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08/10/2020 | FRANCE | N°18BX04140

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 08 octobre 2020, 18BX04140


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière Iru Koronak a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 25 novembre 2016 par lequel le maire d'Urrugne a refusé de lui délivrer un permis de construire modificatif relatif à une maison d'habitation, ainsi que la décision tacite du maire rejetant son recours gracieux formé contre ce même arrêté.

Par un jugement n° 1700960 du 2 octobre 2018, le tribunal administratif de Pau a rejeté la requête.

Procédure devant la cour :

Par

une requête et deux mémoires, enregistrés les 3 décembre 2018, 5 février 2019 et 20 janvier 2020, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière Iru Koronak a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 25 novembre 2016 par lequel le maire d'Urrugne a refusé de lui délivrer un permis de construire modificatif relatif à une maison d'habitation, ainsi que la décision tacite du maire rejetant son recours gracieux formé contre ce même arrêté.

Par un jugement n° 1700960 du 2 octobre 2018, le tribunal administratif de Pau a rejeté la requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 3 décembre 2018, 5 février 2019 et 20 janvier 2020, la SCI Iru Koronak, représentée par la SCP Celice-Soltner-Texidor-Perier, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Pau du 2 octobre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 25 novembre 2016 par lequel le maire d'Urrugne a refusé de lui délivrer un permis de construire modificatif, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au maire d'Urrugne de délivrer le permis de construire modificatif ;

4°) de mettre à la charge de la commune d'Urrugne une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce que le sens des conclusions du rapporteur public n'a pas été mis en ligne dans un délai raisonnable avant l'audience du 18 septembre 2018 ;

- le jugement est irrégulier en ce qu'il est insuffisamment motivé, en violation de l'article L. 9 du code de justice administrative et que les premiers juges n'ont pas répondu à l'ensemble des moyens qu'elle avait soulevé ;

- conformément aux articles L. 111-16 et R. 111-23 du code de l'urbanisme, le maire d'Urrugne ne pouvait pas refuser le permis de construire modificatif et les dispositions contraires de l'article UD 11 imposant la réalisation d'une toiture à pentes avec des tuiles canal d'une couleur terre cuite naturelle à tons brouillés ;

- l'article UD 11 du plan local d'urbanisme, en tant qu'il impose des matériaux déterminés pour les toitures est illégal au regard de l'article L. 151-18 du code de l'urbanisme ;

- le projet de construction avec une toiture plate végétalisée ne méconnait pas l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme ;

- elle n'a procédé à aucune manoeuvre frauduleuse de nature à induire en erreur l'administration.

Par des mémoires enregistrés les 4 décembre 2019, 11 et 19 février 2020, la commune d'Urrugne, représentée par la SELARL Etche Avocats, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société appelante d'une somme de 4 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens développés par la SCI Iru Koronak ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant la SCI Iru Koronak, et de Me A..., représentant la commune d'Urrugne.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 6 mars 2014, le maire d'Urrugne a délivré à la société civile immobilière (SCI) Iru Koronak un permis de construire une maison d'habitation sur un terrain situé chemin d'Aguerrenborda, sous réserve du respect des prescriptions architecturales énoncées en son article 2, parmi lesquelles figure l'exigence d'une toiture composée de tuiles canal ou similaires de couleur terre cuite naturelle à tons brouillés. Le 7 octobre 2016, la SCI Iru Koronak a sollicité la délivrance d'un permis de construire en vue de remplacer la toiture à deux pentes en tuiles canal par une toiture terrasse végétalisée. Par un arrêté du 25 novembre 2016, le maire d'Urrugne a refusé d'accéder à sa demande. La SCI Iru Koronak relève appel du jugement du 2 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce dernier arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Si la société appelante a soulevé les moyens tirés de l'insuffisance de motivation du jugement en raison du défaut de réponse à l'ensemble des moyens et de l'irrégularité de la procédure résultant de l'absence de communication du sens des conclusions du rapporteur public dans un délai raisonnable, elle n'assortit ces moyens d'aucune précision permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé. Par suite, ces moyens doivent être écartés.

Sur la légalité de l'arrêté du 25 novembre 2016 :

3. Pour refuser de délivrer à la SCI Iru Koronak le permis de construire modificatif tendant au remplacement de la toiture à deux pentes en tuiles canal par une toiture terrasse végétalisée, le maire d'Urrugne s'est fondé, d'une part, sur la méconnaissance des dispositions du a) de l'article UD 11-2 du règlement du plan local d'urbanisme d'Urrugne imposant que les toitures seront à deux pentes et devront respecter des pentes compatibles avec les caractéristiques du matériau de couvert qui sera la tuile canal ou similaire et, d'autre part, sur la circonstance que le projet était de nature à porter atteinte au caractère des lieux avoisinants et aux constructions avoisinantes.

4. Aux termes de l'article L. 151-18 du code de l'urbanisme : " Le règlement peut déterminer des règles concernant l'aspect extérieur des constructions neuves, rénovées ou réhabilitées, leurs dimensions, leurs conditions d'alignement sur la voirie et de distance minimale par rapport à la limite séparative et l'aménagement de leurs abords, afin de contribuer à la qualité architecturale, urbaine et paysagère, à la mise en valeur du patrimoine et à l'insertion des constructions dans le milieu environnant ".

5. En l'espèce, compte tenu des caractéristiques de la zone marquée par la présence quasi exclusive de constructions de type basque traditionnel, les auteurs du plan local d'urbanisme, en fixant, par l'article UD 11 de ce document, l'obligation de réaliser des toitures à deux pans minimum avec une pente d'au moins 37% et une couverture en tuiles canal ou similaire, ne peuvent être regardés comme ayant porté au droit de propriété une atteinte disproportionnée eu égard aux buts poursuivis par la réglementation d'urbanisme ni méconnu l'étendue de leur compétence fixée par les dispositions de l'article L. 151-18 du code de l'urbanisme, alors même que le secteur en cause ne fait l'objet d'aucune protection particulière. Dès lors, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Pau a jugé que la société Iru Koronak n'était pas fondée à invoquer l'illégalité, par voie d'exception, de la délibération du conseil municipal d'Urrugne approuvant le plan local d'urbanisme de cette commune.

6. Aux termes de l'article UD 11 du plan local d'urbanisme de la commune d'Urrugne : " Aspect Extérieur / 1. Principe général / Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation des prescriptions spéciales si les constructions et installations, par leur situation, leurs dimensions ou leur aspect extérieur sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains, ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. / Les constructions doivent présenter un volume, un aspect, des couleurs et des matériaux de nature à ne pas porter atteinte à ceux des constructions avoisinantes (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette de la construction projetée est situé sur un coteau au nord du bourg dans un environnement très boisé. Le terrain est en pente, en contrebas de la voie de desserte et s'ouvre sur un espace naturel avec vue dégagée sur le massif de La Rhune. Par ailleurs, la toiture plane végétalisée envisagée permet de réduire l'impact visuel du projet. Ainsi, bien que les constructions avoisinantes présentent le caractère d'un habitat individuel formé de maisons de type basque traditionnel dotées d'une toiture à deux pentes couvertes de tuiles canal, le projet ne porte pas atteinte, par sa localisation et son architecture, au caractère des lieux avoisinants et des constructions avoisinantes. Par suite, en refusant le permis de construire au motif que le projet portait atteinte aux lieux et constructions avoisinants, le maire a fait une inexacte application des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme.

8. Toutefois, aux termes de l'article L. 111-16 du même code : " Nonobstant les règles relatives à l'aspect extérieur des constructions des plans locaux d'urbanisme, des plans d'occupation des sols, des plans d'aménagement de zone et des règlements des lotissements, le permis de construire ou d'aménager ou la décision prise sur une déclaration préalable ne peut s'opposer à l'utilisation de matériaux renouvelables ou de matériaux ou procédés de construction permettant d'éviter l'émission de gaz à effet de serre, à l'installation de dispositifs favorisant la retenue des eaux pluviales ou la production d'énergie renouvelable correspondant aux besoins de la consommation domestique des occupants de l'immeuble ou de la partie d'immeuble concernés. Le permis de construire ou d'aménager ou la décision prise sur une déclaration préalable peut néanmoins comporter des prescriptions destinées à assurer la bonne intégration architecturale du projet dans le bâti existant et dans le milieu environnant. / La liste des dispositifs, procédés de construction et matériaux concernés est fixée par décret ". Aux termes de l'article R. 111-23 du même code : " Pour l'application de l'article L. 111-16, les dispositifs, matériaux ou procédés sont : / 1° Les bois, végétaux et matériaux biosourcés utilisés en façade ou en toiture ; (...) / 3° Les équipements de récupération des eaux de pluie, lorsqu'ils correspondent aux besoins de la consommation domestique des occupants de l'immeuble ou de la partie d'immeuble concernée (...) ". Aux termes de l'article UD 11 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Urrugne : " (...) 2- Dispositions pour les constructions / a) Constructions principales : - Toitures : / Les toitures sont à deux pentes minimum. Les pentes seront compatibles avec les caractéristiques du matériau de couverture, avec un minimum de 37 %. / Le matériau sera la tuile canal ou similaire, couleur terre cuite naturelle à tons brouillé. / Des exceptions pourront être acceptées pour des raisons techniques ou pour respecter le choix de couverture d'origine de bâtiment ".

9. Si l'utilisation de végétaux sur les toitures dans un but d'isolation thermique et de rétention d'eaux pluviales relève des dispositions des articles L. 111-16 et R. 111-23 du code de l'urbanisme précité, ces dispositions n'ont pas pour effet d'écarter l'ensemble des dispositions d'un plan local d'urbanisme régissant l'aspect extérieur des bâtiments, et en particulier celles qui imposent une toiture à deux pentes, laquelle ne fait pas obstacle à une telle végétalisation. Par suite, si le maire d'Urrugne ne pouvait légalement refuser le permis de construire modificatif au motif que la toiture de la construction projetée n'était pas recouverte de tuile canal ou similaire, l'arrêté attaqué, en ce qu'il impose l'exigence d'un toit à deux pentes, ne méconnait pas les dispositions des articles L. 111-16 et R. 111-23 du code de l'urbanisme. Il résulte de l'instruction que ce seul motif suffisait à fonder la décision attaquée.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la société Iru Koronak n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 novembre 2016 par lequel le maire d'Urrugne a refusé de lui délivrer un permis de construire modificatif et de la décision de rejet de son recours gracieux.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

11. Le présent arrêt, qui confirme le jugement du tribunal administratif de Pau n'implique aucune mesure particulière d'exécution. Par suite, les conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Urrugne, qui n'est pas la partie perdante, la somme que l'appelante demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Iru Kononak une somme de 1 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés par la commune d'Urrugne.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Iru Koronak est rejetée.

Article 2 : La société Iru Koronak versera à la commune d'Urrugne une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Iru Koronak et à la commune d'Urrugne.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2020 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme C..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 octobre 2020.

Le rapporteur,

C... Le président,

Marianne Hardy

Le greffier,

Stéphan Triquet

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Atlantiques en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

N° 18BX04140


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18BX04140
Date de la décision : 08/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY-SABOURDY
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : SCP CELICE-SOLTNER-TEXIDOR-PERRIER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-10-08;18bx04140 ?
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