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07/07/2022 | FRANCE | N°21BX01183

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 07 juillet 2022, 21BX01183


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

L'association Nature environnement 17 a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 13 mai 2019 par lequel le maire de la commune de Royan a délivré un permis d'aménager à la société Nexity IR programmes Loire, société par actions simplifiée.

Par un jugement n° 1902280 du 21 janvier 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 mars 2021 et des mémoires enregistrés les 27 avril 2022 e

t 6 mai 2022, l'association Nature environnement 17, représentée par Me Candiago, demande à la cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

L'association Nature environnement 17 a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 13 mai 2019 par lequel le maire de la commune de Royan a délivré un permis d'aménager à la société Nexity IR programmes Loire, société par actions simplifiée.

Par un jugement n° 1902280 du 21 janvier 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 mars 2021 et des mémoires enregistrés les 27 avril 2022 et 6 mai 2022, l'association Nature environnement 17, représentée par Me Candiago, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 21 janvier 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 mai 2019 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Royan le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, la présence de fourmis indispensables au cycle biologique de l'azuré du serpolet ressort bien de l'expertise qu'elle a produite à l'appui de son moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme ; elle a démontré en première instance que le projet était de nature à avoir des conséquences dommageables pour cette espèce de papillons et son habitat ; la présence de l'azuré sur le site est significative ; il s'agit d'une espèce protégée par la directive habitats et au niveau national par l'arrêté du 23 avril 2007 ; il s'agit d'une espèce patrimoniale quasi-menacée et déterminante pour la création de ZNIEFF en Poitou-Charentes ; un plan national d'action a été déployé en sa faveur ; l'origan indispensable au cycle biologique de l'espèce occupe une grande partie de la parcelle ;

- l'arrêté aurait dû contenir des prescriptions spéciales telles que l'exclusion des surfaces occupées par l'origan des aménagements et leur préservation par un balisage adapté, l'évitement des fourmilières et l'adaptation des phases de chantier, la réduction des surfaces de parking ou la réduction du nombre de logements ; de telles prescriptions ne modifieraient pas de façon substantielle le projet de lotissement ;

- en méconnaissance de l'article R. 441-1 du code de l'urbanisme, la demande de permis d'aménager ne précise pas qu'une dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées est nécessaire ; or, une dérogation est nécessaire dès lors que le projet porte sur la création d'un lotissement de 16 lots pour une superficie totale de plancher de 2623,43 m², avec des aires de stationnement et des voies bétonnées et que le terrain d'assiette est occupé en grande partie par l'origan, plante indispensable à l'azuré du serpolet et par des fourmilières également indispensables à cette espèce ; le terrain est également un habitat de l'engoulevent d'Europe, espèce protégée par l'annexe I de la directive oiseaux et par l'arrêté du 29 octobre 2009 ; la présence de milans noirs, espèce également protégée, a aussi été observée sur le site ; le statut au regard des listes rouges n'a pas d'incidence sur la nécessité d'une dérogation ; l'absence au dossier de déclaration concernant la dérogation n'est compensée par aucun autre document et empêchait l'autorité compétente d'apprécier la conformité du projet à la règlementation applicable ;

- le permis méconnaît l'article 8 de la convention sur la diversité biologique et l'article 12 de la directive habitats ;

- il a été accordé en méconnaissance de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme compte tenu des conséquences du projet sur l'azuré du serpolet ;

- le caractère inopportun du permis doit conduire à son annulation ;

- le classement du terrain en zone UD au plan local d'urbanisme (PLU) est entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'est autorisée l'urbanisation du secteur, favorable à l'azuré du serpolet, alors que la prise en compte de ces espaces est prévue par le schéma régional de cohérence écologique (SRCE) de Poitou-Charentes ; en application de l'article L. 371-3 du code de l'environnement, le PLU doit prendre en compte le SRCE ; malgré les demandes de l'association, la commune n'a pas communiqué les règles applicables au terrain antérieurement au PLU en vigueur ; après obtention de ces éléments, elle présentera des observations complémentaires sur ce point.

Par un mémoire enregistré le 10 septembre 2021, la société Nexity IR programmes Loire, représentée par Me Durand, conclut au rejet de la requête, subsidiairement à ce qu'il soit fait application des articles L. 600-5 et/ou L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et à ce que soit mis à la charge de l'association requérante le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens tirés de la méconnaissance de la directive habitats et de la convention sur la diversité écologique sont inopérants, ces textes ne pouvant être utilement invoqués par un justiciable en droit interne ;

- les autres moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par mémoire enregistré le 8 mai 2022, la commune de Royan, représentée par Me Bernard-Chatelot, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'association Nature environnement 17 le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens tirés de la méconnaissance de la directive habitats et de la convention sur la diversité écologique sont inopérants, ces textes n'étant pas opposables ;

- les autres moyens ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 9 mai 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 31 mai 2022 à 12h00.

Par un courrier du 16 mai 2022, les parties ont été invitées à présenter leurs observations sur l'application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme en vue de la régularisation des vices tirés de la méconnaissance des articles R. 441-1 et R. 111-26 du code de l'urbanisme.

Le 24 mai 2022, des observations ont été présentées en réponse au courrier du 16 mai 2022 pour l'association Nature environnement 17.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention sur la diversité biologique, adoptée à Rio de Janeiro le 22 mai 1992 ;

- la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages ;

- la directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages ;

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 ;

- l'arrêté du 23 avril 2007 fixant les listes des insectes protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection ;

- l'arrêté du 29 octobre 2009 fixant la liste des oiseaux protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... A...,

- les conclusions de M. Stéphane Gueguein, rapporteur public,

- et les observations de Me Lê Quang représentant la société Nexity IR programmes Loire.

Considérant ce qui suit :

1. Le 13 mai 2019, le maire de la commune de Royan (Charente-Maritime), a délivré à la société Nexity IR programmes Loire un permis d'aménager portant sur la création d'un lotissement de 16 lots en vue de la réalisation de 10 maisons individuelles et d'un îlot de 20 logements collectifs sociaux, 5 lots demeurant libres, sur les parcelles cadastrées section BX 453, 454, 455, 456, 459, 460, 461, 462, 465, 466, 467 et 468, situées rue de la Roche au lieu-dit La Conside, d'une superficie totale de 9 677 m². L'association Nature environnement 17 fait appel du jugement du 21 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce permis d'aménager.

Sur la légalité du permis d'aménager du 13 mai 2019 :

2. Aux termes de l'article R. 441-1 du code de l'urbanisme : " La demande de permis d'aménager précise : (...) g) S'il y a lieu, que les travaux doivent faire l'objet d'une dérogation au titre du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement (...) ". Le 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement est relatif aux dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1, qui sont délivrées " à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, pouvant être évaluée par une tierce expertise menée, à la demande de l'autorité compétente, par un organisme extérieur choisi en accord avec elle, aux frais du pétitionnaire, et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle ", notamment pour des raisons impératives d'intérêt public majeur.

3. La circonstance que le dossier de demande d'autorisation ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité l'autorisation qui a été accordée que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

4. Si l'association Nature environnement 17 soutient que des engoulevents d'Europe et des milans noirs auraient été observés à proximité du terrain d'assiette, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le projet de lotissement serait susceptible d'entrainer la destruction d'habitats de ces espèces protégées ni qu'il pourrait conduire à la destruction d'individus de ces espèces ou à leur perturbation. Dans ces conditions, aucune dérogation ne peut être considérée comme nécessaire s'agissant de ces espèces. S'agissant en revanche de l'azuré du serpolet (maculinea arion), espèce de papillon figurant à l'annexe IV de la directive 92/43/CEE du Conseil concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages et protégé en application de l'arrêté du 23 avril 2007 fixant les listes des insectes protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection, il ressort des pièces du dossier et notamment de l'expertise écologique à laquelle la société pétitionnaire a fait procéder au mois de juillet 2019 après avoir été alertée sur la présence possible de cette espèce, qu'une dizaine d'individus de l'espèce a été observée sur le terrain, que cette présence atteste de la présence concomitante de sa fourmilière-hôte (myrmica sabuleti) et que l'essentiel du terrain, largement occupé par l'origan, plante-hôte de l'espèce, est un habitat favorable à l'espèce dont la présence est avérée sur le terrain concerné. Ainsi, et comme l'indique d'ailleurs le cabinet d'études auteur de cette expertise, une dérogation à l'interdiction de destruction des habitats des espèces protégées est nécessaire pour ce qui concerne l'azuré du serpolet. La circonstance que le projet ne remettrait pas en cause l'état de conservation de l'espèce dans son aire de répartition naturelle, à la supposer établie, est relative aux conditions de délivrance de la dérogation et non à son champ d'application. Il n'est pas contesté que le dossier de demande de permis d'aménager déposé par la société Nexity IR programmes Loire ne comportait pas de précision quant à la dérogation à laquelle les travaux devaient donner lieu. L'étude écologique réalisée au mois de juillet 2019 à la demande de la société peut être regardée comme apportant les précisions exigées par le g de l'article R. 441-1 du code de l'urbanisme mais il n'apparaît pas que ce document ait été versé au dossier de demande de permis d'aménager. Par suite, le dossier qui ne contenait pas cet élément de nature à éclairer l'autorité administrative sur la conformité du projet à la règlementation applicable, et notamment à l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme, ne peut être regardé comme complet et le permis d'aménager délivré au vu de ce dossier est, ainsi, entaché d'illégalité.

5. Aux termes de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme : " Le permis ou la décision prise sur la déclaration préalable doit respecter les préoccupations d'environnement définies aux articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement. Le projet peut n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si, par son importance, sa situation ou sa destination, il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement. Ces prescriptions spéciales tiennent compte, le cas échéant, des mesures mentionnées à l'article R. 181-43 du code de l'environnement ". Cet article ne permet pas à l'autorité administrative de refuser un permis, mais seulement de l'accorder sous réserve du respect de prescriptions spéciales relevant de la police de l'urbanisme, telles que celles relatives à l'implantation ou aux caractéristiques des bâtiments et de leurs abords, si le projet de construction est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement.

6. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, il ressort des pièces du dossier que l'origan, plante-hôte de l'azuré du serpolet, occupe une grande partie du terrain d'assiette du projet de lotissement et que cette espèce protégée, quasi-menacée au plan régional et faisant l'objet de plans national et régional d'actions, est présente de façon certaine sur ce terrain. Si seulement une dizaine d'individus a été observée lors de l'expertise du cabinet d'études missionné par la société Nexity IR programmes Loire, cette observation, menée sur une seule journée, n'exclut pas qu'une population plus importante occupe le site et, de plus, à supposer même que la population présente sur le site soit relativement réduite, il ressort des pièces du dossier, et notamment du document produit émanant de l'Office pour les insectes et leur environnement, relatif aux déplacements et aux besoins de continuité d'espèces animales, que l'espèce concernée s'organise en métapopulations et qu'une certaine proximité entre les stations est nécessaire pour permettre des échanges et, ainsi, une dispersion de l'espèce, de sorte qu'une fragmentation des habitats nuit à sa conservation et qu'une station n'est jamais recolonisée si elle est isolée des autres. Ainsi, la disparition d'une station, même peu importante, est susceptible d'entrainer non seulement la disparition de sa population, mais également la perte de continuités nécessaires à la survie d'autres populations de l'espèce. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que le projet prévoit une emprise au sol de 1 815,75 m², ainsi qu'un réseau de voies et des aires de stationnement. Si des espaces verts d'une superficie de 5 914,72 m² sont intégrés au projet de la société pétitionnaire, il est prévu d'y planter des arbres de haute tige et non de conserver des espaces d'origan favorables à l'azuré du serpolet. L'arrêté accordant le permis d'aménager ne comporte aucune prescription imposant des mesures de protection de l'espèce. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les prescriptions susceptibles d'être imposées seraient nécessairement de nature à modifier substantiellement le projet au point de nécessiter la présentation d'un nouveau projet et qu'elles seraient, par suite, illégales. Dans ces conditions, eu égard à l'importance de la conservation des continuités écologiques favorables à l'azuré du serpolet et aux inconvénients que présente le projet, dont la réalisation aurait pour conséquence la destruction d'un habitat de l'espèce, en délivrant le permis d'aménager sans l'assortir de prescriptions, le préfet, alors même que la présence de cet habitat n'avait pas été porté à sa connaissance à la date de la décision contestée, a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

7. Aux termes de l'article 8 de la convention de la convention de Rio du 22 mai 1992 : " Chaque Partie contractante, dans la mesure du possible et selon qu'il conviendra (...) d) Favorise la protection des écosystèmes et des habitats naturels, ainsi que le maintien de populations, viables d'espèces dans leur milieu naturel ; e) Promeut un développement durable et écologiquement rationnel dans les zones adjacentes aux zones protégées en vue de renforcer la protection de ces dernières (...) i) S'efforce d'instaurer les conditions nécessaires pour assurer la compatibilité entre les utilisations actuelles et la conservation de la diversité biologique et l'utilisation durable de ses éléments constitutifs (...) ".

8. Les stipulations précitées créent seulement des obligations entre les Etats parties à la convention et ne produisent pas d'effet direct dans l'ordre juridique interne. L'association Nature environnement 17 ne peut donc utilement les invoquer à l'appui de ses conclusions.

9. Aux termes de l'article 12 de la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 : " 1. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour instaurer un système de protection stricte des espèces animales figurant à l'annexe IV point a), dans leur aire de répartition naturelle, interdisant : a) toute forme de capture ou de mise à mort intentionnelle de spécimens de ces espèces dans la nature ; b) la perturbation intentionnelle de ces espèces notamment durant la période de reproduction, de dépendance, d'hibernation et de migration ; c) la destruction ou le ramassage intentionnels des oeufs dans la nature ; d) la détérioration ou la destruction des sites de reproduction ou des aires de repos (...) ".

10. La directive du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvage ayant été entièrement transposée en droit interne, l'association requérante ne saurait utilement invoquer les objectifs qu'elle fixe pour contester le permis d'aménager du 13 mai 2019.

11. Si l'association Nature environnement 17 soutient que le permis d'aménager délivré à la société Nexity IR programmes Loire est inopportun, cette circonstance ne saurait constituer en soi une cause d'illégalité.

12. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. S'ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, leur appréciation peut cependant être censurée par le juge administratif au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

13. Si l'association requérante soutient que le classement en zone UD du terrain concerné au plan local d'urbanisme de la commune de Royan, qui autorise son urbanisation, est entachée d'erreur manifeste d'appréciation du fait de la présence de l'azuré du serpolet, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier qu'au 23 juin 2008, date à laquelle a été approuvé le plan local d'urbanisme et à laquelle sa légalité doit être appréciée, la présence de l'azuré du serpolet sur cette parcelle ait été avérée, les documents produits ne permettant pas d'attester de cette présence avant 2016. De plus, la circonstance que cette espèce protégée ait été identifiée sur ce terrain classé en zone UD ne révèle pas, à elle seule, une illégalité manifeste de ce classement dès lors notamment qu'il appartient à l'autorité compétente, le cas échéant, d'opposer les dispositions de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme aux demandes d'autorisation de construire ou de refuser une dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

14. L'association appelante ne peut davantage utilement invoquer la méconnaissance par le plan local d'urbanisme de l'obligation de prise en compte du schéma régional de cohérence écologique, édictée par l'article L. 371-3 du code de l'environnement, dès lors que ces dispositions, issues de la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, sont postérieures à l'approbation du plan local d'urbanisme, le 23 juin 2008 et que le schéma régional de cohérence écologique a été approuvé seulement le 16 octobre 2015.

14. Il résulte de ce qui précède que l'association requérante est fondée à soutenir que le permis d'aménager contesté a été délivré en méconnaissance des articles R. 441-1 et R. 111-26 du code de l'urbanisme et que les autres moyens qu'elle invoque ne sont pas fondés.

Sur l'application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :

15. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux (...) ".

16. Les vices retenus ci-dessus aux points 4 et 6 sont susceptibles d'être régularisés dès lors que la régularisation n'implique pas d'apporter au projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même. Par suite, il y a lieu de surseoir à statuer sur les conclusions de la requête et d'impartir au pétitionnaire un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt aux fins de régularisation des vices relevés. Cette régularisation pourra résulter soit du versement au dossier de demande de permis d'aménager d'un document indiquant que les travaux doivent faire l'objet d'une dérogation au titre du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement ainsi que de l'adoption de prescriptions adaptées au regard de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme, soit d'une autorisation portant sur un projet adapté, qui sans changer la nature de l'opération, ne serait pas soumis à la dérogation mentionnée ci-dessus ni à la nécessité de prescriptions fondées sur l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme.

DECIDE :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur la légalité du permis d'aménager 13 mai 2019 jusqu'à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt pour permettre à la société Nexity IR programmes Loire de notifier le cas échéant à la cour une mesure de régularisation des irrégularités relevées aux points 4 et 6 du présent arrêt.

Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Nature environnement 17, à la société Nexity IR programmes Loire et à la commune de Royan.

Délibéré après l'audience du 28 juin 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

Mme Nathalie Gay, première conseillère,

Mme Laury Michel, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juillet 2022.

La première assesseure,

Nathalie GayLa présidente-rapporteure,

Elisabeth A...

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au préfet de la Charente-Maritime en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX01183


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01183
Date de la décision : 07/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Elisabeth JAYAT
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : FRECHE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-07-07;21bx01183 ?
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