillet 2015 tendant à obtenir la révision de son compte-rendu d'entretien professionnel au titre de l'année 2014, d'autre part, d'annuler le compte-rendu d'entretien professionnel des années 2013 et 2014, ensuite, d'annuler ses notations des années 2010 à 2017, d'enjoindre au ministre de la défense de modifier le compte-rendu d'entretien professionnel de 2014 afin de retranscrire exactement la réalité de sa situation administrative, d'y inscrire le bilan d'étape pour 2014, de mettre en conformité son compte-rendu d'évaluation professionnelle de 2013 et de le faire valider par l'ensemble des parties et enfin, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1601798 du 7 février 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 avril 2018 et un mémoire enregistré le 30 novembre 2018, M. E..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 février 2018 en tant qu'il a rejeté ses conclusions contre la décision du 24 février 2016 ;

2°) d'annuler la décision du 24 février 2016 par laquelle le directeur du centre interministériel de gestion de Bordeaux a rejeté son recours du 24 juillet 2015 tendant à obtenir la révision de son compte-rendu d'entretien professionnel au titre de l'année 2014 ;

3°) d'enjoindre au ministre de la défense de modifier le compte-rendu d'entretien professionnel de 2014 afin de retranscrire exactement la réalité de sa situation administrative, d'y inscrire le bilan d'étape pour 2014, de mettre en conformité son compte-rendu d'évaluation professionnelle de 2013 et de le faire valider par l'ensemble des parties ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision du 24 février 2016 est insuffisamment motivée en fait en méconnaissance de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Cette décision se contente de se référer à des avis, sans les citer, ni les joindre, ce qui est insuffisant ;

- le principe du contradictoire a été méconnu car l'entretien professionnel a été réalisé alors qu'il était en arrêt maladie et la circonstance qu'il ait exercé un recours hiérarchique ne régularise pas la procédure ;

- en méconnaissance de l'article 4 du décret du 28 juillet 2010 relatif aux conditions générales de l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires de l'Etat, sa valeur professionnelle ne pouvait être appréciée compte-tenu du fait qu'il a été placé en arrêt maladie pendant dix mois en 2014 ;

- le compte-rendu professionnel est basé sur un poste qui n'existe pas, dès lors qu'il est sans poste effectif et maintenu hors référentiel d'emplois et d'effectifs depuis plusieurs années.

- les objectifs fixés dans son entretien correspondent aux activités du poste qui a été supprimé en 2012 ;

- les objectifs fixés ne correspondaient pas à des missions dévolues à un agent de catégorie A ;

- l'administration aurait dû réaliser un bilan d'étape au retour de son congé de maladie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2018, le ministre des armées demande à la cour de rejeter la requête de M. E....

Il soutient que :

- le moyen tiré du défaut de motivation est nouveau en appel ;

- le principe du contradictoire n'a pas été méconnu ;

- la décision en litige est suffisamment motivée en fait et en droit ;

- son évaluation a tenu compte de son absence de dix mois pour congé maladie sans pour autant le pénaliser ;

- la circonstance qu'il ait été en arrêt maladie en 2014 ne faisait pas obstacle à ce que des objectifs professionnels pour l'année 2015 lui soient fixés ;

- la circonstance que M. E..., qui bénéficie du plan d'accompagnement des restructurations, soit sur un poste " hors référentiel en organisation " dans l'attente de son reclassement, n'empêchait pas son notateur de lui fixer des objectifs ;

- aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à l'administration de procéder à un bilan d'étape à son retour de congé maladie ordinaire.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

-la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le décret n° 2010-888 du 28 juillet 2010 ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C... B...,

- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public ;

- et les observations de Me D... représentant M. E....

Considérant ce qui suit :

1. M. E... est attaché d'administration de l'Etat depuis le 1er janvier 2000. Il bénéficie du statut de travailleur handicapé. Il a été affecté à compter du 1er avril 2010 au centre ministériel de gestion à Bordeaux en qualité de responsable de projet " Alliance ". A la suite d'une restructuration interne, son poste a été supprimé en juin 2012. Il a bénéficié d'un plan d'accompagnement aux restructurations en vue de son reclassement. Après avoir exercé un recours gracieux tendant à obtenir la révision de son compte-rendu d'entretien professionnel au titre de l'année 2014, d'abord auprès de son supérieur hiérarchique le 28 avril 2015, puis en saisissant la commission administrative paritaire centrale compétente à l'égard des fonctionnaires du corps des attachés d'administration, laquelle a émis un avis défavorable à sa demande de révision le 21 octobre 2015, M. E... a saisi le tribunal administratif de Bordeaux d'une demande tendant à l'annulation de la décision du 24 février 2016 du directeur du centre ministériel de gestion de Bordeaux prise sur avis de la commission administrative paritaire, rejetant son recours gracieux, d'une demande tendant à l'annulation de ses comptes rendus d'entretien professionnel des années 2013 et 2014, de ses notations des années 2010 à 2017. Par un jugement rendu le 7 février 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Dans la présente instance, M. E... relève appel de ce jugement en tant que le tribunal a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 24 février 2016 du directeur du centre interministériel de Bordeaux.

2. Aux termes de l'article 17 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Les notes et appréciations générales attribuées aux fonctionnaires et exprimant leur valeur professionnelle leur sont communiquées. (...) ". Aux termes de l'article 55 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " (...)l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires se fonde sur un entretien professionnel annuel conduit par le supérieur hiérarchique direct (...) ". Aux termes de l'article 2 du décret du 28 juillet 2010 relatif aux conditions générales de l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires de l'Etat : " Le fonctionnaire bénéficie chaque année d'un entretien professionnel qui donne lieu à compte-rendu. Cet entretien est conduit par le supérieur hiérarchique direct. La date de cet entretien est fixée par le supérieur hiérarchique direct et communiquée au fonctionnaire au moins huit jours à l'avance ". Aux termes de l'article 3 de ce même décret : " L'entretien professionnel porte principalement sur :/ 1° Les résultats professionnels obtenus par le fonctionnaire eu égard aux objectifs qui lui ont été assignés et aux conditions d'organisation et de fonctionnement du service dont il relève ; / 2° Les objectifs assignés au fonctionnaire pour l'année à venir et les perspectives d'amélioration de ses résultats professionnels, compte tenu, le cas échéant, des perspectives d'évolution des conditions d'organisation et de fonctionnement du service ;/ 3° La manière de servir du fonctionnaire ;/ 4° Les acquis de son expérience professionnelle ; / 5° Le cas échéant, la manière dont il exerce les fonctions d'encadrement qui lui ont été confiées ; / 6° Les besoins de formation du fonctionnaire eu égard, notamment, aux missions qui lui sont imparties, aux compétences qu'il doit acquérir et à son projet professionnel ; / 7° Ses perspectives d'évolution professionnelle en termes de carrière et de mobilité. ". Aux termes de l'article 4 du même décret : " Le compte rendu de l'entretien professionnel est établi et signé par le supérieur hiérarchique direct du fonctionnaire. Il comporte une appréciation générale exprimant la valeur professionnelle de ce dernier. Il est communiqué au fonctionnaire qui le complète, le cas échéant de ses observations. Il est visé par l'autorité hiérarchique qui peut formuler, si elle l'estime utile, ses propres observations. (...) ".

3. En premier lieu, il ne résulte d'aucune disposition applicable que les comptes rendus d'entretien d'évaluation seraient soumis à une obligation de motivation. Dès lors, M. E... ne peut utilement faire valoir que la décision du 24 février 2016 du directeur du centre interministériel de Bordeaux rejetant le recours de M. E... est insuffisamment motivée.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ".

5. M. E... fait valoir que l'administration a méconnu le respect du contradictoire, dès lors que l'entretien professionnel a été réalisé pendant son congé maladie et qu'il n'a pas pu faire valoir ses observations. Il ressort toutefois des pièces du dossier que M. E... a été reçu en entretien le 9 avril 2015 par son supérieur hiérarchique direct et a signé son compte-rendu le 13 avril 2015, après avoir porté sur ce document ses observations. Par suite, le compte-rendu d'entretien a été établi conformément aux dispositions de l'article 4 du décret du 28 juillet 2010 relatif aux conditions générales de l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires de l'Etat précitées. Le moyen tiré de ce qu'il a été établi de façon irrégulière, doit être écarté.

6. En troisième lieu, il ressort des termes du compte-rendu de son évaluation professionnelle au titre de l'année 2014 que M. E... n'a pas été évalué pour l'année écoulée en raison de son congé de maladie d'une durée de dix mois au cours de l'année 2014. Il ressort des pièces du dossier que son supérieur hiérarchique n'a pas davantage procédé à une appréciation générale exprimant sa valeur professionnelle au titre de l'année 2014. Néanmoins, conformément à l'article 3 du décret du 28 juillet 2010 relatif aux conditions générales de l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires de l'Etat précitées, l'entretien du 9 avril 2015 a permis de lui fixer des objectifs pour l'année 2015, de renseigner ses besoins en formation et ses perspectives d'évolution de carrière. Par suite, la décision en litige n'a pas été prise en méconnaissance des dispositions précitées du décret du 28 juillet 2010 relatif aux conditions générales de l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires de l'Etat précité.

7. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que, suite à une réorganisation interne où son poste a été supprimé en juin 2012, M. E... a bénéficié de la mise en place d'un plan d'accompagnement en vue de son reclassement sur un emploi de catégorie A. Pour lui permettre d'assurer son reclassement en interne, son directeur lui a proposé un emploi de chef de section " soutien Alliance " le 22 janvier 2014, puis, en février 2015, un emploi hors référentiel d'organisation, de chef de mission rattaché au directeur du centre ministériel de gestion. Les objectifs qui lui ont été fixés pour l'année 2015 dans son compte-rendu d'entretien d'évaluation de l'année 2014, qui correspondent à la fiche d'emploi de chef de mission rattaché au directeur du centre ministériel de gestion de Bordeaux, portent sur l'étude sur la réorganisation et la simplification des dossiers sur le réseau partagé, l'automatisation et la fiabilisation des données du tableau de bord du directeur du centre de gestion dématérialisée de Bordeaux, la création d'un outil de suivi mensuel des erreurs en paye et la mise à jour et l'enrichissement du site internet du service. Il ne ressort pas des pièces du dossier que ces objectifs seraient en inadéquation avec les tâches qui peuvent être confiées à un fonctionnaire de catégorie A. Par suite, M. E... n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

8. Enfin, si M. E... soutient que l'administration a commis une négligence fautive en ne réalisant aucun bilan d'étape à son retour de congé maladie ordinaire, il n'invoque toutefois aucun texte prévoyant une telle obligation à l'appui de ce moyen.

9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la ministre des armées, que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 24 février 2016 du directeur du centre interministériel de Bordeaux. Il y a lieu par voie de conséquence de rejeter ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de ses frais d'instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E... et au ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 16 juin 2020 à laquelle siégeaient :

M. Dominique Naves, président,

Mme F... G..., présidente-assesseure,

Mme C... B..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 9 juillet 2020.

Le président,

Dominique NAVES

La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 18BX01382 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX01382
Date de la décision : 09/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-06-01 Fonctionnaires et agents publics. Notation et avancement. Notation.


Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: Mme Déborah DE PAZ
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : HIRIART

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-07-09;18bx01382 ?
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