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19/11/2020 | FRANCE | N°18BX03318

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 19 novembre 2020, 18BX03318


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Groupe A40 Architectes a demandé au tribunal administratif de Poitiers de condamner l'État au paiement d'une somme de 132 894,44 euros HT correspondant au solde de la rémunération due au titre du marché de maîtrise d'oeuvre de construction d'un complexe de sport sur le campus de l'université de Poitiers.

Par un jugement n° 1502303 du 27 juin 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregi

strés les 30 août 2018 et 4 juin 2019, la société Groupe A40 Architectes, représentée par Me B...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Groupe A40 Architectes a demandé au tribunal administratif de Poitiers de condamner l'État au paiement d'une somme de 132 894,44 euros HT correspondant au solde de la rémunération due au titre du marché de maîtrise d'oeuvre de construction d'un complexe de sport sur le campus de l'université de Poitiers.

Par un jugement n° 1502303 du 27 juin 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 30 août 2018 et 4 juin 2019, la société Groupe A40 Architectes, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 27 juin 2018 ;

2°) de condamner l'État au paiement de la somme de 132 894,44 euros HT ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2.500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Groupe A40 Architectes soutient que :

- l'augmentation de la rémunération du maître d'oeuvre prévue par l'avenant n° 1 tient uniquement compte de prestations supplémentaires relatives à la mise aux normes des constructions existantes et ne porte pas sur la réalisation des tranches conditionnelles et la levée des options, lesquelles ont été réalisées pour une somme totale de 991 749,59 euros HT ;

- en application des dispositions du III de l'article 30 du décret n° 93-1268 du

29 novembre 1993 et des stipulations de l'article 4.1.3 du cahier des clauses administratives particulières, l'avenant n° 1 n'a pu fixer le forfait définitif de rémunération sans chiffrer l'incidence financière des options sur le coût total des travaux, alors que la rémunération du maître d'oeuvre est légalement assise sur ce coût ;

- les tranches conditionnelles et les options ayant été réalisées pour un coût des travaux de 991 749,59 euros HT et l'avenant n° 1 prévoyant un taux de rémunération du maître d'oeuvre au titre de la mission de base de 12 % et au titre de la mission ordonnancement, pilotage et coordination, elle a droit aux sommes de 119 009,95 et

13 884,49 euros HT, soit 132 894,44 euros HT.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 7 mai et 27 juin 2019, le ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation conclut au rejet de la requête, et fait valoir que :

- elle est irrecevable du fait de l'intervention d'un avenant prévoyant une clause de renonciation à tout recours ;

- les moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 modifiée relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée ;

- le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d'oeuvre confiées par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- et les conclusions de Mme Aurélie Chauvin, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par acte d'engagement du 17 décembre 2010, l'État a confié à un groupement dont la société Groupe A40 Architectes était le mandataire, la maîtrise d'oeuvre des travaux de construction d'un complexe universitaire multisalles de sport sur le campus de Poitiers, pour une rémunération forfaitaire de 263 250 euros HT, et un coût prévisionnel des travaux de 2 700 000 euros HT. Dans un courrier du 12 mai 2011, le recteur de l'académie de Poitiers a approuvé les études d'avant-projet définitif et a sollicité d'importantes modifications au projet : réorganisation des travaux en une tranche ferme et trois tranches conditionnelles relatives aux vestiaires et à la salle de musculation, au second oeuvre de la salle de tennis de table et à la salle de judo ; intégration à la tranche ferme de travaux de mise aux normes de constructions existantes ; définition d'options. Puis, par un avenant n° 1 du 20 juillet 2011, la rémunération forfaitaire du maître d'oeuvre a été portée à la somme de 347 975,28 euros HT. Le 17 novembre 2014, le recteur de l'académie de Poitiers a adressé à la société Groupe A40 Architectes un projet d'avenant n° 2, prenant en compte des travaux supplémentaires demandés par le maître d'ouvrage et la prolongation des délais du chantier, fixant le coût total définitif des travaux à 3 681 584,89 euros HT et portant la rémunération du maître d'oeuvre à la somme de 371 610,68 euros HT.

2. Par courrier du 7 juillet 2015, la société Groupe A40 Architectes a sollicité le paiement d'une somme complémentaire de 132 894,44 euros au titre de la réalisation des tranches conditionnelles et de la levée des options demandées dans le courrier du

12 mai 2011, cité au point 1, dont 119 009,95 euros HT au titre de la mission de base et

13 884,49 euros HT au titre de la mission ordonnancement, pilotage et coordination (OPC). Cette demande a été rejetée par le recteur le 16 juillet 2015.

3. La société Groupe A40 Architectes relève appel du jugement du 27 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à ce que l'État soit condamné à lui verser la somme de 132 894,44 euros.

4. L'article 9 de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985, alors en vigueur, dispose : " la mission de maîtrise d'oeuvre donne lieu à une rémunération forfaitaire fixée contractuellement. Le montant de cette rémunération tient compte de l'étendue de la mission, de son degré de complexité et du coût prévisionnel des travaux ". Aux termes de l'article

29 du décret du 29 novembre 1993 : " Le contrat fixe la rémunération forfaitaire du maître d'oeuvre. Cette rémunération décomposée par éléments de mission tient compte : / a) De l'étendue de la mission, appréciée notamment au regard du nombre et du volume des prestations demandées, de l'ampleur des moyens à mettre en oeuvre, du mode de dévolution des travaux, des délais impartis et, le cas échéant, du ou des engagements souscrits par le maître d'oeuvre de respecter le coût prévisionnel des travaux ; / b) Du degré de complexité de cette mission, apprécié notamment au regard du type et de la technicité de l'ouvrage, de son insertion dans l'environnement, des exigences et contraintes du programme; c) Du coût prévisionnel des travaux basé soit sur l'estimation prévisionnelle provisoire des travaux établie par le maître d'oeuvre lors des études d'avant-projet sommaire, soit sur l'estimation prévisionnelle définitive des travaux établie lors des études d'avant-projet définitif (...) ". Et aux termes du III de l'article 30 du même décret : " En cas de modification de programme ou de prestations décidées par le maître de l'ouvrage, le contrat de maîtrise d'oeuvre fait l'objet d'un avenant qui arrête le programme modifié et le coût prévisionnel des travaux concernés par cette modification, et adapte en conséquence la rémunération du maître d'oeuvre et les modalités de son engagement sur le coût prévisionnel ".

5. Il résulte de l'instruction que l'acte d'engagement du 17 décembre 2010 portait sur la construction de bâtiments neufs, pour un coût prévisionnel de 2 700 000 euros HT, et ne comportait qu'une tranche ferme. L'avenant n° 1 a modifié l'étendue des travaux et des prestations de maîtrise d'oeuvre, en ajoutant à la tranche ferme des travaux de rénovation de salles de sports existantes, pris en charge par l'université de Poitiers mais intégrés dans le marché de maîtrise d'oeuvre conclu par l'État. Ces prestations supplémentaires, qui ont été réglées au groupement de maîtrise d'oeuvre, ne sont pas en litige. La société Groupe A40 Architectes soutient en revanche que l'avenant n° 1 ne porterait pas sur les autres modifications demandées par le maître d'ouvrage et tenant à la réorganisation des travaux en une tranche ferme et trois tranches conditionnelles ainsi qu'à la formulation d'options, lesquelles ont été réalisées pour un montant de 991 749,59 euros HT, et qu'elle aurait droit à une rémunération complémentaire à ce titre.

6. Il résulte des termes mêmes de l'avenant n° 1 qu'il traite, dans les b) et c) de son article 3, des tranches conditionnelles et fonctionnelles des travaux, dont il décrit le contenu en expliquant les raisons de la restructuration du marché de travaux en une tranche ferme et trois tranches conditionnelles, ainsi que des options en plus et moins-value. Son article 5, intitulé " forfait définitif de rémunération ", stipule que " consécutivement aux modifications du programme, pour tenir compte des prestations supplémentaires décrites précédemment et nécessaire à la bonne réalisation de l'opération, conformément à la loi MOP et après négociation entre le maître d'ouvrage et le groupement de maîtrise d''oeuvre ", le forfait définitif de rémunération du groupement de maîtrise d'oeuvre est fixé à 347 975,28 HT.

7. La société Groupe A40 Architectes soutient cependant que cette rémunération ne peut être regardée comme incluant les prestations relatives aux travaux afférents aux tranches conditionnelles et aux options dès lors que le coût prévisionnel des travaux est fixé à la somme de 2 700 000 euros HT par l'article 4 de l'avenant sans changement par rapport à l'acte d'engagement. La société fait valoir à cet égard que la rémunération du maître d'oeuvre est notamment fondée sur le coût prévisionnel des travaux et qu'en application des dispositions du III de l'article 30 du décret du 29 novembre 1993 rappelées au point 4, en cas de modification du programme décidée par le maître d'ouvrage, l'avenant doit arrêter le coût prévisionnel des travaux concernés par cette modification et adapter en conséquence la rémunération du maître d'oeuvre.

8. Toutefois, d'une part, la création des trois tranches conditionnelles n'a consisté qu'en une réorganisation de travaux qui étaient auparavant compris dans la tranche ferme et inclus dans le coût des travaux initial. D'autre part, s'agissant des quatre options en

plus-value, l'avenant précise que deux d'entre elles ont fait l'objet d'une évaluation dans les études d'avant-projet définitif et ont donc été intégrées au coût prévisionnel des travaux de 2 700 000 euros. S'agissant des deux autres, leur montant total est de 123 926,59 euros HT, et ne représente ainsi que 4,6 % du coût prévisionnel des travaux.

9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les parties, lors de la conclusion de l'avenant n° 1, ont entendu inclure dans la rémunération du maître d'oeuvre l'ensemble des prestations mentionnées dans l'avenant, y compris, contrairement à ce que soutient la société Groupe A40 Architectes, les prestations relatives aux tranches conditionnelles et aux options.

10. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à la requête par le ministre, la société Groupe A40 Architectes n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. L'Etat n'étant pas partie perdante en la présente instance, il y a lieu de rejeter ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Groupe A40 Architectes est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Groupe A40 Architectes et à la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.

Délibéré après l'audience du 15 octobre 2020 à laquelle siégeaient :

Mme A... C..., présidente,

Mme D..., présidente-assesseure.

Mme Florence Madelaigue, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 novembre 2020.

La rapporteure,

D...

La présidente,

Brigitte C...

La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne à la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation en ce qui la concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 18BX03318 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX03318
Date de la décision : 19/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PHEMOLANT
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : TRASSARD et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-11-19;18bx03318 ?
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