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23/02/2021 | FRANCE | N°19BX02785

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 23 février 2021, 19BX02785


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... E... et M. C... E... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2017 par lequel le maire de Gradignan ne s'est pas opposé à la déclaration préalable présentée par la SARL Bistro Régent pour l'extension de la cheminée de hotte de l'immeuble implantée sur la parcelle cadastrée AT 92, située 82 cours du général de Gaulle.

Par un jugement n° 1800386 du 2 mai 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure de

vant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés le 1er juillet 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... E... et M. C... E... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2017 par lequel le maire de Gradignan ne s'est pas opposé à la déclaration préalable présentée par la SARL Bistro Régent pour l'extension de la cheminée de hotte de l'immeuble implantée sur la parcelle cadastrée AT 92, située 82 cours du général de Gaulle.

Par un jugement n° 1800386 du 2 mai 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés le 1er juillet 2019, le 9 décembre 2019 et le 9 janvier 2020, Mme E... et M. E..., représentés par Me G..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 2 mai 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2017 du maire de Gradignan ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Gradignan une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le tribunal a méconnu le principe du contradictoire dès lors que le mémoire de la commune de Gradignan enregistré le 2 avril 2019 ne leur a pas été transmis ;

- le jugement attaqué n'a pas cité le a) de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme, alors qu'aucun plan de travaux n'était fourni, ne permettant pas d'apprécier l'impact de ces travaux ;

- le projet en litige méconnaît l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme ;

- le cahier des charges du lotissement Laurenzane continue à s'appliquer dans les rapports entre colotis et l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme a été méconnu ;

- la commune aurait dû évaluer le projet en prenant en compte son insertion dans un lotissement pavillonnaire ;

- la commune a méconnu l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, dès lors que le projet porte atteinte à la salubrité publique ;

- le projet en litige se situe à l'intérieur de la marge de retrait et n'était donc pas autorisé en application de l'article 2.1.2.2 du règlement UM14 du plan local d'urbanisme ;

- le projet litigieux ne peut être regardé comme s'intégrant au bâti existant, en méconnaissance de l'article 2.4.1.3 du règlement UM14 du PLU.

Par des mémoires en défense enregistrés le 6 novembre 2019 et le 7 avril 2020, la commune de Gradignan, représentée par Me H..., conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge des consorts E... une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête des consorts E... est irrecevable dès lors qu'ils ne justifient pas d'un intérêt à agir ;

- les moyens des requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et notamment son article 5 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F... A...,

- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., représentant les consorts E..., et de Me H..., représentant la commune de Gradignan.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... E... et M. C... E... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2017 par lequel le maire de Gradignan ne s'est pas opposé à la déclaration préalable présentée par la SARL Bistro Régent pour l'extension de la cheminée de hotte de l'immeuble implanté sur la parcelle cadastrée AT 82 située 82 cours du général de Gaulle dans lequel est exploité un restaurant. Ils relèvent appel du jugement du 2 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. (...) / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ".

3. Si le mémoire enregistré le 2 avril 2019 au greffe du tribunal administratif de Bordeaux présenté pour la commune de Gradignan n'a pas été communiqué aux consorts E..., il ressort toutefois des pièces du dossier que ce mémoire ne comportait aucun élément nouveau. Par suite, en s'abstenant de leur communiquer ce mémoire, le tribunal, qui était tenu de le viser et de l'analyser, n'a pas méconnu les dispositions citées ci-dessus et n'a donc pas entaché son jugement d'irrégularité.

4. En second lieu, il ressort du point 6 du jugement du tribunal administratif de Bordeaux que les premiers juges ont bien examiné le moyen relatif au caractère complet du dossier de déclaration de travaux au regard de l'appréciation de l'insertion du projet dans son environnement par rapport aux constructions avoisinantes, alors même que le a) de l'article R. 431-6 du code de l'urbanisme n'est pas expressément cité. Par ailleurs, contrairement à ce que les consorts E... soutiennent, le jugement attaqué mentionne au point 7 l'article L. 442-9, et notamment son troisième alinéa. Par suite, il est suffisamment motivé sur ces points.

Sur le bien-fondé du jugement :

5. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-36 du code de l'urbanisme : " Le dossier joint à la déclaration (...) / est complété, s'il y a lieu, par les documents mentionnés aux a et b de l'article R. 431-10 (...) / Ces pièces sont fournies sous l'entière responsabilité des demandeurs. / Lorsque la déclaration porte sur un projet de création ou de modification d'une construction et que ce projet est visible depuis l'espace public (...) le dossier comprend également les documents mentionnés aux c et d de l'article R. 431-10. ". Aux termes de l'article R. 431-10 du même code : " Le projet architectural comprend également : a) Le plan des façades et des toitures ; lorsque le projet a pour effet de modifier les façades ou les toitures d'un bâtiment existant, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; (...) / c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; / d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse. ".

6. La circonstance que le dossier de déclaration de travaux ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité la décision de ne pas s'opposer à ces travaux que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

7. D'une part, il ressort des pièces du dossier qu'un plan sommaire de la façade et de la toiture du bâtiment concerné par le projet figurait dans le dossier de déclaration préalable, faisant apparaître la hotte de cheminée existante, ainsi qu'en pointillés, l'état futur de la façade et de la toiture. D'autre part, les éléments annexés au dossier, portant sur un projet d'extension de hotte de cheminée, permettaient de déterminer de manière suffisamment satisfaisante son insertion dans son environnement proche et lointain, et ce alors même que la hauteur et le diamètre précis de la sortie de toiture et du corps de cheminée n'étaient pas indiqués. Dans ces conditions, les insuffisances du dossier n'ont pas été de nature à fausser l'appréciation de l'autorité administrative. Ce moyen doit, par suite, être écarté.

8. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; (...) ".

9. Les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une déclaration, la validité de l'attestation établie par le demandeur. Toutefois, lorsque l'autorité saisie d'une telle déclaration vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, d'aucun droit à la déposer, il lui revient de s'opposer à la déclaration pour ce motif.

10. La seule circonstance que la SARL Bistro Régent ait coché la case " Je ne sais pas " en réponse à la question " Le terrain est-il situé dans un lotissement ' " de la déclaration préalable de travaux ne constituait pas une information faisant apparaître que ce pétitionnaire ne disposait pas de droit à déposer cette déclaration, ou qu'il aurait cherché à dissimuler le fait que l'immeuble visé par le projet faisait partie d'un lotissement. Par conséquent, aucun élément n'était de nature à établir le caractère frauduleux de cette déclaration, contrairement à ce que soutiennent les requérants. Le maire de Gradignan n'a ainsi pas méconnu les dispositions de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme en ne s'opposant pas à la déclaration en cause. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit par suite être écarté.

11. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 442-9 du code de l'urbanisme : " Les règles d'urbanisme contenues dans les documents du lotissement, notamment le règlement, le cahier des charges s'il a été approuvé ou les clauses de nature réglementaire du cahier des charges s'il n'a pas été approuvé, deviennent caduques au terme de dix années à compter de la délivrance de l'autorisation de lotir si, à cette date, le lotissement est couvert par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu. / De même, lorsqu'une majorité de colotis a demandé le maintien de ces règles, elles cessent de s'appliquer immédiatement si le lotissement est couvert par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu, dès l'entrée en vigueur de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové. / Les dispositions du présent article ne remettent pas en cause les droits et obligations régissant les rapports entre colotis définis dans le cahier des charges du lotissement, ni le mode de gestion des parties communes. (...) ".

12. Il est constant que le lotissement dans lequel est situé le projet de la SARL Bistro Régent était couvert par le plan local d'urbanisme de la communauté urbaine de Bordeaux lors de l'entrée en vigueur de la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové. Les clauses du cahier des charges de ce lotissement qui contenaient des règles d'urbanisme ont donc cessé de s'appliquer à compter de cette date. Si les rapports entre colotis sont toujours régis par le cahier des charges du lotissement, ses prescriptions ne concernent que les rapports entre personnes privées. Par suite, les consorts E... ne peuvent utilement se prévaloir de la méconnaissance des clauses du cahier des charges du lotissement, dont le maire de la commune de Gradignan n'avait pas à tenir compte lors de l'édiction de l'arrêté en litige.

13. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".

14. Le projet de la SARL Bistro Régent a pour objet l'extension de la hotte de cheminée existante d'un restaurant, afin que la souche de cette cheminée soit positionnée sur la toiture du bâtiment situé 82 cours Charles de Gaulle. Par ailleurs, le dossier de déclaration préalable indique que cette extension a pour but de diffuser les odeurs au-dessus des toitures et à 8 mètres des ouvertures, ce qui aura pour effet de réduire les nuisances olfactives émanant de ce restaurant. Dans ces conditions, et alors que la cheminée en cause existe déjà, le maire de Gradignan n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en considérant que le projet en litige ne portait pas atteinte à la salubrité publique. Par suite, ce moyen doit être écarté.

15. En cinquième lieu, si les consorts E... se prévalent des dispositions de l'article 2.1.2.2 du règlement du plan local d'urbanisme de Bordeaux métropole en vertu desquelles est interdit, sauf quelques exceptions, l'implantation d'éléments de constructions à l'intérieur des marges de retrait, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que le conduit de la cheminée de hotte en litige serait situé à l'intérieur d'une marge de retrait. Par suite, ce moyen doit être écarté.

16. Enfin, aux termes de l'article 2.4.1.3 de la zone UM14 du plan local d'urbanisme : " Les réhabilitations, surélévations ou extensions doivent être conçues de manière à s'intégrer harmonieusement au bâti en privilégiant les principes de construction des façades de la construction ainsi que le volume et le traitement de la toiture. (...) Pour les constructions comprises dans une séquence présentant une unité architecturale, les travaux de ravalement, de surélévation ou d'extension doivent notamment tenir compte des éléments de composition dominants, lignes de modénature, de la qualité des matériaux, traitement des toitures. (...) ".

17. Le projet de la SARL Bistro Régent consiste en l'extension d'une cheminée de hotte, dont le conduit, en acier galvanisé, se prolongera sur la façade latérale du bâtiment et traversera ensuite les combles sous la toiture. Il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu de la nature et de l'aspect des constructions avoisinantes, qui ne présentent aucun caractère particulier, que ce conduit serait, par son aspect, son diamètre et sa hauteur, de nature à rompre l'harmonie du site. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le projet en cause serait compris dans une séquence présentant une unité architecturale. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 2.4.1.3 du règlement de la zone UM14 du plan local d'urbanisme doit être écarté.

18. Il résulte de ce qui précède que les consorts E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Gradignan, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que les consorts E... demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants une somme 1 500 euros à verser à la commune de Gradignan, en application de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... et M. E... est rejetée.

Article 2 : Les consorts E... verseront à la commune de Gradignan une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... E..., M. C... E..., à la commune de Gradignan et à la SARL Bistro Régent.

Délibéré après l'audience du 21 janvier 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme F... A..., premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 février 2021.

Le président,

Marianne Hardy

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 19BX02785 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19BX02785
Date de la décision : 23/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Autorisations d`utilisation des sols diverses. Autorisation des installations et travaux divers.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Charlotte ISOARD
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : PUYBARAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 04/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-02-23;19bx02785 ?
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