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16/07/2021 | FRANCE | N°21BX01055

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 16 juillet 2021, 21BX01055


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 2 mars 2020 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français.

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Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 mars 2021, M. C..., représ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 2 mars 2020 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français.

Par une ordonnance n° 2005411 du 14 décembre 2020, le président de la 6ème chambre du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 mars 2021, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du 14 décembre 2020 du président de la 6ème chambre du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté de la préfète de la Gironde du 2 mars 2020 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer un certificat de résidence algérien dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens, ainsi qu'une somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement et la recevabilité de sa demande :

- le jugement est irrégulier dès lors qu'en méconnaissance de l'article L. 5 du code de justice administrative et de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, le président de la 6 ème chambre du tribunal s'est fondé sur des pièces non communiquées pour retenir la date du 4 mars 2020 comme date de notification de l'arrêté préfectoral du 2 mars 2020 et en tirer un motif de tardiveté de la demande ; il appartenait à ce juge dès lors que c'est au visa des pièces communiquées par la préfecture dans le cadre de l'instruction du dossier qu'il envisageait d'opposer une irrecevabilité, de lui communiquer ces pièces afin qu'il puisse exprimer contradictoirement ses observations ;

- sa demande contentieuse devant le tribunal est recevable dès lors que l'arrêté attaqué ne lui a pas été régulièrement notifié le 4 mars 2020 à son ancienne adresse sise 19 rue Saumenude puisqu'il avait déménagé à cette date au 4 rue Claude Bonnier à Bordeaux ; son courrier était réexpédié par la Poste à sa nouvelle adresse, changement d'adresse dont il avait d'ailleurs informé la préfecture ; c'est ainsi en réponse à son courrier du mois d'août 2020, que la préfecture lui a, pour la première fois en date du 16 septembre 2020, communiqué l'arrêté du 2 mars 2020 l'informant que cet arrêté lui aurait été adressé par lettre recommandé avec accusé de réception et retourné à la préfecture par les services postaux le 29 juillet 2020 avec la mention " Pli avisé et non réclamé " ; ce courrier n'ayant été retourné à la préfecture qu'en date du 29 juillet 2020, il est impossible que sa notification par lettre recommandée soit intervenue depuis le 4 mars 2020 puisque le délai postal de retour du courrier recommandé non réclamé est de 15 jours ; en tout état de cause, il appartient à la préfecture de produire le pli non réclamé retourné le 29 juillet par les services postaux ; par ailleurs, les perturbations dans la distribution du courrier postal, causées par la crise sanitaire liée au COVID 19 à compter du début du mois de mars 2020 ne permettent pas de retenir qu'il a pu prendre connaissance de l'arrêté attaqué avant la notification qui lui en a été faite par le courrier de la préfecture daté du 16 septembre 2020 ; dans la mesure où il a déposé une demande d'aide juridictionnelle en date du 13 octobre 2020, le délai de recours a été interrompu jusqu' au 2 novembre 2020, puisque la décision du 28 octobre 2020 lui accordant l'aide juridictionnelle, ne lui a été notifiée par le bureau d'aide juridictionnelle que le 2 novembre et qu'ainsi il pouvait encore jusqu'au 2 décembre 2020 exercer légalement son recours ;

En ce qui concerne la décision de refus de délivrance d'un certificat de résidence :

- elle est entachée d'une erreur de droit en ce que la préfète de la Gironde s'est estimée liée par l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

- elle méconnaît les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié et est à ce titre, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle méconnaît les dispositions de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

- cette décision est entachée d'une erreur d'appréciation.

Me A..., a présenté ès qualité, un mémoire en observations, qui a été enregistré le 18 mai 2021.

Il soutient que :

- c'est bien en date du 14 décembre 2020 que la préfète a communiqué un mémoire et des pièces qui n'ont pas fait l'objet d'un débat contradictoire ;

- il résulte de la pièce n° 4 également produite par la préfète le 14 décembre 2020 et sur laquelle le président de chambre du tribunal s'est fondé pour rendre son ordonnance d'irrecevabilité, que la notification faite par la préfecture en date du 3 mars 2020 est irrégulière car il apparaît sur l'enveloppe de notification produite par la préfecture des adresses différentes de Monsieur C..., d'une part : " Chez Madame F... 19 rue Saumenude 33 800 Bordeaux ", d'autre part " rue Malbec 33800 BORDEAUX " de sorte qu'il est impossible à la seule lecture de cette enveloppe de savoir, à quelle adresse la notification a été effectuée ;

- dans tous les cas, s'il fallait considérer que la notification a été faite au 19 rue Saumenude, il est alors impossible que le courrier soit retourné à la préfecture le 29 juillet 2020 avec la mention " Pli avisé et non réclamé ", puisqu'à cette adresse le courrier aurait dû être réexpédié au 4 rue Claude Bonnier 33000 Bordeaux, conformément au contrat de réexpédition de courrier dont M. C... justifie.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 juin 2021, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par ordonnance du 5 mai 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 23 juin 2021 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. D... E..., a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., de nationalité algérienne, est entré en France le 17 mai 2016 sous couvert d'un visa de court séjour délivré par les autorités espagnoles, a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français le 20 février 2017 dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Bordeaux le 29 juin 2017 et un arrêt de la cour de céans le 26 janvier 2018. Le 13 juin 2018, il a de nouveau sollicité son admission au séjour en qualité d'étranger malade. Par un arrêté du 2 mars 2020, la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français. M. C... relève appel de l'ordonnance du 14 décembre 2020 par laquelle le président de la 6ème chambre du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée:

2. Le président de la 6ème chambre du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté comme irrecevable la demande de M. C..., sur le fondement de l'article R. 222-1 4° du code de justice administrative, de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article R. 421-5 du code de justice administrative, des dispositions de l'article 15 de l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, des articles 1er et 2 de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 et de l'article 1er de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions. Il a jugé qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 2 mars 2020, qui comporte la mention des voies et délais de recours, a été notifié à l'intéressé le 4 mars 2020, qu'en application des ordonnances précitées, le point de départ du délai de recours a été reporté au 11 juillet 2020 et qu'alors que le délai imparti à M. C... pour saisir le tribunal d'une demande d'annulation de l'arrêté litigieux expirait le 11 août 2020 et que la demande d'aide juridictionnelle présentée le 30 octobre 2020, après l'expiration des délais de recours contentieux, n'a pas eu pour effet de suspendre ou de proroger le délai de recours, sa requête, enregistrée le 26 novembre 2020 était tardive.

3. Aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire [...] ". Le caractère contradictoire de l'instruction fait obligation de communiquer à toutes les parties l'ensemble des mémoires et pièces soumis au débat contradictoire. Ne sont toutefois pas soumis à une telle exigence les répliques et autres mémoires, observations ou pièces par lesquels les parties se bornent à réitérer des éléments de fait ou de droit qu'elles ont antérieurement fait valoir au cours de la procédure. Il en va de même dans le cas où il ressort des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce, cette méconnaissance n'a pu préjudicier aux droits des parties.

4. Pour juger que le point de départ du délai de recours contre l'arrêté attaqué est la date du 4 mars 2020 et en tirer la conséquence que la demande contentieuse de M. C... est tardive, le président de la 6 ème chambre du tribunal administratif de Bordeaux s'est appuyé sur des pièces communiquées par la préfète de la Gironde à la demande du tribunal, respectivement le 27 novembre 2020 et le 8 décembre 2020, à savoir, d'une part, l'avis de non réception par M. C... du pli que lui a adressé la préfète de la Gironde comportant notamment un tampon daté du 3 mars 2020 et une croix cochée dans la case " Pli avisé et non réclamé " et d'autre part, une enveloppe retournée à la préfète au-dessus de laquelle est collée l'avis de " réception " de la lettre recommandée indiquant la date du 4 mars 2020 comme étant celle de la présentation du pli. Ces documents dont l'examen a conduit à juger irrecevable la demande de M. C..., n'ont, ainsi qu'il ressort de l'application télérecours, pas été communiqués à ce dernier alors, au surplus, que l'intéressé qui avait déménagé et conclu un contrat de réexpédition de son courrier avec les services de la Poste était en mesure d'apporter des éléments sérieux de nature à démontrer que sa demande contentieuse est bien recevable. Le président de la 6 ème chambre du tribunal administratif de Bordeaux a donc méconnu le principe du contradictoire protégé par les dispositions précitées de l'article L. 5 du code de justice administrative ainsi que les stipulations précitées de l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales. Par suite, M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que par l'ordonnance attaquée, le président de la 6ème chambre du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande comme manifestement irrecevable. L'ordonnance attaquée qui est irrégulière doit donc être annulée.

5. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de statuer immédiatement par la voie de l'évocation sur la demande de M. C... tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 mars 2020.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision de refus de délivrance d'un certificat de résidence :

6. Aux termes des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit " au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ".

7. D'une part, selon l'avis rendu, le 2 avril 2019, par le collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) l'état de santé de M. C... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et il peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine eu égard aux caractéristiques du système de santé. Il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté attaqué, ni d'aucune autre pièce du dossier que la préfète de la Gironde, pour refuser au requérant la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade, se serait crue à tort liée par l'avis de ce collège médical. Dès lors, le moyen tiré de ce que la préfète de la Gironde aurait méconnu l'étendue de sa compétence doit être écarté.

8. D'autre part, la partie qui justifie d'un avis, même ancien, du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

9. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser de délivrer à l'intéressé le certificat de résidence sollicité en raison de son état de santé, la préfète de la Gironde s'est notamment fondée sur l'avis précité qu'elle s'est appropriée.

10. Pour contester l'avis le concernant, M. C..., qui lève le secret médical, produit des certificats médicaux qui attestent qu'il présente un état dépressif avec signes d'angoisse corrélés à une colopathie fonctionnelle. Si M. C... soutient qu'il ne bénéficiera pas, en Algérie, d'un accès effectif aux soins qui lui sont nécessaires, notamment dans la région de Béchar, aux portes du Sahara, dont il est originaire, il ne l'établit pas en se bornant à produire une attestation d'un psychanalyste en ce sens, alors d'ailleurs que rien ne fait obstacle à ce qu'il se déplace en Algérie pour accéder aux structures médicales disposant de la capacité à le soigner. La circonstance qu'il entretienne un lien thérapeutique avec des médecins établis en France ne fait pas davantage obstacle à la poursuite des soins en Algérie. Par suite, la préfète de la Gironde n'a pas méconnu les stipulations précitées du 7° de l'article 5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, ni entaché sa décision d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, en lui refusant le certificat de résidence qu'il sollicitait sur ce fondement.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

11. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 10 du présent arrêt, le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

12. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 10 du présent arrêt, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination méconnaitrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au regard de l'état de santé de M. C..., doit être écarté.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

13. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

14. Il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. Les circonstances que la présence de l'étranger sur le territoire français ne représente pas une menace pour l'ordre public ou qu'il n'aurait fait l'objet d'aucune mesure d'éloignement antérieure ne sont pas de nature à faire obstacle, à elles seules, au prononcé d'une interdiction de retour si la situation de l'intéressé, au regard notamment des autres critères, justifie légalement, dans son principe et sa durée, la décision d'interdiction de retour.

15. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifient sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

16. Il ressort des pièces du dossier que M. C..., célibataire, sans enfant, vit en France depuis seulement quatre ans à la date de la décision en litige, n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Algérie où il a vécu jusqu'à l'âge de 24 ans et où résident ses parents et sa fratrie, s'est maintenu illégalement sur le territoire français et n'a pas exécuté l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français pris à son encontre le 20 février 2017. Il ne démontre pas davantage d'une insertion privée ou professionnelle particulière en France. Dans ces conditions, en prononçant à l'encontre de M. C... une interdiction de retour en France d'une durée de deux ans, la préfète de la Gironde n'a pas commis d'erreur d'appréciation au regard des dispositions précitées du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

17. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la demande, que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 2 mars 2020 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français. Par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction et celles tendant à ce que l'Etat soit condamné aux entiers dépens et à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 2005411 du président de la 6ème chambre du tribunal administratif de Bordeaux est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Bordeaux et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 6 juillet 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

M. D... E..., premier conseiller,

M. Stéphane Gueguein, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juillet 2021.

Le rapporteur,

Nicolas E... La présidente,

Evelyne Balzamo La greffière,

Sylvie Hayet La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX01055


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01055
Date de la décision : 16/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Nicolas NORMAND
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : LOPY

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-07-16;21bx01055 ?
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