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14/04/2022 | FRANCE | N°21BX01551

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 14 avril 2022, 21BX01551


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Dax a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la décision du 24 novembre 2015 par laquelle le directeur académique des services départementaux de l'éducation nationale des Landes a refusé la prise en charge financière des assistants de vie scolaire accompagnant un enfant handicapé pendant le temps périscolaire.

Par un jugement n° 1600287 du 5 octobre 2017, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 17BX03810 du 5 novembre 2019, la cour a

dministrative d'appel de Bordeaux a annulé ce jugement et la décision du directeur acad...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Dax a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la décision du 24 novembre 2015 par laquelle le directeur académique des services départementaux de l'éducation nationale des Landes a refusé la prise en charge financière des assistants de vie scolaire accompagnant un enfant handicapé pendant le temps périscolaire.

Par un jugement n° 1600287 du 5 octobre 2017, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 17BX03810 du 5 novembre 2019, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé ce jugement et la décision du directeur académique des services départementaux de l'éducation nationale des Landes du 24 novembre 2015.

Par une décision n° 437167 du 30 décembre 2020, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 5 novembre 2019 et a renvoyé l'affaire devant la cour.

Procédure devant la cour :

Par un mémoire, enregistré le 28 mai 2021, la commune de Dax, représentée par Me Laveissière, maintient ses conclusions d'appel tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Pau du 5 octobre 2017, à l'annulation de la décision du 24 novembre 2015 du directeur académique des services départementaux de l'éducation nationale des Landes et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Elle soutient que :

- il appartient à la cour de tirer les conséquences de l'arrêt du Conseil d'Etat qui juge, dans la continuité de l'arrêt du 20 novembre 2020 n°422248, que les intervenants recrutés par l'Etat peuvent intervenir auprès des enfants en situation de handicap y compris en dehors du temps scolaire dans des conditions à déterminer avec la collectivité organisatrice;

- en l'espèce la décision en litige spécifiait que le temps périscolaire n'entrait pas dans le périmètre d'intervention des assistants de vie scolaire en méconnaissance de ce principe découlant de l'article L. 917-1 du code de l'éducation;

- ainsi, si l'Etat n'est pas tenu à une obligation de financement, cette décision doit être annulée en tant qu'elle refuse de déterminer avec la commune les conditions de mise à disposition des accompagnants d'enfants handicapés et méconnaît les obligations mises à la charge de l'Etat par ces dispositions.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 février 2022, l'académie de Bordeaux conclut au rejet de la requête.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de l'éducation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Christelle Brouard-Lucas,

- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,

- et les observations de Me Laveissière, représentant la commune de Dax.

Considérant ce qui suit :

1. Par une lettre du 9 octobre 2015, adressée au directeur académique des services départementaux de l'éducation nationale des Landes, le maire de Dax a réitéré une précédente demande du 30 juillet 2015 de prise en charge financière d'une assistante de vie scolaire (AVS) dans le cadre de l'accompagnement d'une enfant handicapée pendant le temps périscolaire, prescrit par décision de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH). Par une lettre du 24 novembre 2015, le directeur académique des services départementaux de l'éducation nationale des Landes a indiqué d'une part que le temps périscolaire n'était pas du temps de scolarisation et n'entrait pas dans le périmètre d'intervention des AVS, d'autre part, qu'il appartenait aux collectivités territoriales de prendre en charge la rémunération des accompagnants intervenant dans le cadre périscolaire, et enfin que les AVS " accompagnants des élèves en situation de handicap " (AESH) pouvaient être mis, à ce titre, à la disposition des collectivités par voie de convention, conformément à ce que prévoit l'article L. 917-1 du code de l'éducation.

2. La commune de Dax a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler cette décision en tant qu'elle refusait la prise en charge financière de l'accompagnement d'une enfant handicapée pendant le temps périscolaire prescrit par la CDAPH. Le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande par un jugement du 5 octobre 2017. Par un arrêt n° 17BX03810 du 5 novembre 2019, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé ce jugement et la décision du directeur académique des services départementaux de l'éducation nationale des Landes du 24 novembre 2015. Mais par une décision n° 437167 du 30 décembre 2020, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 5 novembre 2019 et a renvoyé l'affaire devant la cour.

3. Aux termes de l'article L. 114-1 du code de l'action sociale et des familles : " Toute personne handicapée a droit à la solidarité de l'ensemble de la collectivité nationale, qui lui garantit, en vertu de cette obligation, l'accès aux droits fondamentaux reconnus à tous les citoyens ainsi que le plein exercice de sa citoyenneté ". Aux termes de l'article L. 114-1-1 du même code, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " La personne handicapée a droit à la compensation des conséquences de son handicap quels que soient l'origine et la nature de sa déficience, son âge ou son mode de vie. / Cette compensation consiste à répondre à ses besoins, qu'il s'agisse de l'accueil de la petite enfance, de la scolarité, de l'enseignement, de l'éducation (...) ". Aux termes de l'article L. 114-2 de ce code : " Les familles, l'Etat, les collectivités locales, les établissements publics (...) associent leurs interventions pour mettre en œuvre l'obligation prévue à l'article L. 114-1, en vue notamment d'assurer aux personnes handicapées toute l'autonomie dont elles sont capables. / A cette fin, l'action poursuivie vise à assurer l'accès de l'enfant, de l'adolescent ou de l'adulte handicapé aux institutions ouvertes à l'ensemble de la population et son maintien dans un cadre ordinaire de scolarité, de travail et de vie (...) ".

4. Aux termes de l'article L. 216-1 du code de l'éducation : " Les communes, départements ou régions peuvent organiser dans les établissements scolaires, pendant leurs heures d'ouverture et avec l'accord des conseils et autorités responsables de leur fonctionnement, des activités éducatives, sportives et culturelles complémentaires. Ces activités sont facultatives et ne peuvent se substituer ni porter atteinte aux activités d'enseignement et de formation fixées par l'Etat. Les communes, départements et régions en supportent la charge financière. Des agents de l'Etat, dont la rémunération leur incombe, peuvent être mis à leur disposition. / (...) ". Aux termes de l'article L. 551-1 du même code : " Des activités périscolaires prolongeant le service public de l'éducation, et en complémentarité avec lui, peuvent être organisées dans le cadre d'un projet éducatif territorial associant notamment aux services et établissements relevant du ministre chargé de l'éducation nationale d'autres administrations, des collectivités territoriales, des associations et des fondations, sans toutefois se substituer aux activités d'enseignement et de formation fixées par l'Etat. (...) / Le projet éducatif territorial vise notamment à favoriser, pendant le temps libre des élèves, leur égal accès aux pratiques et activités culturelles et sportives et aux nouvelles technologies de l'information et de la communication ".

5. Enfin, aux termes de l'article L. 917-1 du code de l'éducation, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Des accompagnants des élèves en situation de handicap peuvent être recrutés pour exercer des fonctions d'aide à l'inclusion scolaire de ces élèves, y compris en dehors du temps scolaire. Ils sont recrutés par l'Etat, par les établissements d'enseignement mentionnés au chapitre II du titre Ier et au titre II du livre IV de la deuxième partie ou par les établissements mentionnés à l'article L. 442-1. (...) / Ils peuvent être mis à la disposition des collectivités territoriales dans les conditions prévues à l'article L. 916-2 du présent code. (...) ".

6. Lorsqu'une collectivité territoriale organise un service de restauration scolaire ou des activités complémentaires aux activités d'enseignement et de formation pendant les heures d'ouverture des établissements scolaires ou encore des activités périscolaires sur le fondement des dispositions citées au point 4, il lui incombe, ainsi qu'il résulte, notamment, des dispositions du code de l'action sociale et des familles citées au point 3, de veiller à assurer que, sans préjudice du respect des conditions prévues pour l'ensemble des élèves, les élèves en situation de handicap puissent, avec, le cas échéant, le concours des aides techniques et des aides humaines dont ces élèves bénéficient au titre de leur droit à compensation en application du code de l'action sociale et des familles et du code de la sécurité sociale, y avoir effectivement accès.

7. A cet égard, en vertu de l'article L. 917-1 du code de l'éducation, cité au point 5, les accompagnants des élèves en situation de handicap recrutés par l'Etat sur le fondement d'une décision d'une commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées ayant alloué l'aide individuelle prévue à l'article L. 351-3 du code de l'éducation, peuvent intervenir " y compris en dehors du temps scolaire ". A ce titre, ils peuvent notamment être mis à la disposition de la collectivité territoriale dans les conditions prévues à l'article L. 916-2 du code de l'éducation, c'est-à-dire sur le fondement d'une convention conclue entre la collectivité intéressée et l'employeur dans les conditions prévues à l'article L. 216-1 du même code, lequel précise qu'il revient à la collectivité territoriale d'assurer la charge financière de cette mise à disposition. Ils peuvent également être directement employés par la collectivité territoriale pour ces heures accomplies "en dehors du temps scolaire ". Enfin, ils peuvent être recrutés conjointement par l'Etat et par la collectivité territoriale ainsi que le prévoient désormais les dispositions de l'article L. 917-1 du code de l'éducation, dans leur rédaction issue de la loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance, non applicable au présent litige.

8. Il s'ensuit que lorsque l'Etat, sur le fondement de la décision d'une commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées allouant l'aide prévue à l'article L. 351-3 du code de l'éducation, recrute une personne pour accompagner un enfant en situation de handicap durant le temps scolaire et qu'en outre, cet enfant recourt au service de restauration scolaire ou participe à tout ou partie des activités complémentaires ou périscolaires organisées dans son établissement scolaire, il appartient à l'Etat de déterminer avec la collectivité territoriale qui organise ce service et ces activités si et, le cas échéant, comment cette même personne peut intervenir auprès de l'enfant durant ce service et ces activités, de façon à assurer, dans l'intérêt de l'enfant, la continuité de l'aide qui lui est apportée.

9. Dans ses dernières écritures, la commune de Dax ne conteste plus qu'en application de ces dispositions, il lui incombe d'assurer la prise en charge financière de l'accompagnement pendant le temps périscolaire d'une enfant handicapée, prescrit par décision de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées. Elle maintient toutefois ses conclusions d'annulation de la décision en litige en tant qu'elle refuserait de déterminer avec la commune les conditions de mise à disposition des accompagnants d'enfants handicapés et méconnaîtrait les obligations mises à la charge de l'Etat par les dispositions précitées.

10. Il ressort toutefois des pièces du dossier, d'une part, que la demande de la commune adressée le 9 octobre 2015 ne portait que sur la prise en charge financière d'une AVS dans le cadre de l'accompagnement pendant le temps périscolaire d'une enfant handicapée et, d'autre part, que la décision en litige du directeur académique précise explicitement que les AVS- ASEH peuvent être mis à disposition des collectivités territoriales par voie de convention pour assurer l'accompagnement des enfants durant le temps périscolaire en application de l'article L. 917-1 du code de l'éducation. Ainsi, malgré la formulation maladroite selon laquelle " le temps périscolaire n'est pas du temps de scolarisation et n'entre pas dans le périmètre d'intervention des AVS ", ce courrier ne peut être regardé comme constituant un refus de mise à disposition d'une AVS auprès de la collectivité et un manquement de l'Etat aux obligations qui lui incombent dans ce cadre. Ce moyen ne peut donc qu'être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Dax n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa requête. Sa requête d'appel doit, par suite, être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Dax est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Dax et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,

Mme Christelle Brouard-Lucas, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 avril 2022.

La rapporteure,

Christelle Brouard-LucasLa présidente,

Marianne HardyLa greffière,

Virginie SantanaLa République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale de la jeunesse et des sports en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX01551 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01551
Date de la décision : 14/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Aide sociale - Différentes formes d'aide sociale - Aide sociale aux personnes handicapées.

Enseignement et recherche - Questions générales - Questions générales concernant les élèves.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Christelle BROUARD-LUCAS
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : SELARL CAROLINE LAVEISSIERE

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-04-14;21bx01551 ?
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