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16/06/2022 | FRANCE | N°21BX01613

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 16 juin 2022, 21BX01613


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2019 par lequel le préfet de la Charente-Maritime lui a ordonné de se dessaisir de toutes les armes en sa possession, lui a interdit d'acquérir et de détenir des armes et a retiré

la validation de son permis de chasser, ainsi que la décision de rejet de son recours gracieux du 25 juillet 2019.

Par un jugement n° 1902200 du 11 mars 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. >
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 avril et 31 août 2021, M. A..., repr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2019 par lequel le préfet de la Charente-Maritime lui a ordonné de se dessaisir de toutes les armes en sa possession, lui a interdit d'acquérir et de détenir des armes et a retiré

la validation de son permis de chasser, ainsi que la décision de rejet de son recours gracieux du 25 juillet 2019.

Par un jugement n° 1902200 du 11 mars 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 avril et 31 août 2021, M. A..., représenté par Me Meyrand, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 11 mars 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2019 par lequel le préfet de la Charente-Maritime lui a ordonné de se dessaisir de toutes les armes en sa possession, lui a interdit d'acquérir et de détenir des armes et a retiré la validation de son permis de chasser ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Charente-Maritime de lui restituer ses armes et munitions et de procéder à sa radiation du fichier national automatisé nominatif des personnes interdites d'acquisition et de détention d'armes sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision méconnaît l'article 312-3 du code de la sécurité dès lors que les faits de violences, de vol et de cambriolages commis les 7 juillet et 2 et 3 août 1998, qui fondent la décision, ne sont pas mentionnés au bulletin n° 2 de son casier judiciaire ;

- pour les mêmes raisons, elle méconnaît l'article L. 312-3 du code de la sécurité intérieure ;

- les faits en cause, même si leur gravité est incontestable, ont été commis il y a vingt ans et il est irréprochable depuis, rien ne laissant craindre une utilisation dangereuse de son arme.

- il chasse depuis 1985 et a déclaré être en possession d'armes en 2008 et en 2015 ;

- il ne souffre d'aucun trouble de comportement comme en atteste le certificat médical qu'il produit.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 avril 2022, le préfet de la Charente-Maritime conclut au rejet de la requête et fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 12 avril 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 mai 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... F...,

- et les conclusions de Mme C... E....

Considérant ce qui suit :

1. Le 13 septembre 2018, M. A... a déclaré aux services de la préfecture de Charente-Maritime détenir un fusil de chasse de marque Renato Baldi. Après avoir diligenté une enquête administrative, le préfet de la Charente-Maritime, par arrêté du 16 juillet 2019, a ordonné à M. B... A... de se dessaisir de toutes les armes en sa possession dans un délai de trois mois, lui a interdit d'acquérir ou de détenir des armes de toute catégorie et lui a retiré la validation de son permis de chasser. M. A... relève appel du jugement du 11 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision ordonnant à M. A... de se dessaisir de ses armes :

2. Aux termes de l'article L. 312-11 du code de la sécurité intérieure : " Sans préjudice des dispositions de la sous-section 1, le représentant de l'État dans le département peut, pour des raisons d'ordre public ou de sécurité des personnes, ordonner à tout détenteur d'une arme, de munitions et de leurs éléments de toute catégorie de s'en dessaisir. / Le dessaisissement consiste soit à vendre l'arme les munitions et leurs éléments à une personne titulaire de l'autorisation, mentionnée à l'article L. 2332-1 du code de la défense, ou à un tiers remplissant les conditions légales d'acquisition et de détention, soit à la remettre à l'État. Un décret en Conseil d'État détermine les modalités du dessaisissement. / Sauf urgence, la procédure est contradictoire. Le représentant de l'État dans le département fixe le délai au terme duquel le détenteur doit s'être dessaisi de son arme, de ses munitions et de leurs éléments. (...) ". Aux termes de l'article R. 312-67 du même code : " Le préfet ordonne la remise ou le dessaisissement de l'arme ou de ses éléments dans les conditions prévues aux articles L. 312-7 ou L. 312-11 lorsque : / (...) 2° Le demandeur ou le déclarant a été condamné pour l'une des infractions mentionnées au 1° de l'article L. 312-3 figurant au bulletin n° 2 de son casier judiciaire ou dans un document équivalent pour les ressortissants d'un État membre de l'Union européenne ou d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ; / 3° Il résulte de l'enquête diligentée par le préfet que le comportement du demandeur ou du déclarant est incompatible avec la détention d'une arme ; cette enquête peut donner lieu à la consultation des traitements automatisés de données personnelles mentionnés à l'article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ; / 4° Le certificat médical prévu au premier alinéa de l'article L. 312-6 établit que l'état de santé du demandeur ou du déclarant est incompatible avec la détention d'une arme ".

3. L'arrêté contesté est fondé sur la circonstance que l'enquête administrative a fait apparaître que M. A... " s'est signalé par des vols et cambriolages les 7 juillet, 2 et 3 août 1998 et des faits de violences envers sa concubine ", et que " ce comportement laisse craindre une utilisation dangereuse pour lui-même ou pour autrui, des armes qu'il détient et s'avère donc incompatible avec la détention de celles-ci ". Toutefois, par courrier du 27 juillet 2021 adressé au conseil du requérant, le vice-procureur de la République de Saintes a confirmé que le bulletin n° 1 du casier judiciaire de l'intéressé ne comportait aucune mention. En l'absence de preuve de la matérialité des faits qui lui sont reprochés, et qui fondent l'arrêté contesté, M. A... est fondé à soutenir que la décision litigieuse lui ordonnant le dessaisissement de ses armes doit être annulée.

Sur la décision portant interdiction d'acquérir ou de détenir des armes :

4. Aux termes de l'article L. 312-3 du code de la sécurité intérieure, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " Sont interdites d'acquisition et de détention d'armes, de munitions et de leurs éléments des catégories A, B et C : / 1° Les personnes dont le bulletin n° 2 du casier judiciaire comporte une mention de condamnation pour l'une des infractions suivantes : (...) violences volontaires prévues aux articles 222-7 et suivants dudit code ". Aux termes de l'article L. 312-3-1 du même code : " L'autorité administrative peut interdire l'acquisition et la détention des armes, munitions et leurs éléments des catégories A, B et C aux personnes dont le comportement laisse craindre une utilisation dangereuse pour elles-mêmes ou pour autrui ".

5. Pour les motifs énoncés au point 3, le requérant est fondé à soutenir que la décision litigieuse doit être annulée.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 11 mars 2021 et l'arrêté du 16 juillet 2019 sont annulés.

Article 2 : L'État versera à M. A... la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée au préfet de la Charente-Maritime.

Délibéré après l'audience du 19 mai 2022 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,

Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022.

La rapporteure,

Frédérique F... Le président

Éric Rey-Bèthbéder La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 21BX01613


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