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31/01/2022 | FRANCE | N°21BX02967

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 31 janvier 2022, 21BX02967


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 7 octobre 2020 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2005755 du 31 mars 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 juillet 2021 et un mémoir

e enregistré le 17 novembre 2021, M. B..., représenté par Me Perrin, demande à la cour :

1°) d'an...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 7 octobre 2020 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2005755 du 31 mars 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 juillet 2021 et un mémoire enregistré le 17 novembre 2021, M. B..., représenté par Me Perrin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 31 mars 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 octobre 2020 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", subsidiairement de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer un récépissé l'autorisant à travailler, le tout dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, au profit de son conseil, d'une somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- l'arrêté litigieux est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et a méconnu tant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que celles de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- les carences affectant le rapport du médecin rapporteur de l'OFII n'ont pas permis au collège de médecins de cet office de rendre un avis éclairé ;

- cet arrêté a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que celles du 10° de l'article

L. 511-4 du même code.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 novembre 2021, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Elle entend s'en remettre à ses écritures de première instance.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 juin 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., né le 29 août 1980, ressortissant de la République du Congo, déclare être entré en France le 20 avril 2018. Sa demande d'asile a été définitivement rejetée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 18 avril 2019 à la suite de laquelle il a fait l'objet, le 16 septembre 2019, d'une mesure d'éloignement. Par un arrêté du 7 octobre 2020, la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 31 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". L'article R. 313-22 de ce code précise que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". L'article R. 313-23 du même code prévoit que : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical (...). Il transmet son rapport médical au collège de médecins. / (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) ". Enfin, en application de l'article 3 de l'arrêté du 27 décembre 2016 susvisé : " Au vu du certificat médical et des pièces qui l'accompagnent ainsi que des éléments qu'il a recueillis au cours de son examen éventuel, le médecin de l'office établit un rapport médical, conformément au modèle figurant à l'annexe B du présent arrêté ".

3. D'une part, l'appelant fait valoir que le médecin rapporteur n'a pas rempli les rubriques " Interruption éventuelle du suivi psychiatrique " ainsi que la rubrique " Perspectives et pronostic au vu du dossier médical fourni et de la visite médicale, le cas échéant ". Toutefois, le renseignement de ces rubriques, dont la seconde comporte, au demeurant, la mention " le cas échéant " ne présente pas le caractère d'une obligation pour le médecin rapporteur et ne constitue ainsi pas une garantie pour le demandeur d'un titre de séjour. En outre, dès lors que le dossier médical de l'appelant ne comportait aucune mention sur l'interruption de ce suivi et ne comportait aucune indication permettant d'établir un pronostic concernant l'évolution de son état de santé, l'absence de ces mentions n'a pas davantage fait obstacle à ce que le collège de médecins de l'OFII émette un avis éclairé sur son état de santé et est donc demeurée sans incidence sur le sens de l'arrêté litigieux.

4. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que, dans son avis du 19 mars 2020, le collège des médecins de l'OFII a mentionné que l'état de santé de M. B... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait toutefois pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Pour contester cette appréciation, celui-ci entend se prévaloir, en particulier, des certificats établis par son médecin psychiatre les 11 mars 2019, 17 septembre 2019 et 8 décembre 2020 dont il ressort qu'il souffre de stress post-traumatique et se plaint d'idées suicidaires ainsi que des attestations établies par une psychomotricienne qui travaille sur la " symptomatologie dissociative " de l'appelant. Toutefois, l'existence de ce stress post-traumatique ancien ne résulte que des déclarations de l'intéressé et n'est corroboré par aucun élément factuel alors qu'il résulte également de ces certificats médicaux que son état de santé n'implique pas une prise en charge psychiatrique autre que médicamenteuse et que l'intéressé souffrirait de ces troubles dépressifs, qui n'auraient pas été pris en charge avant son entrée sur le territoire national, depuis l'adolescence sans que cette absence de prise en charge n'entraîne de conséquences présentant un facteur de particulière gravité. Par ailleurs, M. B... ne peut pas utilement se prévaloir, à l'encontre de l'arrêté litigieux du 7 octobre 2020, du certificat établi par son médecin traitant plus de six mois plus tard, le 22 juin 2021, et faisant état des troubles évoqués à cette date par l'appelant à la suite d'une interruption de son traitement. Dans ces conditions, l'appelant ne peut être regardé comme établissant que son état de santé nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait avoir des conséquences d'une extrême gravité. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant le séjour aurait méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que la mesure d'éloignement dont elle était assortie aurait méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du même code.

5. En deuxième lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. M. B... entend principalement se prévaloir de la relation affective qu'il entretient avec sa compagne, ressortissante de la république démocratique du Congo, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " valable jusqu'au 26 novembre 2021, avec laquelle il a eu un enfant né en France le 14 octobre 2019 et qui était enceinte de leur second enfant à la date de l'arrêté litigieux. Il produit également une attestation de la mère des deux enfants qu'il a eu d'une précédente union au Congo dont il ressort qu'il ne participe ni à leur entretien ni à leur éducation. Toutefois, la circonstance que le couple élève un enfant ne confère aucun droit au séjour à l'appelant dès lors que sa compagne n'est autorisée à séjourner en France que pour la durée de ses études, n'a pas vocation à s'y installer durablement et que M. B... ne fait état d'aucun élément permettant de considérer que la cellule familiale ne pourrait se reconstituer dans l'un de leurs pays respectifs et, en particulier, que sa compagne ne pourrait y poursuivre ses études. En outre, l'appelant ne fait état d'aucun autre lien particulier sur le territoire français et n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine ou réside, notamment, ses deux premiers enfants mineurs ainsi que l'ensemble de sa famille et où lui-même a résidé jusqu'à l'âge de 37 ans. Enfin, s'il produit une convention de bénévolat qu'il a signée avec l'association Emmaüs en 2019 ainsi qu'une confirmation de rendez-vous pour un don de plasma au cours de la même année, ces seuls éléments ne permettent pas de considérer que l'appelant justifie d'une bonne intégration dans la société française.

7. Dans ces conditions, eu égard également au caractère récent de son séjour en France et au très jeune âge de son enfant né en France, M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté litigieux aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au sens des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire aurait méconnu l'intérêt supérieur de cet enfant tel qu'il est protégé par les stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

8. En troisième et dernier lieu, il résulte de ce qui précède que

M. B... n'est pas davantage fondé à soutenir que l'arrêté litigieux serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté litigieux du 7 octobre 2020. Par suite, sa requête doit être rejetée y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 10 janvier 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Brigitte Phémolant, présidente,

Mme Frédéric Faïck, président-assesseur,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 janvier 2022.

Le rapporteur,

Manuel A...

La présidente,

Brigitte PhémolantLa greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°21BX02967 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX02967
Date de la décision : 31/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme PHEMOLANT
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : PERRIN

Origine de la décision
Date de l'import : 15/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-01-31;21bx02967 ?
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