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20/09/2022 | FRANCE | N°20BX00820

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 20 septembre 2022, 20BX00820


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... F... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 20 mars 2018 par lequel le maire de la commune de Helette a accordé un permis de construire à M. B... E... en vue de la réhabilitation d'un ancien moulin en maison individuelle.

Par un jugement n° 1800938 du 7 janvier 2020, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 6 mars, 26 août, 18 septembre 2020 et 14 septembre

2021, M. D... F..., représenté par Me Vermote, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... F... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 20 mars 2018 par lequel le maire de la commune de Helette a accordé un permis de construire à M. B... E... en vue de la réhabilitation d'un ancien moulin en maison individuelle.

Par un jugement n° 1800938 du 7 janvier 2020, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 6 mars, 26 août, 18 septembre 2020 et 14 septembre 2021, M. D... F..., représenté par Me Vermote, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Pau du 7 janvier 2020 ;

2°) d'annuler le permis de construire délivré le 20 mars 2018 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Helette le versement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la requête est suffisamment motivée et répond aux exigences de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

- il justifie d'un intérêt à agir au sens de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ;

- le plan de masse n'indique pas les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics d'eau potable et d'électricité en méconnaissance de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme ;

- le plan de masse ne représente pas le tuyau enterré permettant l'évacuation des eaux pluviales en méconnaissance de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme ;

- les contradictions du dossier de demande quant aux dimensions précises du projet sont de nature à entacher d'irrégularité le permis pris sur son fondement ;

- le permis de construire litigieux a été accordé pour une résidence principale alors que le pétitionnaire dispose déjà d'une résidence principale et que le projet est relatif à la construction d'une résidence secondaire en méconnaissance de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme ;

- l'inexactitude du dossier de demande de permis de construire quant aux parcelles d'assiette du projet constitue une carence du dossier de permis de construire qui entache d'illégalité l'arrêté litigieux ;

- le pétitionnaire a accumulé des dizaines de mètres cubes de remblai alors qu'aucun document du dossier de demande de permis de construire ne montre des travaux de cette ampleur ;

- la notice indique à tort qu'il n'y aurait aucune végétation et n'indique ni l'organisation et l'aménagement des accès au terrain ni les aires de stationnement prévues en méconnaissance de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme ;

- le dossier de demande de permis de construire ne comprend ni plan de toitures ni document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain en méconnaissance de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme ;

- le projet se situe en zone Natura 2000 et aurait dû faire l'objet d'une évaluation des incidences sur le site Natura 2000 en application de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme ;

- le projet méconnait l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme en ce qu'il ne prévoit pas de raccordement suffisant aux réseaux d'eau potable et d'électricité ;

- l'arrêté contesté méconnait l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme en l'absence de servitude de passage dès lors que le nouvel accès ne peut s'effectuer sur les seules parcelles cadastrées section G n° 604 et 606 ;

- le projet méconnait l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme en ce que l'accès des services d'incendie et de secours s'effectue par un chemin long, pentu, étroit et non bitumé ;

- le projet est incompatible avec son environnement et les activités agricoles qui s'y exercent en méconnaissance de l'article L. 161-4 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté méconnait l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en ce que les travaux projetés ne respectent pas les obligations imposées par la direction départementale des territoires et de la mer.

Par des mémoires, enregistrés les 22 juin et 5 octobre 2020, la commune de Helette, représentée par la SELARL Pecassou-Camebrac et associés, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'appelant d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable en ce que l'appelant s'est borné à reproduire littéralement la requête et le mémoire en réplique produits en première instance sans apporter aucun élément nouveau ou réelle critique à l'égard du jugement attaqué en méconnaissance de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

- l'appelant ne justifie pas d'un intérêt à agir au sens de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ;

- les moyens nouveaux tirés de la prétendue omission des remblaiements importants prévus, de la méconnaissance des articles R. 431-8, R. 431-9 et R.431-10 du code de l'urbanisme, soulevés dans le mémoire enregistré le 22 juin 2020 ne sont pas recevables en application de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme ;

- les moyens développés par l'appelant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C... A...;

- les conclusions de M. Stéphane Gueguein, rapporteur public ;

- et les observations de Me Aguerre-Gongora, représentant M. F... et de Me Logeais, représentant la commune de Helette.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... E... a présenté une demande de permis de construire, le 23 janvier 2018, complétée le 10 mars 2018, en vue de la réhabilitation d'un moulin en maison d'habitation sur les parcelles cadastrées section G n° 603, 604 et 606 situées chemin rural Espila à Helette (Pyrénées-Atlantiques). Par un arrêté du 20 mars 2018, le maire de Helette a accordé le permis de construire sollicité. M. F... relève appel du jugement du 7 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les fins de non-recevoir :

2. Aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours ".

3. La requête d'appel ne constitue pas la reproduction littérale de la demande de première instance présentée par M. F..., mais comporte une contestation de l'appréciation des premiers juges et énonce à nouveau de manière précise les moyens tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 mars 2018. Une telle motivation répond aux conditions posées par l'article R. 411-1 du code de justice administrative. Ainsi, la fin de non-recevoir soulevée par la commune de Helette ne peut être accueillie.

4. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".

5. Il ressort des pièces du dossier et notamment du jugement du tribunal judiciaire de Bayonne du 29 juin 2020 que M. F... a acquis par prescription acquisitive la propriété du chemin d'accès débutant sur la parcelle G607 et continuant sur les parcelles 606, 604 et 603 et du pont reliant les parcelles G 604 et 603. Il ressort des pièces du dossier de demande de permis de construire que M. E... prévoit que l'accès à la construction projetée implantée sur la parcelle cadastrée section G n° 603, s'effectuera par les parcelles cadastrées section G n° 604 et 606. En outre, l'appelant justifie être propriétaire des parcelles naturelles cadastrées section G n° 218, 219, 220, 602, 605 et 607, dont certaines sont contigües au terrain d'assiette du projet. Il fait valoir que le projet en litige consistant en la réhabilitation du moulin en maison d'habitation est susceptible de rendre inaccessible ces parcelles, notamment par la privation du pont qui en constitue l'unique accès, et de compromettre leur exploitation agricole dès lors qu'il ne pourra plus réaliser d'épandage de fumier et de lisier à moins de cent mètres de cette habitation. Si la commune fait valoir que l'appelant ne cultive pas les terres concernées, il ressort des pièces du dossier et notamment d'un courrier de la chambre d'agriculture des Pyrénées-Atlantiques du 3 décembre 2019, que M. F... est exploitant agricole et éleveur avec un cheptel de 350 brebis et 20 vaches allaitantes et que, dès lors qu'il dispose de peu de surface agricole, 13 hectares, son élevage nécessite la mobilisation de l'ensemble de ses surfaces épandables. Dans ces conditions, le projet en litige est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien de l'appelant qui justifie d'un intérêt à agir au sens de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme.

Sur la légalité du permis de construire délivré le 20 mars 2018 :

6. Aux termes de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. / Il indique également, le cas échéant, les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics ou, à défaut d'équipements publics, les équipements privés prévus, notamment pour l'alimentation en eau et l'assainissement. / Lorsque le terrain n'est pas directement desservi par une voie ouverte à la circulation publique, le plan de masse indique l'emplacement et les caractéristiques de la servitude de passage permettant d'y accéder. / Lorsque le projet est situé dans une zone inondable délimitée par un plan de prévention des risques, les cotes du plan de masse sont rattachées au système altimétrique de référence de ce plan ".

7. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

8. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, sur le plan de masse, figurent les mentions AEP et EDF à la fin du chemin d'accès démontrant ainsi l'existence des réseaux d'eau potable et d'électricité. En outre, le permis de construire contesté vise un avis favorable d'ENEDIS, gestionnaire du réseau d'électricité du 13 février 2018, auquel était joint un plan matérialisant les extensions nécessaires à l'opération envisagée, un avis du syndicat d'énergie des Pyrénées Atlantiques (SDEPA), autorité concédante, en date du 20 février 2018, qui mentionne que " Cette alimentation nécessite une extension des réseaux électriques d'une longueur de 100 mètres en domaine public (...) [et] une extension des réseaux électriques de 110 mètres en domaine privé (...) " et enfin un avis de la communauté d'agglomération du Pays basque (CAPB), gestionnaire du réseau d'eau potable du 1er mars 2018 prévoyant un branchement d'une longueur de " 35 m avec traversée de route ". Si l'appelant conteste les distances indiquées dans ces avis, il n'apporte aucun élément quant au tracé des réseaux permettant de remettre en cause la teneur de ces avis. En deuxième lieu, si le plan de masse ne représente pas le raccordement à un réseau des eaux pluviales ni le dispositif sur le terrain d'assiette du projet servant à les évacuer, l'avis de la CAPB émis le 15 février 2018 au vu d'une étude réalisée au mois de janvier 2017 produite par le pétitionnaire, visé par le permis de construire contesté, indique s'agissant des eaux pluviales de toitures et de ruissellement " trop plein sur le terrain sans interaction avec l'assainissement ". Au vu de cet avis et eu égard à l'ampleur des travaux projetés se limitant à la réhabilitation d'une construction existante entourée de parcelles agricoles, non imperméabilisées, permettant l'infiltration des eaux pluviales sur le terrain d'assiette du projet, l'autorité compétente a pu apprécier la conformité du projet à la règlementation applicable. En troisième lieu, si le plan de masse n'est pas coté en trois dimensions, les autres pièces du dossier, et notamment les plans de coupe, permettent d'apprécier les modifications projetées sur la construction existante. Dans ces conditions, les omissions du plan n'ont pas été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

9. Aux termes de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme : " Par dérogation à l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, et sans préjudice de l'application de l'article R. 613-1 du même code, lorsque la juridiction est saisie d'une requête relative à une décision d'occupation ou d'utilisation du sol régie par le présent code, ou d'une demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant une telle décision, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense (...) ".

10. Il ressort des pièces du dossier que le premier mémoire en défense produit par la commune de Helette a été communiqué le 22 juin 2020. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des articles R. 431-8 et R. 431-10 du code de l'urbanisme, soulevés pour la première fois par l'appelant dans son mémoire enregistré le 18 septembre 2020, ne sont pas recevables en application des dispositions de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme, ainsi que le soutient la commune en défense.

11. Il ressort des pièces du dossier que les pages 4 et 11 du formulaire de demande de permis de construire mentionnent une surface créée de 13 m² et une surface totale de 94 m², alors que la page 4 de ce même formulaire indique une surface totale de 99 m² et le plan de masse une extension de six mètres par trois mètres soit 18 m². Toutefois, au vu de l'incohérence de ces pièces, la commune a demandé au pétitionnaire de préciser les dimensions du projet et la surface de 13 m² a été confirmée par un courrier du 10 mars 2018. Le permis de construire contesté a en conséquence été délivré pour une superficie de 13 m². Contrairement à ce que soutient l'appelant, il ressort clairement des pièces du dossier de demande de permis de construire, notamment du plan de masse, de la notice et des plans de façades, que cette extension se situe à l'ouest de la construction existante. Par suite, le moyen tiré de l'incohérence des pièces du dossier de demande de permis de construire doit être écarté.

12. Aux termes de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme : " La demande de permis de construire précise : (...) / c) La localisation et la superficie du ou des terrains ; (...) / e) La destination des constructions, par référence aux différentes destinations et sous-destinations définies aux articles R. 151-27 et R. 151-28 (...) ". Aux termes de l'article R. 151-27 du code de l'urbanisme : " Les destinations de constructions sont : (...) / 2° Habitation (...) ". Aux termes de l'article R. 151-8 du même code : " Les destinations de constructions prévues à l'article R. 151-27 comprennent les sous-destinations suivantes : (...) / 2° Pour la destination " habitation " : logement, hébergement (...) ".

13. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier de demande de permis de construire, et notamment du plan de masse que l'accès au terrain s'effectuera par les parcelles cadastrées section G n° 604 et 606. Contrairement à ce que soutient l'appelant, il ne ressort d'aucune pièce du dossier de demande de permis de construire que le projet concernerait les parcelles cadastrées section G n° 607 et 223. Par suite, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté contesté méconnaitrait le c) de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme.

14. En second lieu, il ressort des pièces du dossier de demande de permis de construire et notamment de la page 4 du formulaire CERFA que la construction projetée est destinée à l'habitation, et plus particulièrement à la sous-destination " logement ". La circonstance que la case " résidence principale " aurait été cochée en page 3 de ce même formulaire de demande en lieu et place de " résidence secondaire " est sans incidence quant au respect des dispositions du e) de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.

15. La circonstance que le pétitionnaire aurait accumulé des remblais sur son terrain n'a pas d'incidence sur la légalité du permis de construire contesté.

16. Aux termes de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme : " Le dossier joint à la demande de permis de construire comprend en outre, selon les cas : (...) / c) Le dossier d'évaluation des incidences du projet sur un site Natura 2000 prévu à l'article R. 414-23 du code de l'environnement, dans le cas où le projet doit faire l'objet d'une telle évaluation en application de l'article L. 414-4 de ce code. Toutefois, lorsque le dossier de demande comporte une étude d'impact, cette étude tient lieu de dossier d'évaluation des incidences Natura 2000 si elle satisfait aux prescriptions de l'article R. 414-23 du code de l'environnement, conformément aux dispositions prévues à l'article R. 414-22 de ce code (...) ". Aux termes de l'article L. 414-4 du code de l'environnement : " I. Lorsqu'ils sont susceptibles d'affecter de manière significative un site Natura 2000, individuellement ou en raison de leurs effets cumulés, doivent faire l'objet d'une évaluation de leurs incidences au regard des objectifs de conservation du site, dénommée ci-après " Evaluation des incidences Natura 2000 " : (...) 2° Les programmes ou projets d'activités, de travaux, d'aménagements, d'ouvrages ou d'installations (...) ".

17. L'appelant fait valoir que la parcelle cadastrée section G n° 603 longe la rivière " Nasako iturria " qui est un sous-affluent de la Joyeuse, cours d'eau identifié comme une zone Natura 2000. Toutefois, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le projet de réhabilitation du moulin existant et de création d'une extension de 13 m², qui prévoit notamment, après étude, la réalisation d'un dispositif de traitement des eaux usées sur le terrain d'assiette du projet à l'opposé du cours d'eau, serait susceptible d'affecter de manière significative un site Natura 2000. La circonstance que le pétitionnaire aurait réalisé des aménagements non autorisés ou aurait souillé le lit de la rivière, est sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme en raison du défaut de dossier d'évaluation des incidences du projet sur un site Natura 2000 doit être écarté.

18. Aux termes de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés (...) ".

19. D'une part, il ressort des pièces du dossier et notamment de l'avis de la CAPB, gestionnaire du réseau d'eau potable, du 1er mars 2018 que le diamètre de la canalisation et la pression de l'eau sont suffisants et que seul un branchement au réseau d'eau potable, d'une longueur de " 35 m avec traversée de route ", est nécessaire pour la réalisation du projet. Si l'appelant fait valoir que lors de l'instruction de la première demande de permis de construire, la CAPB a, le 9 février 2017, émis un avis qui prévoyait, pour les ouvrages à envisager, d'une part, un branchement et d'autre part, une extension du réseau dont le financement était partagé entre la commune pour 15 mètres et le demandeur pour 20 mètres, il ne peut être exclu que, compte tenu de la faible distance de 35 mètres, qui est identique dans les deux avis, le service gestionnaire ait choisi d'effectuer un simple branchement et non une extension du réseau d'eau potable. Dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un branchement ne serait pas réalisable dans le cas d'espèce, l'appelant ne peut utilement se prévaloir, quant au réseau d'eau potable, du moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme.

20. D'autre part, l'avis du SDEPA, du 20 février 2018, indique que le projet nécessite une extension des réseaux électriques d'une longueur de 100 mètres en domaine public, estimée à 14 375 euros en souterrain et que ces travaux seront financés à 80 % par le SDEPA jusqu'à un plafond de 17 000 euros, le dépassement étant à la charge de la commune, et seront réalisés dans un délai de six mois après la délivrance du permis de construire. S'agissant de l'extension des réseaux électriques en domaine privé, leur montant est estimé à 15 815 euros en souterrain, le délai de réalisation à douze mois et le financement est réparti à 40 % pour le SDEP et à 60 % pour le pétitionnaire. Ainsi, au vu du caractère précis de cet avis, l'appelant, qui n'apporte aucun élément permettant de le mettre en doute, n'est pas fondé à soutenir que l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme aurait été méconnu.

21. Aux termes de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à son importance ou à la destination des constructions ou des aménagements envisagés, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie. / Il peut également être refusé ou n'être accepté que sous réserve de prescriptions spéciales si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic ".

22. Le permis de construire, qui est délivré sous réserve des droits des tiers, a pour seul objet d'assurer la conformité des travaux qu'il autorise avec la réglementation d'urbanisme. Dès lors, l'autorité compétente et, en cas de recours, le juge administratif doivent, pour l'application des règles d'urbanisme relatives à la desserte et à l'accès des engins d'incendie et de secours, s'assurer de l'existence d'une desserte suffisante de la parcelle par une voie ouverte à la circulation publique et, le cas échéant, de l'existence d'un titre créant une servitude de passage donnant accès à cette voie.

23. Les pièces du dossier de demande de permis de construire indiquent que l'accès à la parcelle cadastrée section G n° 203 s'effectuera par les parcelles cadastrées section G n° 604 et 606, propriété du pétitionnaire. Ainsi qu'il a été dit au point 5, il ressort du jugement du tribunal judiciaire de Bayonne du 29 juin 2020 que M. F... a acquis par prescription acquisitive la propriété du chemin d'accès débutant sur la parcelle G607 et continuant sur les parcelles 606, 604 et 603 et du pont reliant les parcelles G 604 et 603. Toutefois, au vu des seules pièces du dossier de demande de permis de construire, le maire de Helette n'a pas fait, à la date de la décision attaquée, le 20 mars 2018, une inexacte appréciation des dispositions de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme en délivrant le permis de construire sollicité.

24. Il ressort des pièces du dossier de demande de permis de construire que le projet prévoit la création d'un accès débouchant sur la route de Helette, voie de desserte du projet. Aucun élément du dossier ne permet d'estimer que les caractéristiques de cette voie rectiligne, suffisamment large, qui offre une visibilité satisfaisante aux usagers, ne garantiront pas une desserte suffisante du projet par les véhicules de secours et de lutte contre l'incendie. Si l'appelant fait valoir que le chemin permettant d'accéder au terrain d'assiette du projet est long, étroit et pentu, ce chemin doit être regardé comme une voie interne au projet. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que les conditions d'accès et de desserte du projet créeraient des dangers pour les usagers en méconnaissance de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme ne peut qu'être écarté.

25. Aux termes de l'article L. 161-4 du code de l'urbanisme : " La carte communale délimite les secteurs où les constructions sont autorisées et les secteurs où les constructions ne sont pas admises, à l'exception de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension des constructions existantes ou des constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, à l'exploitation agricole ou forestière et à la mise en valeur des ressources naturelles ". Aux termes de l'article R. 161-4 du même code : " Le ou les documents graphiques délimitent les secteurs où les constructions sont autorisées et ceux où les constructions ne peuvent pas être autorisées, à l'exception : / 1° De l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension des constructions existantes ; / 2° Des constructions et installations nécessaires : / a) A des équipements collectifs ou à des services publics si elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole ou pastorale ou forestière dans l'unité foncière où elles sont implantées et ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages ; / b) A l'exploitation agricole ou forestière ; / c) A la mise en valeur des ressources naturelles ".

26. Ainsi qu'il a été indiqué au point 5, il ressort des pièces du dossier et notamment d'un courrier de la chambre d'agriculture des Pyrénées-Atlantiques du 3 décembre 2019, que M. F... est exploitant agricole et éleveur avec un cheptel de 350 brebis et 20 vaches allaitantes et que, dès lors qu'il dispose de peu de surface agricole, 13 hectares, son élevage nécessite la mobilisation de l'ensemble de ses surfaces épandables. Alors même que l'exploitation agricole des parcelles naturelles jouxtant le terrain d'assiette du projet engendrera nécessairement des nuisances olfactives, la réhabilitation d'un moulin existant en maison individuelle n'est pas par elle-même incompatible avec l'activité d'élevage existante. Au surplus, les dommages qui seraient causés aux occupants du moulin par des nuisances dues à l'activité agricole de M. F... ne pourraient entrainer droit à réparation dès lors que le permis de construire contesté est postérieur à l'existence de ces activités, ainsi que le prévoit l'article L. 113-8 du code de la construction et de l'habitation. Enfin, si l'appelant fait état d'une destruction de drains desservant aussi sa propriété, qui remettrait en cause le drainage de ses terrains, cette destruction qui serait, selon lui, liée à la mise en place de l'assainissement prévu par le projet, n'apparait pas dans l'étude sur l'assainissement produite par la commune et n'est corroborée par aucun autre élément du dossier. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 161-4 du code de l'urbanisme doit être écarté.

27. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".

28. Il ressort de l'arrêté contesté qu'il vise l'avis favorable avec prescriptions du service prévention des risques de la préfecture des Pyrénées-Atlantiques du 7 février 2018 qui met en exergue le fait que la configuration topographique au droit de cette cuvette laisse supposer que l'eau peut s'y accumuler lors d'un événement pluvieux important ou par un phénomène de remontées de nappes et émet des prescriptions que le permis de construire litigieux impose en son article 2. Contrairement à ce que soutient l'appelant, le pétitionnaire n'était pas tenu de modifier les plans de la construction projetée à la suite de ces prescriptions de la DDTM. Dans ces conditions, en délivrant le permis de construire litigieux, le maire de Hellete n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 précité du code de l'urbanisme.

29. Il résulte de tout ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 mars 2018.

Sur les frais liés au litige :

30. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. F... le versement à la commune de Helette d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Helette, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. F... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.

Article 2 : M. F... versera à la commune de Helette une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... F..., à la commune de Helette et à M. B... E....

Délibéré après l'audience du 30 août 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

Mme Nathalie Gay, première conseillère,

Mme Laury Michel, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 septembre 2022.

La rapporteure,

Nathalie A...La présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Atlantiques en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 20BX00820 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX00820
Date de la décision : 20/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : UHALDEBORDE-SALANNE GORGUET VERMOTE BERTIZBEREA

Origine de la décision
Date de l'import : 25/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-09-20;20bx00820 ?
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