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17/12/2020 | FRANCE | N°20BX00314

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 17 décembre 2020, 20BX00314


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée Compagnie générale d'entreprise moderne construction (CGEMC) a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner solidairement la commune de Ramonville-Saint-Agne et la société Société nouvelle d'asphaltes (SNA) Sud-Ouest au paiement de la somme de 38 112 euros HT en raison du préjudice qu'elle estime avoir subi dans l'exécution du marché de réhabilitation du château de Soule.

Par un jugement n° 1701313 du 13 novembre 2019, le tribunal administratif

de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et u...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée Compagnie générale d'entreprise moderne construction (CGEMC) a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner solidairement la commune de Ramonville-Saint-Agne et la société Société nouvelle d'asphaltes (SNA) Sud-Ouest au paiement de la somme de 38 112 euros HT en raison du préjudice qu'elle estime avoir subi dans l'exécution du marché de réhabilitation du château de Soule.

Par un jugement n° 1701313 du 13 novembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 21 janvier 2020 et 19 octobre 2020, la société CGEMC, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 13 novembre 2019 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) de condamner solidairement la commune de Ramonville-Saint-Agne et la société SNA Sud-Ouest à lui verser la somme de 38 112 euros HT en réparation du préjudice subi ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner la SNA Sud-Ouest à lui verser la somme de 38 112 euros HT en réparation du préjudice subi en raison de sa défaillance à exécuter les lots n° 5 et n° 9 du marché ayant conduit à un retard d'exécution des travaux de 23 mois ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Ramonville-Saint-Agne et de la société SNA Sud-Ouest la somme de 2 500 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a omis de statuer sur l'action en responsabilité dirigée contre la société SNA Sud-Ouest sur le fondement de sa responsabilité quasi-délictuelle ;

- le tribunal a estimé à tort que la CGEMC n'avait pas formé de réclamation en cours d'exécution du marché ;

- le tribunal a estimé à tort que la CGEMC, préalablement à sa requête, n'avait pas formulé de mémoire en réclamation à la suite de la notification du décompte général et que par suite sa requête était irrecevable ;

- elle est fondée à demander la réparation de son préjudice en raison des fautes commises par la commune, qui a attribué les lots n° 5 et n° 9 à la SNA Sud-Ouest, laquelle est à l'origine du retard du chantier ;

- la responsabilité quasi-délictuelle de la SNA Sud-Ouest est engagée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 septembre 2020, la société nouvelle d'asphaltes, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et fait valoir que :

- la GEMC n'a pas respecté l'article 13.4.5 du CCAG en ne renvoyant pas dans le délai de quarante-cinq jours le décompte général signé, et dès lors le décompte notifié par la Commune le 2 février 2017 est définitif ;

- les conclusions subsidiaires tendant à la condamnation de la seule société sont nouvelles en appel ;

- les moyens ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 29 octobre 2020, la commune de Ramonville-Saint-Agne, représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête et fait valoir que :

- la demande devant les premiers juges était irrecevable ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics ;

- l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F...,

- les conclusions de Mme B... C...,

- et les observations de Me A..., représentant la Compagnie générale d'entreprise moderne construction, et de Me E..., représentant la commune de Ramonville Saint-Agne.

Considérant ce qui suit :

1. En 2012, dans le cadre de l'opération de réhabilitation du château de Soule, la commune de Ramonville-Saint-Agne a confié à la société Compagnie générale d'entreprise moderne construction (CGEMC) le lot n° 12 " menuiseries intérieures bois - rayonnage mobilier ". La société Société nouvelle d'asphaltes (SNA) a été désignée attributaire des lots n° 5 et n° 9 relatifs à la " couverture " et au " bardage ". À la suite de la réception des travaux le 23 juin 2016, la société CGEMC a transmis à la maîtrise d'oeuvre, le 2 août 2016, son projet de décompte final accompagné d'un mémoire en réclamation tendant au versement d'une somme de 38 112 euros HT en réparation du préjudice subi en raison du retard de 23 mois pris par les travaux. Par un courrier du 11 octobre 2016, le maître d'oeuvre l'a informée de ce que le projet de décompte final ne pouvait être validé et, le 2 février 2017, le maire de Ramonville-Saint-Agne lui a notifié le décompte général du marché et a rejeté le montant de la réclamation. La société CGEMC relève appel du jugement du 13 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de la commune de Ramonville-Saint-Agne et de la société SNA Sud-Ouest au paiement de la somme de 38 112 euros HT.

2. Aux termes de l'article 13 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicables aux marchés publics de travaux : " 13.44. Dans un délai de quarante-cinq jours compté à partir de la notification du décompte général, le titulaire renvoie au représentant du pouvoir adjudicateur, avec copie au maître d'oeuvre, le décompte général revêtu de sa signature, sans ou avec réserves, ou fait connaître les motifs pour lesquels il refuse de le signer. / Si la signature du décompte général est donnée sans réserve par le titulaire, il devient le décompte général et définitif du marché. / Ce décompte lie définitivement les parties, sauf en ce qui concerne le montant des intérêts moratoires afférents au solde. En cas de contestation sur le montant des sommes dues, le représentant du pouvoir adjudicateur règle, dans un délai de trente jours à compter de la date de réception de la notification du décompte général assorti des réserves émises par le titulaire ou de la date de réception des motifs pour lesquels le titulaire refuse de signer, les sommes admises dans le décompte final. Après résolution du désaccord, il procède, le cas échéant, au paiement d'un complément, majoré, s'il y a lieu, des intérêts moratoires, courant à compter de la date de la demande présentée par le titulaire. / Ce désaccord est réglé dans les conditions mentionnées à l'article 50 du présent CCAG ". Aux termes de l'article 50.1.1 du même CCAG : " Si un différend survient entre le titulaire et le maître d'oeuvre, sous la forme de réserves faites à un ordre de service ou sous toute autre forme, ou entre le titulaire et le représentant du pouvoir adjudicateur, le titulaire rédige un mémoire en réclamation. / Dans son mémoire en réclamation, le titulaire expose les motifs de son différend, indique, le cas échéant, les montants de ses réclamations et fournit les justifications nécessaires correspondant à ces montants (...) / Si la réclamation porte sur le décompte général du marché, ce mémoire est transmis dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la notification du décompte général (...) Le mémoire reprend, sous peine de forclusion, les réclamations formulées antérieurement à la notification du décompte général et qui n'ont pas fait l'objet d'un règlement définitif ".

3. Il résulte de ces stipulations qu'il incombe à l'entreprise de reprendre, dans un mémoire en réclamation produit à la suite de la notification du décompte général, les réclamations formulées antérieurement et qui n'ont pas encore fait l'objet d'un règlement définitif et qu'à défaut du respect de ces stipulations, le décompte général devient définitif.

4. Il résulte de l'instruction qu'à la suite de la réception des travaux, la CGEM a adressé au maître d'oeuvre, le 2 août 2016, son projet de décompte final accompagné d'un mémoire en réclamation tendant au versement d'une somme de 38 112 euros HT en réparation du préjudice subi en raison du retard pris par les travaux. Par un courrier du 2 février 2017, la commune de Ramonville-Saint-Agne a notifié à la société CGEMC le décompte général du marché, qui rejetait sa réclamation. Il est constant que la société CGEMC n'a pas adressé, dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la notification du décompte général, de mémoire de réclamation reprenant la réclamation formulée antérieurement à cette notification. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif a jugé que le décompte général était devenu définitif et que les conclusions dirigées contre la commune de Ramonville-Saint-Agne étaient irrecevables.

5. Toutefois, d'une part, l'irrecevabilité tirée de la méconnaissance des stipulations du cahier des clauses administratives générales ainsi opposée aux conclusions dirigées contre la commune ne pouvait être opposée aux conclusions dirigées contre la SNA Sud-Ouest, qui n'était pas liée par un contrat à la CGEM. D'autre part, la circonstance que la demande dont la CGEM a saisi les premiers juges tendait à la condamnation solidaire de la commune de Ramonville Saint-Agne et de la SNA Sud-Ouest n'avait pas pour effet de la rendre irrecevable en tant qu'elle était dirigée contre SNA Sud-Ouest. Par suite, en rejetant pour irrecevabilité les conclusions dirigées contre cette dernière, le tribunal administratif a entaché son jugement d'irrégularité. Il y a lieu d'annuler le jugement en tant qu'il n'a pas statué sur les conclusions dirigées contre la SNA Sud-Ouest.

6. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Toulouse pour qu'il statue à nouveau sur la demande de la CGEMC dirigée à l'encontre de la société SNA et de rejeter les conclusions de la requête tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1701313 du 13 novembre 2019 du tribunal administratif de Toulouse est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la CGEMC dirigées contre la société SNA.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Toulouse dans cette mesure.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Compagnie générale d'entreprise moderne construction, à la commune de Ramonville-Saint-Agne et à la société par actions simplifiée Société nouvelle d'asphaltes.

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme F..., présidente-assesseure,

M. Manuel Bourgeois, premier-conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2020.

Le président de chambre,

Éric Rey-Bèthbéder

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

3

N° 20BX00314


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 20BX00314
Date de la décision : 17/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : CABINET DEPUY

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-12-17;20bx00314 ?
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