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29/09/2020 | FRANCE | N°18BX04212

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 29 septembre 2020, 18BX04212


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme M... A... K... a, par deux requêtes séparées, demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler les décisions des 26 février 2016 et 26 avril 2016 par lesquelles le directeur du centre hospitalier spécialisé La Valette de Saint-Vaury a rejeté ses demandes de placement en congé de longue maladie, d'une part, pour la période du 26 mai 2015 au 25 février 2016 et, d'autre part, pour la période du 26 février au 25 mai 2016 et l'a maintenue en congé de maladie ordinaire jusqu'au 30 avril 2016.


Par un jugement du 9 octobre 2018 sous les n° 1600586 et 1600892, le tribunal a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme M... A... K... a, par deux requêtes séparées, demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler les décisions des 26 février 2016 et 26 avril 2016 par lesquelles le directeur du centre hospitalier spécialisé La Valette de Saint-Vaury a rejeté ses demandes de placement en congé de longue maladie, d'une part, pour la période du 26 mai 2015 au 25 février 2016 et, d'autre part, pour la période du 26 février au 25 mai 2016 et l'a maintenue en congé de maladie ordinaire jusqu'au 30 avril 2016.

Par un jugement du 9 octobre 2018 sous les n° 1600586 et 1600892, le tribunal administratif de Limoges a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 décembre 2018 et le 28 août 2020, Mme A... K..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Limoges du 9 octobre 2018 ;

2°) d'enjoindre au centre hospitalier La Valette de lui attribuer un congé de longue maladie du 17 juin 2015 au 8 mars 2016 ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier spécialisé La Valette le paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le juge de première instance, en substituant son appréciation à celle d'un professionnel de santé, a entaché son jugement d'erreur de droit ;

- les décisions litigieuses sont entachées d'erreur d'appréciation dès lors que sa maladie la met dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaire un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée, comme cela est attesté par les avis du comité médical départemental en date du 22 octobre 2015, du 14 avril 2016 et du 28 septembre 2018 et l'expertise du Dr Dumond ; par ailleurs, l'avis du comité médical départemental du 28 septembre 2018 n'a jamais fait l'objet d'un recours devant le comité médical supérieur ;

- elle n'a jamais exercé d'activité professionnelle en parallèle à son congé de maladie et l'attestation produite par le centre hospitalier en ce sens est dépourvue de valeur probante.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 avril 2019, le centre hospitalier spécialisé La Valette, représenté par Me L..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme A... K... de la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les avis des comités médicaux, départemental ou supérieur, ne sont que consultatifs et il ne se trouvait pas en situation de compétence liée pour l'attribution d'un congé de longue maladie ; de plus, le comité médical supérieur a émis, le 26 janvier 2016, un avis défavorable au placement en congé de longue maladie de Mme A... K... pour la période du 26 mai 2015 au 25 février 2016 ; il appartenait bien au tribunal de rechercher, sans être lié par ces avis, si les conditions posées par l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 étaient réunies ;

- Mme A... K... n'a pas établi en quoi son état de santé aurait justifié le placement en congé de longue maladie, les documents médicaux fournis se contentent de préconiser le placement en congé de longue maladie sans établir la réunion des conditions légales exigées ; en outre, ces avis ne sont pas circonstanciés et les pièces supplémentaires sont postérieures aux décisions en litige ;

- l'expertise du Dr Dumond démontre que l'affection dont se prévaut Mme A... K... n'est pas chronique et ne la met pas dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, l'avis du comité médical départemental du 14 avril 2016 n'est pas circonstancié, celui du 28 septembre 2017 est postérieur aux décisions litigieuses, tout comme l'expertise du Dr Dumond en date du 11 août 2016 ;

- Mme A... K..., alors même qu'elle était en congé maladie, a fait acte de candidature à un poste de psychologue par voie de détachement et a poursuivi une activité professionnelle au lycée Favard de Guéret.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n° 88-386 du 19 avril 1988 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... G...,

- les conclusions de Mme Sabrina Ladoire, rapporteur public,

- et les observations de Me F..., représentant Mme A... K..., et de Me I..., représentant le centre hospitalier spécialisé La Valette.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... K... a été recrutée en qualité de psychologue titulaire le 1er août 2012 par le centre hospitalier spécialisé La Valette de Saint-Vaury (Creuse). Elle a bénéficié d'un congé de maladie ordinaire du 9 mars au 4 mai 2015, puis du 11 au 23 mai 2015 et du 26 mai au 4 août 2015, date à partir de laquelle elle a demandé à être placée en congé de longue maladie. Elle a sollicité du tribunal administratif de Limoges l'annulation des décisions du directeur du centre hospitalier spécialisé La Valette lui refusant le bénéfice d'un congé de longue maladie, la première en date du 26 février 2016 concernant la période du 26 mai 2015 au 25 février 2016, la seconde en date du 26 avril 2016 pour la période allant du 26 février 2016 au 25 mai 2016. Elle relève appel du jugement du 9 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté ses demandes.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Le fonctionnaire en activité à droit : (...) 2° À des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) 3° À des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent. L'intéressé conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. (...) ". Aux termes de l'article 18 du décret du 19 avril 1988 : " Pour l'application de l'article 41 (3°) de la loi du 9 janvier 1986 susvisée, le ministre chargé de la santé établit par arrêté, après avis du comité médical supérieur, une liste indicative de maladies qui, si elles répondent en outre aux critères définis par ces dispositions législatives, peuvent ouvrir droit à congé de longue maladie après avis du comité médical. Toutefois le bénéfice d'un congé de longue maladie demandé pour une affection qui n'est pas inscrite sur la liste prévue à l'alinéa précédent peut être accordé après l'avis du comité médical compétent ". Aux termes de l'article 24 du même décret : " Pour obtenir un congé de longue maladie ou de longue durée, le fonctionnaire en activité, ou son représentant, doit adresser à l'autorité ayant le pouvoir de nomination une demande appuyée d'un certificat du médecin traitant spécifiant qu'il peut bénéficier des dispositions du 3° ou

du 4° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée. Le médecin traitant adresse directement au secrétaire du comité médical compétent un résumé de ses observations et les pièces justificatives dont la production peut être prescrite par les dispositions de l'arrêté ministériel prévu à l'article 49 du décret du 14 mars 1986 susvisé. Au vu de ces pièces, le secrétaire du comité médical fait procéder à une contre-visite du demandeur par un médecin agréé, le cas échéant spécialiste. Le dossier est ensuite soumis au comité médical compétent. Si le médecin agréé qui a procédé à la contre-visite ne siège pas au comité médical, il peut être entendu par celui-ci. Le comité médical transmet son avis à l'autorité investie du pouvoir de nomination. (...) ".

3. En premier lieu, contrairement à ce que soutient Mme A... K..., il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de conclusions en ce sens, de porter sa propre appréciation sur la réalité et l'exactitude matérielle des faits qui lui sont soumis aux fins de se prononcer sur la légalité des décisions contestées devant lui. Le moyen tiré de ce que le tribunal administratif de Limoges aurait substitué son appréciation à celle d'un professionnel de santé est dès lors infondé dans la mesure où le juge de première instance, qui n'est pas lié par les avis émis par les experts ou les comités médicaux consultatifs, devait apprécier l'état de santé de Mme A... K... au regard de l'ensemble des pièces, notamment médicales, fournies contradictoirement par les parties.

4. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que la demande de Mme A... K... d'octroi d'un congé de longue maladie pour la période du 26 mai 2015 au 25 février 2016 a fait l'objet d'un avis favorable du comité médical départemental le 22 octobre 2015, de même que la demande concernant la période du 26 février 2016 au 25 mai 2016 dans un avis du 14 avril 2016. Ce même comité s'est prononcé favorablement à l'octroi d'un congé de longue maladie pour la période du 26 mai 2015 au 3 septembre 2017 dans un avis du 28 septembre 2018, au demeurant ne se rapportant pas à une telle demande mais concernant la réintégration de Mme K.... Toutefois, ces avis ont été contredits par le comité médical supérieur dans un premier avis du 26 janvier 2016 concernant la période du 26 mai 2015 au 25 février 2016, ainsi que par un second avis en date du 19 juin 2018, certes postérieur aux décisions en litige mais relatif à une situation antérieure, également défavorable à un placement en congé de longue maladie de l'intéressée à compter du 26 mai 2015. Les pièces médicales fournies par cette dernière, comportant une attestation de son médecin généraliste, une expertise réalisée par un médecin, psychiatre, à la demande du comité médical départemental, une attestation de son médecin psychiatre traitant, ainsi que deux expertises du Dr Dumond, psychiatre, au demeurant postérieures à la première décision litigieuse, se bornent à décrire l'état de santé de Mme A... K... et à préconiser son placement en congé de longue maladie sans se prononcer sur le caractère invalidant et de gravité confirmée de sa maladie, alors que la réunion de ces deux critères est notamment exigée aux fins de bénéficier d'un placement en congé de longue maladie, au sens et pour l'application des dispositions précitées. Dans ces conditions, en s'appuyant notamment sur l'avis défavorable émis par le comité médical supérieur, le directeur du centre hospitalier spécialisé n'a commis ni erreur de droit, ni erreur d'appréciation en refusant, par ses décisions des 26 février et 26 avril 2016 de placer l'intéressée en congé de longue maladie.

5. Il résulte de ce qui précède que Mme A... K... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté ses conclusions à fins d'annulation. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction doivent également être rejetées.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier spécialisé La Valette, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, la somme que demande Mme A... K... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande présentée au même titre par le centre hospitalier spécialisé La Valette.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... K... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier spécialisé La Valette en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme M... A... K... et au centre hospitalier spécialisé La Valette.

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2020 à laquelle siégeaient :

Mme J... H..., présidente,

Mme B... E..., présidente-assesseure,

Mme D... G..., conseillère.

Lu en audience publique, le 29 septembre 2020.

La rapporteure,

Kolia G...

La présidente,

Catherine H...Le greffier,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N°18BX04212


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX04212
Date de la décision : 29/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01-02 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de maladie. Congés de longue maladie.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Kolia GALLIER
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : SCP DAURIAC PAULIAT - DEFAYE BOUCHERLE MAGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-09-29;18bx04212 ?
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