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02/11/2021 | FRANCE | N°19BX03590

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 02 novembre 2021, 19BX03590


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par trois requêtes distinctes, Mme C... A... et M. B... D... ont demandé au tribunal administratif de Pau, d'une part, de résilier ou d'annuler le contrat de bail emphytéotique portant sur les murs et dépendances de l'hôtel du Palais signé entre la commune de Biarritz et la société Socomix, d'autre part, d'annuler les délibérations des 30 juillet et 15 octobre 2018 par lesquelles le conseil municipal a, respectivement, approuvé la signature de ce contrat de bail emphytéotique, approuvé le traité d'ap

port du fonds de commerce de l'hôtel du Palais à la société Socomix, approuvé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par trois requêtes distinctes, Mme C... A... et M. B... D... ont demandé au tribunal administratif de Pau, d'une part, de résilier ou d'annuler le contrat de bail emphytéotique portant sur les murs et dépendances de l'hôtel du Palais signé entre la commune de Biarritz et la société Socomix, d'autre part, d'annuler les délibérations des 30 juillet et 15 octobre 2018 par lesquelles le conseil municipal a, respectivement, approuvé la signature de ce contrat de bail emphytéotique, approuvé le traité d'apport du fonds de commerce de l'hôtel du Palais à la société Socomix, approuvé l'entrée au capital de cette société de la société DF collection, approuvé le pacte d'actionnaires devant être conclu entre la société Socomix, la société DF collection et sa société mère la société JC Decaux, approuvé la modification des statuts de la société Socomix, approuvé la convention de louage de biens meubles corporels avec la société Socomix et le projet de convention de subordination prévu avec les banques qui sont créanciers privilégiés.

Par un jugement n° 1802286,1802295,1802785 du 5 juillet 2019, le tribunal administratif de Pau a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une première requête enregistrée le 3 septembre 2019 sous le n°19BX03590 et un mémoire enregistré le 27 juillet 2020, Mme A..., représentée par Me Vignot, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 5 juillet 2019 en tant qu'il rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 15 octobre 2018 ;

2°) d'annuler la délibération du conseil municipal de Biarritz du 15 octobre 2018 ;

3°) d'enjoindre au maire de la commune de Biarritz, d'une part, d'inscrire la question de l'abrogation de la délibération du 30 juillet 2018 à l'ordre du jour de la première séance du conseil municipal convoqué pour délibérer des affaires de la commune, d'autre part, de prononcer avec la société Socomix la résolution amiable du bail emphytéotique signé ou, à défaut d'entente sur cette résolution, de saisir le juge du contrat afin qu'il en règle les modalités ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Biarritz la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés pour l'instance.

Elle soutient que :

- la délibération du 15 octobre 2018 est intervenue en méconnaissance des dispositions de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales relatives à l'information des conseillers municipaux ;

- l'hôtel concerné fait partie du domaine public communal de sorte que le montage financier proposé est incompatible avec les dispositions de 1'article L. 1311-1 du code général des collectivités territoriales relatives au caractère inaliénable des biens appartenant au domaine public et que la signature du bail emphytéotique portant sur les dépendances de l'hôtel du Palais aurait dû être précédée d'une procédure de mise en concurrence en application notamment des dispositions des articles L. 1311-2 et R. 1311-2 du code général des collectivités territoriales ;

- à supposer que cet hôtel doive être regardé comme faisant partie du domaine privé de la commune, la signature de ce bail aurait également dû être précédée d'une procédure de mise en concurrence en application des garanties d'impartialité, d'égalité de traitement et de transparence rappelées par le juge communautaire ;

- la délibération relative au pacte d'actionnaires méconnait les dispositions du 2° de l'article L. 1522-1 du code général des collectivités territoriales ;

- les délibérations relatives à la cession du fonds de commerce et à la valorisation des actions de la société Socomix retiennent des valorisations anormalement basses de leur valeur de l'hôtel du Palais.

Par un mémoire enregistré le 11 juin 2020, la commune de Biarritz, représentée par Me Cambot, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme A... au titre des frais exposés pour l'instance.

Elle soutient que la requête est irrecevable faute pour Mme A... de préciser quelles délibérations elle entend attaquer et que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 29 juin 2020, la société anonyme Socomix, représentée par Me Laloum, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de Mme A... au titre des frais exposés pour l'instance.

Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 27 août 2020, les sociétés par actions simplifiées JC Decaux et DF Collection, représentées par Me Cazin, concluent à l'irrecevabilité des conclusions présentées à son encontre et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de Mme A... au titre des frais exposés pour l'instance.

Elles soutiennent que Mme A... n'a formulé aucune conclusion à leur encontre.

II. Par une seconde requête enregistrée le 5 septembre 2019 sous le n°19BX03620, M. D..., représenté par Me Bonneau, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 5 juillet 2019 en tant qu'il rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 30 juillet 2018 ;

2°) d'annuler la délibération du conseil municipal de Biarritz du 30 juillet 2018 ;

3°) d'enjoindre au maire de la commune de Biarritz, de saisir le juge judiciaire afin qu'il constate la nullité du bail emphytéotique ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Biarritz la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés pour l'instance.

Il soutient que :

- la délibération du 30 juillet 2018 est intervenue en méconnaissance des dispositions de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales relatives à l'information des conseillers municipaux ;

- la procédure de passation du bail emphytéotique aurait dû faire l'objet d'une procédure de publicité et de sélection entre les candidats potentiels conformément, d'une part, aux dispositions de la directive n° 2006/123/CE dès lors qu'il constitue une autorisation accordant l'accès à une activité de service au sens de cette directive et, d'autre part, aux règles fondamentales du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et, en particulier à son article 49 interdisant toute discrimination dans l'attribution des titres d'occupation domaniaux.

Par un mémoire enregistré le 11 juin 2020, la commune de Biarritz, représentée par Me Cambot, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. D... au titre des frais exposés pour l'instance.

Elle soutient que les conclusions dirigées contre la délibération du 18 octobre 2018 sont irrecevables faute de préciser de quelle délibération il s'agit et que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 29 juin 2020, la société anonyme Socomix, représentée par Me Laloum, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de M. D... au titre des frais exposés pour l'instance.

Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 27 août 2020, les sociétés par actions simplifiées JC Decaux et DF Collection, représentées par Me Cazin, concluent à l'irrecevabilité des conclusions présentées à son encontre et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. D... au titre des frais exposés pour l'instance.

Elles soutiennent que M. D... n'a formulé aucune conclusion à leur encontre.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la directive n° 2006/123 du Parlement et du Conseil du 12 décembre 2006, relative aux services dans le marché intérieur ;

- le code du tourisme ;

- le code de commerce ;

- le code des marchés publics ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- l'ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016, relative aux marchés de concession ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E...,

- les conclusions de Mme Le Bris, rapporteure publique,

- et les observations de Me Bonneau représentant M. D..., Me Cambot représentant la commune de Biarritz, et de Me Chanel représentant le Société d'économie mixte Socomix.

Une note en délibéré présentée par Me Bonneau représentant M. D... a été enregistrée le 1er octobre 2021.

Considérant ce qui suit :

1. L'hôtel du Palais, situé à Biarritz, a été acquis par cette commune en 1956. Aux termes de deux baux commerciaux portant respectivement sur les murs et sur le fonds de commerce, elle en a confié l'exploitation d'abord à la société Sobadex puis, à compter de l'année 1961, à la société d'économie mixte Socomix, dont elle possédait, jusqu'au 15 octobre 2018, 68 % des actions. Par une délibération du 30 juillet 2018, le conseil municipal de Biarritz a autorisé le maire de la commune à signer avec la société Socomix un bail emphytéotique d'une durée de soixante-quinze ans portant sur les murs et dépendances de l'hôtel du Palais. Par quatre délibérations du 15 octobre 2018, le conseil municipal a également approuvé le traité d'apport du fonds de commerce de l'hôtel du Palais à la société Socomix, approuvé l'entrée au capital de cette société de la société DF collection, approuvé le pacte d'actionnaires devant être conclu entre la société Socomix, la société DF collection et sa société mère la société JC Decaux et approuvé la modification des statuts de la société Socomix. Mme A... et M. D... doivent être regardés comme relevant appel du jugement du 5 juillet 2019 en tant qu'il a rejeté leurs demandes dirigées respectivement, contre ces délibérations du 15 octobre 2018 et contre cette délibération du 30 juillet de la même année.

2. Les requêtes n°19BX03590 et 19BX03620 sont dirigées contre un même jugement, et présentent à juger de questions communes ou complémentaires. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.

Sur la légalité de la délibération du 30 juillet 2018 :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal ". L'article L. 2121-13 du même code précise que : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération. " Cette obligation, qui doit être adaptée à la nature et à l'importance des affaires, doit permettre aux intéressés d'appréhender le contexte ainsi que de comprendre les motifs de fait et de droit des mesures envisagées et de mesurer les implications de leurs décisions. Elle n'impose pas de joindre à la convocation adressée aux intéressés une justification détaillée du bien-fondé des propositions qui leur sont soumises.

4. M. D... et Mme A... soutiennent que le projet de bail emphytéotique soumis à l'approbation du conseil municipal s'inscrivait dans le cadre d'un projet plus large et que " les informations concrètes sur les autres éléments de l'opération n'ont été mentionnées que très sommairement lors du conseil municipal du 30 juillet 2018 ", que les informations nécessaires pour leur permettre de mesurer les implications de leur décision ne leur ont été fournies que lors de la réunion du 3 octobre suivant puis lors de la note explicative accompagnant leur convocation à la séance du conseil municipal du 15 octobre 2018 et que la signature du bail emphytéotique était indissociable, en particulier, de l'apport du fonds de commerce à la société Socomix. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'ensemble des membres du conseil municipal a été invité à participer à une réunion d'information qui s'est tenue le 18 juillet 2018, en présence des membres de la société Socomix, et qui portait précisément sur le descriptif du programme de rénovation de l'hôtel, sur le financement de ce programme et le montage financier privilégié, sur la présentation du contrat de gestion entre la Socomix et le groupe hôtelier pressenti pour participer à l'exploitation et sur la présentation du projet de bail emphytéotique.

5. En outre, la convocation à la séance du conseil municipal du 30 juillet était accompagnée de l'avis du service des domaines concernant le montant du loyer annuel correspondant à ce bail ainsi qu'une note explicative très détaillée, portant sur les éléments essentiels du bail concerné et qui précisait en particulier que " Il faut savoir que la délivrance par le propriétaire d'un contrat de longue durée, assorti de droits réels, est un préalable à tout engagement ferme de la part des banques et investisseurs extérieurs susceptibles d'apporter à la Socomix les financements nécessaires au programme de rénovation. " Ainsi, les conseillers avaient connaissance des motifs pour lesquels la signature de ce bail devait intervenir préalablement aux autres éléments de l'opération. Enfin, il est constant que la signature de ce bail dès le début du mois d'août 2018 était également nécessaire au financement et à la réalisation urgente d'une première tranche de travaux liée à la volonté de la commune d'accueillir le " G7 " au cour du même mois tandis qu'il n'est ni établi ni même soutenu que des conseillers auraient demandé, avant la séance du 30 juillet 2018, des précisions ou explications supplémentaires. Dans ces conditions, M. D... et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré, d'une part, que les conseillers municipaux ont été suffisamment informés sur l'objet de la délibération portant sur cette signature au sens des dispositions précitées de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales et, d'autre part, que la signature du bail emphytéotique n'était pas nécessairement conditionnée par la restructuration des relations de la commune avec la société Socomix et au sein de cette dernière.

6. En second lieu, aux termes de 1'article L. 2111-1 du Code général de la propriété des personnes publiques : " Sous réserve de dispositions législatives spéciales, le domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 est constitué des biens lui appartenant qui sont soit affectés à l'usage direct du public, soit affectés à un service public pourvu qu'en ce cas ils fassent l'objet d'un aménagement indispensable à l'exécution des missions de ce service public. " L'article L. 2122-1-1 du même code dispose que : " Sauf dispositions législatives contraires, lorsque le titre mentionné à l'article L. 2122-1 permet à son titulaire d'occuper ou d'utiliser le domaine public en vue d'une exploitation économique, l'autorité compétente organise librement une procédure de sélection préalable présentant toutes les garanties d'impartialité et de transparence, et comportant des mesures de publicité permettant aux candidats potentiels de se manifester. ".

7. Mme A... soutient que l'hôtel du Palais est affecté au service public local du tourisme en raison de " son impact au sein de la station balnéaire ". Toutefois, si l'hôtel est le seul à avoir reçu l'appellation " Palace " au sein de la commune de Biarritz, si cette commune possède la majorité des actions de la société d'économie mixte qui en assure l'exploitation et si cette exploitation revêt un caractère d'intérêt général, ces seules circonstance ne permettent pas de considérer que cet hôtel a été affecté au service public du tourisme dès lors qu'il n'a pas fait l'objet d'un aménagement particulier après son acquisition par la commune en 1956 mais que celle-ci s'est contentée d'en poursuivre l'exploitation dans des conditions similaires à celles d'un exploitant privé sans assortir cette exploitation d'obligations ou d'objectifs particuliers dont elle contrôlerait qu'ils ont été atteints et sans manifester sa volonté d'ériger néanmoins cette exploitation en service public. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que cet hôtel et son emprise font partie du domaine public de la commune ni, par voie de conséquence, que la signature du bail emphytéotique dont s'agit était soumise à la procédure de mise en concurrence prévu par les dispositions précitées de l'article L. 2122-1-1 du code général de la propriété des personnes publiques ou par celles de l'article R. 1311-2 du même code, lesquelles sont relatives aux baux emphytéotiques portant sur des dépendances du domaine public.

8. En troisième lieu, l'article 4 de la directive n° 2006/123 du 12 décembre 2006 prévoit que " Aux fins de la présente directive, on entend par (...) 6. " régime d'autorisation ", toute procédure qui a pour effet d'obliger un prestataire ou un destinataire à faire une démarche auprès d'une autorité compétente en vue d'obtenir un acte formel ou une décision implicite relative à l'accès à une activité de service ou à son exercice ; (...) 9 La présente directive s'applique exclusivement aux exigences qui affectent l'accès à une activité de service ou l'exercice d'une telle activité ".

9. Aux termes de l'article 12 de la même directive : " 1. Lorsque le nombre d'autorisations disponibles pour une activité donnée est limité en raison de la rareté des ressources naturelles ou des capacités techniques utilisables, les États membres appliquent une procédure de sélection entre les candidats potentiels qui prévoit toutes les garanties d'impartialité et de transparence, notamment la publicité adéquate de l'ouverture de la procédure, de son déroulement et de sa clôture. (...) ".

10. D'une part, il ne peut y avoir matière à question préjudicielle que si la question posée relève d'un autre ordre de juridiction, soulève une difficulté sérieuse et est nécessaire à la solution du litige.

11. D'autre part, et contrairement à ce que soutiennent les appelants, la conclusion du bail emphytéotique ne constitue pas, en elle-même, une démarche à laquelle serait subordonné l'exercice d'une activité hôtelière par la société Socomix ou même la poursuite de son exploitation de l'hôtel du Palais et n'autorise d'ailleurs pas cette société à exercer une telle activité ou à exploiter cet hôtel. Elle n'entre ainsi pas dans le champ d'application des stipulations précitées de la directive n° 2006/123 du 12 décembre 2006. Au demeurant, ce bail ne porte pas sur l'utilisation de ressources naturelles ou de capacités techniques présentant un caractère de rareté au sens des dispositions précitées de la directive n°2006/123 du 12 décembre 2006. Par suite, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que la conclusion de ce contrat de bail caractérise une autorisation au sens de ces dispositions.

12. En quatrième lieu, M. D... ne peut pas plus utilement soutenir que la conclusion du bail emphytéotique concerné méconnaitrait les stipulations de l'article 49 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne relatives à la liberté d'établissement dans le territoire des États membres dès lors que ce bail ne porte que sur une opération purement patrimoniale et non sur une activité économique et ne conditionne pas davantage l'accès à une telle activité ainsi que l'ont dit les premiers juges.

Sur les délibérations du 15 octobre 2018 :

13. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que les conseillers municipaux ont bénéficié dès le 2 octobre 2018 d'une première réunion d'information complète, à laquelle participaient les conseillers municipaux qui le souhaitaient, les responsables de la société Socomix et les experts ayant travaillé sur le dossier, qu'ils ont ensuite bénéficié d'une réunion de la commission générale du conseil municipal organisée sur le sujet le 3 octobre, puis, le 10 octobre, d'une réunion de la commission des finances, que le maire de la commune a également organisé deux conférences téléphoniques ouvertes à ceux qui le souhaitaient les 12 et 15 octobre, et auxquelles participaient à nouveau les responsables et experts de la société Socomix, que les élus ont eu à leur disposition, dès le 3 octobre, la documentation de la société Socomix, les documents explicitant le financement du projet, justifiant la valorisation du fonds de commerce, et ceux sur lesquels ils allaient se prononcer le 15 octobre, l'ensemble étant complété par des notes explicatives complètes annexées aux convocations au conseil municipal. En outre, Mme A... n'établit ni même ne soutient que des conseillers auraient demandé, avant la séance du 15 octobre 2018, des précisions ou explications supplémentaires. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que le maire aurait délibérément dissimulé l'octroi au groupe JC Decaux d'une minorité de blocage au sein de la société Socomix ainsi que de pouvoirs exorbitants par l'intermédiaire du Pacte d'actionnaires et, plus généralement, que les conseillers municipaux auraient été insuffisamment informés sur l'objet des délibérations litigieuses du 15 octobre 2018 en méconnaissance des dispositions des articles L. 2121-12 et L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales en se bornant à soutenir, d'une part, que les contrats de prêt avec les établissements bancaires concernés et cités dans la convention de subordination, l'annexe à la convention de mise à disposition des biens mobiliers communaux à la Socomix, le contrat de management devant être conclu, le contrat de gestion signé avec la société Hyatt, le nouveau plan d'affaires de la société Socomix et le plan de financement du programme de travaux ne leur ont pas été communiqué et, d'autre part, que la note explicative de synthèse adressée aux conseillers le 9 octobre 2018 était trop succincte et ne comportait pas les documents nécessaires tandis que les documents qui ont été remis au conseillers lors de la réunion du 10 octobre étaient quant à eux trop complexes pour être compris.

14. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 1522-1 du code général des collectivités territoriales : " Les assemblées délibérantes des communes, des départements, des régions et de leurs groupements peuvent, à l'effet de créer des sociétés d'économie mixte locales mentionnées à l'article L. 1521-1, acquérir des actions ou recevoir, à titre de redevance, des actions d'apports, émises par ces sociétés.... 2° Les collectivités territoriales et leurs groupements détiennent, séparément ou à plusieurs, plus de la moitié du capital de ces sociétés et des voix dans les organes délibérants ".

15. Mme A..., qui n'a pas produit le pacte d'actionnaires conclu entre la société Socomix et le groupe JC Decaux, n'établit pas qu'il aurait pour objet ou pour effet de déroger aux conditions de majorité prévues au 2° de dispositions précitées de l'article L. 1522-1 du code général des collectivités territoriales en se bornant à soutenir, au demeurant sans l'établir, que ce pacte confère au groupe JC Decaux un droit de veto sur de nombreuses décisions dévolues au conseil d'administration de la société Socomix alors qu'il ressort de ses propres écritures que ce conseil d'administration demeure contrôlé par la commune de Biarritz et que cette commune en possède la majorité des droits de vote.

16. En troisième et dernier lieu, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que l'entrée du groupe JC Decaux au capital de la société Socomix a été consentie à un prix anormalement bas en se bornant à soutenir que la valeur des actions de cette dernière société a été calculée en retenant " une valeur des murs " de 25 millions d'euros et une valeur du fonds de commerce de 13,7 millions d'euros très inférieures à la valeur de l'hôtel du Palais, qu'elle estime à 200 millions d'euros, dès lors, d'une part, qu'il est constant que cette société n'est pas propriétaire de l'hôtel mais seulement titulaire d'un bail emphytéotique indépendant du fonds de commerce et lui imposant le versement d'une redevance annuelle d'un montant nominal de 920 000 euros, supérieur au montant mentionné dans l'avis du service des domaines, et, d'autre part, que la valeur du fonds de commerce a été fixée entre 12 et 14 millions d'euros par le commissaire aux apports sans que l'appelante puissent utilement prétendre, au demeurant sans l'établir, que l'application, au chiffre d'affaire de l'hôtel du Palais, au titre de son exercice clos le 31 mars 2018, des coefficients utilisés par la cour d'appel de Chambéry en 2007 pour valoriser un hôtel 4 étoiles situé à Courchevel permettrait de valoriser le fonds de commerce de l'hôtel du Palais à la somme de 53 millions d'euros.

17. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de leurs différentes conclusions, que Mme A... et M. D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des délibérations du conseil municipal de Biarritz des 30 juillet et 15 octobre 2018. Par suite, leurs requêtes doivent être rejetées, y compris leurs conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

18. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... et de M. D... les sommes que demandent la commune de Biarritz et la société Socomix en application des mêmes dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ni de faire droit aux conclusions présentées aux mêmes fins par les sociétés JC Decaux et DF Collection, lesquelles se bornent à faire valoir qu'aucune conclusion n'a été formée à leur encontre.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes n°19BX03590 et 19BX03620 sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Biarritz ainsi que des sociétés Socomix, JC Decaux et DF Collection tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A..., à M. B... D..., à la société anonyme Socomix, à la commune de Biarritz et aux sociétés par actions simplifiées JC Decaux et DF Collection.

Délibéré après l'audience du 27 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Didier Artus, président,

Mme Frédéric Faïck, président-assesseur,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 02 novembre 2021.

Le rapporteur,

Manuel E...

Le président,

Didier ArtusLa greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Atlantiques en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°19BX03590, 19BX03620


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX03590
Date de la décision : 02/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

39-02 Marchés et contrats administratifs. - Formation des contrats et marchés.


Composition du Tribunal
Président : M. ARTUS
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : DROITS ET TERRITOIRES;DROITS ET TERRITOIRES;RIVIERE AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 09/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-11-02;19bx03590 ?
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