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28/09/2021 | FRANCE | N°21BX00912

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 28 septembre 2021, 21BX00912


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 30 juin 2020 par lequel la préfète des Landes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2001425 du 3 février 2021, tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 mars 2021 et un mémoire enregistré le 19 ao

ût 2021, M. A..., représenté par Me Bordes, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribuna...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 30 juin 2020 par lequel la préfète des Landes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2001425 du 3 février 2021, tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 mars 2021 et un mémoire enregistré le 19 août 2021, M. A..., représenté par Me Bordes, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 3 février 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 juin 2020 de la préfète des Landes ;

3°) d'enjoindre à la préfète des Landes de réexaminer sa situation dans le délai de 15 jours à compter de la notification de la décision à intervenir et dans cette attente de lui délivrer une autorisation au séjour au titre de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- le mémoire du 14 janvier 2021 et les pièces 22 à 31 n'ont pas été communiqués au préfet ;

- le tribunal a fait abstraction de la jurisprudence sur l'authenticité de l'acte et la preuve de la minorité ; il ne pouvait limiter son analyse essentiellement en fonction du jugement supplétif ;

- le tribunal a omis de se prononcer sur le moyen tiré de la méconnaissance par la préfète de l'article 47 du code civil en l'absence de saisine des autorités maliennes ;

- le tribunal n'a pas répondu à la circonstance que l'identité de Mamadou Silah correspondant à ses empreintes, né en Gambie et âgé de 36 ans est inconnue en Gambie ;

- c'est à tort que le tribunal a écarté le moyen selon lequel l'arrêté ne pouvait intervenir avant la mainlevée de la tutelle.

En ce qui concerne les moyens communs aux décisions attaquées :

- la compétence du signataire de l'acte n'est pas établie ;

- la date de l'arrêté est erronée ;

- l'arrêté contesté a été pris en méconnaissance du principe du contradictoire dès lors que convoqué par les services de la préfecture pour l'examen de sa situation administrative, il s'est vu notifier une obligation de quitter le territoire français l'empêchant de présenter l'attestation d'authenticité de sa carte d'identité consulaire et de son passeport.

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

- elle est entachée d'erreur de fait sur son âge réel dès lors qu'il n'est pas établi par la préfète que la carte d'identité consulaire et le passeport biométrique délivrés par le consulat du Mali seraient falsifiés ; le relevé d'empreintes établissant qu'il avait été signalé en Espagne sous l'identité de Mamadou A..., né en janvier 1984, ne figure pas au dossier et ne le concerne aucunement ; son consentement n'ayant pas été recueilli préalablement à la réalisation des examens osseux et aucun procès-verbal de police ne faisant état de cet accord, les tests osseux devront être écartés des débats ; en tout état de cause, les tests osseux qui ne présentent pas d'élément suffisant de certitude, ne peuvent à eux seuls permettre de déterminer la minorité et contredire les données contenues dans un acte d'état-civil ; le rapport d'expertise qui établit son âge entre 29 et 31 ans ne correspond ni à l'âge de M. C..., qui serait âgé de 36 ans, ni à ce qui a été mentionné au rapport primo arrivant, faisant état d'un adolescent âgé entre 16 et 18 ans ; le juge pour enfants a reconnu sa minorité ;

- il appartient à la cour d'écarter les procès-verbaux d'audition et l'expertise osseuse dès lors qu'ils sont illégaux par voie de conséquence de la nullité de la procédure de garde à vue intervenue sans information préalable du juge judiciaire ;

- à la date de l'arrêté, les infractions pénales qui lui sont reprochées n'étant pas établies, il doit bénéficier de la présomption d'innocence ; le passeport a été délivré sur la base de la fiche d'identification MNA comprenant un numéro permettant d'identifier chaque personne physique avec prise d'empreintes ; en remettant le passeport, les autorités maliennes ont nécessairement validé son état-civil ; la police aux frontières ne s'est pas prononcée sur l'authenticité de son passeport ;

- en s'abstenant de saisir les autorités maliennes en vue de la vérification des documents produits alors qu'ils ne pouvaient être regardés comme manifestement frauduleux, la préfète a méconnu l'article 47 du code civil ; le consul général de la République du Mali à Paris a confirmé l'authenticité de la carte d'indenté consulaire établie le 30 décembre 2017 et du passeport qui lui a été délivré le 17 juillet 2019 ;

- cette décision est entachée d'erreur de droit dès lors qu'il remplit les conditions pour obtenir un titre de séjour ;

- elle porte atteinte à sa vie privée et familiale en faisant notamment obstacle à la poursuite de ses études en Bac Pro plâtre alors qu'il justifie du sérieux de ses études ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est dépourvue de base en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'erreur de fait sur son âge réel ;

- elle porte une atteinte disproportionnée à sa vie personnelle et familiale et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle est dépourvue de base légale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 juin 2021 la préfète des Landes conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 avril 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Birsen Sarac-Deleigne ;

- et les observations de Me Bordes, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant malien, qui déclare être né le 29 mai 2001, a fait l'objet d'un placement auprès des services de l'aide sociale à l'enfance en qualité de mineur isolé à compter du 1er juin 2017. Il a sollicité, le 29 mai 2019, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 30 juin 2020, la préfète des Landes a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 3 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Une partie ne peut nullement se prévaloir de la méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure vis-à-vis de la partie adverse. Par suite, la circonstance que le tribunal n'a pas communiqué à la partie défenderesse les pièces et le mémoire du demandeur enregistrés le 14 janvier 2021, lequel au demeurant ne comportait aucun moyen nouveau ou conclusions nouvelles, n'entache pas d'irrégularité le jugement attaqué.

3. La critique du jugement en ce que le tribunal, d'une part, n'a pas tenu compte de la jurisprudence sur l'authenticité des actes et la preuve de la minorité en limitant son analyse au jugement supplétif et en ne répondant pas à la circonstance que l'identité de la personne correspondant à ses empreintes était inconnue en Gambie et, d'autre part, a écarté à tort le moyen tiré de ce que l'arrêté ne pouvait intervenir avant la mainlevée de la tutelle, relève du fond et non la régularité du jugement. Ce moyen doit dès lors être écarté.

4. Enfin, M. A... soutient que le tribunal n'a pas examiné le moyen tiré l'absence de saisine par la préfète des autorités maliennes en vue de la vérification de son identité en méconnaissance de l'article 47 du code civil. Toutefois, le tribunal qui n'avait pas à répondre à tous les arguments invoqués par le requérant, a implicitement mais nécessairement considéré que la consultation des autorités maliennes n'était pas requise, dès lors qu'il avait estimé que la falsification des documents d'identité ressortait des pièces du dossier. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité.

Sur la légalité de l'arrêté du 30 juin 2020 :

En ce qui concerne les moyens communs aux décisions attaquées :

5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 25 février 2020, publié le même jour au recueil spécial des actes administratifs de la préfecture des Landes, la préfète de ce département a donné délégation à M. Loïc Grosse, secrétaire général de la préfecture des Landes et signataire de l'arrêté attaqué, à l'effet de signer tous arrêtés et décisions relevant des attributions de l'État dans le département à l'exception de certaines décisions au nombre desquelles ne figurent pas les décisions attaquées. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux a été signé par une autorité incompétente manque en fait et doit être écarté.

6. En deuxième lieu, M. A... relève que l'arrêté attaqué porte la date du 30 juin 2019 au lieu de celle du 30 juin 2020. S'il est vrai que cette mention manuscrite de la date est erronée, une telle erreur, pour regrettable qu'elle soit, est sans incidence sur la légalité de l'arrêté dès lors que, au vu des autres pièces du dossier et des mentions même de l'arrêté, il ne fait pas de doute qu'il a été signé, non pas en 2019 mais en 2020. Le moyen tiré du vice de forme doit, par suite, être écarté.

7. En troisième lieu, le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause.

8. Lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement. À l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de le mettre à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour.

9. Il appartenait à M. A... au cours de l'instruction de sa demande de titre de séjour déposée le 29 mai 2019, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... aurait sollicité en vain un entretien avec les services de la préfecture des Landes au cours de l'instruction de sa demande, ni qu'il aurait été empêché de porter spontanément à la connaissance du préfet des éléments de nature à permettre à l'administration d'apprécier son droit au séjour et sa situation. Au demeurant, il ressort des pièces du dossier qu'il a été auditionné à deux reprises sur sa situation administrative, le 11 avril 2019 et le 10 février 2020 notamment sur l'authenticité des documents dont il se prévalait pour établir sa minorité. Il ne saurait par suite utilement soutenir qu'il a été empêché de produire l'attestation d'authenticité délivrée le 17 février 2020 par le consulat du Mali alors qu'il a disposé pour ce faire de plusieurs mois entre la date d'établissement de l'attestation et le rejet de sa demande intervenue le 30 juin 2020. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que son droit d'être entendu aurait été méconnu doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité du refus de titre de séjour :

10. D'une part, aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigé. " Aux termes de l'article R. 311-2-2 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " L'étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour présente les documents justifiant de son état civil et de sa nationalité et, le cas échéant, de ceux de son conjoint, de ses enfants et de ses ascendants. ". Lorsqu'il examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de " salarié " ou " travailleur temporaire ", présentée sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans, qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle et que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Il lui revient ensuite, dans le cadre du large pouvoir dont il dispose, de porter une appréciation globale sur la situation de l'intéressé, au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Il appartient au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation ainsi portée.

11. D'autre part, aux termes de l'article L. 111-6 dudit code, dans sa rédaction alors en vigueur : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil (...) des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ".

12. Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.

13. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.

14. Il ressort des pièces du dossier que pour établir sa naissance au 29 mai 2001 et, partant, son état de minorité lors de sa prise en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance, M. A... a produit un acte de naissance et sa copie certifiée conforme par un tampon du consulat général du Mali, un extrait de jugement supplétif, une carte d'identité consulaire valable du 30 décembre 2017 au 29 décembre 2020 et un passeport biométrique valable du 17 juillet 2019 au 16 juillet 2024. Il se prévaut également d'un certificat d'authenticité signé par le conseiller consulaire du consulat général du Mali à Paris en date du 17 février 2020.

15. Pour contester l'authenticité de ces différents documents, la préfète des Landes s'est fondée sur le rapport du service de la fraude documentaire de la police de l'air et des frontières des Pyrénées-Atlantiques (PAF) établi le 24 juillet 2018 concluant au caractère contrefait de l'acte de naissance et du jugement supplétif et par suite à l'obtention frauduleuse de la certification de la copie de l'acte de naissance et de la carte d'identité consulaire. S'agissant du jugement supplétif, il est indiqué notamment qu'il comporte une faute d'orthographe sur le tampon du greffier lequel comporte la mention " greffer " au lieu de " greffier " , que l'intitulé de l'acte est erroné dès lors qu'il mentionne " extrait de naissance " au lieu de " jugement supplétif " et que l'analyse des caractéristiques graphiques des mentions manuscrites figurant sur le jugement supplétif et l'acte de naissance permet d'établir que les deux actes ont été rédigés par la même main alors qu'ils sont présentés comme établis par deux personnes différentes, greffier et maire, exerçant dans des administrations différentes. En ce qui concerne l'acte de naissance, il est indiqué également qu'il a été établi sur un document non sécurisé, que le nom de l'imprimerie habituellement retrouvé en bas à gauche n'est pas mentionné et que la rubrique 24 correspondant à la date de l'acte n'est pas renseigné. Si le requérant se prévaut de la carte consulaire en date du 30 décembre 2017, assortie de son attestation d'authenticité ainsi que d'un passeport délivré le 17 juillet 2019 dont l'authenticité n'a pas été examinée par la PAF, il ressort du procès-verbal d'audition du 11 avril 2019 que M. A... a déclaré avoir obtenu la carte d'identité consulaire sur la base de l'extrait d'acte de naissance et du jugement supplétif qui ne sont pas authentiques, ce qui remet en cause la valeur probante de la carte consulaire, tout comme celle du passeport qui s'il constitue une pièce d'identité, ne saurait revêtir le caractère d'acte d'état civil, comme le sont l'extrait d'acte de naissance ou le jugement supplétif. La matérialité de ces irrégularités n'est pas sérieusement contestée par M. A.... Leur constatation suffisait à permettre à la préfète des Landes de renverser la présomption de validité des actes d'état civil instituée par l'article 47 du code civil et à justifier le refus de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-15 précité, sans que l'administration ait été tenue de vérifier si les autres conditions prévues par ces dispositions étaient satisfaites et sans qu'il soit besoin d'examiner le motif superfétatoire tiré de ce que l'intéressé a été contrôlé en Espagne sous l'identité d'une personne se disant né le 1er janvier 1984, ou les conditions du test osseux concluant à un âge probable de 31,77 ans. Contrairement à ce que soutient M. A..., les dispositions précitées de l'article 47 n'impliquent pas nécessairement que la préfète saisisse les autorités maliennes afin d'établir l'authenticité des actes produits alors que les éléments en sa possession permettaient de douter sérieusement du caractère probant du jugement supplétif et de sa retranscription à l'état civil alors au demeurant que ces éléments n'ont pas été démentis par les autorités maliennes, interrogés par la préfète. Par suite, les moyens tirés de l'erreur de fait et de ce que le refus de titre de séjour méconnaîtrait les dispositions précitées de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 47 du code civil doivent être écartés. Par ailleurs, les conditions de la garde à vue de M. A... sont sans incidence sur la légalité de la décision attaquée. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'irrégularité de la garde à vue de l'intéressé doit être écarté.

16. En se prévalant de l'atteinte à sa vie privée et familiale, le requérant doit être regardé comme ayant entendu se prévaloir des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales aux termes desquelles : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

17. Il ressort des pièces du dossier que M. A... n'est présent sur le territoire français que depuis mai 2017 et qu'il a bénéficié d'une prise en charge en qualité de mineur étranger isolé sur la base d'actes d'état civil dont l'authenticité a été remise en cause. Célibataire et sans enfant à charge, il ne justifie pas d'attaches familiales ou personnelles sur le territoire français. Il n'est pas isolé, en revanche, dans son pays d'origine, où vit notamment sa mère. Dans ces conditions et alors même que le requérant a obtenu un CAP de carrelage en 2019 ainsi qu'un diplôme d'étude en langue française en juillet 2019, qu'il a bénéficié d'un contrat jeune majeur, que ses éducateurs et enseignants attestent de sa bonne intégration et du sérieux de ses études, la préfète des Landes, en prenant la décision en litige, n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de l'intéressé ni porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au sens des stipulations précitées.

En ce qui concerne la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

18. Il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour.

19. Les moyens tirés de l'erreur de fait, de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 15, 16 et 17.

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :

20. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination est privée de base légale en raison des illégalités entachant la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

21. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée à la préfète des Landes.

Délibéré après l'audience du 31 août 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

M. Frédéric Faïck, président assesseur,

Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2021.

La rapporteure,

Birsen Sarac-DeleigneLa présidente,

Elisabeth JayatLa greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

7

N° 21BX00912


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX00912
Date de la décision : 28/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Birsen SARAC-DELEIGNE
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : BORDES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-09-28;21bx00912 ?
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