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24/09/2020 | FRANCE | N°19BX04809

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 24 septembre 2020, 19BX04809


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 11 septembre 2018 par laquelle le préfet de la Charente-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1802678 du 30 octobre 2019, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 décembre 2019, Mme B..., représentée par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal ad

ministratif de Poitiers du 30 octobre 2019 ;

2°) d'annuler la décision du 11 septembre 2018 par laque...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 11 septembre 2018 par laquelle le préfet de la Charente-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1802678 du 30 octobre 2019, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 décembre 2019, Mme B..., représentée par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 30 octobre 2019 ;

2°) d'annuler la décision du 11 septembre 2018 par laquelle le préfet de la Charente-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa demande et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai ;

4°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier pour n'avoir pas répondu aux moyens soulevés au soutien des conclusions dirigées contre le refus de titre qui n'étaient pas inopérants, tirés d'une erreur de fait, d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi qu'aux moyens soulevés à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français, tirés de ce que cette décision est dépourvue de base légale, qu'elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ; le jugement est insuffisamment motivé pour ne pas avoir répondu à ces moyens ;

- le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur de fait dès lors qu'elle est entrée régulièrement sur le territoire français pendant la période de validité de son visa ;

- le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation dès lors qu'elle remplit les conditions posées par les dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que sa demande devait être regardée comme une demande de visa de long séjour sur place ;

- l'obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- l'obligation de quitter le territoire français porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de mener une vie privée et familiale normale, en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., épouse B..., ressortissante russe née le 1er mars 1985, a bénéficié d'un visa Schengen pour l'Italie où elle est entrée le 7 octobre 2017, avant de rejoindre la France. Elle s'est mariée le 10 janvier 2018 avec M. B..., ressortissant français. Saisi le 10 juillet 2018 par Mme B... d'une demande de titre de séjour en qualité de conjoint de français, le préfet de la Charente-Maritime a, par décision du 11 septembre 2018, refusé de délivrer à l'intéressée le titre de séjour sollicité. Mme B... relève appel du jugement du 30 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la régularité du jugement :

2. S'il ressort des pièces du dossier soumis au tribunal administratif de Poitiers que Mme B... a fait valoir que la décision lui refusant un titre de séjour en qualité de conjoint de français était entachée d'une erreur de fait dès lors qu'elle était entrée régulièrement sur le territoire français, il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que les premiers juges ont répondu à ce moyen en retenant que : " Si Mme B... soutient avoir rejoint la France après son arrivée en Italie, elle n'a pas établi la déclaration d'entrée prévue par l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen et l'article R. 211-32 du CESEDA, dont la souscription est une condition de la régularité de l'entrée en France de l'étranger soumis à l'obligation de visa et en provenance directe d'un État partie à cette convention qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire. ".

3. Le moyen soulevé par Mme B..., tiré de l'erreur de droit commise par le préfet à lui avoir opposé un défaut de visa de long séjour alors que sa demande valait demande d'un tel visa de long séjour sur place est inopérant dès lors que la décision litigieuse est fondée sur l'absence d'entrée régulière en France et non sur l'absence d'un visa de long séjour. Le tribunal n'était ainsi pas tenu de répondre à ce moyen.

4. Si Mme B... soutient que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de l'erreur d'appréciation dès lors qu'ils ont retenu que la décision litigieuse n'était pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'application des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce moyen, qui a trait au bien-fondé du jugement, est sans incidence sur sa régularité.

5. Enfin, les moyens soulevés à l'encontre d'une prétendue obligation de quitter le territoire français, tirés de ce que cette décision serait dépourvue de base légale, qu'elle méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de la situation personnelle de Mme B... sont inopérants dès lors que la décision litigieuse se limite à refuser la délivrance d'un titre de séjour et n'est assortie d'aucune mesure d'éloignement.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier pour défaut de réponse à un moyen ou pour insuffisance de motivation.

Sur la légalité de la décision du 11 septembre 2018 :

7. D'une part, aux termes de l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 : " 1. Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des Parties contractantes sont tenus de se déclarer, dans les conditions fixées par chaque Partie contractante, aux autorités compétentes de la Partie contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. Cette déclaration peut être souscrite au choix de chaque Partie contractante, soit à l'entrée, soit, dans un délai de trois jours ouvrables à partir de l'entrée, à l'intérieur du territoire de la Partie contractante sur lequel ils pénètrent. (...) ".

8. La souscription de la déclaration prévue par l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen et dont l'obligation figure à l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est une condition de la régularité de l'entrée en France de l'étranger soumis à l'obligation de visa et en provenance directe d'un État partie à cette convention qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire. Selon l'article R. 211-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La déclaration obligatoire mentionnée à l'article L. 531-2 est, sous réserve des dispositions de l'article R. 212-6, souscrite à l'entrée sur le territoire métropolitain par l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un État membre de la Communauté européenne et qui est en provenance directe d'un État partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990. ".

9. D'autre part, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ". Aux termes de l'article L. 313-2 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire et celle de la carte de séjour pluriannuelle (...) sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1. ". L'article L. 211-2-1 du même code dispose toutefois que : " (...) Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour. ".

10. Il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B... aurait, lors de son entrée en France via l'Italie dont les autorités lui avaient délivré un visa de court séjour de type Schengen, souscrit la déclaration d'entrée prévue par l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen et l'article R. 211-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ainsi, son entrée en France est irrégulière. Dès lors, en considérant que, faute d'entrée régulière en France, Mme B... ne remplissait pas les conditions prévues par les dispositions combinées du 4° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour obtenir un titre de séjour de plein droit en qualité de conjoint de français, ni même les conditions prévues par l'article L. 211-2-1 du même code pour obtenir sur place un visa de long séjour, le préfet de la Charente-Maritime n'a entaché sa décision ni d'une erreur de fait, ni d'une erreur de droit, ni d'une erreur d'appréciation.

11. Ainsi qu'il a été dit au point 5 ci-dessus, les moyens soulevés par Mme B... à l'encontre d'une prétendue obligation de quitter le territoire français, tirés de ce que cette décision serait dépourvue de base légale et qu'elle méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, sont inopérants dès lors que la décision litigieuse se limite à refuser la délivrance d'un titre de séjour et n'est assortie d'aucune mesure d'éloignement.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent par voie de conséquence être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Charente-Maritime.

Délibéré après l'audience du 27 août 2020 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, président,

M. C... A..., président-assesseur,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 septembre 2020.

Le rapporteur,

Didier A...

Le président,

Marianne HardyLe greffier,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

4

N° 19BX04809


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19BX04809
Date de la décision : 24/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : RABESANDRATANA

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-09-24;19bx04809 ?
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